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21/03/2018 | FRANCE | N°16-10655

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 21 mars 2018, 16-10655


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Donne acte à Mme Y... du désistement de son pourvoi ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que, le 19 septembre 2007, la caisse de Crédit mutuel Obernai-Ottrott, aux droits de laquelle vient la caisse de Crédit mutuel du Pays de Sainte-Odile (la banque), a consenti à la société Joann un prêt professionnel dont M. et Mme Y... se sont portés cautions solidaires ; qu'à la suite de la liquidation judiciaire de la société Joann, la banque les a assignés en paiement au titre de leur engagement de caut

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Sur le premier moyen :

Vu l'article L. 341-4, devenu L. 332-1 du cod...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Donne acte à Mme Y... du désistement de son pourvoi ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que, le 19 septembre 2007, la caisse de Crédit mutuel Obernai-Ottrott, aux droits de laquelle vient la caisse de Crédit mutuel du Pays de Sainte-Odile (la banque), a consenti à la société Joann un prêt professionnel dont M. et Mme Y... se sont portés cautions solidaires ; qu'à la suite de la liquidation judiciaire de la société Joann, la banque les a assignés en paiement au titre de leur engagement de caution ;

Sur le premier moyen :

Vu l'article L. 341-4, devenu L. 332-1 du code de la consommation ;

Attendu que, pour exclure toute disproportion de l'engagement de caution de M. Y... au jour de sa souscription et le condamner à payer diverses sommes à la banque, l'arrêt retient que celui-ci est propriétaire en commun d'un immeuble dont la valeur n'est pas justifiée ;

Qu'en se déterminant ainsi, sans mieux préciser l'objet de ce droit de propriété, dont M. Y... contestait l'existence au jour de la souscription de l'engagement litigieux, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du texte susvisé ;

Et sur le second moyen :

Vu l'obligation pour le juge de ne pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis, et l'article 4 du code de procédure civile ;

Attendu que, pour exclure tout manquement de la banque à son devoir de mise en garde et condamner M. Y... à lui payer diverses sommes, l'arrêt retient qu'un tel manquement n'est pas invoqué afin de faire écarter les prétentions de la banque ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'il résultait des conclusions d'appel de M. Y... que celui-ci sollicitait, à titre subsidiaire, le rejet de la demande en paiement de la banque pour manquement à son devoir de mise en garde, de sorte qu'il opposait un moyen de défense au fond, la cour d'appel a violé les principe et texte susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il déclare prescrite la demande reconventionnelle en dommages-intérêts de M. Y..., l'arrêt rendu le 30 septembre 2015, entre les parties, par la cour d'appel de Colmar ; remet, en conséquence, sur les autres points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Metz ;

Condamne la caisse de Crédit mutuel du Pays de Sainte-Odile aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer à M. Y... la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt et un mars deux mille dix-huit.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, avocat aux Conseils, pour M. Y...

PREMIER MOYEN DE CASSATION :
:

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir condamné M. Y..., solidairement avec Mme Z..., à payer à la société CCM Obernai Ottrott, aux droits de laquelle vient la CCM du Pays de Sainte-Odile, la somme de 138.948,66 €, avec intérêts au taux de 7,50% l'an et de la cotisation d'assurance-vie au taux de 0,50% l'an à compter du 30 mars 2012 jusqu'au 3 décembre 2012 sur la somme de 146.695,75 € et, à compter du 4 décembre 2012, sur la somme de 138.948,66 € et d'avoir débouté M. Y... de ses demandes ;

AUX MOTIFS QU' à l'instar de sa soeur, M. Josy Y... invoque également les dispositions de l'article L 341-4 du code de la consommation ; qu'il indique qu'il a deux enfants à charge et qu'il n'était propriétaire que d'une partie des parts de sa société, s'agissant d'une activité de prothésiste avec un seul salarié et soumise à une forte concurrence, notamment chinoise ; qu'il ajoute qu'au moment de son engagement, il était en cours de séparation avec son épouse, ajoutant qu'il a été condamné à lui verser une somme de 1.200 € par mois au titre du devoir de secours par ordonnance de non-conciliation du 10 mars 2008 ; qu'il résulte néanmoins de la fiche de renseignements qu'il a remplie qu'il avait déclaré en 2006, soit l'année précédant son engagement, des revenus de 77.700 €, ce qui correspond à une moyenne mensuelle de 6.475 € ; qu'il a précisé n'avoir aucun crédit en cours et n'avoir aucune charge de loyer ; que surtout, il indiquait avoir un revenu disponible de 4.500 € par mois ; que sur ce point, il soutient que ses revenus pour l'année 2007 seraient bien inférieurs puisque à hauteur de 12.276 € ; que néanmoins, il doit être constaté que le document fiscal qu'il produit à cet égard mentionne un revenu de 29.000 € ; que par ailleurs, il doit être précisé que l'année 2007 correspond à celle de la résidence séparée avec son épouse ; que dans cette mesure, M. Josy Y... a nécessairement fait une seconde déclaration de revenus qui a donné lieu à un avis d'imposition distinct pour la période de vie commune ; que son allégation selon laquelle il n'aurait fait qu'une déclaration ne peut être retenue ; qu'à l'opposé, il doit donc être admis qu'il ne justifie pas de l'intégralité de ses revenus pour l'année 2007 ; qu'au demeurant, il doit être noté qu'il a été condamné à verser à son épouse une contribution de 1.200 € par mois au titre de son devoir de secours par le juge aux affaires familiales, ce qui contredit manifestement ses allégations au regard d'une perte substantielle de revenus ; qu'il convient enfin de retenir que celui-ci détient 218 parts sur 500 parts de sa société au sein de laquelle il exerce une activité professionnelle de prothésiste ; que, par ailleurs, il était propriétaire de la moitié des parts sociales de la société Joann qui avait une valeur nette de 30.000€ ; qu'enfin, il est propriétaire en communauté d'un bien immeuble pour lequel il ne fournit aucune explication sur la valeur en actif net que celui-ci peut représenter ; qu'en considération de l'ensemble de ces éléments, force est donc de constater que M. Josy Y... ne justifie nullement que son engagement de caution était manifestement disproportionné à ses biens et revenus au moment où il a été conclu ;

