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15/03/2018 | FRANCE | N°17-12751

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 15 mars 2018, 17-12751


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique du pourvoi principal, ci-après annexé :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 29 septembre 2016), rendu sur renvoi après cassation (3e Civ., 11 mars 2014, pourvoi n° 13-12.565), qu'en 1999, la société Gérance générale foncière (société GGF) a entrepris la construction de sept villas ; qu'une mission de maîtrise d'oeuvre a été confiée à M. X..., assuré auprès de la société Allianz ; que la société Fernandes Castro, assurée auprès de la société MA

AF et représentée par son liquidateur judiciaire, est intervenue en qualité d'entreprise g...

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique du pourvoi principal, ci-après annexé :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 29 septembre 2016), rendu sur renvoi après cassation (3e Civ., 11 mars 2014, pourvoi n° 13-12.565), qu'en 1999, la société Gérance générale foncière (société GGF) a entrepris la construction de sept villas ; qu'une mission de maîtrise d'oeuvre a été confiée à M. X..., assuré auprès de la société Allianz ; que la société Fernandes Castro, assurée auprès de la société MAAF et représentée par son liquidateur judiciaire, est intervenue en qualité d'entreprise générale ; que la réception des villas a eu lieu le 28 août 2000 ; que, des glissements de terrain affectant certaines villas étant survenus en 2005, la société GGF a, après expertise, assigné M. X..., la société Fernandes Castro et leurs assureurs en réparation des préjudices subis ;

Attendu que la société GGF fait grief à l'arrêt de limiter à 55 500 euros l'indemnisation due au titre des travaux de reprise et de rejeter sa demande en paiement de la somme de 659 079,32 euros ;

Mais attendu qu'ayant relevé que la demande du maître de l'ouvrage était fondée sur une expertise amiable non contradictoire établie le 8 octobre 2012, soit au-delà du délai d'épreuve décennal, et que l'expert judiciaire n'avait constaté dans ce délai aucun désordre d'affaissement important des jardins pour les villas numéros 31, 35 et 39 et avait écarté un premier devis nettement supérieur au seul montant des travaux de reprise utiles des villas portant les numéros 33 et 34, la cour d'appel, qui, sans violer le principe de la contradiction, a déduit de ces seuls motifs qu'une indemnisation complémentaire n'était pas justifiée, a légalement justifié sa décision ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le pourvoi incident qui n'est qu'éventuel :

REJETTE les pourvois ;

Condamne la société Gérance générale foncière aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quinze mars deux mille dix-huit.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyen produit au pourvoi principal par Me Z..., avocat aux Conseils, pour la société Gérance générale foncière

Il est fait grief à l'arrêt attaqué

D'AVOIR limité à 55 500 euros HT l'indemnisation due à la société Gérance générale foncière au titre des travaux de reprise et D'AVOIR débouté la société Gérance générale foncière de sa demande en paiement de la somme de 659 079,32 euros TTC au titre de travaux de reprise ;

