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21/03/2018 | FRANCE | N°16-19851

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 21 mars 2018, 16-19851


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le cinquième moyen, pris en ses quatrième, cinquième et sixième branches :

Vu l'article 267 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 2 juin 2016), que les sociétés Poweo et Direct énergie, fournisseurs de gaz, aux droits desquelles est venue la société Poweo-Direct énergie, devenue Direct énergie, ont conclu respectivement, le 21 juin 2005 et le 21 novembre 2008, deux contrats d'acheminement sur le réseau de distribution de gaz na

turel avec la société GRDF, gestionnaire du réseau ; que le 22 juillet 2013, la so...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le cinquième moyen, pris en ses quatrième, cinquième et sixième branches :

Vu l'article 267 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 2 juin 2016), que les sociétés Poweo et Direct énergie, fournisseurs de gaz, aux droits desquelles est venue la société Poweo-Direct énergie, devenue Direct énergie, ont conclu respectivement, le 21 juin 2005 et le 21 novembre 2008, deux contrats d'acheminement sur le réseau de distribution de gaz naturel avec la société GRDF, gestionnaire du réseau ; que le 22 juillet 2013, la société Direct énergie a saisi le comité de règlement des différends et des sanctions (le Cordis) de la Commission de régulation de l'énergie (la CRE) afin qu'il enjoigne à cette dernière de mettre en conformité ses conventions avec la réglementation applicable au secteur de l'énergie et qu'il fixe le tarif des prestations d'intermédiation accomplies par le fournisseur pour le compte du gestionnaire de réseau dans le cadre du contrat unique conclu avec le client final ; que par une décision du 19 septembre 2014, le Cordis a enjoint à la société GRDF de transmettre à la société Direct énergie un nouveau contrat d'acheminement sur le réseau de distribution de gaz naturel, conforme à certains principes rappelés dans sa décision, et a rejeté la demande de fixation du tarif des prestations d'intermédiation ; que la société GRDF a formé un recours en annulation contre cette décision et la société Direct énergie un recours en réformation ; que la société ENI Gas et Power France (la société ENI), qui avait été entendue par le Cordis, est intervenue volontairement devant la cour d'appel ; que par l'arrêt attaqué, la cour d'appel a confirmé la décision du Cordis imposant la transmission du contrat mais l'a réformée en ce qu'elle rejetait le surplus des demandes de la société Direct énergie et a enjoint à la société GRDF, d'une part, de mettre ses contrats d'acheminement sur le réseau de distribution en conformité avec les principes énoncés par la décision, en proposant à la société Direct énergie et à la société ENI un avenant à ce contrat d'accès au réseau prévoyant que sont réputées n'avoir jamais existé entre les parties les clauses du contrat subordonnant l'accès au contrat à l'acceptation par le fournisseur de la prestation d'intermédiation, lui imposant de rendre des prestations à charge de la société GRDF dont il ne pouvait négocier le prix ou les conditions de réalisation, ainsi qu'une rémunération équitable et proportionnée au regard des coûts évités pour les prestations accomplies pour son compte auprès des clients, et, d'autre part, de verser une rémunération égale à celle qui sera fixée entre elles avec effet à compter du jour de la signature des contrats respectifs ;

Attendu que la société GRDF fait grief à l'arrêt de statuer ainsi alors, selon le moyen :

1°/ que l'article L. 134-19 du code de l'énergie subordonnant la saisine du Cordis à l'existence d'un différend, en application du principe de non-rétroactivité des décisions administratives, les décisions du Cordis ne sauraient avoir un effet rétroactif antérieur à la naissance du différend ; qu'en considérant néanmoins que les modifications contractuelles devaient être reportées à la date de conclusion des contrats concernés, la cour d'appel a violé l'article L. 134-19 du code de l'énergie ensemble le principe de non-rétroactivité des actes administratifs ;

2°/ qu'aucune habilitation législative n'autorise le Cordis à prononcer des décisions à caractère rétroactif ; qu'à supposer que la primauté du droit européen puisse conduire une autorité administrative à prononcer une décision rétroactive de nature à remettre en cause une situation contractuelle acquise, encore eût-il fallu que le Cordis et à sa suite la cour d'appel, pour justifier le caractère rétroactif, exceptionnel de la décision, établissent que découlerait des exigences de droit de l'Union la nécessité de prononcer une telle décision ; qu'en l'espèce, pour se prononcer comme elle l'a fait, la cour d'appel -non plus que le Cordis dans sa décision entreprise- n'a pas justifié de la nécessité du caractère rétroactif de sa décision au regard du droit européen ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du principe de l'effectivité du droit européen ;

3°/ que les principes de confiance légitime et de sécurité juridique s'opposent à la modification rétroactive de stipulations contractuelles relatives au tarif conformes à une décision de l'autorité de régulation sur ledit tarif ; qu'au cas présent, ainsi que le soutenait la société GRDF, à supposer que le tarif arrêté par la CRE par délibération du 28 février 2012 en fonction des charges supportées par elle, lesquelles n'incluaient pas la charge des impayés, eût été illégal, la remise en cause du tarif n'était en toute hypothèse envisageable que pour l'avenir ; qu'en se fondant sur la seule circonstance inopérante que la question précise de la charge des impayés n'avait pas été évoquée, ni donc tranchée, lors de l'adoption du tarif pour rejeter le moyen ainsi opposé par la société GRDF, la cour d'appel a violé les principes de confiance légitime et de sécurité juridique ;

Attendu que les articles L. 134-19 et L. 134-20 du code de l'énergie, qui organisent la procédure de règlement des différends devant la CRE, ne contiennent aucune disposition relative à l'effet dans le temps des décisions rendues par le Cordis, l'article L. 134-20 précisant seulement que "La décision du comité, qui peut être assortie d'astreintes, est motivée et précise les conditions d'ordre technique et financier de règlement du différend dans lesquelles l'accès aux réseaux, ouvrages et installations mentionnés à l'article L. 134-19 ou leur utilisation sont, le cas échéant, assurés. Lorsque cela est nécessaire pour le règlement du différend, le comité peut fixer, de manière objective, transparente, non discriminatoire et proportionnée, les modalités de l'accès auxdits réseaux, ouvrages et installations ou les conditions de leur utilisation." ;

Attendu que, saisie d'un pourvoi dans une procédure de règlement de différend traitée par l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (l'ARCEP), la Cour de cassation (Chambre commerciale, financière et économique, 14 décembre 2010, n° 09-67.371) avait jugé, au visa de l'article 36-8 du code des postes et des communications électroniques, qui n'était pas plus explicite, "que le pouvoir conféré à l'ARCEP de préciser, au titre de la procédure de règlement des différends, les conditions équitables, d'ordre technique et financier, dans lesquelles l'interconnexion ou l'accès doivent être assurés, s'étend à l'ensemble de la période couverte par le différend dont elle se trouve saisie, peu important la date de son émergence entre les parties ; qu'il s'ensuit que cette Autorité peut remettre en cause l'application, pendant cette période, des tarifs fixés dans la convention d'accès à la boucle locale." ;

Que toutefois, l'article 36-8 précité a été modifié par la loi n° 2015-990 du 6 août 2015, relative à la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques, qui lui a ajouté la phrase suivante : "L'autorité peut, à la demande de la partie qui la saisit, décider que sa décision produira effet à une date antérieure à sa saisine, sans toutefois que cette date puisse être antérieure à la date à laquelle la contestation a été formellement élevée par l'une des parties pour la première fois et, en tout état de cause, sans que cette date soit antérieure de plus de deux ans à sa saisine." ;

Attendu qu'en ce qui concerne le marché du gaz, le législateur est également intervenu, dans le même sens, par la loi n° 2017-55 du 20 janvier 2017, qui a ajouté à l'article L.134-20 du code de l'énergie relatif à la procédure de règlement des différends devant la CRE un alinéa 4, aux termes duquel "le comité peut, à la demande de la partie qui le saisit, décider que sa décision produira effet à une date antérieure à sa saisine, sans toutefois que cette date puisse être antérieure à la date à laquelle la contestation a été formellement élevée par l'une des parties pour la première fois et, en tout état de cause, sans que cette date soit antérieure de plus de deux ans à sa saisine" ;

Attendu que si ce texte, qui prévoit qu'il est applicable aux règlements de différends en cours à sa date d'entrée en vigueur, ne s'applique pas au présent litige, dès lors qu'il est postérieur à la décision attaquée et ne prévoit pas expressément son application devant la Cour de cassation, il reste qu'il est potentiellement applicable en cas de cassation suivie de renvoi et que la Cour de cassation doit statuer sur le moyen qui soutient que l'autorité de régulation statuant en matière de règlement des différends n'a pas le pouvoir de donner à ses décisions un effet antérieur à la naissance du différend ;

Attendu que la directive 2009/73/CE du Parlement européen et du Conseil du 13 juillet 2009 concernant des règles communes pour le marché intérieur du gaz naturel et abrogeant la directive 2003/55/CE, après avoir énoncé, dans son considérant 25, que "L'accès non discriminatoire au réseau de distribution détermine l'accès à la clientèle en aval, au niveau de la vente de détail", prévoit, en son article 32, paragraphe 1, un accès non discriminatoire au réseau de distribution par des tarifs objectifs : "les États membres veillent à ce que soit mis en place, pour tous les clients éligibles, y compris les entreprises de fourniture, un système d'accès des tiers aux réseaux de transport et de distribution ainsi qu'aux installations de GNL. Ce système, fondé sur des tarifs publiés, doit être appliqué objectivement et sans discrimination entre les utilisateurs du réseau. Les États membres veillent à ce que ces tarifs, ou les méthodes de calcul de ceux-ci, soient approuvés avant leur entrée en vigueur conformément à l'article 41 par une autorité de régulation visée à l'article 39, paragraphe 1, et à ce que ces tarifs et les méthodes de calcul, lorsque seules les méthodes de calcul sont approuvées, soient publiés avant leur entrée en vigueur" ; qu'elle organise la régulation du secteur par des autorités nationales dont elle fixe les objectifs généraux et précise les missions et les pouvoirs ; qu'au titre des objectifs, elle prévoit, en son article 40, qu'"aux fins des tâches de régulation définies dans la présente directive, l'autorité de régulation prend toutes les mesures raisonnables pour atteindre les objectifs suivants dans le cadre de ses missions et compétences définies à l'article 41, en étroite concertation, le cas échéant, avec les autres autorités nationales concernées, y compris les autorités de concurrence, et sans préjudice de leurs compétences" et cite, parmi ces objectifs, la promotion d'un marché intérieur du gaz naturel concurrentiel (a) et la facilitation de l'accès à de nouvelles capacités de production (e) ; qu'au titre des missions, elle mentionne, en son article 41, paragraphe 1, la fixation ou l'approbation, selon des critères transparents, des tarifs de distribution (a), le contrôle du respect, par les gestionnaires de réseau, des obligations qui leur incombent (b) et celui de la transparence (i) ; qu'après avoir, dans le considérant 29, souligné la nécessité d'une indépendance renforcée de ces autorités, favorisée par l'adoption de règles harmonisées dans l'Union européenne, la directive , dans le considérant 30, précise qu'elles doivent disposer de pouvoirs étendus : "Pour garantir le bon fonctionnement du marché intérieur du gaz naturel, il convient que les régulateurs de l'énergie soient en mesure de prendre des décisions concernant tous les aspects réglementaires pertinents et qu'ils disposent d'une indépendance totale par rapport aux autres intérêts publics ou privés. Ceci n'empêche ni l'exercice d'un contrôle juridictionnel, ni l'exercice d'un contrôle parlementaire conformément au droit constitutionnel des États membres", et oblige, en son article 41, paragraphe 4, les États membres à veiller à ce qu'elles disposent des pouvoirs nécessaires pour s'acquitter de leurs missions d'une manière efficace et rapide, tout en prévoyant que ces autorités ont compétence pour "prendre des décisions contraignantes" (a), "arrêter et imposer les mesures proportionnées et nécessaires afin de promouvoir une concurrence effective et d'assurer le bon fonctionnement du marché" (b) et "infliger des sanctions effectives, proportionnées et dissuasives à l'encontre des entreprises de gaz naturel qui ne respectent pas les obligations qui leur incombent en vertu de la présente directive ou des décisions juridiquement contraignantes applicables de l'autorité de régulation ou de l'agence, ou proposer qu'une juridiction compétente inflige de telles sanctions" (d) ; que l'article 41, paragraphe 10, prévoit que les autorités peuvent demander aux gestionnaires de réseau de modifier leurs conditions, y compris les tarifs, pour que ceux-ci soient proportionnés et appliqués de manière non discriminatoire ;

Attendu qu'en ce qui concerne le règlement des litiges, l'article 41, paragraphe 11, de la directive prévoit que "toute partie ayant un grief à faire valoir contre un gestionnaire de réseau de transport, de stockage, de GNL ou de distribution en ce qui concerne les obligations imposées audit gestionnaire par la présente directive peut s'adresser à l'autorité de régulation qui, agissant en tant qu'autorité de règlement du litige, prend une décision dans un délai de deux mois après la réception de la plainte (...)" ; que, si est ainsi instaurée la compétence des autorités de régulation en la matière, la directive, cependant, ne donne pas de précision sur l'étendue de leurs pouvoirs, en particulier quant aux effets dans le temps de leurs décisions ;

Attendu que la Cour de justice a consacré le principe de sécurité juridique et a admis qu'il puisse l'emporter sur l'effectivité du droit de l'Union (CJUE, 13 mars 2008, Vereniging National Overlegorgaan Sociale Werkvoorziening, C-383/06 à C385/06) ;

Attendu que la société GRDF estime qu'en l'espèce, une limitation des effets dans le temps de la décision du Cordis ne constitue pas un obstacle à l'effectivité du droit européen et qu'elle permet de concilier la garantie d'un droit d'accès au réseau non discriminatoire et le fonctionnement concurrentiel du marché ; qu'elle souligne que l'article 34, paragraphe 3, de la directive précise que "les États membres veillent à mettre en place un système de règlement des litiges, comportant une autorité indépendante des parties et ayant accès à toutes les informations pertinentes, pour permettre la résolution rapide des litiges portant sur l'accès aux réseaux de gazoducs en amont, compte tenu des critères définis au paragraphe 2 et du nombre des parties qui peuvent être impliquées dans la négociation de l'accès à ces réseaux", que l'article 41, paragraphe 11, impose à cette autorité de statuer dans les deux mois, les prolongations de délai étant encadrées, et qu'ainsi, l'autorité de régulation nationale a reçu pour mission de trancher très rapidement les différends qui lui sont soumis afin de rétablir au plus vite les conditions de l'équilibre concurrentiel du marché ; qu'elle en déduit que le plaignant, qui dispose aussi du droit de s'adresser à une juridiction de droit commun et qui a fait le choix de s'adresser à l'autorité de régulation pour bénéficier d'une procédure rapide, n'est donc pas privé de protection juridictionnelle effective ; qu'elle fait valoir, également, que l'exigence de sécurité juridique (CJCE, 13 décembre 1967, Neumann, C-17/67), qui postule notamment la non-rétroactivité des actes administratifs (CJCE, 29 janvier 1985, Gesamthochschule Duisburg, C-234/83), le respect des droits acquis et de l'immutabilité des situations juridiques subjectives (CJCE, 22 septembre 1983, Verli Wallace, C-159/82), et le principe de sauvegarde de la confiance légitime (CJCE, 16 mai 1979, Tomadini, C-84/78) s'opposent à la remise en cause de contrats sans limitation dans le temps ; qu'elle ajoute enfin que le marché risquerait d'être déstabilisé par des difficultés structurelles, si ce n'est substantielles, si les décisions de l'autorité de régulation venaient à remettre en cause des contrats passés dès leur origine ;

Attendu que la société Direct énergie réplique que, par sa décision, le Cordis n'a fait que rétablir l'application des principes d'ordre public économique garantissant l'accès au réseau à des conditions objectives non discriminatoires et proportionnées pour tous les acteurs, qui n'avaient pas été respectés par le gestionnaire de réseau dans le cadre de la conclusion des conventions de raccordement, que sa décision n'implique donc pas une modification de l'ordre juridique et ne contrevient pas aux principes de non-rétroactivité de la loi, ni à celui d'intangibilité des conventions légalement formées ; qu'elle ajoute qu'un opérateur ne peut se prévaloir des principes de sécurité juridique et de confiance légitime envers une administration qu'à la condition notamment que la question posée ait été expressément tranchée par l'administration et que les assurances données soient conformes aux normes applicables et observe que tel n'est pas le cas en l'espèce, ni la CRE ni le Cordis n'ayant donné à la société GRDF quelque assurance que ce soit sur la légalité de son mécanisme de transfert ;

Attendu que la société ENI objecte, pour sa part, que le principe d'effectivité du droit communautaire (CJCE, 13 mars 2007, Unibet, C-432/05), qui exige que les États membres établissent les voies de recours nécessaires pour assurer une protection juridictionnelle effective dans les domaines couverts par le droit de l'Union (CJCE, 25 juillet 2002, Unión de Pequeños Agricultores, C-50/00 P) s'oppose à ce que le législateur mette en place des mécanismes de contrôle sanctionnant de manière partielle et imparfaite la méconnaissance de droits garantis par le droit communautaire ; qu'elle invoque aussi l'article 47 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, qui prévoit que toute personne, dont les droits et libertés garantis par le droit de l'Union ont été violés, a droit à un recours effectif devant un tribunal impartial, en soulignant que ce droit s'applique à la fois aux juridictions de l'Union (CJUE, 26 novembre 2013, Gascogne Sack Deutschland GmbH, C-40/12 P) et aux juridictions nationales lorsqu'elles sont saisies d'un litige relevant du champ d'application du droit de l'Union (par exemple concernant la conciliation de ce droit avec la sûreté de l'État, CJUE, 4 juin 2013, ZZ, C-300/11) ; qu'elle en déduit que le juge national, qui est juge de droit commun de la conformité du droit interne au droit communautaire, doit s'opposer à ce que le législateur mette en place des mécanismes de contrôle sanctionnant de manière partielle et imparfaite la méconnaissance de droits garantis par le droit communautaire ;

Attendu qu'il résulte de ces positions contraires, toutes tirées du droit européen et plus particulièrement de la directive 2009/73/CE du Parlement européen et du Conseil du 13 juillet 2009 concernant des règles communes pour le marché intérieur du gaz naturel et abrogeant la directive 2003/55/CE, qu'il existe un doute raisonnable sur l'interprétation qui doit être donnée à cette directive quant aux pouvoirs dont doivent disposer les autorités nationales de régulation statuant en matière de règlement des différends ; qu'il y a donc lieu de surseoir à statuer et de saisir la Cour de justice de l'Union européenne ;

PAR CES MOTIFS :

RENVOIE à la Cour de justice de l'Union européenne aux fins de répondre à la question suivante :

La directive 2009/73/CE du Parlement européen et du Conseil du 13 juillet 2009, et en particulier son article 41, paragraphe 11, doivent-ils être interprétés en ce sens qu'ils commandent qu'une autorité de régulation, réglant un litige, ait le pouvoir de rendre une décision s'appliquant à l'ensemble de la période couverte par le litige dont elle est saisie, peu important la date de son émergence entre les parties, notamment en tirant les conséquences de la non-conformité d'un contrat aux dispositions de la directive par une décision dont les effets couvrent toute la période contractuelle ?

Sursoit à statuer jusqu'à la décision de la Cour de justice de l'Union européenne ;

Réserve les dépens ;

Dit qu'une expédition du présent arrêt ainsi qu'un dossier, comprenant notamment la décision attaquée, seront transmis par le directeur de greffe de la Cour de cassation au greffier de la Cour de justice de l'Union européenne ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt et un mars deux mille dix-huit.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat aux Conseils, pour la société GRDF

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR confirmé la décision du CoRDIS en ce qu'elle a dit que la société GRDF devrait transmettre à la société Poweo Direct Energie un nouveau contrat d'acheminement sur le réseau de distribution de gaz naturel dans un délai de six mois à compter de la notification de la décision conforme aux principes selon lequel le fournisseur ne saurait être redevable du paiement des sommes dues au GRD par le client final et selon lequel le risque d'impayé devrait être supporté par le GRD ; d'AVOIR enjoint à la société GRDF de mettre ses contrats d'acheminement sur le réseau de distribution en conformité avec les principes énoncés par la décision, dans le délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt, en proposant à la société Direct Energie et à la société ENI un avenant à ce contrat d'accès au réseau prévoyant que sont réputées n'avoir jamais existé entre les parties parce que contraires au code de l'énergie les clauses du contrat d'accès signé entre elles, subordonnant l'accès à ce contrat à l'acceptation par le fournisseur de la prestation d'intermédiation et qui vont au-delà de ce qu'exige la seule signature des CSL par le client lorsque celui-ci souhaite un contrat unique, et imposant au fournisseur de rendre des prestations à la société GRDF dont il ne pouvait à tout le moins négocier le prix ou les conditions de réalisation, notamment, lorsque le client n'est pas en contrat écrit, une rémunération équitable et proportionnée au regard des coûts évités par elle des prestations accomplies pour son compte auprès des clients ; d'AVOIR dit que la société GRDF ne pourrait conditionner l'accès au réseau de distribution à la réalisation de prestations non rémunérées par un tarif équitable et proportionné au regard des coûts évités par elle, auprès des clients finals ayant conclu un contrat de livraison directe, d'AVOIR dit que ces amendements et l'offre tarifaire afférente devraient être proposés dans le délai de deux mois à compter de la signification de l'arrêt et devront être soumis au CoRDIS dans le même délai à compter de la notification de l'arrêt ; d'AVOIR enjoint à la société GRDF de verser à la société Direct Énergie une rémunération égale à celle qui sera fixée entre elles pour la gestion des clients en contrat unique avec effet à compter du 21 juin 2005 s'agissant du contrat d'accès au réseau public de distribution conclu avec la société, Poweo, et à compter du 21 novembre 2008, s'agissant de celui signé avec la société Direct Energie, avec intérêts au taux compter de la date de l'arrêt ;

AUX MOTIFS QUE : « Sur la question de la transposition au gaz de la solution donnée au différend relatif au contrat unique dans le secteur de l'électricité.