ALORS QU' en cas de séparation de biens, la proportionnalité du cautionnement souscrit par l'un des époux doit s'apprécier au regard de son seul patrimoine et de ses revenus au jour de l'engagement de caution ; qu'en l'espèce, M. Y... était marié sous le régime de la séparation de biens au jour de son engagement de caution ; que la banque affirmait qu'il était « propriétaire en communauté de biens d'un immeuble bâti [...]                           » (concl., p. 9 § 1) ; que M. Y... faisait pourtant valoir que la fiche de renseignements remplie le 7 septembre 2007 indiquait qu'il était marié sous le régime de la séparation de biens, qu'il vivait dans un immeuble appartenant personnellement à sa femme, situé [...]                          , et qu'il n'était propriétaire d'aucun bien immobilier au jour de l'engagement litigieux (concl., p. 9 § 4, 5, p. 10 § 10, 11) ; qu'il produisait notamment l'acte de vente du 6 mai 2009 (pièce n° 5.6), justifiant qu'il avait acquis une maison d'habitation sise « [...]               » à [...] plus de deux ans après son engagement de caution conclu le 19 septembre 2007 ; qu'en jugeant que le cautionnement n'était pas manifestement disproportionné au jour où il a été conclu parce qu'il était « propriétaire en communauté d'un bien immeuble » (arrêt, p. 5 § 5), sans expliquer sur quelle pièce elle fondait cette affirmation erronée et contestée, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L 341-4 du code de la consommation.

SECOND MOYEN DE CASSATION :
:

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir condamné M. Y..., solidairement avec Mme Z..., à payer à la société CCM Obernai Ottrott, aux droits de laquelle vient la CCM du Pays de Sainte-Odile, la somme de 138.948,66 €, avec intérêts au taux de 7,50% l'an et de la cotisation d'assurance-vie au taux de 0,50% l'an à compter du 30 mars 2012 jusqu'au 3 décembre 2012 sur la somme de 146.695,75 € et, à compter du 4 décembre 2012, sur la somme de 138.948,66 € et d'avoir débouté M. Y... de ses demandes ;

AUX MOTIFS QUE les appelants estiment que la banque a manqué à son obligation de mise en garde à leur égard ; qu'ils expliquent que s'agissant d'un moyen de défense, celui-ci n'est pas atteint par la prescription ; qu'il convient néanmoins de noter que ces derniers invoquent le non-respect de son obligation de mise en garde par la société Caisse de Crédit Mutuel Obernai Ottrott au soutien de leurs demandes subsidiaires en paiement de dommages-intérêts ; que ce moyen n'est nullement invoqué afin de faire écarter les prétentions de la banque ; que s'agissant ainsi d'une demande et non d'une défense au fond, l'argument tiré de la prescription doit être examiné ; que sur ce point, en application des dispositions de l'article 2222 du code civil, la prescription de l'action en responsabilité est acquise passé un délai de cinq ans à compter de l'entrée en vigueur de la loi du 17 juin 2008 ; qu'en application de l'article 2224 du code civil, l'action personnelle ou mobilière se prescrit par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer ; qu'en l'espèce le délai de prescription court nécessairement à compter de la souscription du contrat ; que les engagements litigieux ont été souscrits le 19 septembre 2007 ; que la responsabilité de la société Caisse de Crédit Mutuel Obernai Ottrott devait donc être engagée au plus tard le 19 juin 2013 ; que ce n'est néanmoins que dans le cadre de leurs conclusions du 5 novembre 2013 que les appelants ont formulé, pour la première fois, une demande en paiement de dommages-intérêts, engageant ainsi la responsabilité de la banque ; que cette action est nécessairement prescrite en application des articles précités ;

ALORS QUE la prétention d'une partie tendant au rejet des demandes formées par son adversaire constitue un moyen de défense au fond, sur lequel la prescription est sans incidence ; que la caution, qui demande à être déchargée de son obligation de paiement en raison du manquement du créancier à son devoir de mise en garde, concluant au rejet de la prétention de son adversaire, soulève un moyen de défense ; qu'en l'espèce, M. Y... demandait, dans le dispositif de ses conclusions, à la cour d'appel de « débouter la banque de sa demande en raison du manquement à l'obligation de mise en garde » (concl., p. 18 § 3) ; qu'en jugeant néanmoins que le moyen relatif au manquement de la société CCM Obernai Ottrott à son devoir de mise en garde n'était « nullement invoqué afin de faire écarter les prétentions de la banque » et qu'il ne s'agissait ainsi pas d'un moyen de défense au fond (arrêt, p. 5 § 8 et 9), la cour d'appel a dénaturé les conclusions de M. Y... et a violé l'article 4 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 16-10655
Date de la décision : 21/03/2018
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Colmar, 30 septembre 2015


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 21 mar. 2018, pourvoi n°16-10655


Composition du Tribunal
Président : Mme Batut (président)
Avocat(s) : SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, SCP Matuchansky, Poupot et Valdelièvre

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:16.10655
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