AUX MOTIFS QUE, sur les désordres et les responsabilités, en se fondant sur les constatations de l'expert A..., dont la compétence, le sérieux et l'impartialité ne font l'objet d'aucune contestation, en estimant que les désordres sont constitués par l'affaissement d'un talus et sont constitutifs d'un vice du sol, en précisant que les jardins aménagés le long des façades ouest des villas portant les numéros 33 et 34 présentent un risque d'éboulement majeur pouvant constituer un danger pour les occupants des villas en question, et qu'il est donc nécessaire de prévoir des dispositifs permettant d'y remédier, en ajoutant qu'aucune des parties ne conteste le risque d'éboulement mentionné par l'expert qui constitue un risque direct d'atteinte à la sécurité des personnes, en qualifiant ce désordre de décennal puisque le risque d'atteinte à la sécurité des personnes porte atteinte à l'habitabilité de l'ouvrage, rendu donc impropre à sa destination, en précisant que l'affaissement des jardinets de ces deux villas est la conséquence de la conjonction de deux absences d'ouvrage à savoir : - d'une part, l'absence de dispositifs de recueillement et de collecte des eaux de pluie en provenance de la toiture des villas, - d'autre part, l'absence de dispositif de maintien des terres de remblai compte tenu de la forte pente des talus en tête desquels les remblais ont été réalisés, notamment pour ce qui concerne les villas numéros 33 et 34, en déclarant responsables sur le fondement de l'article 1792 du code civil, tant le maître d'oeuvre qui avait une mission complète que l'entreprise générale, alors qu'aucune cause exonératoire de responsabilité n'était démontrée, le premier juge a fait une juste analyse des faits de la cause, appliqué à l'espèce les règles de droit qui s'imposaient et pertinemment répondu aux moyens des parties pour la plupart repris en appel ; qu'à ces justes motifs que la cour adopte, il convient seulement d'ajouter que les désordres analysés par l'expert dans son rapport du 17 novembre 2008 le furent moins de dix ans après la réception, dont il n'est pas contesté qu'elle est intervenue le 28 août 2000, qu'une villa avec jardin constitue en elle-même un ouvrage au sens de l'article 1792 du code civil ; qu'il n'est nullement démontré que les désordres précédemment décrits sont imputables à un autre intervenant, qu'il s'agisse du lotisseur initial ou de la société chargée de l'étude géotechnique, qui, dans ses différents rapports, a formulé un certain nombre d'observations utiles et de réserves, compte tenu notamment de l'existence de remblais et de la sensibilité du sous-sol au ravinement des eaux de pluie qui provoque la dégradation des terrains par entraînement des particules fines (rapport de la société Gehygeo du 28 février 2000) ; qu'en présence d'un terrain d'assise ayant fait l'objet de remblaiement, de la construction de 6 des 7 villas à quelques mètres seulement de la crête du talus pentu du [...] (pièce 40 du maître de l'ouvrage), il appartenait au maître d'oeuvre de concevoir un ouvrage adapté au sol et de prévoir notamment tous dispositifs permettant l'écoulement des eaux pluviales afin d'éviter un grave affaissement des jardins entourant les villas ; qu'il en est de même pour l'entreprise générale, qui a ici réalisé un ouvrage dont une partie, les jardinets, présentait un risque sérieux d'affaissement, qui s'est réalisé ; qu'elle était d'ailleurs chargée, non seulement des travaux de gros oeuvre, mais encore de terrassements, impliquant donc la préparation des terrains où devait être construites les villas et aménagés leurs jardins ; qu'ainsi, aux termes du C.C.T.P. « les travaux de terrassement... comprendront : - les terrassements en déblai et en excavation, - les terrassements en remblai, - les mouvements de terre en déblai et en remblai ; nécessaires pour réaliser : - la plate-forme ou les différentes plates-formes ainsi que les talus ou glacis de raccordement et autres aux cotes du projet, - la ou les excavations aux cotes du projet » ; qu'il lui appartenait donc, en qualité de professionnelle de la construction, d'entreprise tous corps de métier chargée notamment du lot terrassement - gros oeuvre, d'exécuter sa mission conformément aux