Il convient de rappeler que cette solution a été exprimée dans les termes suivants : « le gestionnaire de réseaux de distribution ne peut, à travers une stipulation contractuelle, transférer sur un tiers ou un cocontractant, directement ou indirectement, tout ou partie [de ses obligations] » (décision du 7 avril 2008,).
Le contrat unique visé par l'article L.12192 du code de la consommation, «(...) n'a ni pour objet, ni pour effet de modifier les responsabilités contractuelles respectives du gestionnaire de réseaux, et du client final. Ce dernier bénéficie des mêmes droits et obligations que s'il avait conclu un contrat d'accès au réseau » et dès lors, « le rôle du fournisseur est celui d'un intermédiaire dûment missionné à cet effet par le client final et le gestionnaire de réseaux de distribution » .
La société GRDF soutient que la décision transposant ces principes au secteur du gaz constitue une erreur de droit.
Elle fait valoir qu'il existe des différences substantielles entre les deux types d'énergie, tant du fait de leurs caractéristiques propres, que de l'architecture contractuelle liant le gestionnaire de réseau au fournisseur et au consommateur.
S'agissant de la différence des caractéristiques propres aux deux énergies, elle soutient que le gaz ne serait, à la différence de l'électricité, pas un bien essentiel, et serait substituable par au moins une source d'énergie dans chacun de ses usages. Par ailleurs, le fournisseur ne serait pas chargé d'une mission de service public, il n'existerait pas de convention de concession de distribution publique, l'ouverture du marché du gaz serait plus grande que celle du marché de l'électricité. Elle ajoute que la qualification de « bien » pour l'électricité est une construction juridique qui n'existe pas en matière de gaz.
Concernant les différences des régimes contractuels liant ces parties, la société GRDF fait valoir d'une part que le tarif d'utilisation des réseaux de distribution d'électricité (le « TURPE Distribution ») est acquitté par le consommateur final, alors que pour le gaz naturel, le redevable du tarif ATRD est le fournisseur. Elle affirme que l'acheminement est réalisé pour le compte du fournisseur et non pour celui du consommateur, ce qui explique que n'est pas ce dernier qui doive payer le prix de cette prestation et que lorsque la CRE a fixé le niveau du tarif d'utilisation des réseaux publics de distribution de gaz naturel (l'ATRD), par sa délibération du 28 février 2012, elle n'a pas intégré le coût des factures impayées des consommateurs finals parmi ceux que couvre le tarif ATRD 4. Elle en déduit qu'il n'y a pas en matière gazière de représentation du fournisseur envers le distributeur et que le « contrat unique » n'a pas, en cette matière, le même sens qu'en matière d'électricité.
Sur ce dernier point elle ajoute dans son dernier mémoire en réplique que le schéma triangulaire du contrat unique (client final fournisseur gestionnaire de réseau) aurait été construit dans le secteur gazier sur des bases différentes de celles qui lui ont été données dans l'électricité. Pour l'électricité, le contrat unique serait un contrat demandé par les clients finals ayant quitté le tarif réglementé de vente et passé avec leur fournisseur pour couvrir à la fois l'accès au réseau et la fourniture, cela leur éviterait de contracter eux-mêmes avec le gestionnaire du réseau de distribution. En matière gazière, au contraire, et sauf à se trouver dans une situation où les clients finals peuvent conclure avec le GRD un contrat de livraison directe (CLD), les clients finals sont automatiquement liés au GRD par les conditions standard de livraison (CSL) qui sont jointes à leur contrat de fourniture, mais qui ne font pas partie de celui-ci et qui ne lient pas le fournisseur au gestionnaire de réseaux.
La société Direct Énergie objecte que les différences ainsi relevées sont inopérantes pour justifier que les principes régissant la répartition des obligations des parties en matière d'électricité ne puissent pas s'appliquer en matière de gaz. Elle soutient que les différences entre les schémas contractuels du gaz et de l'électricité résultent d'un choix de la société GRDF et non de l'application de dispositions réglementaires qui justifieraient qu'elle puisse transférer la charge des impayés sur les fournisseurs à l'inverse de ce qui a été décidé pour l'électricité.
La société ENI oppose que la société GRDF ne saurait tirer argument d'un contrat qu'elle impose aux fournisseurs, lesquels n'ont pas les moyens d'en négocier les termes.
Elle ajoute que la requérante s'appuie sur une interprétation fantaisiste de l'article 6 du décret n°2005123 du 14 février 2005 relatif à la contribution tarifaire sur les prestations de transport et de distribution d'électricité et de gaz naturel, pour soutenir que les GRD ou les fournisseurs seraient « redevables » de la CTA en matière de gaz alors que seul le consommateur en serait redevable en matière électrique. Elle conteste enfin l'argumentation relative à la construction contractuelle différente en matière de gaz et d'électricité dès lors que cette construction contractuelle a été décidée par le seul gestionnaire de réseau.
La CRE observe que le dispositif du contrat unique traite indifféremment les secteurs de gaz et de l'électricité et qu'il n'y a aucune distinction à opérer entre ces deux secteurs, en signant le contrat de fourniture, le client final conclut également les conditions standard de livraison. Il est donc lié à la fois au fournisseur et au gestionnaire de réseau.
La cour relève que la possibilité pour le consommateur de conclure un contrat unique lui permettant de disposer de la fourniture d'électricité ou de gaz acheminé jusqu'au point physique de sa consommation a été instaurée par le législateur dans l'article L.12192 du code de la consommation, qui précise que : « le fournisseur est tenu d'offrir au client la possibilité de conclure avec lui un contrat unique portant sur la fourniture et la distribution d'électricité ou de gaz naturel. Ce contrat reproduit les clauses réglant les relations entre le fournisseur et le gestionnaire de réseau, notamment les clauses précisant les responsabilités respectives de ces opérateurs.
Outre la prestation d'accès aux réseaux, le consommateur peut, dans le cadre du contrat unique, demander à bénéficier de toutes les prestations techniques proposées par le gestionnaire de réseau. Le fournisseur ne peut facturer au consommateur d'autres frais que ceux que le gestionnaire de réseau lui a imputés au titre d'une prestation ».
Cette disposition unique visant à la fois le gaz et l'électricité témoigne de ce que le législateur a considéré ces deux secteurs comme devant obéir à un schéma identique quelle que soit la source d'énergie concernée.
La société GRDF n'apporte aucun élément qui permettrait de justifier en quoi les différences de nature entre l'électricité et le gaz qu'elle décrit et qui ont été retranscrites dans les paragraphes précédents, ou le caractère uniquement juridique de la qualification de "bien" pour l'électricité, justifieraient que les principes relatifs à la répartition des droits et obligations entre le fournisseur et le gestionnaire de réseau soient différents selon la source d'énergie concernée. Elle ne démontre en particulier pas en quoi ces différences auraient des répercussions sur les relations qui s'établissent dans le cadre du contrat unique entre le gestionnaire de réseau, le fournisseur et le consommateur et les obligations ou les droits qui devraient s'en déduire.
Par ailleurs, si le schéma contractuel en matière gazière se distingue de celui existant en matière d'électricité, d'une part, en ce que le fournisseur de gaz naturel conclut dans tous les cas avec le distributeur un contrat d'acheminement (le CAD), d'autre part, en ce que le client qui opte pour le contrat de livraison directe signe deux contrats dont un avec la société gestionnaire de réseau, ce qui n'existe pas en matière d'électricité, ces différences ne justifient pas que les principes adoptés en matière d'électricité ne s'appliquent pas en matière de gaz.
En effet, sur le premier point, ainsi que l'a relevé à juste titre le CoRDIS, le fait que l'acheminement fasse l'objet d'un contrat entre le fournisseur et le gestionnaire de réseau n'en induit pas pour autant que le client final ne soit pas le bénéficiaire de cette prestation dont il profite.
Sur le second point, si certains clients dont la situation réclame une pression ou un débit particuliers ont la possibilité de conclure un contrat de livraison directe avec le GRD, il n'en demeure pas moins que lorsque le client signe un contrat unique, ce qui correspond à la majorité des situations des consommateurs individuels, ce contrat unique est négocié avec le seul fournisseur qui, dans ce cas, représente le gestionnaire de réseau. A ce sujet, il convient d'observer que les conditions générales du CAD comportent une annexe H définissant les modalités de collaboration entre le fournisseur et le GRD qui précisent qu'il existe entre eux un contrat de mandat par lequel le fournisseur fait accepter au client final les conditions de livraisons contractuelles (CSL)
du distributeur, recueille les réclamations, ainsi que toutes demandes de prestations dites mandatées, ainsi qu'un contrat de « mission », par lequel le fournisseur propose au client en son nom, mais pour le compte du GRD, les prestations commissionnées.
À ce sujet encore il convient de relever que si dans la configuration contractuelle relative au gaz naturel, le fournisseur ne représente pas le client final auprès du gestionnaire de réseau, puisque ce dernier remplit son obligation contractuelle, d'une part, envers le fournisseur aux termes du contrat d'acheminement, d'autre part, envers le consommateur en vertu des seules CSL qui constituent un contrat entre le client et le consommateur, il n'en demeure pas moins que ce schéma, qui résulte de la seule volonté de la société GRDF, n'est pas de nature à modifier la répartition des charges et obligations entre le fournisseur et le gestionnaire de réseau résultant de la possibilité, instaurée par le législateur pour les consommateurs de signer un contrat unique comprenant les prestations d'acheminement et de livraison d'un côté, celle de fourniture de l'autre.
En outre, si le gestionnaire du réseau gazier n'est pas investi expressément d'une « mission de service public », il est néanmoins en charge d'une telle mission et des obligations qui y sont liées, ainsi que cela ressort de l'article 13 de la loi du 9 août 2004 tel que modifié par la loi du 7 décembre 2006 qui prévoyait que « (...) Un gestionnaire de réseau de distribution d'électricité ou de gaz naturel est notamment chargé dans le cadre des cahiers des charges de concession et des règlements de service des régies (...)
4° d'assurer dans des conditions objectives, transparentes et non discriminatoires, l'accès à ces réseaux ; (
) » ou de l'article 13, I, du décret n° 2004251 du 19 mars 2004 « relatif aux obligations de service public dans le secteur du gaz » qui énonce que « Les opérateurs de réseaux de distribution prennent les dispositions appropriées pour assurer l'acheminement du gaz dans les conditions de continuité et de qualité définies par les textes réglementaires en vigueur, notamment par le présent décret ». Il s'en déduit que la société GRDF n'est pas fondée à contester être investie d'une mission de service public.
La société GRDF conteste encore la décision en ce que le CoRDIS a fondé sa démonstration de ce que le fournisseur agirait pour le compte du gestionnaire de réseau en s'appuyant sur le décret n°2005123 du 14 février 2005 relatif à la contribution tarifaire sur les prestations de transport et de distribution d'électricité et de gaz naturel, dont il dénaturerait le sens et la portée. Elle oppose que ce texte fiscal portant sur une taxe très spécifique visant au financement des pensions des agents des entreprises régulées du secteur d'activité, serait dépourvu de pertinence pour trois raisons.
Premièrement, la logique et l'autonomie du droit fiscal interdiraient d'en déduire des obligations contractuelles ; deuxièmement, le décret désignerait comme redevables, selon les cas, les GRD ou les fournisseurs et non les clients finals ; troisièmement enfin, il reviendrait à dénaturer le décret que de soutenir qu'il en résulte que les impayés doivent être refacturés aux GRD par les fournisseurs.
Toutefois, la cour relève à ce sujet que la référence ainsi faite au décret du 14 février 2005 vient compléter le motif selon lequel il ressort des termes du décret du 19 mars 2004, précédemment transcrits, qu'il appartient au gestionnaire de réseaux de distribution d'acheminer le gaz jusqu'au point de livraison du client final, ce dont le CoRDIS déduit que le bénéficiaire de la prestation d'acheminement est le client final et non le distributeur. En tout état de cause, l'illustration de cette qualité de bénéficiaire de la prestation d'acheminement par la référence à l'article 3, I, du décret du 14 février est fondée, dans la mesure où cette disposition montre que le client final, qui est le contribuable de la taxe, la paie au gestionnaire de réseau, qui en est le redevable, lorsqu'il est lié à celui-ci par un contrat de livraison directe. Cette analyse est confirmée par la situation analogue du client qui a conclu un contrat unique et qui verse la CTA au fournisseur par le paiement de la facture que celui-ci lui adresse, de même que par celle du consommateur demeuré client du fournisseur historique qui paie la CTA par la facture.
Enfin, le fait que le tarif ATRD4, validé par la CRE dans sa décision du 28 février 2012, n'ait pas pris en compte le coût des impayés ne peut justifier que ceux-ci soient pris en charge par le fournisseur, dans la mesure où ces tarifs sont établis sur la base des éléments comptables et les dépenses prévisionnelles présentées par la société GRDF elle-même à la CRE, ainsi que le précise l'article L. 4522 du code de l'énergie, et l'indique la délibération de la CRE du 28 février 2012.
Sur l'application du principe selon lequel le gestionnaire du réseau public de distribution ne peut imposer aux fournisseurs des stipulations dans le contrat d'acheminement sur le réseau visant à les rendre redevables en son nom et pour son compte du paiement du tarif ATRD et de toute autre somme non couverte par ce tarif Il résulte des développements qui précèdent que, comme l'a relevé à juste titre le CoRDIS, le contrat unique prévu par l'article 12192 du code de la consommation a pour objectif de simplifier pour le consommateur le dispositif de souscription des contrats en dispensant le client final de conclure directement et parallèlement à son contrat de fourniture un contrat d'accès au réseau public de distribution, ce qu'il fait d'ailleurs au demeurant par l'intermédiaire du fournisseur.
En conséquence, la fonction de mandataire assumée par les fournisseurs, dans le cadre du mécanisme contractuel décrit ci-dessus, n'a pas pour objet et ne peut avoir pour effet de modifier les responsabilités respectives du gestionnaire de réseaux, du fournisseur et du client final telles qu'elles découlent de la loi et des textes pris pour son application.
Ainsi, le gestionnaire de réseau ne peut, sous couvert de la mission confiée au fournisseur auprès du client dans le cadre de la signature du contrat unique, imposer au seul fournisseur de supporter l'intégralité du risque d'impayés qui s'attache à l'exercice par le gestionnaire de sa mission de service public. La cour relève à ce sujet et à titre surabondant que la société GRDF ne démontre pas que, comme elle l'affirme, les gestionnaires de réseaux d'acheminement et de distribution de gaz naturel des autres pays européens ne supportent pas les risques d'impayés de la part des clients finaux » ;

ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE : « Sur les stipulations du contrat d'acheminement sur le réseau de distribution de gaz naturel tendant à ce qu'elles rendent le fournisseur redevable en son nom et pour son compte, du paiement du tarif ATRD et de toute autre somme non couverte par le tarif.
La société Poweo Direct Energie demande au comité de règlement des différends et des sanctions de déclarer contraires à la réglementation sectorielle toutes les stipulations du contrat d'acheminement sur le réseau de distribution de gaz naturel tendant à ce qu'elles rendent le fournisseur redevable en son nom et pour son compte du paiement du tarif d'utilisation des réseaux de distribution de gaz naturel et de toute autre somme non couverte par ce tarif.
L'article L. 11197 du code de l'énergie énonce qu'un « droit d'accès aux ouvrages [
] de distribution de gaz naturel [
] est garanti par les opérateurs qui les exploitent aux clients ainsi qu'aux fournisseurs et à leurs mandataires, dans des conditions définies par contrat ».
L'article L. 12192 du code de la consommation prévoit que « Le fournisseur est tenu d'offrir au client la possibilité de conclure avec lui un contrat unique portant sur la fourniture et la distribution d'électricité ou de gaz naturel. Ce contrat reproduit en annexe les clauses réglant les relations entre le fournisseur et le gestionnaire de réseau, notamment les clauses précisant les responsabilités respectives de ces opérateurs Outre la prestation d'accès aux réseaux, le consommateur peut, dans le cadre du contrat unique, demander à bénéficier de toutes les prestations techniques proposées par le gestionnaire du réseau. Le fournisseur ne peut facturer au consommateur d'autres frais que ceux que le gestionnaire du réseau lui a imputés au titre d'une prestation ».
En instituant le contrat unique, le législateur a entendu simplifier le dispositif de souscription des contrats, en dispensant le client final de conclure directement et parallèlement à son contrat de fourniture, un contrat d'accès au réseau avec le gestionnaire du réseau public de distribution. Il résulte des travaux préparatoires de la loi n° 20038 du 3 janvier 2003 relative aux marchés du gaz et de l'électricité et au service public de l'énergie, qui a modifié la loi n° 2000108 du 10 février 2000 relative à la modernisation et au développement du service public de l'électricité, que la mise en oeuvre du contrat unique a pour but de permettre la conclusion, par les fournisseurs, de contrats d'accès au réseau au nom et pour le compte de leurs clients.
Dès lors, le contrat unique n'a pas pour objet et ne pourrait avoir pour effet de modifier les responsabilités respectives du gestionnaire de réseaux, du fournisseur et du client final, telles qu'elles découlent de la loi et des textes pris pour son application.
Il en résulte que les droits et obligations du gestionnaire de réseaux à l'égard du fournisseur ne peuvent, sous couvert de la mission confiée au fournisseur auprès du client dans le cadre de la conclusion du contrat unique, être aménagés de telle sorte qu'ils aboutiraient à faire supporter au seul fournisseur l'intégralité d'un risque qui s'attache à l'exercice par le gestionnaire de réseaux de sa mission de service public.
Le contrat unique visé par l'article L. 12192 du code de la consommation doit s'analyser comme permettant au consommateur de conclure, d'une part, un contrat de fourniture avec le fournisseur de son choix et, d'autre part, un contrat de « distribution » avec le gestionnaire de réseaux de distribution pour l'acheminement et la livraison du gaz jusqu'à son point de livraison.
Contrairement à ce que soutient la société GRDF, la notion de « distribution» visée par les dispositions de l'article L. 12192 du code de la consommation doit s'analyser à la lumière de la définition de la « distribution », donnée par la directive 2009/73/CE du Parlement Européen et du Conseil du 13 juillet 2009 concernant des règles communes pour le marché intérieur du gaz naturel et abrogeant la directive 2003/55/CE. Selon l'article 2 point 5 de la directive précitée, la « distribution » doit s'entendre comme « le transport de gaz naturel par l'intermédiaire de réseaux locaux ou régionaux de gazoducs aux fins de fourniture à des clients, mais ne comprenant pas la fourniture ».
L'article 13 du décret n°2004251 du 19 mars 2004 relatif aux obligations de service public dans le secteur du gaz énonce que « I. Les opérateurs de réseaux de distribution prennent les dispositions appropriées pour assurer l'acheminement du gaz dans les conditions de continuité et de qualité définies par les textes réglementaires en vigueur, notamment par le présent décret ».
Ainsi, il ressort des termes du décret du 19 mars 2004, qu'il appartient au gestionnaire de réseaux de distribution d'acheminer ce gaz jusqu'au point de livraison du client final.
En outre, l'article 7 du décret n°2005123 du 14 février 2005 relatif à la contribution tarifaire sur les prestations de transport et de distribution d'électricité et de gaz naturel dispose que « I. Lorsqu'un [
] gestionnaire de réseau public de distribution de gaz naturel facture à un consommateur final ayant exercé son éligibilité l'utilisation des réseaux, il collecte le montant de la contribution tarifaire correspondante par prélèvement sur le montant hors taxes facturé ». Le gestionnaire de réseaux de distribution de gaz naturel peut donc facturer directement l'utilisation du réseau au consommateur final ayant souscrit une offre de marché.
Par conséquent, au regard tant des dispositions de l'article L. 12192 du code de la consommation que des dispositions précitées du décret du 14 février 2005 et du 19 mars 2004, la mission d'acheminement dévolue au gestionnaire de réseaux de distribution s'effectue pour le compte du client final et non pour le compte de son fournisseur.
Dès lors, le gestionnaire du réseau public de distribution ne peut imposer aux fournisseurs des stipulations dans le contrat d'acheminement sur le réseau de distribution de gaz naturel visant à le rendre redevable en son nom et pour son compte, du paiement du tarif ATRD et de toute autre somme non couverte par ce tarif.
La société GRDF devra, en conséquence, mettre en conformité les clauses du contrat d'acheminement sur le réseau de distribution de gaz naturel avec ce qui précède.
Sur le reversement au gestionnaire de réseau des sommes perçues au titre de l'utilisation du réseau par le fournisseur La société Poweo Direct Energie demande, au comité, de dire que « pour reverser au gestionnaire de réseau les sommes perçues au titre de l'utilisation du réseau, le fournisseur doit les avoir préalablement recouvrées auprès du client final ».
L'article 7 du décret n°2005123 du 14 février 2005 relatif à la contribution tarifaire sur les prestations de transport et de distribution d'électricité et de gaz naturel énonce que « le fournisseur de gaz naturel reverse aux gestionnaires de réseaux de transport et de distribution avec lesquels il a conclu des contrats d'accès aux réseaux pour l'alimentation de ses clients le montant facturé à ces derniers au titre de l'utilisation des réseaux, déduction faite du montant de la contribution tarifaire correspondante ».
Il résulte de ces dispositions et de l'ensemble de ce qui précède, notamment de ce que la mission d'acheminement dévolue au gestionnaire de réseaux de distribution est réalisée pour le compte du client final, que pour reverser au gestionnaire de réseaux les sommes dues au titre de l'utilisation du réseau, le fournisseur doit les avoir préalablement recouvrées auprès du client final. Il ne peut en être autrement que dans les cas où le fournisseur n'a pas effectué toutes les diligences requises pour recouvrer les sommes concernées, en particulier celles prévues par le décret n° 2008780 du 13 août 2008 relatif à la procédure applicable en cas d'impayés des factures d'électricité, de gaz, de chaleur et d'eau » ;

ALORS 1/ QUE les décisions du CoRDIS prises en matière de règlement des différends n'ont pas de caractère réglementaire leur conférant une autorité autre que jurisprudentielle ; qu'en décidant que, par principe, aucun élément de distinction entre les deux énergies, électricité et Gaz, ne s'y opposant, la décision du CoRDIS du 7 avril 2008 rendue pour le règlement d'un différend entre ERDF et notamment les sociétés Direct Energie, Gaz de France, Electrabel France et Poweo, relatif à la signature d'un contrat permettant l'accès au réseau public de distribution d'électricité (dit contrat GRDF) était transposable au présent différend concernant les sociétés GRDF, d'une part, et Poweo Direct Energie et EniGas etamp;amp;Power, d'autre part, relatif au contrat unique d'acheminement du gaz naturel, sans en justifier autrement, la cour d'appel a violé, par fausse application, l'article 1351 du code civil dans sa version applicable en la cause ;

ALORS 2/ QU'en s'estimant ainsi tenue par une décision du CoRDIS du 7 avril 2008 rendue pour le règlement d'un différend entre ERDF et notamment les sociétés Direct Energie, Gaz de France, Electrabel France et Poweo, relatif à la signature d'un contrat permettant l'accès au réseau public de distribution d'électricité (dit contrat GRDF) quand celle-ci prise en matière de règlement des différends n'avait pas de caractère réglementaire lui conférant une autorité autre que jurisprudentielle, la cour d'appel a commis un excès de pouvoir négatif en violation des article L. 134-19 et L. 134-20 du code de l'énergie ;

ALORS 3/ QU' en statuant de la sorte, la cour d'appel a encore violé le principe de la prohibition des arrêts de règlement, en violation de l'article 5 du code civil.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR confirmé la décision du CoRDIS en ce qu'elle a dit que la société GRDF devrait transmettre à la société Poweo Direct Energie un nouveau contrat d'acheminement sur le réseau de distribution de gaz naturel dans un délai de six mois à compter de la notification de la décision conforme aux principes selon lequel le fournisseur ne saurait être redevable du paiement des sommes dues au GRD par le client final et selon lequel le risque d'impayé devrait être supporté par le GRD ; d'AVOIR enjoint à la société GRDF de mettre ses contrats d'acheminement sur le réseau de distribution en conformité avec les principes énoncés par la décision, dans le délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt, en proposant à la société Direct Energie et à la société ENI un avenant à ce contrat d'accès au réseau prévoyant que sont réputées n'avoir jamais existé entre les parties parce que contraires au code de l'énergie les clauses du contrat d'accès signé entre elles, subordonnant l'accès à ce contrat à l'acceptation par le fournisseur de la prestation d'intermédiation et qui vont au-delà de ce qu'exige la seule signature des CSL par le client lorsque celui-ci souhaite un contrat unique, et imposant au fournisseur de rendre des prestations à la société GRDF dont il ne pouvait à tout le moins négocier le prix ou les conditions de réalisation, notamment, lorsque le client n'est pas en contrat écrit, une rémunération équitable et proportionnée au regard des coûts évités par elle des prestations accomplies pour son compte auprès des clients ; d'AVOIR dit que la société GRDF ne pourrait conditionner l'accès au réseau de distribution à la réalisation de prestations non rémunérées par un tarif équitable et proportionné au regard des coûts évités par elle, auprès des clients finals ayant conclu un contrat de livraison directe, d'AVOIR dit que ces amendements et l'offre tarifaire afférente devraient être proposés dans le délai de deux mois à compter de la signification de l'arrêt et devront être soumis au CoRDIS dans le même délai à compter de la notification de l'arrêt ; d'AVOIR enjoint à la société GRDF de verser à la société Direct Énergie une rémunération égale à celle qui sera fixée entre elles pour la gestion des clients en contrat unique avec effet à compter du 21 juin 2005 s'agissant du contrat d'accès au réseau public de distribution conclu avec la société, Poweo, et à compter du 21 novembre 2008, s'agissant de celui signé avec la société Direct Energie, avec intérêts au taux compter de la date de l'arrêt ;

