LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, ci-après annexé :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 15 novembre 2016), que, le 24 août 2010, Mme Y... a vendu à M. X... un immeuble moyennant paiement d'un capital et d'une rente viagère ; que, M. X... n'ayant pas payé les rentes des mois de novembre 2013, décembre 2013 et février 2014, Mme Y... lui a fait délivrer un commandement de payer visant la clause résolutoire ; qu'en l'absence de paiement, Mme Y... l'a assigné en résolution de la vente ;
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de constater la résolution de la vente et de dire que les sommes perçues par Mme Y... ainsi que tous les embellissements et améliorations apportés au bien restent dus à titre de dommages-intérêts ;
Mais attendu qu'ayant, par motifs propres et adoptés, relevé que l'acte authentique prévoyait expressément la résolution de plein droit de la vente à défaut de paiement à son exacte échéance d'un seul terme de la rente viagère et que le commandement de payer visait les rentes des mois de novembre 2013, décembre 2013 et février 2014, constaté que celles-ci n'avaient été payées par M. X... et retenu exactement que celui-ci ne pouvait procéder, de sa propre autorité, à une compensation unilatérale entre le compte relatif aux rentes viagères et le compte des charges, alors qu'il ne pouvait croire, en raison des termes clairs et précis de l'acte de vente, qu'il incombait à Mme Y... de faire l'avance de toutes les charges, la cour d'appel, qui a déduit à bon droit de ces seuls motifs que la résolution de la vente était acquise, a légalement justifié sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de M. X... et le condamne à payer à Mme Y... la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quinze mars deux mille dix-huit.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat aux Conseils, pour M. X...
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR constaté la résolution de la vente conclue le 24 août 2014 entre madame Y... et monsieur X... portant sur les lots 23, 40 et 46 d'un immeuble sis [... , d'AVOIR ordonné la publication de la décision à la conservation des hypothèques de Nice, d'AVOIR dit que toutes les sommes perçues par madame Y... ainsi que tous les embellissements et améliorations apportés aux biens vendus à titre de dommages-intérêts contractuellement et forfaitairement fixés, et d'AVOIR précisé, pour les besoins de la publicité foncière, la composition des biens objets de la vente ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE « I) Le contrat de vente : Le contrat de vente passé le 24 août 2010 entre Mme Y... veuve Z..., venderesse, et M. Robert X..., acquéreur, porte sur trois lots de copropriété de l'ensemble immobilier sis [...] , soit le lot n°40 consistant en un appartement avec les 333/10.000èmes indivis du sol et des parties communes, le lot n°23 consistant en une cave avec les 5/10.000èmes indivis du sol et des parties communes, et le lot n°66 consistant en la jouissance d'un parking avec les 10/10.000èmes indivis du sol et des parties communes. Cette vente est en viager, avec conservation par la venderesse des droits d'usage et d'habitation sa vie durant. La rente fixée au contrat de vente est de 9.420 euros par an, somme susceptible de variation selon un indice convenu, payable d'avance en douze termes mensuels égaux, par échéances de 785 euros initialement, le premier de chaque mois. Les biens concernés étant soumis au statut de la copropriété, le contrat prévoit que : "l'acquéreur s'oblige à payer tous impôts et taxes fonciers, primes d'assurances souscrites par le syndicat des copropriétaires, et autres charges afférentes aux biens, objet des présentes, sauf les charges mises par la loi ou par la présente convention à la charge des locataires qui seront payées par le vendeur. Le vendeur devra rembourser à l'acquéreur toutes les charges locatives dont le syndicat des copropriétaires serait en droit d'exiger de l'occupant". Par ailleurs l'acte précise que : "comme conséquence du droit d'usage et d 'habitation qu'il se réserve, le réservataire souffrira les charges de jouissance et continuera