règles de l'art et aux prescriptions contractuelles, afin notamment de mettre à la disposition de l'entreprise chargée d'aménager in fine les jardins des parcelles dûment terrassées et non susceptibles d'importants affaissements ; que chacun de ces deux intervenants à la construction étant à l'origine de l'entier dommage subi par le maître de l'ouvrage, une condamnation in solidum à l'indemniser devait donc être prononcée ; qu'ainsi, la décision déférée doit être confirmée en ce que le premier juge a estimé que les désordres affectant les jardins des deux villas en question étaient des désordres décennaux relevant de la responsabilité du maître d'oeuvre et de l'entreprise générale, telle que définie aux articles 1792 et suivants du code civil ; que, par contre, alors que l'indemnisation complémentaire sollicitée par le maître de l'ouvrage devant la cour de renvoi, fortement contestée par le maître d'oeuvre et les assureurs décennaux, l'est, d'une part, après examen des lieux intervenu le 19 septembre 2012, sur le fondement d'un rapport d'expertise amiable établi le 8 octobre 2012 de façon non contradictoire, au-delà du délai d'épreuve de 10 ans puisque la réception est du 28 août 2000, d'autre part, de factures non soumises à l'examen d'un expert judiciaire, concernant d'ailleurs des travaux confortatifs des villas, cette réclamation n'est pas justifiée, la société Gérance générale foncière devant donc en être déboutée ; que, sur l'indemnisation, dans le délai d'épreuve décennal, et conformément à l'examen de l'expert judiciaire A..., les seuls désordres d'affaissement important des jardins présentant un risque pour la sécurité des personnes, sont ceux affectant : - d'une part, la villa 33 : avec affaissement d'une quarantaine de centimètres entraînant le déchirement du PVC gaufré du drainage vertical le long de la partie enterrée du mur de façade ouest, affaissement provenant du glissement de la partie supérieure du talus qui n'a pas été conforté, et de l'absence de dispositif de recueil des eaux en provenance de la toiture (§ 5.2.2), - d'autre part, la villa 34 : avec affaissement d'une vingtaine de centimètres, entraînant également le déchirement du PVC gaufré du drainage vertical le long de la partie enterrée du mur de façade ouest, et procédant des mêmes causes ; que tel n'est pas le cas des villas portant les numéros 31, 35 et 39 ; qu'en conséquence, s'il convient, pour évaluer le coût des travaux de reprise, de se fonder sur l'évaluation de l'expert judiciaire commis qui avait écarté un premier devis nettement supérieur au seul montant des travaux de reprise utiles concernant les deux villas concernées, puisqu'il portait également sur des travaux de reprise en sous oeuvre des villas (devis du 11 août 2008 de C3R), les travaux de reprise des villas portant le numéro 33 et 34 doivent être évalués comme suit, soit pour chacune des villas : - réalisation d'une paroi berlinoise en limite ouest y compris terrassement et tirants de maintien pour 50 m² : hors-taxes 25 000 euros, - dépose clôture et mise en place nouvelle clôture : hors-taxes 1 000 euros, - réalisation d'un caniveau en pied de façades ouest y compris exutoire : hors-taxes 750 euros, - remise en état du jardin y compris apport de terre végétale et remise à niveau : hors-taxes 1 000 euros, soit un total hors-taxes de 27 750 euros et pour deux villas de 55 500 euros ; qu'alors qu'il n'est pas contesté que le maître de l'ouvrage récupère la TVA, il n'y a pas lieu de prononcer une condamnation toutes taxes comprises ; qu'en conséquence, le jugement déféré doit être partiellement réformé quant au montant des travaux de reprise ; que, sur les assureurs, alors que la compagnie Allianz est l'assureur décennal du maître d'oeuvre, c'est à juste titre que le premier juge l'a condamnée à indemniser le maître de l'ouvrage, sauf à dire que dans ses rapports avec son assuré, ce dernier devra garder à sa charge le montant de la franchise contractuelle ; qu'au surplus, alors que l'entreprise générale fait l'objet d'une procédure de liquidation judiciaire, que la société Maaf est son assureur décennal, c'est également à juste titre que le premier juge l'a condamnée in solidum à indemniser le maître de l'ouvrage ;