AUX MOTIFS QUE : « Sur la question de la transposition au gaz de la solution donnée au différend relatif au contrat unique dans le secteur de l'électricité.
Il convient de rappeler que cette solution a été exprimée dans les termes suivants : «le gestionnaire de réseaux de distribution ne peut, à travers une stipulation contractuelle, transférer sur un tiers ou un cocontractant, directement ou indirectement, tout ou partie [de ses obligations] » (décision du 7 avril 2008,).
Le contrat unique visé par l'article L.12192 du code de la consommation, «(...) n'a ni pour objet, ni pour effet de modifier les responsabilités contractuelles respectives du gestionnaire de réseaux, et du client final. Ce dernier bénéficie des mêmes droits et obligations que s'il avait conclu un contrat d'accès au réseau » et dès lors, « le rôle du fournisseur est celui d'un intermédiaire dûment missionné à cet effet par le client final et le gestionnaire de réseaux de distribution » .
La société GRDF soutient que la décision transposant ces principes au secteur du gaz constitue une erreur de droit.
Elle fait valoir qu'il existe des différences substantielles entre les deux types d'énergie, tant du fait de leurs caractéristiques propres, que de l'architecture contractuelle liant le gestionnaire de réseau au fournisseur et au consommateur.
S'agissant de la différence des caractéristiques propres aux deux énergies, elle soutient que le gaz ne serait, à la différence de l'électricité, pas un bien essentiel, et serait substituable par au moins une source d'énergie dans chacun de ses usages. Par ailleurs, le fournisseur ne serait pas chargé d'une mission de service public, il n'existerait pas de convention de concession de distribution publique, l'ouverture du marché du gaz serait plus grande que celle du marché de l'électricité. Elle ajoute que la qualification de « bien » pour l'électricité est une construction juridique qui n'existe pas en matière de gaz.
Concernant les différences des régimes contractuels liant ces parties, la société GRDF fait valoir d'une part que le tarif d'utilisation des réseaux de distribution d'électricité (le « TURPE Distribution ») est acquitté par le consommateur final, alors que pour le gaz naturel, le redevable du tarif ATRD est le fournisseur. Elle affirme que l'acheminement est réalisé pour le compte du fournisseur et non pour celui du consommateur, ce qui explique que n'est pas ce dernier qui doive payer le prix de cette prestation et que lorsque la CRE a fixé le niveau du tarif d'utilisation des réseaux publics de distribution de gaz naturel (l'ATRD), par sa délibération du 28 février 2012, elle n'a pas intégré le coût des factures impayées des consommateurs finals parmi ceux que couvre le tarif ATRD 4. Elle en déduit qu'il n'y a pas en matière gazière de représentation du fournisseur envers le distributeur et que le « contrat unique » n'a pas, en cette matière, le même sens qu'en matière d'électricité.
Sur ce dernier point elle ajoute dans son dernier mémoire en réplique que le schéma triangulaire du contrat unique (client final fournisseur gestionnaire de réseau) aurait été construit dans le secteur gazier sur des bases différentes de celles qui lui ont été données dans l'électricité. Pour l'électricité, le contrat unique serait un contrat demandé par les clients finals ayant quitté le tarif réglementé de vente et passé avec leur fournisseur pour couvrir à la fois l'accès au réseau et la fourniture, cela leur éviterait de contracter eux-mêmes avec le gestionnaire du réseau de distribution. En matière gazière, au contraire, et sauf à se trouver dans une situation où les clients finals peuvent conclure avec le GRD un contrat de livraison directe (CLD), les clients finals sont automatiquement liés au GRD par les conditions standard de livraison (CSL) qui sont jointes à leur contrat de fourniture, mais qui ne font pas partie de celui-ci et qui ne lient pas le fournisseur au gestionnaire de réseaux.
La société Direct Énergie objecte que les différences ainsi relevées sont inopérantes pour justifier que les principes régissant la répartition des obligations des parties en matière d'électricité ne puissent pas s'appliquer en matière de gaz. Elle soutient que les différences entre les schémas contractuels du gaz et de l'électricité résultent d'un choix de la société GRDF et non de l'application de dispositions réglementaires qui justifieraient qu'elle puisse transférer la charge des impayés sur les fournisseurs à l'inverse de ce qui a été décidé pour l'électricité.
La société ENI oppose que la société GRDF ne saurait tirer argument d'un contrat qu'elle impose aux fournisseurs, lesquels n'ont pas les moyens d'en négocier les termes.
Elle ajoute que la requérante s'appuie sur une interprétation fantaisiste de l'article 6 du décret n°2005123 du 14 février 2005 relatif à la contribution tarifaire sur les prestations de transport et de distribution d'électricité et de gaz naturel, pour soutenir que les GRD ou les fournisseurs seraient «redevables » de la CTA en matière de gaz alors que seul le consommateur en serait redevable en matière électrique. Elle conteste enfin l'argumentation relative à la construction contractuelle différente en matière de gaz et d'électricité dès lors que cette construction contractuelle a été décidée par le seul gestionnaire de réseau.
La CRE observe que le dispositif du contrat unique traite indifféremment les secteurs de gaz et de l'électricité et qu'il n'y a aucune distinction à opérer entre ces deux secteurs, en signant le contrat de fourniture, le client final conclut également les conditions standard de livraison. Il est donc lié à la fois au fournisseur et au gestionnaire de réseau.
La cour relève que la possibilité pour le consommateur de conclure un contrat unique lui permettant de disposer de la fourniture d'électricité ou de gaz acheminé jusqu'au point physique de sa consommation a été instaurée par le législateur dans l'article L.12192 du code de la consommation, qui précise que : « le fournisseur est tenu d'offrir au client la possibilité de conclure avec lui un contrat unique portant sur la fourniture et la distribution d'électricité ou de gaz naturel. Ce contrat reproduit les clauses réglant les relations entre le fournisseur et le gestionnaire de réseau, notamment les clauses précisant les responsabilités respectives de ces opérateurs.
Outre la prestation d'accès aux réseaux, le consommateur peut, dans le cadre du contrat unique, demander à bénéficier de toutes les prestations techniques proposées par le gestionnaire de réseau. Le fournisseur ne peut facturer au consommateur d'autres frais que ceux que le gestionnaire de réseau lui a imputés au titre d'une prestation ».
Cette disposition unique visant à la fois le gaz et l'électricité témoigne de ce que le législateur a considéré ces deux secteurs comme devant obéir à un schéma identique quelle que soit la source d'énergie concernée.
La société GRDF n'apporte aucun élément qui permettrait de justifier en quoi les différences de nature entre l'électricité et le gaz qu'elle décrit et qui ont été retranscrites dans les paragraphes précédents, ou le caractère uniquement juridique de la qualification de "bien" pour l'électricité, justifieraient que les principes relatifs à la répartition des droits et obligations entre le fournisseur et le gestionnaire de réseau soient différents selon la source d'énergie concernée. Elle ne démontre en particulier pas en quoi ces différences auraient des répercussions sur les relations qui s'établissent dans le cadre du contrat unique entre le gestionnaire de réseau, le fournisseur et le consommateur et les obligations ou les droits qui devraient s'en déduire.
Par ailleurs, si le schéma contractuel en matière gazière se distingue de celui existant en matière d'électricité, d'une part, en ce que le fournisseur de gaz naturel conclut dans tous les cas avec le distributeur un contrat d'acheminement (le CAD), d'autre part, en ce que le client qui opte pour le contrat de livraison directe signe deux contrats dont un avec la société gestionnaire de réseau, ce qui n'existe pas en matière d'électricité, ces différences ne justifient pas que les principes adoptés en matière d'électricité ne s'appliquent pas en matière de gaz.
En effet, sur le premier point, ainsi que l'a relevé à juste titre le CoRDIS, le fait que l'acheminement fasse l'objet d'un contrat entre le fournisseur et le gestionnaire de réseau n'en induit pas pour autant que le client final ne soit pas le bénéficiaire de cette prestation dont il profite.
Sur le second point, si certains clients dont la situation réclame une pression ou un débit particuliers ont la possibilité de conclure un contrat de livraison directe avec le GRD, il n'en demeure pas moins que lorsque le client signe un contrat unique, ce qui correspond à la majorité des situations des consommateurs individuels, ce contrat unique est négocié avec le seul fournisseur qui, dans ce cas, représente le gestionnaire de réseau. A ce sujet, il convient d'observer que les conditions générales du CAD comportent une annexe H définissant les modalités de collaboration entre le fournisseur et le GRD qui précisent qu'il existe entre eux un contrat de mandat par lequel le fournisseur fait accepter au client final les conditions de livraisons contractuelles (CSL) du distributeur, recueille les réclamations, ainsi que toutes demandes de prestations dites mandatées, ainsi qu'un contrat de «mission », par lequel le fournisseur propose au client en son nom, mais pour le compte du GRD, les prestations commissionnées.
À ce sujet encore il convient de relever que si dans la configuration contractuelle relative au gaz naturel, le fournisseur ne représente pas le client final auprès du gestionnaire de réseau, puisque ce dernier remplit son obligation contractuelle, d'une part, envers le fournisseur aux termes du contrat d'acheminement, d'autre part, envers le consommateur en vertu des seules CSL qui constituent un contrat entre le client et le consommateur, il n'en demeure pas moins que ce schéma, qui résulte de la seule volonté de la société GRDF, n'est pas de nature à modifier la répartition des charges et obligations entre le fournisseur et le gestionnaire de réseau résultant de la possibilité, instaurée par le législateur pour les consommateurs de signer un contrat unique comprenant les prestations d'acheminement et de livraison d'un côté, celle de fourniture de l'autre.
En outre, si le gestionnaire du réseau gazier n'est pas investi expressément d'une « mission de service public », il est néanmoins en charge d'une telle mission et des obligations qui y sont liées, ainsi que cela ressort de l'article 13 de la loi du 9 août 2004 tel que modifié par la loi du 7 décembre 2006 qui prévoyait que « (...) Un gestionnaire de réseau de distribution d'électricité ou de gaz naturel est notamment chargé dans le cadre des cahiers des charges de concession et des règlements de service des régies (...)
4° d'assurer dans des conditions objectives, transparentes et non discriminatoires, l'accès à ces réseaux ; (
) » ou de l'article 13, I, du décret n° 2004251 du 19 mars 2004 « relatif aux obligations de service public dans le secteur du gaz » qui énonce que « Les opérateurs de réseaux de distribution prennent les dispositions appropriées pour assurer l'acheminement du gaz dans les conditions de continuité et de qualité définies par les textes réglementaires en vigueur, notamment par le présent décret ». Il s'en déduit que la société GRDF n'est pas fondée à contester être investie d'une mission de service public.
La société GRDF conteste encore la décision en ce que le CoRDIS a fondé sa démonstration de ce que le fournisseur agirait pour le compte du gestionnaire de réseau en s'appuyant sur le décret n°2005123 du 14 février 2005 relatif à la contribution tarifaire sur les prestations de transport et de distribution d'électricité et de gaz naturel, dont il dénaturerait le sens et la portée. Elle oppose que ce texte fiscal portant sur une taxe très spécifique visant au financement des pensions des agents des entreprises régulées du secteur d'activité, serait dépourvu de pertinence pour trois raisons.
Premièrement, la logique et l'autonomie du droit fiscal interdiraient d'en déduire des obligations contractuelles ; deuxièmement, le décret désignerait comme redevables, selon les cas, les GRD ou les fournisseurs et non les clients finals ; troisièmement enfin, il reviendrait à dénaturer le décret que de soutenir qu'il en résulte que les impayés doivent être refacturés aux GRD par les fournisseurs.
Toutefois, la cour relève à ce sujet que la référence ainsi faite au décret du 14 février 2005 vient compléter le motif selon lequel il ressort des termes du décret du 19 mars 2004, précédemment transcrits, qu'il appartient au gestionnaire de réseaux de distribution d'acheminer le gaz jusqu'au point de livraison du client final, ce dont le CoRDIS déduit que le bénéficiaire de la prestation d'acheminement est le client final et non le distributeur. En tout état de cause, l'illustration de cette qualité de bénéficiaire de la prestation d'acheminement par la référence à l'article 3, I, du décret du 14 février est fondée, dans la mesure où cette disposition montre que le client final, qui est le contribuable de la taxe, la paie au gestionnaire de réseau, qui en est le redevable, lorsqu'il est lié à celuici par un contrat de livraison directe. Cette analyse est confirmée par la situation analogue du client qui a conclu un contrat unique et qui verse la CTA au fournisseur par le paiement de la facture que celui-ci lui adresse, de même que par celle du consommateur demeuré client du fournisseur historique qui paie la CTA par la facture.
Enfin, le fait que le tarif ATRD4, validé par la CRE dans sa décision du 28 février 2012, n'ait pas pris en compte le coût des impayés ne peut justifier que ceux-ci soient pris en charge par le fournisseur, dans la mesure où ces tarifs sont établis sur la base des éléments comptables et les dépenses prévisionnelles présentées par la société GRDF elle-même à la CRE, ainsi que le précise l'article L. 4522 du code de l'énergie, et l'indique la délibération de la CRE du 28 février 2012.
Sur l'application du principe selon lequel le gestionnaire du réseau public de distribution ne peut imposer aux fournisseurs des stipulations dans le contrat d'acheminement sur le réseau visant à les rendre redevables en son nom et pour son compte du paiement du tarif ATRD et de toute autre somme non couverte par ce tarif Il résulte des développements qui précèdent que, comme l'a relevé à juste titre le CoRDIS, le contrat unique prévu par l'article 12192 du code de la consommation a pour objectif de simplifier pour le consommateur le dispositif de souscription des contrats en dispensant le client final de conclure directement et parallèlement à son contrat de fourniture un contrat d'accès au réseau public de distribution, ce qu'il fait d'ailleurs au demeurant par l'intermédiaire du fournisseur.
En conséquence, la fonction de mandataire assumée par les fournisseurs, dans le cadre du mécanisme contractuel décrit ci-dessus, n'a pas pour objet et ne peut avoir pour effet de modifier les responsabilités respectives du gestionnaire de réseaux, du fournisseur et du client final telles qu'elles découlent de la loi et des textes pris pour son application.
Ainsi, le gestionnaire de réseau ne peut, sous couvert de la mission confiée au fournisseur auprès du client dans le cadre de la signature du contrat unique, imposer au seul fournisseur de supporter l'intégralité du risque d'impayés qui s'attache à l'exercice par le gestionnaire de sa mission de service public. La cour relève à ce sujet et à titre surabondant que la société GRDF ne démontre pas que, comme elle l'affirme, les gestionnaires de réseaux d'acheminement et de distribution de gaz naturel des autres pays européens ne supportent pas les risques d'impayés de la part des clients finaux » ;

ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE : « Sur les stipulations du contrat d'acheminement sur le réseau de distribution de gaz naturel tendant à ce qu'elles rendent le fournisseur redevable en son nom et pour son compte, du paiement du tarif ATRD et de toute autre somme non couverte par le tarif.
La société Poweo Direct Energie demande au comité de règlement des différends et des sanctions de déclarer contraires à la réglementation sectorielle toutes les stipulations du contrat d'acheminement sur le réseau de distribution de gaz naturel tendant à ce qu'elles rendent le fournisseur redevable en son nom et pour son compte du paiement du tarif d'utilisation des réseaux de distribution de gaz naturel et de toute autre somme non couverte par ce tarif.
L'article L. 11197 du code de l'énergie énonce qu'un « droit d'accès aux ouvrages [
] de distribution de gaz naturel [
] est garanti par les opérateurs qui les exploitent aux clients ainsi qu'aux fournisseurs et à leurs mandataires, dans des conditions définies par contrat ».
L'article L. 12192 du code de la consommation prévoit que « Le fournisseur est tenu d'offrir au client la possibilité de conclure avec lui un contrat unique portant sur la fourniture et la distribution d'électricité ou de gaz naturel. Ce contrat reproduit en annexe les clauses réglant les relations entre le fournisseur et le gestionnaire de réseau, notamment les clauses précisant les responsabilités respectives de ces opérateurs Outre la prestation d'accès aux réseaux, le consommateur peut, dans le cadre du contrat unique, demander à bénéficier de toutes les prestations techniques proposées par le gestionnaire du réseau. Le fournisseur ne peut facturer au consommateur d'autres frais que ceux que le gestionnaire du réseau lui a imputés au titre d'une prestation ».
En instituant le contrat unique, le législateur a entendu simplifier le dispositif de souscription des contrats, en dispensant le client final de conclure directement et parallèlement à son contrat de fourniture, un contrat d'accès au réseau avec le gestionnaire du réseau public de distribution. Il résulte des travaux préparatoires de la loi n°20038 du 3 janvier 2003 relative aux marchés du gaz et de l'électricité et au service public de l'énergie, qui a modifié la loi n°2000108 du 10 février 2000 relative à la modernisation et au développement du service public de l'électricité, que la mise en oeuvre du contrat unique a pour but de permettre la conclusion, par les fournisseurs, de contrats d'accès au réseau au nom et pour le compte de leurs clients.
Dès lors, le contrat unique n'a pas pour objet et ne pourrait avoir pour effet de modifier les responsabilités respectives du gestionnaire de réseaux, du fournisseur et du client final, telles qu'elles découlent de la loi et des textes pris pour son application.
Il en résulte que les droits et obligations du gestionnaire de réseaux à l'égard du fournisseur ne peuvent, sous couvert de la mission confiée au fournisseur auprès du client dans le cadre de la conclusion du contrat unique, être aménagés de telle sorte qu'ils aboutiraient à faire supporter au seul fournisseur l'intégralité d'un risque qui s'attache à l'exercice par le gestionnaire de réseaux de sa mission de service public.
Le contrat unique visé par l'article L. 12192 du code de la consommation doit s'analyser comme permettant au consommateur de conclure, d'une part, un contrat de fourniture avec le fournisseur de son choix et, d'autre part, un contrat de « distribution » avec le gestionnaire de réseaux de distribution pour l'acheminement et la livraison du gaz jusqu'à son point de livraison.
Contrairement à ce que soutient la société GRDF, la notion de « distribution» visée par les dispositions de l'article L. 12192 du code de la consommation doit s'analyser à la lumière de la définition de la « distribution », donnée par la directive 2009/73/CE du Parlement Européen et du Conseil du 13 juillet 2009 concernant des règles communes pour le marché intérieur du gaz naturel et abrogeant la directive 2003/55/CE. Selon l'article 2 point 5 de la directive précitée, la « distribution » doit s'entendre comme « le transport de gaz naturel par l'intermédiaire de réseaux locaux ou régionaux de gazoducs aux fins de fourniture à des clients, mais ne comprenant pas la fourniture ».
L'article 13 du décret n°2004251 du 19 mars 2004 relatif aux obligations de service public dans le secteur du gaz énonce que « I. Les opérateurs de réseaux de distribution prennent les dispositions appropriées pour assurer l'acheminement du gaz dans les conditions de continuité et de qualité définies par les textes réglementaires en vigueur, notamment par le présent décret ».
Ainsi, il ressort des termes du décret du 19 mars 2004, qu'il appartient au gestionnaire de réseaux de distribution d'acheminer ce gaz jusqu'au point de livraison du client final.
En outre, l'article 7 du décret n°2005123 du 14 février 2005 relatif à la contribution tarifaire sur les prestations de transport et de distribution d'électricité et de gaz naturel dispose que « I. Lorsqu'un [
] gestionnaire de réseau public de distribution de gaz naturel facture à un consommateur final ayant exercé son éligibilité l'utilisation des réseaux, il collecte le montant de la contribution tarifaire correspondante par prélèvement sur le montant hors taxes facturé ». Le gestionnaire de réseaux de distribution de gaz naturel peut donc facturer directement l'utilisation du réseau au consommateur final ayant souscrit une offre de marché.
Par conséquent, au regard tant des dispositions de l'article L. 12192 du code de la consommation que des dispositions précitées du décret du 14 février 2005 et du 19 mars 2004, la mission d'acheminement dévolue au gestionnaire de réseaux de distribution s'effectue pour le compte du client final et non pour le compte de son fournisseur.
Dès lors, le gestionnaire du réseau public de distribution ne peut imposer aux fournisseurs des stipulations dans le contrat d'acheminement sur le réseau de distribution de gaz naturel visant à le rendre redevable en son nom et pour son compte, du paiement du tarif ATRD et de toute autre somme non couverte par ce tarif.
La société GRDF devra, en conséquence, mettre en conformité les clauses du contrat d'acheminement sur le réseau de distribution de gaz naturel avec ce qui précède.
Sur le reversement au gestionnaire de réseau des sommes perçues au titre de l'utilisation du réseau par le fournisseur La société Poweo Direct Energie demande, au comité, de dire que « pour reverser au gestionnaire de réseau les sommes perçues au titre de l'utilisation du réseau, le fournisseur doit les avoir préalablement recouvrées auprès du client final ».
L'article 7 du décret n°2005123 du 14 février 2005 relatif à la contribution tarifaire sur les prestations de transport et de distribution d'électricité et de gaz naturel énonce que « le fournisseur de gaz naturel reverse aux gestionnaires de réseaux de transport et de distribution avec lesquels il a conclu des contrats d'accès aux réseaux pour l'alimentation de ses clients le montant facturé à ces derniers au titre de l'utilisation des réseaux, déduction faite du montant de la contribution tarifaire correspondante ».
Il résulte de ces dispositions et de l'ensemble de ce qui précède, notamment de ce que la mission d'acheminement dévolue au gestionnaire de réseaux de distribution est réalisée pour le compte du client final, que pour reverser au gestionnaire de réseaux les sommes dues au titre de l'utilisation du réseau, le fournisseur doit les avoir préalablement recouvrées auprès du client final. Il ne peut en être autrement que dans les cas où le fournisseur n'a pas effectué toutes les diligences requises pour recouvrer les sommes concernées, en particulier celles prévues par le décret n° 2008780 du 13 août 2008 relatif à la procédure applicable en cas d'impayés des factures d'électricité, de gaz, de chaleur et d'eau » ;

ALORS QU'en considérant que le « fait que le tarif ATRD4, validé par la CRE dans sa décision du 28 février 2012, n'ait pas pris en compte le coût des impayés ne peut justifier que ceuxci soient pris en charge par le fournisseur, dans la mesure où ces tarifs sont établis sur la base des éléments comptables et les dépenses prévisionnelles présentées par la société GRDF elle-même à la CRE, ainsi que le précise l'article L.452-2 du code de l'énergie, et l'indique la délibération de la CRE du 28 février 2012 » (arrêt, p. 13, antepénultième §), quand il ressort de ladite cette délibération que « pour établir ce tarif, la CRE a organisé une consultation publique du 11 octobre 4 novembre 2011 et procédé à l'audition des fournisseurs de gaz naturel sur le réseau de GRDF » parmi lesquels Direct Energie et ENI, en sorte que la délibération n'a pas été prise au vu des seuls éléments fournis par la société GRDF, la cour d'appel a dénaturé ladite délibération en violation de l'article 1134 du code civil dans sa rédaction applicable en la cause.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR confirmé la décision du CoRDIS en ce qu'elle a dit que la société GRDF devrait transmettre à la société Poweo Direct Energie un nouveau contrat d'acheminement sur le réseau de distribution de gaz naturel dans un délai de six mois à compter de la notification de la décision conforme aux principes selon lequel le fournisseur ne saurait être redevable du paiement des sommes dues au GRD par le client final et selon lequel le risque d'impayé devrait être supporté par le GRD ; d'AVOIR enjoint à la société GRDF de mettre ses contrats d'acheminement sur le réseau de distribution en conformité avec les principes énoncés par la décision, dans le délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt, en proposant à la société Direct Energie et à la société ENI un avenant à ce contrat d'accès au réseau prévoyant que sont réputées n'avoir jamais existé entre les parties parce que contraires au code de l'énergie les clauses du contrat d'accès signé entre elles, subordonnant l'accès à ce contrat à l'acceptation par le fournisseur de la prestation d'intermédiation et qui vont au-delà de ce qu'exige la seule signature des CSL par le client lorsque celui-ci souhaite un contrat unique, et imposant au fournisseur de rendre des prestations à la société GRDF dont il ne pouvait à tout le moins négocier le prix ou les conditions de réalisation, notamment, lorsque le client n'est pas en contrat écrit, une rémunération équitable et proportionnée au regard des coûts évités par elle des prestations accomplies pour son compte auprès des clients ; d'AVOIR dit que la société GRDF ne pourrait conditionner l'accès au réseau de distribution à la réalisation de prestations non rémunérées par un tarif équitable et proportionné au regard des coûts évités par elle, auprès des clients finals ayant conclu un contrat de livraison directe, d'AVOIR dit que ces amendements et l'offre tarifaire afférente devraient être proposés dans le délai de deux mois à compter de la signification de l'arrêt et devront être soumis au CoRDIS dans le même délai à compter de la notification de l'arrêt ; d'AVOIR enjoint à la société GRDF de verser à la société Direct Énergie une rémunération égale à celle qui sera fixée entre elles pour la gestion des clients en contrat unique avec effet à compter du 21 juin 2005 s'agissant du contrat d'accès au réseau public de distribution conclu avec la société, Poweo, et à compter du 21 novembre 2008, s'agissant de celui signé avec la société Direct Energie, avec intérêts au taux compter de la date de l'arrêt ;