d'acquitter les dépenses d'abonnements, de consommations, de fournitures, de réparation, d'entretien et toutes charges de copropriété dites "locatives" afférentes au bien vendu, la taxe d'enlèvement des ordures ménagères" et que : "l'acquéreur de son côté acquittera la taxe foncière sur les propriétés bâties ainsi que les charges de copropriété dites "propriétaires" afférentes au bien vendu". M. X... se prévaut d'une disposition de la promesse synallagmatique de vente selon laquelle il était prévu que le réservataire du droit d'usage et d'habitation continuerait de faire l'avance de toutes les charges, l'acquéreur lui remboursant celles qui lui incombant. Il rappelle cependant qu'il a bien conscience que cette clause n'a pas été reprise dans l'acte authentique. Rien n'empêchait les parties de convenir dans l'acte authentique une disposition différente, plus simple, plus conforme au droit, selon laquelle le propriétaire paie les charges de copropriété et récupère sur l'occupant la part de charges correspondant aux charges locatives. C'est cette disposition de l'acte authentique de vente qui fait loi entre les parties. Les dispositions de cet acte sont claires. L'acquéreur doit payer la rente mensuellement le 1er du mois à Mme Y... veuve Z.... En tant que propriétaire, M. X... doit payer les charges de copropriété et, s'il les a réellement payées, récupérer les charges locatives sur Mme Y... veuve Z.... Le paiement des rentes n'a aucun rapport avec celui des charges. En tout état de cause, M. X... doit s'acquitter mensuellement du paiement des rentes en viager. Il doit payer toutes les charges de copropriété et Mme Y... veuve Z... lui verser la part des charges lui incombant, correspondant aux charges locatives. Le comptes de charges entre les parties est indépendant du compte de paiement des rentes et M. X... ne peut, de sa propre autorité, décider de procéder à une compensation unilatérale entre le compte des charges et celui relatifs aux rentes de la vente en viager. Il) La situation des parties suite au commandement du 10 juin 2014 : Il n'est pas contesté qu'aux dates de novembre 2013 à février 2014 inclus, le montant mensuel de la rente était de 801,57 euros. Le 10 juin 2014, Mme Y... veuve Z... a fait signifier en personne à M. Robert X... un commandement d'avoir à payer dans les trente jours les sommes correspondant aux rentes des mois de novembre 2013, décembre 2013 et février 2014, soit 2.404,62 euros, outre les frais de l'acte. Ce commandement rappelait expressément les termes de la clause résolutoire sus-énoncée, dont Mme Y... veuve Z... précisait se prévaloir. L'acte authentique de vente du 24 août 2010 contient en effet en page sept , au chapitre "convention relative à la rente" , la clause suivante : "en outre, et par dérogation des dispositions de l'article 1978 du code civil, il est expressément convenu qu'à défaut de paiement à son exacte échéance, d'un seul terme de la rente viagère présentement constituée, la présente vente sera de plein droit et sans mise en demeure préalable, purement et simplement résolue sans qu'il soit besoin de remplir aucune formalité judiciaire, un mois après un simple commandement de payer demeuré infructueux contenant déclaration par le crédirentier de son intention d'user du bénéfice de la présente clause." Cette clause est bien une clause résolutoire de plein droit. Il est bien précisé qu'elle déroge conventionnellement aux dispositions de l'article 1978 du code civil. Il résulte du commandement du 10 juin 2014 que, faute de paiement par M. X... avant le 11 juillet 2014 de la somme de 2.404,71 euros correspondant aux rentes des mois de novembre 2013, décembre 2013 et février 2014, la vente du 24 août 2010 est résolue de plein droit. M. X... met en avant le compte des charges de copropriété entre Mme Y... veuve Z... et lui pour prétendre que, du fait d'un trop payé prétendu de charges de sa part, il pouvait se rembourser de ce trop payé en ne s'acquittant des rentes pour un montant équivalent. Il a déjà été vu plus haut que la question du règlement des charges de copropriété est sans lien avec celle du paiement des rentes viagères et que M. X... ne