ALORS, 1°), QUE, si le juge ne peut se fonder exclusivement sur une expertise réalisée à la demande de l'une des parties, il est tenu d'examiner toute pièce régulièrement versée aux débats et soumise à la discussion contradictoire ; qu'en considérant, pour rejeter la demande d'indemnisation complémentaire formulée par la société Gérance générale foncière, que celle-ci était fondée, d'une part, sur un rapport d'expertise amiable établi de façon non contradictoire et, d'autre part, sur des factures non soumises à l'examen d'un expert judiciaire, la cour d'appel, qui n'a pas examiné ces pièces dont la communication régulière et la discussion contradictoire n'étaient pourtant pas contestées, a violé l'article 16 du code de procédure civile ;

ALORS, 2°), QUE les nouveaux désordres constatés au-delà de l'expiration du délai décennal, délai d'épreuve, dits désordres évolutifs, relèvent de la garantie décennale lorsqu'ils trouvent leur siège dans l'ouvrage où un désordre de même nature avait été constaté et dont la réparation avait été demandée en justice avant l'expiration de ce délai ; qu'en considérant, pour rejeter la demande d'indemnisation complémentaire formulée par la société Gérance générale foncière, que celle-ci était fondée sur un rapport d'expertise amiable établi après l'expiration du délai de garantie décennale, sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si les désordres constatés dans ce rapport d'expertise amiable, qui affectaient principalement les villas n° 33 et 34, ne constituaient pas l'aggravation de ceux qui avaient été constatés par l'expert judiciaire sur ces deux villas et dont la réparation avait été demandée en justice avant l'expiration dudit délai, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article 1792 du code civil. Moyen produit au pourvoi incident éventuel par la SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, avocat aux Conseils, pour M. X... et la société Allianz

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé le jugement ayant déclaré M. X... responsable des désordres constatés par l'expert, d'avoir condamné M. X... et la SA Allianz in solidum avec la société MAAF assurances à payer à la société Gérance générale foncière la somme de 55.500 € HT au titre des travaux de reprise, outre l'indexation sur l'indice BT 01 à compter de la signification de l'assignation, d'avoir condamné M. X... et la SA Allianz in solidum avec la compagnie MAAF assurances à payer à la SA Gérance générale foncière les sommes de 5.000 € et 8.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE sur les désordres et les responsabilités : en se fondant sur les constatations de l'expert A..., dont la compétence, le sérieux et l'impartialité ne font l'objet d'aucune contestation, en estimant que les désordres sont constitués par l'affaissement d'un talus et sont constitutifs d'un vice du sol, en précisant que les jardins aménagés le long des façades ouest des villas portants les numéros 33 et 34 présentent un risque d'éboulement majeur pouvant constituer un danger pour les occupants des villas en question, et qu'il est donc nécessaire de prévoir des dispositifs permettant d'y remédier, en ajoutant qu'aucune des parties ne conteste le risque d'éboulement mentionné par l'expert qui constitue un risque direct d'atteinte à la sécurité des personnes, en qualifiant ce désordre de décennal puisque le risque d'atteinte à la sécurité des personnes porte atteinte à l'habitabilité de l'ouvrage, rendu donc impropre à sa destination, en précisant que l'affaissement des jardinets de ces deux villas est la conséquence de la conjonction de deux absences d'ouvrage à savoir : - d'une part, l'absence de dispositifs de recueillement et de collecte des eaux de pluie en provenance de la toiture des villas, - d'autre part, l'absence de dispositifs de maintien des terres de remblai compte tenu de la forte pente des talus en tête desquels les remblais ont été réalisés, notamment pour ce qui concerne les villas numéro [...] et [...], en déclarant responsables sur le fondement de l'article 1792 du code civil, tant le maître d'oeuvre qui avait une mission complète que l'entreprise générale, alors qu'aucune cause exonératoire de responsabilité n'était démontrée, le premier juge a fait une juste analyse des faits de la cause, appliqué à l'espèce les règles de droit qui s'imposaient et pertinemment répondu aux moyens des parties pour la plupart repris en appel ; à ces justes motifs que la cour adopte, il convient seulement d'ajouter : que les désordres analysés par l'expert dans son rapport du 17 novembre 2008 le furent moins de 10 ans après la réception, dont il n'est pas contesté qu'elle est intervenue le 28 août 2000, qu'une villa avec jardin constitue en elle-même un ouvrage au sens de l'article 1792 du code civil, qu'il n'est nullement démontré que les désordres précédemment décrits sont imputables à un autre intervenant, qu'il s'agisse du lotisseur initial ou de la société chargée de l'étude géotechnique, qui, dans ses différents rapports, a formulé un certain nombre d'observations utiles et de réserves, compte tenu notamment de l'existence de remblais et de la sensibilité du sous-sol au raffinement des eaux de pluie qui provoque la dégradation des terrains par entraînement des particules fines (rapport de la SARL Gehygeo du 28.2.2000) ; qu'en présence d'un terrain d'assise ayant fait l'objet de remblaiement, de la construction de 6 des 7 villas à quelques mètres seulement de la crête du talus pentu du [...] (pièce 40 du maître de l'ouvrage), il appartenait au maître d'oeuvre de concevoir un ouvrage adapté au sol et de prévoir notamment tout dispositif permettant l'écoulement des eaux pluviales afin d'éviter un grave affaissement des jardins entourant les villas ; qu'il en est de même pour l'entreprise générale [
] ; que chacun de ces deux intervenants à la construction étant à l'origine de l'entier dommage subi par le maître de l'ouvrage, une condamnation in solidum à l'indemniser devra donc être prononcée ; ainsi, la décision déférée doit être confirmée en ce que le premier juge a estimé que les désordres affectant les jardins des deux villas en question étaient des désordres décennaux relevant de la responsabilité du maître d'oeuvre et de l'entreprise générale, telle que définie aux articles 1792 et suivants du code civil ; [
] sur l'indemnisation : dans le délai d'épreuve décennal et conformément à l'examen de l'expert judiciaire A..., les seuls désordres d'affaissement important des jardins présentant un risque pour la sécurité des personnes sont ceux affectant - d'une part, la villa 33 [
] - d'autre part, la villa 34 [
] ;

ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE sur les demandes de la société Gérance générale foncière : il résulte du rapport d'expertise de M. A... que : l'expert a constaté les désordres suivants : [
] - [...]       - le terrain aménagé en jardinet le long de la façade ouest de la villa s'est affaissé d'une quarantaine de centimètres, entraînant le déchirement du PVC gaufré du drainage vertical le long de la partie enterrée du mur de façade ouest ; ce jardinet d'une largeur de l'ordre de 1,50 m à 2,00 m a manifestement été créé par un apport de terre végétale en tête d'un talus extrêmement pentu de l'ordre de 60 degrés ; cet affaissement provient du glissement de cette partie supérieure du talus qui n'a pas été conforté de quelque manière que ce soit ; en outre, aucun dispositif de recueil des eaux en provenance de la toiture n'a été mis en place, de sorte que les eaux en provenance du pan ouest de la couverture de la villa tombent en pied du mur de façade et s'infiltrent dans le sol favorisant ainsi la formation d'une sorte de loupe de glissement ; - aucun désordre structurel de la villa susceptible de résulter de cet affaissement est à constater ; on peut donc en conclure que, dans l'état actuel des choses, ce glissement n'affecte pas les fondations de la villa ; l'expert précise que le glissement de terrain constaté n'affecte pas les villas proprement dites ; par contre il rend le jardinet situé à l'arrière de la villa impropre à sa destination ; en outre son caractère est fortement évolutif ; si aucune disposition n'est mise en oeuvre pour stabiliser ce glissement, la partie de terrain à l'arrière de la villa sera emportée vers le talweg en contrebas à l'occasion d'une précipitation quelque peu importante ; - [...]       - le terrain aménagé en jardinets le long de la façade ouest de la villa, d'une largeur de l'ordre de 2 m, s'est affaissé d'une vingtaine de centimètres, entraînant le glissement du PVC gaufré du drainage vertical le long de la partie enterrée du mur de façade ouest dans l'angle nord-ouest de la villa ; cet affaissement procède des mêmes causes que celui de la [...]       ; - sur la villa proprement dite : - en pignon nord des multifissures d'une ouverture de l'ordre de 1 à 3 mm, verticales et horizontales à la jonction des génoises et de la maçonnerie du mur pignon nord, - en façade est, une amorce de fissure verticale millimétrique en partie haute du mur de façade dans l'angle nord-est de la villa ; l'expert précise que, comme pour la [...]      , le glissement de terrain constaté n'affecte pas la villa proprement dite ; par contre il rend le jardinet situé à l'arrière de la villa impropre à sa destination ; en outre son caractère est fortement évolutif ; si aucune disposition n'est mise en oeuvre pour stabiliser ce glissement, la partie de terrain à l'arrière de la villa sera emportée vers le talweg en contrebas à l'occasion d'une précipitation quelque peu importante ; les désordres affectant la structure de la villa qui consistent dans des fissurations millimétriques résultant de variations dimensionnelles relatives à la jonction de matériaux différents (béton-maçonnerie), même s'ils peuvent avoir un caractère légèrement évolutif, ne compromettent pas la solidité de l'ouvrage et ne sont pas de nature à le rendre impropre à sa destination ; en aucun cas ils ne résultent d'un problème de fondation des villas ou de fouille du terrain ; [
] les désordres structurels affectant les villas ne sont en aucune manière liés aux tassements de terrain constatés ; les fondations de ces villas n'en sont a priori pas affectées ; néanmoins les jardins aménagés le long des façades ouest des villas n° [...] et [...] présentent un risque d'éboulement majeur pouvant constituer un danger pour les occupants des villas en question ; il est donc nécessaire de prévoir des dispositifs permettant d'y remédier ; les travaux nécessaires pour y remédier peuvent consister dans la réalisation d'une paroi type berlinoise (
) ; lorsque ces ouvrages seront réalisés le conviendra de procéder à la remise en état des drainages endommagés et des jardins ; toutefois pour ces villas, comme par mesure de précaution pour l'ensemble des autres villas, un dispositif de captage des eaux de pluie en provenance du pan ouest des toitures doit être mis en place ; compte tenu de l'impossibilité « administrative » de mettre en place des gouttières en partie basse de la toiture, ce captage doit être réalisé au niveau du sol par un caniveau raccordé à un exutoire pouvant diriger les eaux vers le talweg situé en aval à une distance suffisamment grande pour éviter l'érosion du talus au débouché ; les désordres constatés sont la conséquence de la conjonction de deux absences d'ouvrage, à savoir : - d'une part l'absence de dispositifs de recueillement et de collecte des eaux de pluie en provenance de la toiture des villas, - d'autre part l'absence de dispositifs de maintien des terres de remblais compte tenu de la forte pente des talus en tête desquels les remblais ont été réalisés, notamment pour ce qui concerne les villas n° [...] et [...], ces absences d'ouvrages constituent des vices de conception ; aux termes de l'article 1792 du code civil, tout constructeur d'un ouvrage est responsable de plein droit, envers le maître ou l'acquéreur de l'ouvrage, des dommages, même résultant d'un vice du sol, qui compromettent la solidité de l'ouvrage ou qui, l'affectant dans l'un de ses éléments constitutifs ou l'un de ses éléments d'équipement, le rendent impropre à sa destination ; une telle responsabilité n'a lieu si le constructeur prouve que les dommages proviennent d'une cause étrangère ; il en résulte que les dommages, même résultant d'un vice du sol, qui rendent l'ouvrage impropre à sa destination entre dans le champ d'application des dispositions de l'article 1792 du code civil ; en l'espèce, les désordres sont constitués par l'affaissement d'un talus et sont consécutifs à un vice du sol ; il résulte du rapport d'expertise que les fondations des villas ne sont pas affectées de désordres significatifs, mais que les jardins aménagés le long des façades ouest des villas n° [...] et [...] présentent un risque d'éboulement majeur pouvant constituer un danger pour les occupants des villas en question, et qu'il est donc nécessaire de prévoir des dispositifs permettant d'y remédier ; aucune des parties ne conteste que le risque d'éboulement mentionné par l'expert constitue un risque direct d'atteinte à la sécurité des personnes ; le risque d'atteinte à la sécurité des personnes porte atteint à l'habitabilité de l'ouvrage, et rend donc l'ouvrage impropre à sa destination ; il résulte du rapport d'expertise que l'affaissement des jardinets des villas n° [...] et [...] est la conséquence de la conjonction de deux absences d'ouvrage, à savoir : - d'une part l'absence de dispositifs de recueillement et de collecte des eaux de pluie en provenance de la toiture des villas, - d'autre part l'absence de dispositifs de maintien des terres de remblais compte tenu de la forte pente des talus en tête desquels les remblais ont été réalisés, notamment pour ce qui concerne les villas n°[...] et [...] ; il résulte du contrat en date du 2 juin 1999 que M. X... avait une mission de maîtrise d'oeuvre complète, incluant l'évaluation du coût des équipements et des charges d'aménagement du site, l'établissement du cahier des clauses techniques particulières, et le suivi des travaux (DET) ; il résulte par ailleurs du CCTP que les travaux de terrassement inclus et les terrassements nécessaires pour réaliser la plate-forme où les différentes plates-formes ainsi que les talus ou glacis de raccordement et autres aux côtes du projet, et là ou l'excavation aux côtes du projet ; il en résulte que M. X... et la SARL Fernandes Castro sont intervenus en qualité de constructeurs de l'ouvrage ; M. X... et la MAAF ne démontrent la réalité d'aucune cause étrangère ; il convient en conséquence de déclarer M. X... responsable des désordres constatés par l'expert ;