AUX MOTIFS QUE : « Sur la question de la transposition au gaz de la solution donnée au différend relatif au contrat unique dans le secteur de l'électricité.
Il convient de rappeler que cette solution a été exprimée dans les termes suivants :
«le gestionnaire de réseaux de distribution ne peut, à travers une stipulation contractuelle, transférer sur un tiers ou un cocontractant, directement ou indirectement, tout ou partie [de ses obligations] » (décision du 7 avril 2008,).
Le contrat unique visé par l'article L.12192 du code de la consommation, «(...) n'a ni pour objet, ni pour effet de modifier les responsabilités contractuelles respectives du gestionnaire de réseaux, et du client final. Ce dernier bénéficie des mêmes droits et obligations que s'il avait conclu un contrat d'accès au réseau » et dès lors, « le rôle du fournisseur est celui d'un intermédiaire dûment missionné à cet effet par le client final et le gestionnaire de réseaux de distribution » .
La société GRDF soutient que la décision transposant ces principes au secteur du gaz constitue une erreur de droit.
Elle fait valoir qu'il existe des différences substantielles entre les deux types d'énergie, tant du fait de leurs caractéristiques propres, que de l'architecture contractuelle liant le gestionnaire de réseau au fournisseur et au consommateur.
S'agissant de la différence des caractéristiques propres aux deux énergies, elle soutient que le gaz ne serait, à la différence de l'électricité, pas un bien essentiel, et serait substituable par au moins une source d'énergie dans chacun de ses usages. Par ailleurs, le fournisseur ne serait pas chargé d'une mission de service public, il n'existerait pas de convention de concession de distribution publique, l'ouverture du marché du gaz serait plus grande que celle du marché de l'électricité. Elle ajoute que la qualification de « bien » pour l'électricité est une construction juridique qui n'existe pas en matière de gaz.
Concernant les différences des régimes contractuels liant ces parties, la société GRDF fait valoir d'une part que le tarif d'utilisation des réseaux de distribution d'électricité (le « TURPE Distribution ») est acquitté par le consommateur final, alors que pour le gaz naturel, le redevable du tarif ATRD est le fournisseur. Elle affirme que l'acheminement est réalisé pour le compte du fournisseur et non pour celui du consommateur, ce qui explique que n'est pas ce dernier qui doive payer le prix de cette prestation et que lorsque la CRE a fixé le niveau du tarif d'utilisation des réseaux publics de distribution de gaz naturel (l'ATRD), par sa délibération du 28 février 2012, elle n'a pas intégré le coût des factures impayées des consommateurs finals parmi ceux que couvre le tarif ATRD 4. Elle en déduit qu'il n'y a pas en matière gazière de représentation du fournisseur envers le distributeur et que le « contrat unique » n'a pas, en cette matière, le même sens qu'en matière d'électricité.
Sur ce dernier point elle ajoute dans son dernier mémoire en réplique que le schéma triangulaire du contrat unique (client final fournisseur gestionnaire de réseau) aurait été construit dans le secteur gazier sur des bases différentes de celles qui lui ont été données dans l'électricité. Pour l'électricité, le contrat unique serait un contrat demandé par les clients finals ayant quitté le tarif réglementé de vente et passé avec leur fournisseur pour couvrir à la fois l'accès au réseau et la fourniture, cela leur éviterait de contracter eux-mêmes avec le gestionnaire du réseau de distribution. En matière gazière, au contraire, et sauf à se trouver dans une situation où les clients finals peuvent conclure avec le GRD un contrat de livraison directe (CLD), les clients finals sont automatiquement liés au GRD par les conditions standard de livraison (CSL) qui sont jointes à leur contrat de fourniture, mais qui ne font pas partie de celui-ci et qui ne lient pas le fournisseur au gestionnaire de réseaux.
La société Direct Énergie objecte que les différences ainsi relevées sont inopérantes pour justifier que les principes régissant la répartition des obligations des parties en matière d'électricité ne puissent pas s'appliquer en matière de gaz. Elle soutient que les différences entre les schémas contractuels du gaz et de l'électricité résultent d'un choix de la société GRDF et non de l'application de dispositions réglementaires qui justifieraient qu'elle puisse transférer la charge des impayés sur les fournisseurs à l'inverse de ce qui a été décidé pour l'électricité.
La société ENI oppose que la société GRDF ne saurait tirer argument d'un contrat qu'elle impose aux fournisseurs, lesquels n'ont pas les moyens d'en négocier les termes.
Elle ajoute que la requérante s'appuie sur une interprétation fantaisiste de l'article 6 du décret n°2005123 du 14 février 2005 relatif à la contribution tarifaire sur les prestations de transport et de distribution d'électricité et de gaz naturel, pour soutenir que les GRD ou les fournisseurs seraient «redevables » de la CTA en matière de gaz alors que seul le consommateur en serait redevable en matière électrique. Elle conteste enfin l'argumentation relative à la construction contractuelle différente en matière de gaz et d'électricité dès lors que cette construction contractuelle a été décidée par le seul gestionnaire de réseau.
La CRE observe que le dispositif du contrat unique traite indifféremment les secteurs de gaz et de l'électricité et qu'il n'y a aucune distinction à opérer entre ces deux secteurs, en signant le contrat de fourniture, le client final conclut également les conditions standard de livraison. Il est donc lié à la fois au fournisseur et au gestionnaire de réseau.
La cour relève que la possibilité pour le consommateur de conclure un contrat unique lui permettant de disposer de la fourniture d'électricité ou de gaz acheminé jusqu'au point physique de sa consommation a été instaurée par le législateur dans l'article L.12192 du code de la consommation, qui précise que : « le fournisseur est tenu d'offrir au client la possibilité de conclure avec lui un contrat unique portant sur la fourniture et la distribution d'électricité ou de gaz naturel. Ce contrat reproduit les clauses réglant les relations entre le fournisseur et le gestionnaire de réseau, notamment les clauses précisant les responsabilités respectives de ces opérateurs.
Outre la prestation d'accès aux réseaux, le consommateur peut, dans le cadre du contrat unique, demander à bénéficier de toutes les prestations techniques proposées par le gestionnaire de réseau. Le fournisseur ne peut facturer au consommateur d'autres frais que ceux que le gestionnaire de réseau lui a imputés au titre d'une prestation ».
Cette disposition unique visant à la fois le gaz et l'électricité témoigne de ce que le législateur a considéré ces deux secteurs comme devant obéir à un schéma identique quelle que soit la source d'énergie concernée.
La société GRDF n'apporte aucun élément qui permettrait de justifier en quoi les différences de nature entre l'électricité et le gaz qu'elle décrit et qui ont été retranscrites dans les paragraphes précédents, ou le caractère uniquement juridique de la qualification de "bien" pour l'électricité, justifieraient que les principes relatifs à la répartition des droits et obligations entre le fournisseur et le gestionnaire de réseau soient différents selon la source d'énergie concernée. Elle ne démontre en particulier pas en quoi ces différences auraient des répercussions sur les relations qui s'établissent dans le cadre du contrat unique entre le gestionnaire de réseau, le fournisseur et le consommateur et les obligations ou les droits qui devraient s'en déduire.
Par ailleurs, si le schéma contractuel en matière gazière se distingue de celui existant en matière d'électricité, d'une part, en ce que le fournisseur de gaz naturel conclut dans tous les cas avec le distributeur un contrat d'acheminement (le CAD), d'autre part, en ce que le client qui opte pour le contrat de livraison directe signe deux contrats dont un avec la société gestionnaire de réseau, ce qui n'existe pas en matière d'électricité, ces différences ne justifient pas que les principes adoptés en matière d'électricité ne s'appliquent pas en matière de gaz.
En effet, sur le premier point, ainsi que l'a relevé à juste titre le CoRDIS, le fait que l'acheminement fasse l'objet d'un contrat entre le fournisseur et le gestionnaire de réseau n'en induit pas pour autant que le client final ne soit pas le bénéficiaire de cette prestation dont il profite.
Sur le second point, si certains clients dont la situation réclame une pression ou un débit particuliers ont la possibilité de conclure un contrat de livraison directe avec le GRD, il n'en demeure pas moins que lorsque le client signe un contrat unique, ce qui correspond à la majorité des situations des consommateurs individuels, ce contrat unique est négocié avec le seul fournisseur qui, dans ce cas, représente le gestionnaire de réseau. A ce sujet, il convient d'observer que les conditions générales du CAD comportent une annexe H définissant les modalités de collaboration entre le fournisseur et le GRD qui précisent qu'il existe entre eux un contrat de mandat par lequel le fournisseur fait accepter au client final les conditions de livraisons contractuelles (CSL)
du distributeur, recueille les réclamations, ainsi que toutes demandes de prestations dites mandatées, ainsi qu'un contrat de « mission », par lequel le fournisseur propose au client en son nom, mais pour le compte du GRD, les prestations commissionnées.
À ce sujet encore il convient de relever que si dans la configuration contractuelle relative au gaz naturel, le fournisseur ne représente pas le client final auprès du gestionnaire de réseau, puisque ce dernier remplit son obligation contractuelle, d'une part, envers le fournisseur aux termes du contrat d'acheminement, d'autre part, envers le consommateur en vertu des seules CSL qui constituent un contrat entre le client et le consommateur, il n'en demeure pas moins que ce schéma, qui résulte de la seule volonté de la société GRDF, n'est pas de nature à modifier la répartition des charges et obligations entre le fournisseur et le gestionnaire de réseau résultant de la possibilité, instaurée par le législateur pour les consommateurs de signer un contrat unique comprenant les prestations d'acheminement et de livraison d'un côté, celle de fourniture de l'autre.
En outre, si le gestionnaire du réseau gazier n'est pas investi expressément d'une « mission de service public », il est néanmoins en charge d'une telle mission et des obligations qui y sont liées, ainsi que cela ressort de l'article 13 de la loi du 9 août 2004 tel que modifié par la loi du 7 décembre 2006 qui prévoyait que « (...) Un gestionnaire de réseau de distribution d'électricité ou de gaz naturel est notamment chargé dans le cadre des cahiers des charges de concession et des règlements de service des régies (...)
4° d'assurer dans des conditions objectives, transparentes et non discriminatoires, l'accès à ces réseaux ; (
) » ou de l'article 13, I, du décret n° 2004251 du 19 mars 2004 « relatif aux obligations de service public dans le secteur du gaz » qui énonce que « Les opérateurs de réseaux de distribution prennent les dispositions appropriées pour assurer l'acheminement du gaz dans les conditions de continuité et de qualité définies par les textes réglementaires en vigueur, notamment par le présent décret ». Il s'en déduit que la société GRDF n'est pas fondée à contester être investie d'une mission de service public.
La société GRDF conteste encore la décision en ce que le CoRDIS a fondé sa démonstration de ce que le fournisseur agirait pour le compte du gestionnaire de réseau en s'appuyant sur le décret n°2005123 du 14 février 2005 relatif à la contribution tarifaire sur les prestations de transport et de distribution d'électricité et de gaz naturel, dont il dénaturerait le sens et la portée. Elle oppose que ce texte fiscal portant sur une taxe très spécifique visant au financement des pensions des agents des entreprises régulées du secteur d'activité, serait dépourvu de pertinence pour trois raisons.
Premièrement, la logique et l'autonomie du droit fiscal interdiraient d'en déduire des obligations contractuelles ; deuxièmement, le décret désignerait comme redevables, selon les cas, les GRD ou les fournisseurs et non les clients finals ; troisièmement enfin, il reviendrait à dénaturer le décret que de soutenir qu'il en résulte que les impayés doivent être refacturés aux GRD par les fournisseurs.
Toutefois, la cour relève à ce sujet que la référence ainsi faite au décret du 14 février 2005 vient compléter le motif selon lequel il ressort des termes du décret du 19 mars 2004, précédemment transcrits, qu'il appartient au gestionnaire de réseaux de distribution d'acheminer le gaz jusqu'au point de livraison du client final, ce dont le CoRDIS déduit que le bénéficiaire de la prestation d'acheminement est le client final et non le distributeur. En tout état de cause, l'illustration de cette qualité de bénéficiaire de la prestation d'acheminement par la référence à l'article 3, I, du décret du 14 février est fondée, dans la mesure où cette disposition montre que le client final, qui est le contribuable de la taxe, la paie au gestionnaire de réseau, qui en est le redevable, lorsqu'il est lié à celui-ci par un contrat de livraison directe. Cette analyse est confirmée par la situation analogue du client qui a conclu un contrat unique et qui verse la CTA au fournisseur par le paiement de la facture que celui-ci lui adresse, de même que par celle du consommateur demeuré client du fournisseur historique qui paie la CTA par la facture.
Enfin, le fait que le tarif ATRD4, validé par la CRE dans sa décision du 28 février 2012, n'ait pas pris en compte le coût des impayés ne peut justifier que ceux-ci soient pris en charge par le fournisseur, dans la mesure où ces tarifs sont établis sur la base des éléments comptables et les dépenses prévisionnelles présentées par la société GRDF elle-même à la CRE, ainsi que le précise l'article L. 4522 du code de l'énergie, et l'indique la délibération de la CRE du 28 février 2012.
Sur l'application du principe selon lequel le gestionnaire du réseau public de distribution ne peut imposer aux fournisseurs des stipulations dans le contrat d'acheminement sur le réseau visant à les rendre redevables en son nom et pour son compte du paiement du tarif ATRD et de toute autre somme non couverte par ce tarif Il résulte des développements qui précèdent que, comme l'a relevé à juste titre le CoRDIS, le contrat unique prévu par l'article 12192 du code de la consommation a pour objectif de simplifier pour le consommateur le dispositif de souscription des contrats en dispensant le client final de conclure directement et parallèlement à son contrat de fourniture un contrat d'accès au réseau public de distribution, ce qu'il fait d'ailleurs au demeurant par l'intermédiaire du fournisseur.
En conséquence, la fonction de mandataire assumée par les fournisseurs, dans le cadre du mécanisme contractuel décrit ci-dessus, n'a pas pour objet et ne peut avoir pour effet de modifier les responsabilités respectives du gestionnaire de réseaux, du fournisseur et du client final telles qu'elles découlent de la loi et des textes pris pour son application.
Ainsi, le gestionnaire de réseau ne peut, sous couvert de la mission confiée au fournisseur auprès du client dans le cadre de la signature du contrat unique, imposer au seul fournisseur de supporter l'intégralité du risque d'impayés qui s'attache à l'exercice par le gestionnaire de sa mission de service public. La cour relève à ce sujet et à titre surabondant que la société GRDF ne démontre pas que, comme elle l'affirme, les gestionnaires de réseaux d'acheminement et de distribution de gaz naturel des autres pays européens ne supportent pas les risques d'impayés de la part des clients finaux [
]
Sur la détermination des conditions financières des prestations d'intermédiation rendues par le fournisseur pour le compte du gestionnaire de réseau dans le cadre du contrat unique.
La société Direct Énergie demande la réformation de la décision du CoRDIS en ce qu'il a rejeté sa demande visant à ce qu'il détermine la rémunération des prestations qu'elle rend aux clients finals pour GRDF, lorsqu'elles sont imposées par la réglementation, et à ce qu'il reconnaisse l'illégalité des clauses imposant au fournisseur de réaliser des peines et soins dans le cas des CLD.
Elle soutient que tout en reconnaissant que la réalisation de ces prestations de service constituait bien une condition d'accès au réseau de distribution, la question de la qualification de la nature des conventions liant un gestionnaire de réseau et un fournisseur étant une problématique indépendante, le Comité aurait refusé de trancher le différend et d'en préciser les conditions d'ordre financier.
Elle précise qu'il ressort de l'article L. 13420 du code de l'énergie qu'en matière de règlement des différends entre un gestionnaire de réseau et un fournisseur portant sur l'accès au réseau, le CoRDIS est compétent et a même l'obligation de le trancher conformément aux règles de droit en vigueur et de préciser les conditions d'ordre financier de l'accès au réseau. Elle fait valoir que le différend portait bien sur une modalité d'accès au réseau de distribution de gaz naturel, puisque cet accès serait conditionné à la réalisation des prestations en cause.
Elle ajoute que contrairement à ce qu'a retenu le CoRDIS, les prestations de services réalisées par elle-même pour GRDF ne dépendent pas d'une qualification juridique de la relation entre les parties.
La société Direct Énergie soutient encore que le Comité a commis une erreur de droit en écartant sa demande relative aux peines et soins rendus aux clients finals ayant conclu un CLD aux motifs qu'elle n'apportait pas d'éléments suffisants permettant d'en apprécier le bien-fondé, alors qu'elle lui demandait d'indiquer que dans ce cas GRDF ne saurait lui imposer de fournir des prestations d'intermédiation et donc de fixer les conditions financières des prestations rendues à un montant équivalent à celui retenu pour les contrats en CSL.
Sur la détermination des conditions financières relatives aux prestations rendues par elle pour la société GRDF dans le cadre du contrat unique, la société Direct Energie expose que le CoRDIS ayant fait droit à sa demande tendant à ce que soit reconnue l'obligation pour GRDF de supporter les charges financières liées à l'exécution de son activité de service public, celle-ci doit en conséquence, supporter, au moins partiellement, les coûts des prestations de services rendues par les fournisseurs et qui sont nécessaires pour l'accès au réseau, à savoir, en l'espèce, les prestations dites de peines et soins consistant en la gestion de clientèle quant aux problématiques liées à la distribution et non à la fourniture. Elle indique qu'une telle obligation imposée à GRDF serait parfaitement similaire aux obligations imposées à ERDF à son égard, dans sa décision du 22 octobre 2010, rendue dans le cadre d'un différend les opposant, confirmée par la cour d'appel en 2011.
Elle précise que la méthode admise par la CRE consiste en un plafonnement des coûts supportés par le fournisseur pour traiter un « client énergie » au montant de la commission de gestion qu'ERDF perçoit au titre du TURPE pour traiter les clients disposant d'un contrat d'accès direct au réseau de distribution électrique (CARD). Cette commission de gestion correspond aux coûts que supporte ERDF pour traiter les charges de facturation, des demandes de modifications du contrat d'accès au réseau (modification de la puissance par exemple) et des services de recouvrement (hors impayés) et qui sont connues sous le nom de composante de gestion basse tension. Elle propose que sa commission soit du même montant que celui retenu par la CRE.
La société ENI soutient que le CoRDIS est compétent pour se prononcer sur la validité des stipulations du CAD en vertu des dispositions des articles L. 1311, alinéa 3, et L.13420, alinéas 2 et 3, du code de l'énergie. Elle ajoute que dans sa délibération du 26 juillet 2012, la CRE saisie de la question en matière d'électricité a considéré que la rémunération convenue entre les sociétés Direct Energie et ERDF respectait les principes généraux du droit de la concurrence et du code l'énergie et a souligné que « (...) Le projet de contrat (...)pour la gestion de clientèle en contrat unique pourrait être conclu avec d'autres opérateurs (fournisseurs nouveaux entrants) placés dans une situation comparable à la société Poweo Direct Energie aux regards de leurs coûts de gestion de clientèle et de leur base de clients "énergie" ». Elle estime que cette décision a fixé un référentiel en tout point transposable au gaz.
La société GRDF oppose que le CoRDIS n'est pas le juge des contrats de représentation passés entre les GRD et les fournisseurs. Elle ajoute que parmi les textes réglementaires, qui s'imposent par définition à tous les opérateurs, figure la délibération du collège de la CRE qui, en vertu de l'article L.4523 du code de l'énergie, fixe le tarif d'accès aux réseaux en fonction de l'ensemble des coûts supportés par le gestionnaire, que le tarif doit couvrir. Elle fait observer que l'article 1er du décret n°200522 du 11 janvier 2005 relatif aux règles de tarification pour l'utilisation des réseaux publics de distribution de gaz naturel énumère les charges d'exploitation prises en compte dans la fixation des tarifs d'utilisation des réseaux publics de distribution de gaz naturel et ne mentionne nullement les impayés des clients finals à l'égard des fournisseurs, de même que le tarif ATRD 4 qui constitue l'essentiel de ses recettes. Elle précise que la raison de cette situation se trouve dans le fait que ces actes réglementaires traduisent la relation entre le fournisseur et le GRD, d'une part, le fournisseur et le consommateur d'autre part. Ainsi selon elle, c'est le fournisseur qui fait acheminer le gaz dans le réseau de distribution, pour livraison à son client. Seul le fournisseur est engagé vis-à-vis de GRDF au titre de l'acheminement, non le client final, la circonstance qu'il en aille différemment en électricité étant indifférente.
Elle objecte encore que le CoRDIS n'a pas compétence pour remettre en cause le tarif ATRD, et donc un acte réglementaire, au travers du règlement d'un différend.
Par ailleurs, la société GRDF oppose que la rémunération des fournisseurs au titre du contrat unique ne constitue pas une « modalité d'accès au réseau». Bien au contraire, la compétence tarifaire et la détermination de l'équilibre financier du contrat d'acheminement appartient au collège de la CRE.
La société GRDF précise encore qu'elle ignore le contenu du contrat GRDF qui a été négocié entre les sociétés Direct Energie et ERDF. Elle observe que ce contrat ne concerne que les prestations sous contrat unique d'électricité et que la société GRDF se borne à lancer des chiffres allusifs sans les mettre en relation ni avec la réalité économique du secteur gaz ni avec les coûts qu'elle prétend supporter à tort dans le cas où le client ne choisit pas le contrat unique. Elle objecte qu'à supposer que la CRE ait approuvé le contrat GRDF et admis une rémunération pour la société Direct Energie du même montant que la composante de gestion basse tension du TURPE, la cour ne dispose d'aucun élément pour vérifier ces dires. La société GRDF ajoute qu'il n'est pas possible de transposer purement et simplement ce montant sans entrer dans l'analyse du tarif ATRD 4 de GRDF et ce d'autant plus que Direct Energie ne fournirait aucun élément chiffré.
S'agissant des CLD, la société GRDF objecte que la société Direct Énergie n'assure aucune prestation à son bénéfice dans ce schéma. Elle précise que si elle facture au fournisseur l'accès au réseau et l'acheminement du gaz, ce serait parce qu'il s'agit précisément de la contrepartie d'une prestation offerte par elle au fournisseur et non d'une prestation offerte par celui-ci à des clients. Contrairement à ce que soutient Direct Energie, la situation est différente de celle qui prévaut dans le secteur électrique : il n'existe pas de contrat d'acheminement d'électricité puisque ledit acheminement est réputé instantané et que les producteurs se voient facturer l'accès au réseau par leur gestionnaire de réseau.
Elle soutient qu'il n'est pas possible ni pour le CoRDIS, ni pour la cour d'appel de lui imposer de reproduire dans ses contrats d'acheminement des clauses d'un contrat relatif à d'autres prestations que les siennes, réalisées sur un autre marché que celui où elle intervient, et dont seule une partie à l'instance connaîtrait le contenu.
La CRE observe que le CoRDIS n'est pas compétent pour fixer le niveau tarifaire des prestations effectuées par le fournisseur pour le compte du GRD dans le cadre d'une relation de représentation, dès lors qu'il ne lui appartient pas de qualifier, parmi les différents modes de représentation juridique, la relation contractuelle entre le gestionnaire de réseau et les clients finals. Selon elle, seules les parties peuvent déterminer les contours qu'elles souhaitent donner à leur relation contractuelle d'intermédiation et, le cas échéant, en fixer les conditions dans le respect des règles législatives et réglementaires qui s'imposent à elles. En l'absence d'accord entre les parties, il leur revient de saisir le juge du contrat afin qu'il puisse procéder à la qualification du lien juridique. Cette détermination de la nature juridique de l'accord de représentation entre le fournisseur et le GRD est un préalable nécessaire à l'éventuelle étude de ses conditions financières.
Elle ajoute que la compétence du CoRDIS est distincte de celle du collège de la Commission et qu'il est dès lors indifférent de soulever que la Commission s'est prononcée sur la rémunération du fournisseur pour l'accomplissement des prestations rendues par les fournisseurs d'électricité dans le cadre de la distribution d'électricité par une délibération du 26 juillet 2012, d'autant que dans le cadre de cette délibération, la CRE n'a pas fixé la rémunération.