1°) ALORS QUE pour juger que les désordres affectant les jardins des deux villas n° [...] et [...] rendaient l'ouvrage impropre à sa destination en raison d'une « atteinte à l'habilité de l'ouvrage » et relevaient par conséquent de la responsabilité décennale, la cour d'appel, adoptant expressément les motifs du jugement de première instance, a retenu qu'« aucune des parties ne conteste le risque d'éboulement mentionné par l'expert qui constitue un risque direct d'atteinte à la sécurité des personnes » (arrêt, p. 9 § 6, reprenant le jugement, p. 10 § 5) ; qu'en statuant ainsi, cependant que dans leurs conclusions n° 2 du 24 mai 2016, M. X... et la société Allianz contestaient le risque d'éboulement en soutenant que « plus de 15 ans après l'achèvement des travaux, aucun éboulement des remblais ne s'est à ce jour produit ce qui confirme par les faits (prod.) l'avis de M. A..., expert judiciaire qui indiquait que leur instabilité, bien qu'ayant un caractère évolutif, ne compromettait pas la solidité de l'ouvrage et n'était pas de nature à les rendre impropre à sa destination » (concl., p. 9 § 9, prod. adverse n° 7), la cour d'appel a dénaturé les conclusions dont elle était saisie et violé l'article 4 du code de procédure civile ;