Il résulte de l'article L. 13419 du code de l'énergie que le CoRDIS peut être saisi en cas de différend entre les opérateurs et les utilisateurs des ouvrages de transport et de distribution de gaz naturel et que ces différends peuvent porter sur l'accès auxdits réseaux, ouvrages et installations ou sur leur utilisation, notamment en cas de refus d'accès ou de désaccord sur la conclusion, l'interprétation ou l'exécution des contrats.
L'article 13420 du même code précise que la décision du Comité, qui peut être assortie d'astreintes, est motivée et précise les conditions d'ordre technique et financier de règlement du différend dans lesquelles l'accès aux réseaux, ouvrages et installations mentionnés à l'article L. 13419 ou leur utilisation sont, le cas échéant, assurés.
Il se déduit de ces dispositions que le Comité est compétent pour trancher les désaccords sur l'interprétation et l'exécution des contrats liant le gestionnaire de réseau public de transport et de distribution de gaz naturel, les fournisseurs et les clients finals. Dans ce cadre, il a compétence, sous le contrôle de la cour d'appel de Paris, pour préciser comment doivent s'organiser les relations entre ces parties, ainsi que les conditions d'ordre technique mais aussi financières dans lesquelles l'accès aux réseaux, ouvrages et installations ou leur utilisation sont assurés. Ces attributions sont distinctes des questions de responsabilité qui pourraient survenir entre elles et qui ressortent de la seule compétence des juridictions, ainsi que l'a relevé la cour d'appel de Paris dans un arrêt du 8 novembre 2012 (RG n° 2011/20346) cité par la CRE dans ses observations. Il importe par ailleurs peu au regard de ces dispositions que le différend porte sur l'accès au réseau ou sur son utilisation.
En l'espèce, le CoRDIS a tranché le différend des sociétés Direct Énergie et GRDF sur les questions de savoir sur laquelle d'entre elles devait reposer la charge, d'une part, des impayés par les clients finals du tarif ATRD, d'autre part, de sommes dues au titre de différentes prestations réalisées dans le cadre de la gestion de la clientèle ou de difficultés liées à l'utilisation du réseau, dans le cadre du contrat unique ou du contrat direct. Il était compétent en application du texte précité pour préciser quelles étaient les conditions financières de ces prestations liées à l'accès et à l'utilisation du réseau Contrairement à ce qu'il a retenu, le CoRDIS n'avait à ce sujet nul besoin de définir quelle était la qualification du contrat par lequel la société fournisseur agissait envers le gestionnaire de réseau auprès du client final, mais simplement de préciser quelles prestations étaient concernées et de fixer une méthode de calcul de la rémunération du fournisseur lorsqu'il agit pour le compte du gestionnaire de réseau auprès du client final.
Il ne saurait être fait obstacle à cette compétence prévue par le législateur au motif qu'elle pourrait avoir pour effet de remettre en cause le tarif d'accès des tiers au réseau (ATRD) validé par la CRE au regard des coûts présentés par la société gestionnaire du réseau.
Pour autant, le CoRDIS ne pouvait fixer les conditions financières en cause ab initio et sans que la société Direct Energie lui fournisse les éléments lui permettant de se prononcer.
Sur les CSL ou contrat unique, il est exact qu'il résulte du principe énoncé par la décision selon lequel le contrat unique ne peut avoir pour objet ou effet de faire supporter au seul fournisseur les sommes correspondant à la mission de distribution dévolue au gestionnaire de réseaux publics, que la société GRDF doit supporter, au moins partiellement, les coûts des prestations de services rendues par les fournisseurs nécessaires pour l'accès au réseau. La société Direct Energie précise que ces prestations sont celles de peines et soins consistant dans la gestion de clientèle « quant aux problématiques liées à la distribution et non à la fourniture ».
Ainsi qu'elle le souligne, les prestations accomplies par elle pour le compte de la société GRDF dans le cadre du contrat unique sont détaillées dans le contrat d'acheminement, d'une part, dans l'article 1er de l'annexe H intitulé « Accord de représentation », par lequel le GRD qualifié de mandant confie au fournisseur qualifié de mandataire une liste de huit prestations envers les clients finals, d'autre part, dans l'article 5 de ce même accord précisant les « prestations mandatées » et dans l'article de la même annexe qui sous l'intitulé « contrat de commission » précise une liste de cinq prestations que le fournisseur doit accomplir en application de l'article 6.
S'agissant de la détermination des conditions financières relatives aux prestations ainsi rendues pour GRDF dans le cadre du contrat unique, la société Direct Energie soutient àjuste titre qu'il découle du principe selon lequel le contrat unique ne peut avoir pour effet de faire supporter au seul fournisseur les sommes correspondant à la mission de distribution dévolue au gestionnaire de réseaux de distribution, que la société GRDF doit supporter, au moins en partie, les coûts des prestations de service rendues par les fournisseurs. Ces prestations sont relatives à la gestion de clientèle quant aux problématiques liées à la distribution, et non à la fourniture, et sont dites «de peines et soins ».
Elle ne fait toutefois qu'affirmer sans en apporter la démonstration que ces obligations sont identiques à celles imposées à ERDF à l'égard des fournisseurs et ni le CoRDIS ni aujourd'hui la cour ne disposent d'éléments qui justifieraient d'appliquer s'agissant des prestations de peines et soins en matière de distribution de gaz le tarif annuel de 33,72 euros fixé au titre de la composante de gestion pour un client basse tension bénéficiant des contrat d'accès direct au réseau de distribution électrique.
Cependant, ainsi qu'elle le soutient, le rejet de toutes ses prétentions en matière de détermination tarifaire aboutit à laisser perdurer une situation illégale lui laissant la charge des l'intégralité des prestations accomplies pour le seul compte de la société GRDF, en violation du principe précédemment rappelé et il sera enjoint à la société GRDF dans les conditions précisées infra de proposer une tarification équitable de ces services.
Sur le CLD La société Direct Énergie soutient à juste titre que le principe affirmé par le CoRDIS, selon lequel il appartient au gestionnaire de réseau de distribution de gaz naturel de supporter l'intégralité du risque qui s'attache à l'exercice de sa mission de service public, implique qu'il soit précisé, comme elle le demandait à ce comité, que le gestionnaire de réseau ne peut imposer au fournisseur, sans rémunération, des charges dans le cadre de la conclusion d'un contrat de livraison directe. Il n'était pas nécessaire à ce stade que la société Direct Energie apporte la démonstration que tel était bien le cas dès lors que l'article 17 du contrat de livraison directe énonce que « Les prestations de base du catalogue des Prestations sont couvertes par le tarif d'acheminement » et que la société GRDF ne conteste pas que l'acheminement est facturé au fournisseur et non au client final.
S'agissant du montant de la rémunération de tels services, la cour renvoie à sa motivation précédente relative au contrat unique. Le CoRDIS ne pouvait faute d'élément d'appréciation tangible se prononcer sur ce point et la cour ne le peut pas davantage.
Cependant, et de même que cela a été précédemment précisé pour le contrat unique, le rejet de toutes les prétentions de la société Direct Énergie en matière de détermination tarifaire aboutit à laisser perdurer une situation illégale laissant à la charge des fournisseurs l'intégralité des prestations accomplies pour le seul compte de la société GRDF, en violation du principe précédemment rappelé et il sera enjoint à la société GRDF dans les conditions précisées infra de proposer une tarification équitable de ces services Sur l'illégalité de la décision du CoRDIS en ce qu'elle laisse à la charge du fournisseur la réalisation de prestations de peines et soins sans rémunération Compte tenu des principes énoncés par le ÇoRDIS, dont l'analyse est validée par la cour, il convient, ainsi que le demande la société Direct Energie, de ne pas laisser perdurer les clauses laissant à la charge du fournisseur la réalisation de prestations de peines et soins sans rémunération.
En conséquence, il y a lieu d'enjoindre à la société GRDF de proposer un avenant au contrat d'accès prévoyant, d'une part, la mise en conformité de cette convention aux principes énoncés ci-dessus, d'autre part, une rémunération équitable et proportionnée au regard des coûts évités par elle des prestations accomplies pour son compte auprès des clients.
À ce titre, le gestionnaire de réseau devra introduire dans l'avenant des clauses réputant non écrites les dispositions des contrats contraires aux principes énoncés ci-dessus et il devra aussi préciser que la société GRDF ne peut imposer au fournisseur d'accomplir des prestations relevant de ses missions de service, sans lui offrir une juste et équitable rémunération couvrant les coûts évités par lui.
Dès lors, il sera enjoint à la société GRDF, s'agissant des contrats CAD, de mettre ces conventions en conformité avec les principes sus énoncés, dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, en proposant à la société Direct Énergie un avenant à ce contrat d'accès au réseau prévoyant que :
Sont réputées n'avoir jamais existé entre les parties parce que contraires au code de l'énergie les clauses du contrat d'accès signé avec la société Poweo le 21 juin 2005 et du contrat d'accès conclu avec la société Direct Énergie le 21 novembre 2008 :

• subordonnant l'accès à ce contrat à l'acceptation par le fournisseur de la prestation d'intermédiation et qui vont au-delà de ce qu'exige la seule signature des CSL par le client lorsque celui-ci souhaite un contrat unique ;

• imposant au fournisseur de rendre des prestations à la société GRDF dont il ne pouvait à tout le moins négocier le prix ou les conditions de réalisation, notamment, lorsque le client n'est pas en contrat écrit ;

Une rémunération équitable et proportionnée au regard des coûts évités par elle des prestations accomplies pour son compte auprès des clients.

La même injonction sera prononcée au bénéfice de la société ENI concernant les clauses identiques contenues dans le contrat conclu entre elle et la société GRDF.
S'agissant du CLD, ilsera précisé que la société GRDF ne peut conditionner l'accès au réseau de distribution à la réalisation de prestations non rémunérées par un tarif équitable et proportionné au regard des coûts évités par elle, auprès des clients finals ayant conclu un CLD.
S'agissant des prestations déjà rendues, il sera enjoint à la société GRDF de verser à la société Direct Energie une rémunération égale à celle qui sera fixée entre elles pour la gestion des clients en contrat unique avec effet à compter du 21 juin 2005 s'agissant du contrat d'accès au réseau public de distribution conclu avec la société Poweo, et à compter du 21 novembre 2008, s'agissant de celui signé avec la société Direct Energie, avec intérêts au taux légal à compter de la date de l'arrêt » ;

ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE : « Sur les stipulations du contrat d'acheminement sur le réseau de distribution de gaz naturel tendant à ce qu'elles rendent le fournisseur redevable en son nom et pour son compte, du paiement du tarif ATRD et de toute autre somme non couverte par le tarif.
La société Poweo Direct Energie demande au comité de règlement des différends et des sanctions de déclarer contraires à la réglementation sectorielle toutes les stipulations du contrat d'acheminement sur le réseau de distribution de gaz naturel tendant à ce qu'elles rendent le fournisseur redevable en son nom et pour son compte du paiement du tarif d'utilisation des réseaux de distribution de gaz naturel et de toute autre somme non couverte par ce tarif.
L'article L. 11197 du code de l'énergie énonce qu'un « droit d'accès aux ouvrages [
]
de distribution de gaz naturel [
] est garanti par les opérateurs qui les exploitent aux clients ainsi qu'aux fournisseurs et à leurs mandataires, dans des conditions définies par contrat ».
L'article L. 12192 du code de la consommation prévoit que « Le fournisseur est tenu d'offrir au client la possibilité de conclure avec lui un contrat unique portant sur la fourniture et la distribution d'électricité ou de gaz naturel. Ce contrat reproduit en annexe les clauses réglant les relations entre le fournisseur et le gestionnaire de réseau, notamment les clauses précisant les responsabilités respectives de ces opérateurs Outre la prestation d'accès aux réseaux, le consommateur peut, dans le cadre du contrat unique, demander à bénéficier de toutes les prestations techniques proposées par le gestionnaire du réseau. Le fournisseur ne peut facturer au consommateur d'autres frais que ceux que le gestionnaire du réseau lui a imputés au titre d'une prestation ».
En instituant le contrat unique, le législateur a entendu simplifier le dispositif de souscription des contrats, en dispensant le client final de conclure directement et parallèlement à son contrat de fourniture, un contrat d'accès au réseau avec le gestionnaire du réseau public de distribution. Il résulte des travaux préparatoires de la loi n°20038 du 3 janvier 2003 relative aux marchés du gaz et de l'électricité et au service public de l'énergie, qui a modifié la loi n°2000108 du 10 février 2000 relative à la modernisation et au développement du service public de l'électricité, que la mise en oeuvre du contrat unique a pour but de permettre la conclusion, par les fournisseurs, de contrats d'accès au réseau au nom et pour le compte de leurs clients.
Dès lors, le contrat unique n'a pas pour objet et ne pourrait avoir pour effet de modifier les responsabilités respectives du gestionnaire de réseaux, du fournisseur et du client final, telles qu'elles découlent de la loi et des textes pris pour son application.
Il en résulte que les droits et obligations du gestionnaire de réseaux à l'égard du fournisseur ne peuvent, sous couvert de la mission confiée au fournisseur auprès du client dans le cadre de la conclusion du contrat unique, être aménagés de telle sorte qu'ils aboutiraient à faire supporter au seul fournisseur l'intégralité d'un risque qui s'attache à l'exercice par le gestionnaire de réseaux de sa mission de service public.
Le contrat unique visé par l'article L. 12192 du code de la consommation doit s'analyser comme permettant au consommateur de conclure, d'une part, un contrat de fourniture avec le fournisseur de son choix et, d'autre part, un contrat de « distribution » avec le gestionnaire de réseaux de distribution pour l'acheminement et la livraison du gaz jusqu'à son point de livraison.
Contrairement à ce que soutient la société GRDF, la notion de «distribution » visée par les dispositions de l'article L. 12192 du code de la consommation doit s'analyser à la lumière de la définition de la « distribution», donnée par la directive 2009/73/CE du Parlement Européen et du Conseil du 13 juillet 2009 concernant des règles communes pour le marché intérieur du gaz naturel et abrogeant la directive 2003/55/CE. Selon l'article 2 point 5 de la directive précitée, la « distribution » doit s'entendre comme « le transport de gaz naturel par l'intermédiaire de réseaux locaux ou régionaux de gazoducs aux fins de fourniture à des clients, mais ne comprenant pas la fourniture ».
L'article 13 du décret n°2004251 du 19 mars 2004 relatif aux obligations de service public dans le secteur du gaz énonce que « I. Les opérateurs de réseaux de distribution prennent les dispositions appropriées pour assurer l'acheminement du gaz dans les conditions de continuité et de qualité définies par les textes réglementaires en vigueur, notamment par le présent décret ».
Ainsi, il ressort des termes du décret du 19 mars 2004, qu'il appartient au gestionnaire de réseaux de distribution d'acheminer ce gaz jusqu'au point de livraison du client final.
En outre, l'article 7 du décret n°2005123 du 14 février 2005 relatif à la contribution tarifaire sur les prestations de transport et de distribution d'électricité et de gaz naturel dispose que « I. Lorsqu'un [
] gestionnaire de réseau public de distribution de gaz naturel facture à un consommateur final ayant exercé son éligibilité l'utilisation des réseaux, il collecte le montant de la contribution tarifaire correspondante par prélèvement sur le montant hors taxes facturé ». Le gestionnaire de réseaux de distribution de gaz naturel peut donc facturer directement l'utilisation du réseau au consommateur final ayant souscrit une offre de marché.
Par conséquent, au regard tant des dispositions de l'article L. 12192 du code de la consommation que des dispositions précitées du décret du 14 février 2005 et du 19 mars 2004, la mission d'acheminement dévolue au gestionnaire de réseaux de distribution s'effectue pour le compte du client final et non pour le compte de son fournisseur.
Dès lors, le gestionnaire du réseau public de distribution ne peut imposer aux fournisseurs des stipulations dans le contrat d'acheminement sur le réseau de distribution de gaz naturel visant à le rendre redevable en son nom et pour son compte, du paiement du tarif ATRD et de toute autre somme non couverte par ce tarif.
La société GRDF devra, en conséquence, mettre en conformité les clauses du contrat d'acheminement sur le réseau de distribution de gaz naturel avec ce qui précède.
Sur le reversement au gestionnaire de réseau des sommes perçues au titre de l'utilisation du réseau par le fournisseur La société Poweo Direct Energie demande, au comité, de dire que « pour reverser au gestionnaire de réseau les sommes perçues au titre de l'utilisation du réseau, le fournisseur doit les avoir préalablement recouvrées auprès du client final ».
L'article 7 du décret n°2005123 du 14 février 2005 relatif à la contribution tarifaire sur les prestations de transport et de distribution d'électricité et de gaz naturel énonce que « le fournisseur de gaz naturel reverse aux gestionnaires de réseaux de transport et de distribution avec lesquels il a conclu des contrats d'accès aux réseaux pour l'alimentation de ses clients le montant facturé à ces derniers au titre de l'utilisation des réseaux, déduction faite du montant de la contribution tarifaire correspondante ».
Il résulte de ces dispositions et de l'ensemble de ce qui précède, notamment de ce que la mission d'acheminement dévolue au gestionnaire de réseaux de distribution est réalisée pour le compte du client final, que pour reverser au gestionnaire de réseaux les sommes dues au titre de l'utilisation du réseau, le fournisseur doit les avoir préalablement recouvrées auprès du client final. Il ne peut en être autrement que dans les cas où le fournisseur n'a pas effectué toutes les diligences requises pour recouvrer les sommes concernées, en particulier celles prévues par le décret n° 2008780 du 13 août 2008 relatif à la procédure applicable en cas d'impayés des factures d'électricité, de gaz, de chaleur et d'eau [
] Sur la demande d'injonction tendant à ce que la société GRDF mette en conformité le contrat d'acheminement sur le réseau de distribution de gaz naturel et ses annexes Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que la société GRDF devra proposer à la société POWEO DIRECT ENERGIE un nouveau contrat d'acheminement sur le réseau de distribution de gaz naturel conforme aux principes rappelés dans la présente décision selon lesquels ce contrat, s'agissant des clients en contrat unique, ne peut avoir pour objet ou pour effet de faire supporter au seul fournisseur les sommes correspondants à la mission de distribution dévolue au gestionnaire de réseaux de distribution.
En outre, pour reverser au gestionnaire de réseaux de distribution de gaz naturel, les sommes perçues au titre de l'utilisation du réseau, le fournisseur doit les avoir préalablement recouvrées auprès du client final.
La société GRDF devra transmettre à la société POWEO DIRECT ENERGIE ce nouveau contrat d'acheminement sur le réseau de distribution de gaz naturel dans un délai de six mois à compter de la notification de la présente décision. A défaut de parvenir à un accord sanctionné par la signature du nouveau contrat d'acheminement sur le réseau de distribution de gaz naturel, les parties pourront saisir à nouveau le comité de règlement des différends et des sanctions pour apprécier la conformité du nouveau projet de contrat aux principes de la présente décision » ;

ALORS QUE délaissant purement et simplement le moyen de GRDF selon lequel le CoRDIS ne pouvait remettre en cause les stipulations contractuelles convenues entre la société GRDF et les fournisseurs, qu'elles portent sur le sort des sommes impayées par le consommateur final ou sur de prétendues prestations fournies par le fournisseur au bénéfice de la société GRDF, stipulations que le président du « groupe de travail gaz » (GTG), instance de négociation des contrats d'acheminement à laquelle participent les gestionnaires de réseaux de distribution, et les fournisseurs, sous l'égide de la CRE, avait invité les fournisseurs à signer, la cour d'appel a privé sa décision de tout motif en violation de l'article 455 du code de procédure civile.

QUATRIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR confirmé la décision du CoRDIS en ce qu'elle a dit que la société GRDF devrait transmettre à la société Poweo Direct Energie un nouveau contrat d'acheminement sur le réseau de distribution de gaz naturel dans un délai de six mois à compter de la notification de la décision conforme aux principes selon lequel le fournisseur ne saurait être redevable du paiement des sommes dues au GRD par le client final et selon lequel le risque d'impayé devrait être supporté par le GRD ; d'AVOIR enjoint à la société GRDF de mettre ses contrats d'acheminement sur le réseau de distribution en conformité avec les principes énoncés par la décision, dans le délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt, en proposant à la société Direct Energie et à la société ENI un avenant à ce contrat d'accès au réseau prévoyant que sont réputées n'avoir jamais existé entre les parties parce que contraires au code de l'énergie les clauses du contrat d'accès signé entre elles, subordonnant l'accès à ce contrat à l'acceptation par le fournisseur de la prestation d'intermédiation et qui vont au-delà de ce qu'exige la seule signature des CSL par le client lorsque celui-ci souhaite un contrat unique, et imposant au fournisseur de rendre des prestations à la société GRDF dont il ne pouvait à tout le moins négocier le prix ou les conditions de réalisation, notamment, lorsque le client n'est pas en contrat écrit, une rémunération équitable et proportionnée au regard des coûts évités par elle des prestations accomplies pour son compte auprès des clients ; d'AVOIR dit que la société GRDF ne pourrait conditionner l'accès au réseau de distribution à la réalisation de prestations non rémunérées par un tarif équitable et proportionné au regard des coûts évités par elle, auprès des clients finals ayant conclu un contrat de livraison directe, d'AVOIR dit que ces amendements et l'offre tarifaire afférente devraient être proposés dans le délai de deux mois à compter de la signification de l'arrêt et devront être soumis au CoRDIS dans le même délai à compter de la notification de l'arrêt ; d'AVOIR enjoint à la société GRDF de verser à la société Direct Énergie une rémunération égale à celle qui sera fixée entre elles pour la gestion des clients en contrat unique avec effet à compter du 21 juin 2005 s'agissant du contrat d'accès au réseau public de distribution conclu avec la société, Poweo, et à compter du 21 novembre 2008, s'agissant de celui signé avec la société Direct Energie, avec intérêts au taux compter de la date de l'arrêt ;

AUX MOTIFS QUE : « Sur la question de la transposition au gaz de la solution donnée au différend relatif au contrat unique dans le secteur de l'électricité.
Il convient de rappeler que cette solution a été exprimée dans les termes suivants : «le gestionnaire de réseaux de distribution ne peut, à travers une stipulation contractuelle, transférer sur un tiers ou un cocontractant, directement ou indirectement, tout ou partie [de ses obligations] » (décision du 7 avril 2008,).
Le contrat unique visé par l'article L.12192 du code de la consommation, «(...) n'a ni pour objet, ni pour effet de modifier les responsabilités contractuelles respectives du gestionnaire de réseaux, et du client final. Ce dernier bénéficie des mêmes droits et obligations que s'il avait conclu un contrat d'accès au réseau » et dès lors, « le rôle du fournisseur est celui d'un intermédiaire dûment missionné à cet effet par le client final et le gestionnaire de réseaux de distribution » .
La société GRDF soutient que la décision transposant ces principes au secteur du gaz constitue une erreur de droit.
Elle fait valoir qu'il existe des différences substantielles entre les deux types d'énergie, tant du fait de leurs caractéristiques propres, que de l'architecture contractuelle liant le gestionnaire de réseau au fournisseur et au consommateur.
S'agissant de la différence des caractéristiques propres aux deux énergies, elle soutient que le gaz ne serait, à la différence de l'électricité, pas un bien essentiel, et serait substituable par au moins une source d'énergie dans chacun de ses usages. Par ailleurs, le fournisseur ne serait pas chargé d'une mission de service public, il n'existerait pas de convention de concession de distribution publique, l'ouverture du marché du gaz serait plus grande que celle du marché de l'électricité. Elle ajoute que la qualification de « bien » pour l'électricité est une construction juridique qui n'existe pas en matière de gaz.
Concernant les différences des régimes contractuels liant ces parties, la société GRDF fait valoir d'une part que le tarif d'utilisation des réseaux de distribution d'électricité (le « TURPE Distribution ») est acquitté par le consommateur final, alors que pour le gaz naturel, le redevable du tarif ATRD est le fournisseur. Elle affirme que l'acheminement est réalisé pour le compte du fournisseur et non pour celui du consommateur, ce qui explique que n'est pas ce dernier qui doive payer le prix de cette prestation et que lorsque la CRE a fixé le niveau du tarif d'utilisation des réseaux publics de distribution de gaz naturel (l'ATRD), par sa délibération du 28 février 2012, elle n'a pas intégré le coût des factures impayées des consommateurs finals parmi ceux que couvre le tarif ATRD 4. Elle en déduit qu'il n'y a pas en matière gazière de représentation du fournisseur envers le distributeur et que le « contrat unique » n'a pas, en cette matière, le même sens qu'en matière d'électricité.
Sur ce dernier point elle ajoute dans son dernier mémoire en réplique que le schéma triangulaire du contrat unique (client final fournisseur gestionnaire de réseau) aurait été construit dans le secteur gazier sur des bases différentes de celles qui lui ont été données dans l'électricité. Pour l'électricité, le contrat unique serait un contrat demandé par les clients finals ayant quitté le tarif réglementé de vente et passé avec leur fournisseur pour couvrir à la fois l'accès au réseau et la fourniture, cela leur éviterait de contracter eux-mêmes avec le gestionnaire du réseau de distribution. En matière gazière, au contraire, et sauf à se trouver dans une situation où les clients finals peuvent conclure avec le GRD un contrat de livraison directe (CLD), les clients finals sont automatiquement liés au GRD par les conditions standard de livraison (CSL) qui sont jointes à leur contrat de fourniture, mais qui ne font pas partie de celui-ci et qui ne lient pas le fournisseur au gestionnaire de réseaux.
La société Direct Énergie objecte que les différences ainsi relevées sont inopérantes pour justifier que les principes régissant la répartition des obligations des parties en matière d'électricité ne puissent pas s'appliquer en matière de gaz. Elle soutient que les différences entre les schémas contractuels du gaz et de l'électricité résultent d'un choix de la société GRDF et non de l'application de dispositions réglementaires qui justifieraient qu'elle puisse transférer la charge des impayés sur les fournisseurs à l'inverse de ce qui a été décidé pour l'électricité.
La société ENI oppose que la société GRDF ne saurait tirer argument d'un contrat qu'elle impose aux fournisseurs, lesquels n'ont pas les moyens d'en négocier les termes.
Elle ajoute que la requérante s'appuie sur une interprétation fantaisiste de l'article 6 du décret n°2005123 du 14 février 2005 relatif à la contribution tarifaire sur les prestations de transport et de distribution d'électricité et de gaz naturel, pour soutenir que les GRD ou les fournisseurs seraient «redevables » de la CTA en matière de gaz alors que seul le consommateur en serait redevable en matière électrique. Elle conteste enfin l'argumentation relative à la construction contractuelle différente en matière de gaz et d'électricité dès lors que cette construction contractuelle a été décidée par le seul gestionnaire de réseau.
La CRE observe que le dispositif du contrat unique traite indifféremment les secteurs de gaz et de l'électricité et qu'il n'y a aucune distinction à opérer entre ces deux secteurs, en signant le contrat de fourniture, le client final conclut également les conditions standard de livraison. Il est donc lié à la fois au fournisseur et au gestionnaire de réseau.
La cour relève que la possibilité pour le consommateur de conclure un contrat unique lui permettant de disposer de la fourniture d'électricité ou de gaz acheminé jusqu'au point physique de sa consommation a été instaurée par le législateur dans l'article L.12192 du code de la consommation, qui précise que : « le fournisseur est tenu d'offrir au client la possibilité de conclure avec lui un contrat unique portant sur la fourniture et la distribution d'électricité ou de gaz naturel. Ce contrat reproduit les clauses réglant les relations entre le fournisseur et le gestionnaire de réseau, notamment les clauses précisant les responsabilités respectives de ces opérateurs.
Outre la prestation d'accès aux réseaux, le consommateur peut, dans le cadre du contrat unique, demander à bénéficier de toutes les prestations techniques proposées par le gestionnaire de réseau. Le fournisseur ne peut facturer au consommateur d'autres frais que ceux que le gestionnaire de réseau lui a imputés au titre d'une prestation ».
Cette disposition unique visant à la fois le gaz et l'électricité témoigne de ce que le législateur a considéré ces deux secteurs comme devant obéir à un schéma identique quelle que soit la source d'énergie concernée.
La société GRDF n'apporte aucun élément qui permettrait de justifier en quoi les différences de nature entre l'électricité et le gaz qu'elle décrit et qui ont été retranscrites dans les paragraphes précédents, ou le caractère uniquement juridique de la qualification de "bien" pour l'électricité, justifieraient que les principes relatifs à la répartition des droits et obligations entre le fournisseur et le gestionnaire de réseau soient différents selon la source d'énergie concernée. Elle ne démontre en particulier pas en quoi ces différences auraient des répercussions sur les relations qui s'établissent dans le cadre du contrat unique entre le gestionnaire de réseau, le fournisseur et le consommateur et les obligations ou les droits qui devraient s'en déduire.
Par ailleurs, si le schéma contractuel en matière gazière se distingue de celui existant en matière d'électricité, d'une part, en ce que le fournisseur de gaz naturel conclut dans tous les cas avec le distributeur un contrat d'acheminement (le CAD), d'autre part, en ce que le client qui opte pour le contrat de livraison directe signe deux contrats dont un avec la société gestionnaire de réseau, ce qui n'existe pas en matière d'électricité, ces différences ne justifient pas que les principes adoptés en matière d'électricité ne s'appliquent pas en matière de gaz.
En effet, sur le premier point, ainsi que l'a relevé à juste titre le CoRDIS, le fait que l'acheminement fasse l'objet d'un contrat entre le fournisseur et le gestionnaire de réseau n'en induit pas pour autant que le client final ne soit pas le bénéficiaire de cette prestation dont il profite.
Sur le second point, si certains clients dont la situation réclame une pression ou un débit particuliers ont la possibilité de conclure un contrat de livraison directe avec le GRD, il n'en demeure pas moins que lorsque le client signe un contrat unique, ce qui correspond à la majorité des situations des consommateurs individuels, ce contrat unique est négocié avec le seul fournisseur qui, dans ce cas, représente le gestionnaire de réseau. A ce sujet, il convient d'observer que les conditions générales du CAD comportent une annexe H définissant les modalités de collaboration entre le fournisseur et le GRD qui précisent qu'il existe entre eux un contrat de mandat par lequel le fournisseur fait accepter au client final les conditions de livraisons contractuelles (CSL)
du distributeur, recueille les réclamations, ainsi que toutes demandes de prestations dites mandatées, ainsi qu'un contrat de « mission », par lequel le fournisseur propose au client en son nom, mais pour le compte du GRD, les prestations commissionnées.
À ce sujet encore il convient de relever que si dans la configuration contractuelle relative au gaz naturel, le fournisseur ne représente pas le client final auprès du gestionnaire de réseau, puisque ce dernier remplit son obligation contractuelle, d'une part, envers le fournisseur aux termes du contrat d'acheminement, d'autre part, envers le consommateur en vertu des seules CSL qui constituent un contrat entre le client et le consommateur, il n'en demeure pas moins que ce schéma, qui résulte de la seule volonté de la société GRDF, n'est pas de nature à modifier la répartition des charges et obligations entre le fournisseur et le gestionnaire de réseau résultant de la possibilité, instaurée par le législateur pour les consommateurs de signer un contrat unique comprenant les prestations d'acheminement et de livraison d'un côté, celle de fourniture de l'autre.
En outre, si le gestionnaire du réseau gazier n'est pas investi expressément d'une « mission de service public », il est néanmoins en charge d'une telle mission et des obligations qui y sont liées, ainsi que cela ressort de l'article 13 de la loi du 9 août 2004 tel que modifié par la loi du 7 décembre 2006 qui prévoyait que « (...) Un gestionnaire de réseau de distribution d'électricité ou de gaz naturel est notamment chargé dans le cadre des cahiers des charges de concession et des règlements de service des régies (...)
4° d'assurer dans des conditions objectives, transparentes et non discriminatoires, l'accès à ces réseaux ; (
) » ou de l'article 13, I, du décret n° 2004251 du 19 mars 2004 « relatif aux obligations de service public dans le secteur du gaz » qui énonce que « Les opérateurs de réseaux de distribution prennent les dispositions appropriées pour assurer l'acheminement du gaz dans les conditions de continuité et de qualité définies par les textes réglementaires en vigueur, notamment par le présent décret ». Il s'en déduit que la société GRDF n'est pas fondée à contester être investie d'une mission de service public.
La société GRDF conteste encore la décision en ce que le CoRDIS a fondé sa démonstration de ce que le fournisseur agirait pour le compte du gestionnaire de réseau en s'appuyant sur le décret n°2005123 du 14 février 2005 relatif à la contribution tarifaire sur les prestations de transport et de distribution d'électricité et de gaz naturel, dont il dénaturerait le sens et la portée. Elle oppose que ce texte fiscal portant sur une taxe très spécifique visant au financement des pensions des agents des entreprises régulées du secteur d'activité, serait dépourvu de pertinence pour trois raisons.
Premièrement, la logique et l'autonomie du droit fiscal interdiraient d'en déduire des obligations contractuelles ; deuxièmement, le décret désignerait comme redevables, selon les cas, les GRD ou les fournisseurs et non les clients finals ; troisièmement enfin, il reviendrait à dénaturer le décret que de soutenir qu'il en résulte que les impayés doivent être refacturés aux GRD par les fournisseurs.
Toutefois, la cour relève à ce sujet que la référence ainsi faite au décret du 14 février 2005 vient compléter le motif selon lequel il ressort des termes du décret du 19 mars 2004, précédemment transcrits, qu'il appartient au gestionnaire de réseaux de distribution d'acheminer le gaz jusqu'au point de livraison du client final, ce dont le CoRDIS déduit que le bénéficiaire de la prestation d'acheminement est le client final et non le distributeur. En tout état de cause, l'illustration de cette qualité de bénéficiaire de la prestation d'acheminement par la référence à l'article 3, I, du décret du 14 février est fondée, dans la mesure où cette disposition montre que le client final, qui est le contribuable de la taxe, la paie au gestionnaire de réseau, qui en est le redevable, lorsqu'il est lié à celui-ci par un contrat de livraison directe. Cette analyse est confirmée par la situation analogue du client qui a conclu un contrat unique et qui verse la CTA au fournisseur par le paiement de la facture que celui-ci lui adresse, de même que par celle du consommateur demeuré client du fournisseur historique qui paie la CTA par la facture.
Enfin, le fait que le tarif ATRD4, validé par la CRE dans sa décision du 28 février 2012, n'ait pas pris en compte le coût des impayés ne peut justifier que ceux-ci soient pris en charge par le fournisseur, dans la mesure où ces tarifs sont établis sur la base des éléments comptables et les dépenses prévisionnelles présentées par la société GRDF elle-même à la CRE, ainsi que le précise l'article L. 4522 du code de l'énergie, et l'indique la délibération de la CRE du 28 février 2012.
Sur l'application du principe selon lequel le gestionnaire du réseau public de distribution ne peut imposer aux fournisseurs des stipulations dans le contrat d'acheminement sur le réseau visant à les rendre redevables en son nom et pour son compte du paiement du tarif ATRD et de toute autre somme non couverte par ce tarif Il résulte des développements qui précèdent que, comme l'a relevé à juste titre le CoRDIS, le contrat unique prévu par l'article 12192 du code de la consommation a pour objectif de simplifier pour le consommateur le dispositif de souscription des contrats en dispensant le client final de conclure directement et parallèlement à son contrat de fourniture un contrat d'accès au réseau public de distribution, ce qu'il fait d'ailleurs au demeurant par l'intermédiaire du fournisseur.
En conséquence, la fonction de mandataire assumée par les fournisseurs, dans le cadre du mécanisme contractuel décrit ci-dessus, n'a pas pour objet et ne peut avoir pour effet de modifier les responsabilités respectives du gestionnaire de réseaux, du fournisseur et du client final telles qu'elles découlent de la loi et des textes pris pour son application.
Ainsi, le gestionnaire de réseau ne peut, sous couvert de la mission confiée au fournisseur auprès du client dans le cadre de la signature du contrat unique, imposer au seul fournisseur de supporter l'intégralité du risque d'impayés qui s'attache à l'exercice par le gestionnaire de sa mission de service public. La cour relève à ce sujet et à titre surabondant que la société GRDF ne démontre pas que, comme elle l'affirme, les gestionnaires de réseaux d'acheminement et de distribution de gaz naturel des autres pays européens ne supportent pas les risques d'impayés de la part des clients finaux » ;

ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE : « Sur les stipulations du contrat d'acheminement sur le réseau de distribution de gaz naturel tendant à ce qu'elles rendent le fournisseur redevable en son nom et pour son compte, du paiement du tarif ATRD et de toute autre somme non couverte par le tarif.
La société Poweo Direct Energie demande au comité de règlement des différends et des sanctions de déclarer contraires à la réglementation sectorielle toutes les stipulations du contrat d'acheminement sur le réseau de distribution de gaz naturel tendant à ce qu'elles rendent le fournisseur redevable en son nom et pour son compte du paiement du tarif d'utilisation des réseaux de distribution de gaz naturel et de toute autre somme non couverte par ce tarif.
L'article L. 11197 du code de l'énergie énonce qu'un « droit d'accès aux ouvrages [
] de distribution de gaz naturel [
] est garanti par les opérateurs qui les exploitent aux clients ainsi qu'aux fournisseurs et à leurs mandataires, dans des conditions définies par contrat ».
L'article L. 12192 du code de la consommation prévoit que « Le fournisseur est tenu d'offrir au client la possibilité de conclure avec lui un contrat unique portant sur la fourniture et la distribution d'électricité ou de gaz naturel. Ce contrat reproduit en annexe les clauses réglant les relations entre le fournisseur et le gestionnaire de réseau, notamment les clauses précisant les responsabilités respectives de ces opérateurs Outre la prestation d'accès aux réseaux, le consommateur peut, dans le cadre du contrat unique, demander à bénéficier de toutes les prestations techniques proposées par le gestionnaire du réseau. Le fournisseur ne peut facturer au consommateur d'autres frais que ceux que le gestionnaire du réseau lui a imputés au titre d'une prestation ».
En instituant le contrat unique, le législateur a entendu simplifier le dispositif de souscription des contrats, en dispensant le client final de conclure directement et parallèlement à son contrat de fourniture, un contrat d'accès au réseau avec le gestionnaire du réseau public de distribution. Il résulte des travaux préparatoires de la loi n°20038 du 3 janvier 2003 relative aux marchés du gaz et de l'électricité et au service public de l'énergie, qui a modifié la loi n°2000108 du 10 février 2000 relative à la modernisation et au développement du service public de l'électricité, que la mise en oeuvre du contrat unique a pour but de permettre la conclusion, par les fournisseurs, de contrats d'accès au réseau au nom et pour le compte de leurs clients.
Dès lors, le contrat unique n'a pas pour objet et ne pourrait avoir pour effet de modifier les responsabilités respectives du gestionnaire de réseaux, du fournisseur et du client final, telles qu'elles découlent de la loi et des textes pris pour son application.
Il en résulte que les droits et obligations du gestionnaire de réseaux à l'égard du fournisseur ne peuvent, sous couvert de la mission confiée au fournisseur auprès du client dans le cadre de la conclusion du contrat unique, être aménagés de telle sorte qu'ils aboutiraient à faire supporter au seul fournisseur l'intégralité d'un risque qui s'attache à l'exercice par le gestionnaire de réseaux de sa mission de service public.
Le contrat unique visé par l'article L. 12192 du code de la consommation doit s'analyser comme permettant au consommateur de conclure, d'une part, un contrat de fourniture avec le fournisseur de son choix et, d'autre part, un contrat de « distribution » avec le gestionnaire de réseaux de distribution pour l'acheminement et la livraison du gaz jusqu'à son point de livraison.
Contrairement à ce que soutient la société GRDF, la notion de « distribution» visée par les dispositions de l'article L. 12192 du code de la consommation doit s'analyser à la lumière de la définition de la « distribution », donnée par la directive 2009/73/CE du Parlement Européen et du Conseil du 13 juillet 2009 concernant des règles communes pour le marché intérieur du gaz naturel et abrogeant la directive 2003/55/CE. Selon l'article 2 point 5 de la directive précitée, la « distribution » doit s'entendre comme « le transport de gaz naturel par l'intermédiaire de réseaux locaux ou régionaux de gazoducs aux fins de fourniture à des clients, mais ne comprenant pas la fourniture ».

L'article 13 du décret n°2004251 du 19 mars 2004 relatif aux obligations de service public dans le secteur du gaz énonce que « I. Les opérateurs de réseaux de distribution prennent les dispositions appropriées pour assurer l'acheminement du gaz dans les conditions de continuité et de qualité définies par les textes réglementaires en vigueur, notamment par le présent décret ».
Ainsi, il ressort des termes du décret du 19 mars 2004, qu'il appartient au gestionnaire de réseaux de distribution d'acheminer ce gaz jusqu'au point de livraison du client final.
En outre, l'article 7 du décret n°2005123 du 14 février 2005 relatif à la contribution tarifaire sur les prestations de transport et de distribution d'électricité et de gaz naturel dispose que « I. Lorsqu'un [
] gestionnaire de réseau public de distribution de gaz naturel facture à un consommateur final ayant exercé son éligibilité l'utilisation des réseaux, il collecte le montant de la contribution tarifaire correspondante par prélèvement sur le montant hors taxes facturé ». Le gestionnaire de réseaux de distribution de gaz naturel peut donc facturer directement l'utilisation du réseau au consommateur final ayant souscrit une offre de marché.
Par conséquent, au regard tant des dispositions de l'article L. 12192 du code de la consommation que des dispositions précitées du décret du 14 février 2005 et du 19 mars 2004, la mission d'acheminement dévolue au gestionnaire de réseaux de distribution s'effectue pour le compte du client final et non pour le compte de son fournisseur.
Dès lors, le gestionnaire du réseau public de distribution ne peut imposer aux fournisseurs des stipulations dans le contrat d'acheminement sur le réseau de distribution de gaz naturel visant à le rendre redevable en son nom et pour son compte, du paiement du tarif ATRD et de toute autre somme non couverte par ce tarif.
La société GRDF devra, en conséquence, mettre en conformité les clauses du contrat d'acheminement sur le réseau de distribution de gaz naturel avec ce qui précède.
Sur le reversement au gestionnaire de réseau des sommes perçues au titre de l'utilisation du réseau par le fournisseur La société Poweo Direct Energie demande, au comité, de dire que « pour reverser au gestionnaire de réseau les sommes perçues au titre de l'utilisation du réseau, le fournisseur doit les avoir préalablement recouvrées auprès du client final ».
L'article 7 du décret n°2005123 du 14 février 2005 relatif à la contribution tarifaire sur les prestations de transport et de distribution d'électricité et de gaz naturel énonce que « le fournisseur de gaz naturel reverse aux gestionnaires de réseaux de transport et de distribution avec lesquels il a conclu des contrats d'accès aux réseaux pour l'alimentation de ses clients le montant facturé à ces derniers au titre de l'utilisation des réseaux, déduction faite du montant de la contribution tarifaire correspondante ».
Il résulte de ces dispositions et de l'ensemble de ce qui précède, notamment de ce que la mission d'acheminement dévolue au gestionnaire de réseaux de distribution est réalisée pour le compte du client final, que pour reverser au gestionnaire de réseaux les sommes dues au titre de l'utilisation du réseau, le fournisseur doit les avoir préalablement recouvrées auprès du client final. Il ne peut en être autrement que dans les cas où le fournisseur n'a pas effectué toutes les diligences requises pour recouvrer les sommes concernées, en particulier celles prévues par le décret n° 2008780 du 13 août 2008 relatif à la procédure applicable en cas d'impayés des factures d'électricité, de gaz, de chaleur et d'eau » ;

ALORS 1/ QUE si les exigences de la régulation, lorsqu'elles sont d'ordre public, peuvent justifier qu'il soit dérogé au principe de liberté contractuelle, le CoRDIS disposant à cet égard d'un pouvoir d'injonction à destination des GRD, encore faut-il que l'atteinte à cette liberté soit justifiée par les objectifs de la politique de régulation et, partant, fondée sur un principe ou une disposition de droit de l'Union ou de droit interne applicable ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a considéré que « la fonction de mandataire assumée par les fournisseurs, dans le cadre du mécanisme contractuel décrit ci-dessus, n'a pas pour objet et ne peut avoir pour effet de modifier les responsabilités respectives du gestionnaire de réseaux, du fournisseur et du client final telles qu'elles découlent de la loi et des textes pris pour son application » (arrêt, p. 14, § 2), pour en déduire que la charge des impayés relatifs à la prestation d'acheminement, pesant jusqu'alors selon les contrats en vigueur sur le fournisseur, devait être reportée sur le GRD, sans préciser en quoi les stipulations contractuelles ainsi écartées contreviendraient aux principes ou textes applicables d'ordre public, qu'ils fussent de droit de l'Union ou de droit interne ; qu'en reconnaissant ainsi au CoRDIS un pouvoir de porter atteinte à la liberté contractuelle, qui n'est assorti d'aucune limite, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 134-19 et L. 111-97 du code de l'énergie ;

ALORS 2/ QUE selon l'article L. 121-92 du code de la consommation dans sa rédaction applicable en la cause, le fournisseur d'énergie est tenu d'offrir au client la possibilité de conclure avec lui un contrat unique portant sur la fourniture et la distribution d'électricité ou de gaz naturel lequel reproduit en annexe les clauses réglant les relations entre le fournisseur et le gestionnaire de réseau, notamment les clauses précisant les responsabilités respectives de ces opérateurs, ce dont il s'évince que les clauses réglant les relations entre le fournisseur et le gestionnaire ressortent de la liberté contractuelle ; qu'en jugeant que en application de l'article L. 121-92 du code de la consommation, le contrat unique n'a ni pour objet ni pour effet de modifier les responsabilités contractuelles respectives du gestionnaire de réseaux, du fournisseur et du client final, ce dernier devant bénéficier des mêmes droits et obligations que s'il avait conclu un contrat d'accès au réseau, la cour d'appel, qui en a déduit une limitation de la liberté contractuelle, a statué contra legem en violation dudit texte ;

ALORS 3/ QUE si, en application de l'article L. 121-92 du code de la consommation dans sa rédaction applicable en la cause, le contrat unique n'a ni pour objet ni pour effet de modifier les responsabilités contractuelles respectives du gestionnaire de réseaux, du fournisseur et du client final, ce dernier devant bénéficier des mêmes droits et obligations que s'il avait conclu un contrat d'accès au réseau, c'est au bénéfice du client final que ce texte prévoit une protection ; qu'en jugeant qu'il se déduirait de ces dispositions que « le gestionnaire de réseau ne peut, sous couvert de la mission confiée au fournisseur auprès du client dans le cadre de la signature du contrat unique, imposer au seul fournisseur de supporter l'intégralité du risque d'impayés qui s'attache à l'exercice par le gestionnaire de sa mission de service public » (arrêt, p. 14, § 2), la cour d'appel a violé les dispositions susvisées.

CINQUIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR confirmé la décision du CoRDIS en ce qu'elle a dit que la société GRDF devrait transmettre à la société Poweo Direct Energie un nouveau contrat d'acheminement sur le réseau de distribution de gaz naturel dans un délai de six mois à compter de la notification de la décision conforme aux principes selon lequel le fournisseur ne saurait être redevable du paiement des sommes dues au GRD par le client final et selon lequel le risque d'impayé devrait être supporté par le GRD ; d'AVOIR enjoint à la société GRDF de mettre ses contrats d'acheminement sur le réseau de distribution en conformité avec les principes énoncés par la décision, dans le délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt, en proposant à la société Direct Energie et à la société ENI un avenant à ce contrat d'accès au réseau prévoyant que sont réputées n'avoir jamais existé entre les parties parce que contraires au code de l'énergie les clauses du contrat d'accès signé entre elles, subordonnant l'accès à ce contrat à l'acceptation par le fournisseur de la prestation d'intermédiation et qui vont au-delà de ce qu'exige la seule signature des CSL par le client lorsque celui-ci souhaite un contrat unique, et imposant au fournisseur de rendre des prestations à la société GRDF dont il ne pouvait à tout le moins négocier le prix ou les conditions de réalisation, notamment, lorsque le client n'est pas en contrat écrit, une rémunération équitable et proportionnée au regard des coûts évités par elle des prestations accomplies pour son compte auprès des clients ; d'AVOIR dit que la société GRDF ne pourrait conditionner l'accès au réseau de distribution à la réalisation de prestations non rémunérées par un tarif équitable et proportionné au regard des coûts évités par elle, auprès des clients finals ayant conclu un contrat de livraison directe, d'AVOIR dit que ces amendements et l'offre tarifaire afférente devraient être proposés dans le délai de deux mois à compter de la signification de l'arrêt et devront être soumis au CoRDIS dans le même délai à compter de la notification de l'arrêt ; d'AVOIR enjoint à la société GRDF de verser à la société Direct Énergie une rémunération égale à celle qui sera fixée entre elles pour la gestion des clients en contrat unique avec effet à compter du 21 juin 2005 s'agissant du contrat d'accès au réseau public de distribution conclu avec la société, Poweo, et à compter du 21 novembre 2008, s'agissant de celui signé avec la société Direct Energie, avec intérêts au taux compter de la date de l'arrêt ;

AUX MOTIFS QUE : « Sur le caractère rétroactif de la décision [
]

La cour rappelle qu'en application de l'article L. 13420 du code de l'énergie, le CoRDIS doit dans ses décisions de règlement des différends préciser les conditions d'ordre technique et financier de règlement du différend dans lesquelles l'accès au réseau ou son utilisation sont assurés.
Dans le cadre de ce pouvoir, la compétence du Comité s'étend à l'ensemble de la période couverte par le différend dont il se trouve saisi sous réserve des règles de prescription applicables en la matière sans qu'importe la date de son émergence entre les parties.
En statuant en ce sens, le Comité n'a fait que rétablir l'application des principes d'ordre public économique garantissant l'accès au réseau à des conditions objectives non discriminatoires et proportionnées pour tous les acteurs, qui n'avaient pas été respectés par le gestionnaire de réseau dans le cadre de la conclusion des conventions de raccordement. Elle ne constitue pas une modification de l'ordre juridique et ne contrevient pas aux principes de non-rétroactivité de la loi, ni à celui d'intangibilité des conventions légalement formées. Les références jurisprudentielles invoquées à ce titre par la société GRDF sont en conséquence inopérantes, de même que celles relatives à la question de l'appréciation de la gravité des irrégularités susceptibles d'entraîner la nullité d'une convention dans le cadre du principe de proportionnalité.
De même, l'arrêt rendu par la Cour de cassation dans l'affaire Towercast (pourvoi n°1228426), invoqué par la requérante, qui admet la possibilité d'appliquer une nouvelle tarification aux contrats conclus sous l'empire de la tarification précédente, n'a pas la portée de limiter les effets de la décision du régulateur à la date de formalisation du différend, qu'elle lui prête.
Au surplus, la société GRDF rappelle que la cour d'appel de Paris (chambre 54) dans un arrêt rendu le 14 janvier 2015 (RG n° 12/19140, a jugé en matière d'électricité et au regard de la législation et de la réglementation de ce secteur qu'il résulte des dispositions applicables « (..) qu'en rendant le fournisseur responsable des impayés l'article 7.1 [du contrat conclu entre le fournisseur et le gestionnaire de réseau] ajoute une obligation non prévue par les textes législatifs et réglementaires [applicables](...)» ce dont elle a déduit que la garantie des impayés reposant sur le fournisseur était «dépourvue de cause ». La requérante invoque cet arrêt en faisant observer qu'il est fondé sur la seule réglementation applicable au secteur de l'électricité qui donne compétence à l'autorité de régulation en matière de règlement de différend portant sur « l'accès au réseau », alors que les articles 13419 et 13420 font mention de « l'utilisation du réseau », ce qui serait une différence substantielle.
Il ne saurait toutefois être tiré aucune conclusion de différence des réglementations à cet égard, dès lors qu'elles ont toutes deux pour objectif de résoudre les conflits résultant de l'ouverture à la concurrence de la fourniture d'électricité ou de gaz et qu'en tout état de cause les dispositions visées mentionnent elles aussi l'accès au réseau, ce que concerne le litige de l'espèce qui trouve sa source dans l'obligation de garantir les impayés imposée, dans le cadre du contrat d'acheminement sur le réseau de distribution, par le gestionnaire du réseau aux fournisseurs. Par ailleurs la phrase relevée par la société GRDF selon laquelle « (...) Si la décision du CoRDIS du 22 octobre 2010 et l'arrêt du 29 septembre 2011 de la cour d'appel de Paris invoquées par GDFSuez, ont imposé la modification de cet article, cela ne saurait valoir que pour l'avenir et non pour les contrats en cours » n'est pas un motif de l'arrêt mais un moyen développé par la société GRDF, que la cour a implicitement rejeté.
Il suit de l'ensemble de ce qui précède que les moyens développés par la société GRDF au sujet de la rétroactivité de la décision sont dépourvus de fondement et doivent être rejetés, sans qu'il soit justifié de saisir le Cour de justice de l'Union européenne d'une question préjudicielle.
La société GRDF soutient encore qu'en adoptant sur la part des impayés relative à l'acheminement une solution inverse de celle qu'a retenue la CRE à l'issue de la consultation publique sur le tarif ATRD 4, ainsi que sa décision adoptée le 22 octobre 2010, le CoRDIS a méconnu les principes de confiance légitime et de sécurité juridique.
Elle soutient qu'elle avait une espérance légitime à ne pas voir le régulateur lui-même remettre en cause, rétroactivement de surcroît, l'ensemble de ces décisions. Elle ajoute que s'il existe une exception au principe d'intangibilité des relations contractuelles, lorsqu'une autorité administrative règle un différend, cette exception ne saurait aller jusqu'à lui permettre de faire remonter l'effet de sa décision à une date antérieure à la formalisation du différend en l'absence d'une habilitation précise. Elle invoque enfin un arrêt du 11 mai 2004, par lequel le Conseil d'État statuant en assemblée a jugé que le juge administratif pouvait déroger au principe d'annulation d'un acte ab initio dans le cas de la constatation d'un excès de pouvoir lorsque cet effet « est de nature à emporter des conséquences manifestement excessives en raison tant des effets que cet acte a produits et des situations qui ont pu se constituer lorsqu'il était en vigueur que de l'intérêt général pouvant s'attacher à un maintien temporaire de ses effets ».
Elle fait enfin valoir que la décision attaquée porte atteinte à son droit de propriété sur les créances nées de l'application d'un tarif d'utilisation des réseaux qu'elle exploite (le tarif ATRD4) arrêté par la CRE à la suite d'une vaste concertation à laquelle ont participé tous les acteurs du marché. Elle soutient qu'en statuant comme il a fait, le CoRDIS a violé l'article 1er du Premier protocole additionnel à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme.
Il convient sur ces points de relever que la décision critiquée en considérant que la société GRDF ne pouvait mettre à la charge des fournisseurs la garantie des impayés des clients concernant la part d'acheminement, n'a pas remis en cause la décision de la CRE relative au tarif ATRD 4. En effet, aucun élément de cette décision relative aux tarifs de la société GRDF ne conduit à penser que la CRE aurait estimé, ne serait-ce qu'implicitement, que le gestionnaire de réseau pouvait faire supporter l'ensemble des impayés par les fournisseurs. Au surplus, il n'est pas contesté que ce tarif est fixé selon les éléments de coûts produits par la société GRDF elle-même.
Dans ces conditions, il lui appartenait de s'interroger sur la validité du mécanisme de garantie des impayés qu'elle avait institué et que la société Direct Energie conteste depuis plusieurs années, comme en témoigne, notamment, le document intitulé « Note de travail commune Direct Energie et Poweo » du 16 novembre 2009 par lequel ces sociétés ont indiqué à titre liminaire que « Les discussions relatives à l'évolution du contrat d'acheminement Distribution (...) se poursuivent depuis juin 2007 sans que les demandes constantes des fournisseurs ou les conséquences de la décision du 7 avril 2008 du Comité de règlement des différends et des sanctions aient pu être sérieusement examinées ».
Dans une partie du document, relative à la nécessité que soit défini « un schéma contractuel clair pour le consommateur et adapté aux obligations du fournisseur », les sociétés Direct Energie et Poweo ont encore précisé que « En d'autres termes, le mécanisme contractuel imposé par GRDF ne saurait conduire, par la seule application des dispositions à reporter ses obligations sur le fournisseur qui ne saurait accepter un tel transfert ». De même, dans un document intitulé « Présentation GT1 ad hoc CAD du 29/04/2011 » les sociétés Poweo et Direct Energie ont mentionné à nouveau la charge indue de règlement des impayés concernant la partie acheminement qui leur était imposée par la société GRDF.
En outre, il ne résulte d'aucun élément du dossier que la CRE ou son comité de règlement des différends et des sanctions auraient l'une ou l'autre affirmé que les impayés devaient être mis à la charge du fournisseur pour la part d'acheminement faisant ainsi naître une confiance légitime de la part des gestionnaires de réseau. La situation est d'ailleurs inverse puisque dès la décision du 7 avril 2008, complétée par celle du 22 octobre 2010, le CoRDIS a posé les principes selon lesquels le gestionnaire de réseau ne pouvait dans le cadre du contrat unique transférer au fournisseur les obligations et charges qui lui incombaient Les moyens par lesquels la société GRDF soutient que le CoRDIS a méconnu les principes de confiance légitime et de sécurité juridique, ainsi que l'article 1er du premier protocole additionnel à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme doivent en conséquence être rejetés.
En conséquence l'ensemble du recours formé par la société GRDF est rejeté» ;

ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE : « La société POWEO DIRECT ENERGIE demande au comité d'enjoindre à la société GRDF de proposer un avenant au contrat d'acheminement sur le réseau de distribution de gaz naturel remettant la situation contractuelle dans l'état où elle aurait dû être si le contrat d'acheminement sur le réseau de distribution de gaz naturel avait été ab initio conforme à la réglementation en vigueur, soit au 21 juin 2005 s'agissant du contrat d'acheminement sur le réseau de distribution de gaz naturel signé par la société POWEO et, au 21 novembre 2008, s'agissant de celui signé par la société DIRECT ENERGIE.
L'article L.13420 du code de l'énergie prévoit que « La décision du comité, qui peut être assortie d'astreintes, est motivée et précise les conditions d'ordre technique et financier de règlement du différend dans lesquelles l'accès aux réseaux, ouvrages et installations mentionnés à l'article L. 13419 ou leur utilisation sont, le cas échéant, assurés ».
Le comité est compétent pour trancher tout différend survenu entre un gestionnaire de réseaux et un utilisateur concernant les règles relatives à l'accès ou l'utilisation des réseaux, ouvrages et installations. Toutefois, si le litige doit être formalisé entre l'opérateur de réseau et l'utilisateur préalablement à la saisine du comité, il peut indifféremment porter sur une période antérieure ou postérieure à sa formalisation.
Ainsi, la compétence du comité s'étend à l'ensemble de la période couverte par le différend dont elle se trouve saisie, sous réserve des règles de prescription applicables en la matière, peu importe la date de son émergence entre les parties.
Dès lors, il appartient à la société GRDF de proposer un avenant au contrat d'acheminement sur le réseau de distribution de gaz naturel remettant la situation contractuelle dans l'état où elle aurait dû être si le contrat d'acheminement sur le réseau de distribution de gaz naturel avait été ab initio conforme à la réglementation en vigueur.
Toutefois, l'avenant au contrat d'acheminement sur le réseau de distribution de gaz naturel ne saurait prévoir la prise en compte d'impayés du fournisseur pour lesquels ce dernier ne justifie pas que les créances correspondantes ont été qualifiées d'irrécouvrables par un commissaire aux comptes et qu'il a effectué toutes les diligences requises pour recouvrer les sommes concernées, en particulier celles prévues par le décret n°2008780 du 13 août 2008 » ;

ALORS 1/ QU' ayant énoncé en énonçant que la compétence du CoRDIS s'étend à toute la période couvrant le différend, laquelle correspondrait à l'ensemble de la relation contractuelle depuis , la cour d'appel en retenant au titre de cette période, l'ensemble de la période de relation contractuelle, dès la signature du contrat, et en enjoignant à la société GRDF de renégocier le contrat dans des termes déterminés, la cour d'appel a statué tout à la fois comme autorité juridictionnelle et comme autorité de régulation, méconnaissant l'étendue de ses pouvoirs, en violation des articles L. 134-19 et L. 134-20 du code de l'énergie ;

ALORS 2/ QU'ayant énoncé que la compétence du CoRDIS s'étend à toute la période couvrant le différend, la cour d'appel en retenant au titre de cette période, l'ensemble de la période de relation contractuelle, dès la signature du contrat, sans expliquer le fondement sur lequel une telle décision équivalant au prononcé d'une condamnation à réparation du préjudice subi du fait d'un manquement de l'un des cocontractants, laquelle ne relève pas de la compétence du CoRDIS mais de celle du juge du contrat, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 134-19 et L. 134-20 du code de l'énergie ;

ALORS 3/ QU' en statuant ainsi, sous couvert de règlement d'un différend, le CoRDIS et à sa suite la cour d'appel se sont érigés en juge du contrat ; qu'en prononçant une condamnation rétroactive anéantissant les stipulations contractuelles ab initio, la cour d'appel a excédé ses pouvoirs en violation des articles L. 134-19 et L. 134-20 du code de l'énergie ;

ALORS 4/ QUE l'article L. 134-19 du code de l'énergie subordonnant la saisine du CoRDIS à l'existence d'un différend, en application du principe de non-rétroactivité des décisions administratives, les décisions du CoRDIs ne sauraient avoir un effet rétroactif antérieur à la naissance du différend ; qu'en considérant néanmoins que les modifications contractuelles devaient être reportées à la date de conclusion des contrats concernés, la cour d'appel a violé l'article L. 134-19 du code de l'énergie ensemble le principe de non-rétroactivité des actes administratifs ;

ALORS 5/ QUE aucune habilitation législative n'autorise le CoRDIS à prononcer des décisions à caractère rétroactif ; qu'à supposer que la primauté du droit européen puisse conduire une autorité administrative à prononcer une décision rétroactive de nature à remettre en cause une situation contractuelle acquise, encore eû-til fallu que le CoRDIS et sa suite la cour d'appel, pour justifier le caractère rétroactif, exceptionnel, de la décision, établissent que découlerait des exigences de droit de l'Union la nécessité de prononcer une telle décision ; qu'en l'espèce, pour se prononcer comme elle l'a fait, la cour d'appel non plus que le CoRDIS dans sa décision entreprise n'a pas justifié de la nécessité du caractère rétroactif de sa décision au regard du droit européen ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du principe de l'effectivité du droit européen ;

ALORS 6/ QUE les principes de confiance légitime et de sécurité juridique s'opposent à la modification rétroactive de stipulations contractuelles relatives au tarif conformes à une décision de l'autorité de régulation sur ledit tarif ; qu'au cas présent, ainsi que le soutenait la société GRDF, à supposer que le tarif arrêté par la CRE par délibération du 28 février 2012 en fonction des charges supportées par la société exposante, lesquelles n'incluaient pas la charge des impayés, eût été illégal, la remise en cause du tarif n'était en toute hypothèse envisageable que pour l'avenir ; qu'en se fondant sur la seule circonstance inopérante que la question précise de la charge des impayés n'avait pas été évoquée, ni donc tranchée, lors de l'adoption du tarif pour rejeter le moyen ainsi opposé par la société exposante, la cour d'appel a violé les principes de confiance légitime et de sécurité juridique.

SIXIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR confirmé la décision du CoRDIS en ce qu'elle a dit que la société GRDF devrait transmettre à la société Poweo Direct Energie un nouveau contrat d'acheminement sur le réseau de distribution de gaz naturel dans un délai de six mois à compter de la notification de la décision conforme aux principes selon lequel le fournisseur ne saurait être redevable du paiement des sommes dues au GRD par le client final et selon lequel le risque d'impayé devrait être supporté par le GRD ; d'AVOIR enjoint à la société GRDF de mettre ses contrats d'acheminement sur le réseau de distribution en conformité avec les principes énoncés par la décision, dans le délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt, en proposant à la société Direct Energie et à la société ENI un avenant à ce contrat d'accès au réseau prévoyant que sont réputées n'avoir jamais existé entre les parties parce que contraires au code de l'énergie les clauses du contrat d'accès signé entre elles, subordonnant l'accès à ce contrat à l'acceptation par le fournisseur de la prestation d'intermédiation et qui vont au-delà de ce qu'exige la seule signature des CSL par le client lorsque celui-ci souhaite un contrat unique, et imposant au fournisseur de rendre des prestations à la société GRDF dont il ne pouvait à tout le moins négocier le prix ou les conditions de réalisation, notamment, lorsque le client n'est pas en contrat écrit, une rémunération équitable et proportionnée au regard des coûts évités par elle des prestations accomplies pour son compte auprès des clients ; d'AVOIR dit que la société GRDF ne pourrait conditionner l'accès au réseau de distribution à la réalisation de prestations non rémunérées par un tarif équitable et proportionné au regard des coûts évités par elle, auprès des clients finals ayant conclu un contrat de livraison directe, d'AVOIR dit que ces amendements et l'offre tarifaire afférente devraient être proposés dans le délai de deux mois à compter de la signification de l'arrêt et devront être soumis au CoRDIS dans le même délai à compter de la notification de l'arrêt ; d'AVOIR enjoint à la société GRDF de verser à la société Direct Énergie une rémunération égale à celle qui sera fixée entre elles pour la gestion des clients en contrat unique avec effet à compter du 21 juin 2005 s'agissant du contrat d'accès au réseau public de distribution conclu avec la société, Poweo, et à compter du 21 novembre 2008, s'agissant de celui signé avec la société Direct Energie, avec intérêts au taux compter de la date de l'arrêt ;

AUX MOTIFS QUE : « Sur la détermination des conditions financières des prestations d'intermédiation rendues par le fournisseur pour le compte du gestionnaire de réseau dans le cadre du contrat unique.
La société Direct Énergie demande la réformation de la décision du CoRDIS en ce qu'il a rejeté sa demande visant à ce qu'il détermine la rémunération des prestations qu'elle rend aux clients finals pour GRDF, lorsqu'elles sont imposées par la réglementation, et à ce qu'il reconnaisse l'illégalité des clauses imposant au fournisseur de réaliser des peines et soins dans le cas des CLD.
Elle soutient que tout en reconnaissant que la réalisation de ces prestations de service constituait bien une condition d'accès au réseau de distribution, la question de la qualification de la nature des conventions liant un gestionnaire de réseau et un fournisseur étant une problématique indépendante, le Comité aurait refusé de trancher le différend et d'en préciser les conditions d'ordre financier.
Elle précise qu'il ressort de l'article L. 13420 du code de l'énergie qu'en matière de règlement des différends entre un gestionnaire de réseau et un fournisseur portant sur l'accès au réseau, le CoRDIS est compétent et a même l'obligation de le trancher conformément aux règles de droit en vigueur et de préciser les conditions d'ordre financier de l'accès au réseau. Elle fait valoir que le différend portait bien sur une modalité d'accès au réseau de distribution de gaz naturel, puisque cet accès serait conditionné à la réalisation des prestations en cause.
Elle ajoute que contrairement à ce qu'a retenu le CoRDIS, les prestations de services réalisées par elle-même pour GRDF ne dépendent pas d'une qualification juridique de la relation entre les parties.
La société Direct Énergie soutient encore que le Comité a commis une erreur de droit en écartant sa demande relative aux peines et soins rendus aux clients finals ayant conclu un CLD aux motifs qu'elle n'apportait pas d'éléments suffisants permettant d'en apprécier le bien-fondé, alors qu'elle lui demandait d'indiquer que dans ce cas GRDF ne saurait lui imposer de fournir des prestations d'intermédiation et donc de fixer les conditions financières des prestations rendues à un montant équivalent à celui retenu pour les contrats en CSL.
Sur la détermination des conditions financières relatives aux prestations rendues par elle pour la société GRDF dans le cadre du contrat unique, la société Direct Energie expose que le CoRDIS ayant fait droit à sa demande tendant à ce que soit reconnue l'obligation pour GRDF de supporter les charges financières liées à l'exécution de son activité de service public, celle-ci doit en conséquence, supporter, au moins partiellement, les coûts des prestations de services rendues par les fournisseurs et qui sont nécessaires pour l'accès au réseau, à savoir, en l'espèce, les prestations dites de peines et soins consistant en la gestion de clientèle quant aux problématiques liées à la distribution et non à la fourniture. Elle indique qu'une telle obligation imposée à GRDF serait parfaitement similaire aux obligations imposées à ERDF à son égard, dans sa décision du 22 octobre 2010, rendue dans le cadre d'un différend les opposant, confirmée par la cour d'appel en 2011.
Elle précise que la méthode admise par la CRE consiste en un plafonnement des coûts supportés par le fournisseur pour traiter un « client énergie » au montant de la commission de gestion qu'ERDF perçoit au titre du TURPE pour traiter les clients disposant d'un contrat d'accès direct au réseau de distribution électrique (CARD). Cette commission de gestion correspond aux coûts que supporte ERDF pour traiter les charges de facturation, des demandes de modifications du contrat d'accès au réseau (modification de la puissance par exemple) et des services de recouvrement (hors impayés) et qui sont connues sous le nom de composante de gestion basse tension. Elle propose que sa commission soit du même montant que celui retenu par la CRE.
La société ENI soutient que le CoRDIS est compétent pour se prononcer sur la validité des stipulations du CAD en vertu des dispositions des articles L. 1311, alinéa 3, et L. 13420, alinéas 2 et 3, du code de l'énergie. Elle ajoute que dans sa délibération du 26 juillet 2012, la CRE saisie de la question en matière d'électricité a considéré que la rémunération convenue entre les sociétés Direct Energie et ERDF respectait les principes généraux du droit de la concurrence et du code l'énergie et a souligné que « (...) Le projet de contrat (...)pour la gestion de clientèle en contrat unique pourrait être conclu avec d'autres opérateurs (fournisseurs nouveaux entrants) placés dans une situation comparable à la société Poweo Direct Energie aux regards de leurs coûts de gestion de clientèle et de leur base de clients "énergie" ». Elle estime que cette décision a fixé un référentiel en tout point transposable au gaz.
La société GRDF oppose que le CoRDIS n'est pas le juge des contrats de représentation passés entre les GRD et les fournisseurs. Elle ajoute que parmi les textes réglementaires, qui s'imposent par définition à tous les opérateurs, figure la délibération du collège de la CRE qui, en vertu de l'article L.4523 du code de l'énergie, fixe le tarif d'accès aux réseaux en fonction de l'ensemble des coûts supportés par le gestionnaire, que le tarif doit couvrir. Elle fait observer que l'article 1er du décret n°200522 du 11 janvier 2005 relatif aux règles de tarification pour l'utilisation des réseaux publics de distribution de gaz naturel énumère les charges d'exploitation prises en compte dans la fixation des tarifs d'utilisation des réseaux publics de distribution de gaz naturel et ne mentionne nullement les impayés des clients finals à l'égard des fournisseurs, de même que le tarif ATRD 4 qui constitue l'essentiel de ses recettes. Elle précise que la raison de cette situation se trouve dans le fait que ces actes réglementaires traduisent la relation entre le fournisseur et le GRD, d'une part, le fournisseur et le consommateur d'autre part. Ainsi selon elle, c'est le fournisseur qui fait acheminer le gaz dans le réseau de distribution, pour livraison à son client. Seul le fournisseur est engagé vis-à-vis de GRDF au titre de l'acheminement, non le client final, la circonstance qu'il en aille différemment en électricité étant indifférente.
Elle objecte encore que le CoRDIS n'a pas compétence pour remettre en cause le tarif ATRD, et donc un acte réglementaire, au travers du règlement d'un différend.
Par ailleurs, la société GRDF oppose que la rémunération des fournisseurs au titre du contrat unique ne constitue pas une « modalité d'accès au réseau». Bien au contraire, la compétence tarifaire et la détermination de l'équilibre financier du contrat d'acheminement appartient au collège de la CRE.
La société GRDF précise encore qu'elle ignore le contenu du contrat GRDF qui a été négocié entre les sociétés Direct Energie et ERDF. Elle observe que ce contrat ne concerne que les prestations sous contrat unique d'électricité et que la société GRDF se borne à lancer des chiffres allusifs sans les mettre en relation ni avec la réalité économique du secteur gaz ni avec les coûts qu'elle prétend supporter à tort dans le cas où le client ne choisit pas le contrat unique. Elle objecte qu'à supposer que la CRE ait approuvé le contrat GRDF et admis une rémunération pour la société Direct Energie du même montant que la composante de gestion basse tension du TURPE, la cour ne dispose d'aucun élément pour vérifier ces dires. La société GRDF ajoute qu'il n'est pas possible de transposer purement et simplement ce montant sans entrer dans l'analyse du tarif ATRD 4 de GRDF et ce d'autant plus que Direct Energie ne fournirait aucun élément chiffré.
S'agissant des CLD, la société GRDF objecte que la société Direct Énergie n'assure aucune prestation à son bénéfice dans ce schéma. Elle précise que si elle facture au fournisseur l'accès au réseau et l'acheminement du gaz, ce serait parce qu'il s'agit précisément de la contrepartie d'une prestation offerte par elle au fournisseur et non d'une prestation offerte par celuici à des clients. Contrairement à ce que soutient Direct Energie, la situation est différente de celle qui prévaut dans le secteur électrique : il n'existe pas de contrat d'acheminement d'électricité puisque ledit acheminement est réputé instantané et que les producteurs se voient facturer l'accès au réseau par leur gestionnaire de réseau.
Elle soutient qu'il n'est pas possible ni pour le CoRDIS, ni pour la cour d'appel de lui imposer de reproduire dans ses contrats d'acheminement des clauses d'un contrat relatif à d'autres prestations que les siennes, réalisées sur un autre marché que celui où elle intervient, et dont seule une partie à l'instance connaîtrait le contenu.