2°) ALORS QUE la prise en compte de dommages futurs au titre de la responsabilité décennale est subordonnée à la certitude de survenance d'une atteinte à la solidité de l'ouvrage ou d'une impropriété à destination pendant la période de dix ans suivant la réception des travaux ; que tel est le cas lorsque le désordre dénoncé constitue un facteur de risque certain pour la sécurité des personnes dans le délai décennal ; que pour qualifier le désordre de décennal, la cour d'appel a retenu que « les jardins aménagés le long des façades ouest des villas portant les numéros [...] et [...] présentent un risque d'éboulement majeur pouvant constituer un danger pour les occupants en question » (arrêt, p. 9 § 6) et que les désordres d'affaissement importants des jardins des villas [...] et [...] « présenta[ie]nt un risque pour la sécurité des personnes » (arrêt, p. 11 § 1) ; qu'en statuant ainsi, sans caractériser de risque certain d'éboulement dans le délai de la garantie décennale, la cour d'appel, qui n'a pas caractérisé l'impropriété de l'ouvrage à sa destination, a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1792 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 17-12751
Date de la décision : 15/03/2018
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 29 septembre 2016


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 15 mar. 2018, pourvoi n°17-12751


Composition du Tribunal
Président : M. Chauvin (président)
Avocat(s) : Me Haas, Me Le Prado, SCP Baraduc, Duhamel et Rameix

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:17.12751
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