La CRE observe que le CoRDIS n'est pas compétent pour fixer le niveau tarifaire des prestations effectuées par le fournisseur pour le compte du GRD dans le cadre d'une relation de représentation, dès lors qu'il ne lui appartient pas de qualifier, parmi les différents modes de représentation juridique, la relation contractuelle entre le gestionnaire de réseau et les clients finals. Selon elle, seules les parties peuvent déterminer les contours qu'elles souhaitent donner à leur relation contractuelle d'intermédiation et, le cas échéant, en fixer les conditions dans le respect des règles législatives et réglementaires qui s'imposent à elles. En l'absence d'accord entre les parties, il leur revient de saisir le juge du contrat afin qu'il puisse procéder à la qualification du lien juridique. Cette détermination de la nature juridique de l'accord de représentation entre le fournisseur et le GRD est un préalable nécessaire à l'éventuelle étude de ses conditions financières.
Elle ajoute que la compétence du CoRDIS est distincte de celle du collège de la Commission et qu'il est dès lors indifférent de soulever que la Commission s'est prononcée sur la rémunération du fournisseur pour l'accomplissement des prestations rendues par les fournisseurs d'électricité dans le cadre de la distribution d'électricité par une délibération du 26 juillet 2012, d'autant que dans le cadre de cette délibération, la CRE n'a pas fixé la rémunération.
Il résulte de l'article L. 13419 du code de l'énergie que le CoRDIS peut être saisi en cas de différend entre les opérateurs et les utilisateurs des ouvrages de transport et de distribution de gaz naturel et que ces différends peuvent porter sur l'accès auxdits réseaux, ouvrages et installations ou sur leur utilisation, notamment en cas de refus d'accès ou de désaccord sur la conclusion, l'interprétation ou l'exécution des contrats. L'article 13420 du même code précise que la décision du Comité, qui peut être assortie d'astreintes, est motivée et précise les conditions d'ordre technique et financier de règlement du différend dans lesquelles l'accès aux réseaux, ouvrages et installations mentionnés à l'article L. 13419 ou leur utilisation sont, le cas échéant, assurés.
Il se déduit de ces dispositions que le Comité est compétent pour trancher les désaccords sur l'interprétation et l'exécution des contrats liant le gestionnaire de réseau public de transport et de distribution de gaz naturel, les fournisseurs et les clients finals. Dans ce cadre, il a compétence, sous le contrôle de la cour d'appel de Paris, pour préciser comment doivent s'organiser les relations entre ces parties, ainsi que les conditions d'ordre technique mais aussi financières dans lesquelles l'accès aux réseaux, ouvrages et installations ou leur utilisation sont assurés. Ces attributions sont distinctes des questions de responsabilité qui pourraient survenir entre elles et qui ressortent de la seule compétence des juridictions, ainsi que l'a relevé la cour d'appel de Paris dans un arrêt du 8 novembre 2012 (RG n° 2011/20346) cité par la CRE dans ses observations. Il importe par ailleurs peu au regard de ces dispositions que le différend porte sur l'accès au réseau ou sur son utilisation.
En l'espèce, le CoRDIS a tranché le différend des sociétés Direct Énergie et GRDF sur les questions de savoir sur laquelle d'entre elles devait reposer la charge, d'une part, des impayés par les clients finals du tarif ATRD, d'autre part, de sommes dues au titre de différentes prestations réalisées dans le cadre de la gestion de la clientèle ou de difficultés liées à l'utilisation du réseau, dans le cadre du contrat unique ou du contrat direct. Il était compétent en application du texte précité pour préciser quelles étaient les conditions financières de ces prestations liées à l'accès et à l'utilisation du réseau Contrairement à ce qu'il a retenu, le CoRDIS n'avait à ce sujet nul besoin de définir quelle était la qualification du contrat par lequel la société fournisseur agissait envers le gestionnaire de réseau auprès du client final, mais simplement de préciser quelles prestations étaient concernées et de fixer une méthode de calcul de la rémunération du fournisseur lorsqu'il agit pour le compte du gestionnaire de réseau auprès du client final.
Il ne saurait être fait obstacle à cette compétence prévue par le législateur au motif qu'elle pourrait avoir pour effet de remettre en cause le tarif d'accès des tiers au réseau (ATRD) validé par la CRE au regard des coûts présentés par la société gestionnaire du réseau.
Pour autant, le CoRDIS ne pouvait fixer les conditions financières en cause ab initio et sans que la société Direct Energie lui fournisse les éléments lui permettant de se prononcer.
Sur les CSL ou contrat unique, il est exact qu'il résulte du principe énoncé par la décision selon lequel le contrat unique ne peut avoir pour objet ou effet de faire supporter au seul fournisseur les sommes correspondant à la mission de distribution dévolue au gestionnaire de réseaux publics, que la société GRDF doit supporter, au moins partiellement, les coûts des prestations de services rendues par les fournisseurs nécessaires pour l'accès au réseau. La société Direct Energie précise que ces prestations sont celles de peines et soins consistant dans la gestion de clientèle « quant aux problématiques liées à la distribution et non à la fourniture ».
Ainsi qu'elle le souligne, les prestations accomplies par elle pour le compte de la société GRDF dans le cadre du contrat unique sont détaillées dans le contrat d'acheminement, d'une part, dans l'article 1er de l'annexe H intitulé « Accord de représentation », par lequel le GRD qualifié de mandant confie au fournisseur qualifié de mandataire une liste de huit prestations envers les clients finals, d'autre part, dans l'article 5 de ce même accord précisant les «prestations mandatées » et dans l'article 7 de la même annexe qui sous l'intitulé « contrat de commission » précise une liste de cinq prestations que le fournisseur doit accomplir en application de l'article 6.
S'agissant de la détermination des conditions financières relatives aux prestations ainsi rendues pour GRDF dans le cadre du contrat unique, la société Direct Energie soutient àjuste titre qu'il découle du principe selon lequel le contrat unique ne peut avoir pour effet de faire supporter au seul fournisseur les sommes correspondant à la mission de distribution dévolue au gestionnaire de réseaux de distribution, que la société GRDF doit supporter, au moins en partie, les coûts des prestations de service rendues par les fournisseurs. Ces prestations sont relatives à la gestion de clientèle quant aux problématiques liées à la distribution, et non à la fourniture, et sont dites «de peines et soins ».
Elle ne fait toutefois qu'affirmer sans en apporter la démonstration que ces obligations sont identiques à celles imposées à ERDF à l'égard des fournisseurs et ni le CoRDIS ni aujourd'hui la cour ne disposent d'éléments qui justifieraient d'appliquer s'agissant des prestations de peines et soins en matière de distribution de gaz le tarif annuel de 33,72 euros fixé au titre de la composante de gestion pour un client basse tension bénéficiant des contrat d'accès direct au réseau de distribution électrique.
Cependant, ainsi qu'elle le soutient, le rejet de toutes ses prétentions en matière de détermination tarifaire aboutit à laisser perdurer une situation illégale lui laissant la charge des l'intégralité des prestations accomplies pour le seul compte de la société GRDF, en violation du principe précédemment rappelé et il sera enjoint à la société GRDF dans les conditions précisées infra de proposer une tarification équitable de ces services.
Sur le CLD La société Direct Énergie soutient à juste titre que le principe affirmé par le CoRDIS, selon lequel il appartient au gestionnaire de réseau de distribution de gaz naturel de supporter l'intégralité du risque qui s'attache à l'exercice de sa mission de service public, implique qu'il soit précisé, comme elle le demandait à ce comité, que le gestionnaire de réseau ne peut imposer au fournisseur, sans rémunération, des charges dans le cadre de la conclusion d'un contrat de livraison directe. Il n'était pas nécessaire à ce stade que la société Direct Energie apporte la démonstration que tel était bien le cas dès lors que l'article 17 du contrat de livraison directe énonce que « Les prestations de base du catalogue des Prestations sont couvertes par le tarif d'acheminement » et que la société GRDF ne conteste pas que l'acheminement est facturé au fournisseur et non au client final.
S'agissant du montant de la rémunération de tels services, la cour renvoie à sa motivation précédente relative au contrat unique. Le CoRDIS ne pouvait faute d'élément d'appréciation tangible se prononcer sur ce point et la cour ne le peut pas davantage.
Cependant, et de même que cela a été précédemment précisé pour le contrat unique, le rejet de toutes les prétentions de la société Direct Énergie en matière de détermination tarifaire aboutit à laisser perdurer une situation illégale laissant à la charge des fournisseurs l'intégralité des prestations accomplies pour le seul compte de la société GRDF, en violation du principe précédemment rappelé et il sera enjoint à la société GRDF dans les conditions précisées infra de proposer une tarification équitable de ces services » ;

ALORS 1/ QUE la qualification juridique de la relation contractuelle entre le GRD et le fournisseur ne ressort pas de la compétence du CoRDIS mais de celle du juge du contrat ; qu'en statuant sur les conditions financières des prestations d'intermédiation effectuées par le fournisseur, sous couvert de ce qu'elles conditionnent l'accès aux réseaux, la cour d'appel, saisie d'un recours contre la décision du CoRDIS, a excédé ses pouvoirs en violation de l'article L. 134-19 du code de l'énergie ;

ALORS 2/ QUE s'agissant des réseaux gaziers, contrairement aux dispositions applicables en matière de télécommunication, aucune référence n'est faite au caractère équitable des conditions dans lesquelles l'accès au réseau doit être assuré ; que l'article L. 134-20 du code de l'énergie précise seulement que « la décision du comité [
] précise les conditions d'ordre technique et financier de règlement du différend dans lesquelles l'accès aux réseaux, ouvrages et installations mentionnés à l'article L. 134-19 ou leur utilisation sont, le cas échéant, assurés », quand l'article L. 36-8 du code des postes et communications électroniques dispose que la « décision [de l'ARCEP statuant en règlement des différends] est motivée et précise les conditions équitables, d'ordre technique et financier, dans lesquelles l'interconnexion ou l'accès doivent être assurés » ; qu'en enjoignant à la société GRDF de proposer un « tarif équitable » des services dans le cadre des CSL et du CLD, la cour d'appel a violé, par fausse application, l'article L. 36-8 du code des postes et communications électroniques, et, par refus d'application, l'article L. 134-20 du code de l'énergie ;

ALORS 3/ QU'en statuant ainsi, sans s'expliquer sur ce que pourrait être un tarif équitable, quand aucun texte du droit de l'énergie ne s'y réfère, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 134-20 du code de l'énergie.

SEPTIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR confirmé la décision du CoRDIS en ce qu'elle a dit que la société GRDF devrait transmettre à la société Poweo Direct Energie un nouveau contrat d'acheminement sur le réseau de distribution de gaz naturel dans un délai de six mois à compter de la notification de la décision conforme aux principes selon lequel le fournisseur ne saurait être redevable du paiement des sommes dues au GRD par le client final et selon lequel le risque d'impayé devrait être supporté par le GRD ; d'AVOIR enjoint à la société GRDF de mettre ses contrats d'acheminement sur le réseau de distribution en conformité avec les principes énoncés par la décision, dans le délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt, en proposant à la société Direct Energie et à la société ENI un avenant à ce contrat d'accès au réseau prévoyant que sont réputées n'avoir jamais existé entre les parties parce que contraires au code de l'énergie les clauses du contrat d'accès signé entre elles, subordonnant l'accès à ce contrat à l'acceptation par le fournisseur de la prestation d'intermédiation et qui vont au-delà de ce qu'exige la seule signature des CSL par le client lorsque celui-ci souhaite un contrat unique, et imposant au fournisseur de rendre des prestations à la société GRDF dont il ne pouvait à tout le moins négocier le prix ou les conditions de réalisation, notamment, lorsque le client n'est pas en contrat écrit, une rémunération équitable et proportionnée au regard des coûts évités par elle des prestations accomplies pour son compte auprès des clients ; d'AVOIR dit que la société GRDF ne pourrait conditionner l'accès au réseau de distribution à la réalisation de prestations non rémunérées par un tarif équitable et proportionné au regard des coûts évités par elle, auprès des clients finals ayant conclu un contrat de livraison directe, d'AVOIR dit que ces amendements et l'offre tarifaire afférente devraient être proposés dans le délai de deux mois à compter de la signification de l'arrêt et devront être soumis au CoRDIS dans le même délai à compter de la notification de l'arrêt ; d'AVOIR enjoint à la société GRDF de verser à la société Direct Énergie une rémunération égale à celle qui sera fixée entre elles pour la gestion des clients en contrat unique avec effet à compter du 21 juin 2005 s'agissant du contrat d'accès au réseau public de distribution conclu avec la société, Poweo, et à compter du 21 novembre 2008, s'agissant de celui signé avec la société Direct Energie, avec intérêts au taux compter de la date de l'arrêt ;

AUX MOTIFS QUE : « Sur l'illégalité de la décision du CoRDIS en ce qu'elle laisse à la charge du fournisseur la réalisation de prestations de peines et soins sans rémunération Compte tenu des principes énoncés par le CoRDIS, dont l'analyse est validée par la cour, il convient, ainsi que le demande la société Direct Energie, de ne pas laisser perdurer les clauses laissant à la charge du fournisseur la réalisation de prestations de peines et soins sans rémunération.
En conséquence, il y a lieu d'enjoindre à la société GRDF de proposer un avenant au contrat d'accès prévoyant, d'une part, la mise en conformité de cette convention aux principes énoncés ci-dessus, d'autre part, une rémunération équitable et proportionnée au regard des coûts évités par elle des prestations accomplies pour son compte auprès des clients.
À ce titre, le gestionnaire de réseau devra introduire dans l'avenant des clauses réputant non écrites les dispositions des contrats contraires aux principes énoncés ci-dessus et il devra aussi préciser que la société GRDF ne peut imposer au fournisseur d'accomplir des prestations relevant de ses missions de service, sans lui offrir une juste et équitable rémunération couvrant les coûts évités par lui.
Dès lors, il sera enjoint à la société GRDF, s'agissant des contrats CAD, de mettre ces conventions en conformité avec les principes sus énoncés, dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, en proposant à la société Direct Énergie un avenant à ce contrat d'accès au réseau prévoyant que :
Sont réputées n'avoir jamais existé entre les parties parce que contraires au code de l'énergie les clauses du contrat d'accès signé avec la société Poweo le 21 juin 2005 et du contrat d'accès conclu avec la société Direct Énergie le 21 novembre 2008 :

• subordonnant l'accès à ce contrat à l'acceptation par le fournisseur de la prestation d'intermédiation et qui vont au-delà de ce qu'exige la seule signature des CSL par le client lorsque celui-ci souhaite un contrat unique ;

• imposant au fournisseur de rendre des prestations à la société GRDF dont il ne pouvait à tout le moins négocier le prix ou les conditions de réalisation, notamment, lorsque le client n'est pas en contrat écrit ;

Une rémunération équitable et proportionnée au regard des coûts évités par elle des prestations accomplies pour son compte auprès des clients.

La même injonction sera prononcée au bénéfice de la société ENI concernant les clauses identiques contenues dans le contrat conclu entre elle et la société GRDF.
S'agissant du CLD, il sera précisé que la société GRDF ne peut conditionner l'accès au réseau de distribution à la réalisation de prestations non rémunérées par un tarif équitable et proportionné au regard des coûts évités par elle, auprès des clients finals ayant conclu un CLD.
S'agissant des prestations déjà rendues, il sera enjoint à la société GRDF de verser à la société Direct Energie une rémunération égale à celle qui sera fixée entre elles pour la gestion des clients en contrat unique avec effet à compter du 21 juin 2005 s'agissant du contrat d'accès au réseau public de distribution conclu avec la société Poweo, et à compter du novembre 2008, s'agissant de celui signé avec la société Direct Energie, avec intérêts au taux légal à compter de la date de l'arrêt » ;

ET AUX MOTIFS SUPPOSEMENT ADOPTES QUE :

« La société POWEO DIRECT ENERGIE demande au comité de dire réputées contraires à la réglementation sectorielle les stipulations du contrat d'acheminement sur le réseau de distribution de gaz naturel subordonnant l'accès à ce contrat à l'acceptation, par le fournisseur, de la prestation de relation d'intermédiation qui va au-delà de ce qu'exige le seule signature des Conditions Standard de Livraison par le client final et prétend exiger du fournisseur qu'il rende des prestations à la société GRDF dont il ne peut fixer librement le prix ou les conditions de réalisation.
Il résulte des dispositions précitées de l'article L. 12192 du code de la consommation, que dans le cadre du contrat unique institué par cet article, le fournisseur est l'interlocuteur unique du client final. Dès lors, cette représentation ne peut être effective que si le contrat d'acheminement sur le réseau de distribution de gaz naturel met en place un accord de représentation entre le gestionnaire de réseaux de distribution et le fournisseur, notamment pour ce qui est des procédures de réclamations.
Toutefois, il n'appartient pas au comité de règlement des différends et des sanctions, eu égard à la mission qui lui est impartie par le législateur, de qualifier, parmi les différents modes de représentation juridique, la relation contractuelle de représentation entre gestionnaire de réseaux et clients finals, ainsi que la rémunération afférente.
Sur les prestations réalisées sans rémunération par la société POWEO DIRECT ENERGIE au titre du Contrat de livraison direct La société POWEO DIRECT ENERGIE demande au comité de dire que « sont réputées contraires à la réglementation en vigueur, toutes les stipulations qui [
] obligent DE à fournir à GRDF la moindre prestation ou supporter la moindre charge dans le cadre du Contrat de livraison direct alors même qu'elle n'est pas intervenue dans la signature de cette convention entre GRDF et le client final ».
Cette demande n'est cependant pas assortie des éléments permettant d'en apprécier le bienfondé et ne peut, par suite, qu'être écartée.
Néanmoins, ainsi qu'il a été dit, la mission d'acheminement dévolue au gestionnaire de réseaux de distribution est réalisée pour le compte du client final. Dès lors, quel que soit le schéma contractuel choisi par le client (Conditions Standard de Livraison ou Contrat de livraison direct), il appartient au gestionnaire de réseaux de distribution de gaz naturel de supporter l'intégralité du risque qui s'attache à l'exercice de sa mission de service public. Par conséquent, le gestionnaire de réseaux de distribution de gaz naturel ne peut faire supporter aux fournisseurs les risques s'attachant à l'exercice de sa mission de service public et ce quel que soit le schéma contractuel choisi par le client » ;

ALORS 1/ QUE la qualification juridique de la relation contractuelle entre le GRD et le fournisseur ne ressort pas de la compétence du CoRDIS mais de celle du juge du contrat ; qu'en statuant sur les conditions financières de prestations de peines et soins effectuées par le fournisseur, sous couvert de ce qu'elles conditionnent l'accès aux réseaux, la cour d'appel, saisie d'un recours contre la décision du CoRDIS, a excédé ses pouvoirs en violation de l'article L. 134-19 du code de l'énergie ;

ALORS 2/ QUE s'agissant des réseaux gaziers, contrairement aux dispositions applicables en matière de télécommunications, aucune référence n'est faite au caractère équitable des conditions dans lesquelles l'accès au réseau doit être assuré ; que l'article L. 134-20 du code de l'énergie précise seulement que « la décision du comité [
] précise les conditions d'ordre technique et financier de règlement du différend dans lesquelles l'accès aux réseaux, ouvrages et installations mentionnés à l'article L. 134-19 ou leur utilisation sont, le cas échéant, assurés », quand l'article L. 36-8 du code des postes et communications électroniques dispose que la « décision [de l'ARCEP statuant en règlement des différends] est motivée et précise les conditions équitables, d'ordre technique et financier, dans lesquelles l'interconnexion ou l'accès doivent être assurés » ; qu'en enjoignant à la société GRDF de proposer un « tarif équitable » des services dans le cadre des CSL et du CLD, la cour d'appel a violé, par fausse application, l'article L. 36-8 du code des postes et communications électroniques, et, par refus d'application, l'article L. 134-20 du code de l'énergie ;

ALORS 3/ QU'en statuant ainsi, sans s'expliquer sur ce que pourrait être un tarif équitable, quand aucun texte du droit de l'énergie ne s'y réfère, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 134-20 du code de l'énergie.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 16-19851
Date de la décision : 21/03/2018
Sens de l'arrêt : Renvoi devant la cour de justice de l'u.e
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 02 juin 2016


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 21 mar. 2018, pourvoi n°16-19851


Composition du Tribunal
Président : Mme Mouillard (président)
Avocat(s) : SCP Piwnica et Molinié, SCP Rousseau et Tapie, SCP Thouin-Palat et Boucard

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:16.19851
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