pouvait se permettre de considérer qu'en ne payant pas les rentes de viager il se remboursait des charges. Il doit être en outre observé que M. X... ne justifie pas avoir payé régulièrement les charges. En effet le compte de charges tenu par le cabinet Brustel, syndic de la copropriété, permet de voir qu'il ne s'acquittait pas régulièrement des charges ou très incomplètement. En réalité M. X..., non seulement ne s'acquittait pas régulièrement du paiement de la rente viagère, mais il ne s'acquittait non plus régulièrement du paiement des charges de copropriété. A la date du commandement, la somme représentative de trois mensualités de rentes était bien due, et trente jours après signification de ce commandement, M. X... n'avait procédé à aucun règlement sur les causes du commandement. En conséquence le jugement sera confirmé en ce qu'il a constaté la résolution de la vente du 24 août 2014 » ;
ET AUX MOTIFS REPUTES ADOPTES QUE « le 24 août 2010, Madame Monique Y... a vendu en viager à Monsieur Robert X... divers biens situés à Nice moyennant le versement comptant de la somme de 30 000 € et la charge pour l'acquéreur de servir au vendeur une rente viagère dont la capitalisation est évaluée à la somme de 85 00 €. Le montant de la rente viagère a été fixé à la somme annuelle de 9 420 € payable d'avance en douze termes égaux par échéances fixées initialement à la somme de 785 €, payable les 1er de chaque mois, la rente étant indexée. L'acte notarié prévoit que Madame Monique Y... réserve expressément à son profit pendant sa vie et jusqu'à son décès, le droit d'usage et d'habitation des biens vendus. Qui s'exercera sous les conditions suivantes (...) 6) l'acquéreur s'oblige à payer tous impôts et taxes foncières, primes d'assurance souscrite par le syndicat des copropriétaires et autres charges afférentes aux biens, objet des présentes, sauf les charges mises par la loi ou par la présente convention à la charge des locataires, qui seront payées par le vendeur. Le vendeur devra rembourser à l'acquéreur toutes charges locatives dont le syndicat des copropriétaires serait en droit d'exiger de l'occupant. (Page 6). L'acte de vente prévoit également (page 7) que par dérogation aux dispositions de l'article 1798 du code civil, il est expressément convenu qu'à défaut de paiement à son exacte échéance, d'un seul terme de la rente viagère, la présente vente sera de plein droit et sans mise en demeure préalable, purement et simplement résolue sans qu'il soit besoin de remplir aucune formalité judiciaire, un mois après un simple commandement de payer demeuré infructueux, contenant déclaration par le crédirentier de son intention d'user du bénéfice de la présente clause. Le 10 juin 2014, Madame Monique Y... a fait délivrer à Monsieur Robert X... un commandement de payer visant la clause résolutoire pour non-paiement des rentes viagères de novembre 2013, décembre 2013 et février 2014 soit 3 x 801,57 €. M. Robert X... a écrit au conseil de Madame Monique Y... le 4 décembre 2014, pour lui dire que Madame Monique Y... ne payant pas les charges, il a payé à sa place une somme de 3 200 € le 8 juillet 2013, que Madame Monique Y... devait normalement lui rembourser cette somme, mais que comme elle ne le remboursait pas il a déduit ces sommes des rentes qu'il lui devait, mais que son fils lui a dit que cette somme a peut-être été déduite. Alors dans le doute il lui adresse un chèque pour le mois de novembre 2013 (801,57 €), pour le mois de décembre 2013 (801,57 €), et uniquement la somme de 227,50 € pour le mois de février 2014 car il a déjà payé 524,07 €. Il ajoute que Madame Monique Y... reste devoir au syndic la somme de 2 334,73 €. Il n'est donc pas contesté par Monsieur Robert X... qu'il ne s'est pas acquitté du paiement de trois mois de rente un mois après la signification du commandent de payer visant la clause résolutoire. L'acte de vente mentionne sans ambiguïté qu'il incombe à Monsieur Robert X... dès la signature de celui-ci, de régler l'intégralité des charges de copropriété auprès du syndic, et qu'il récupère ensuite sur Madame Monique Y... les charges locatives. Il allègue avoir opéré une compensation, mais il ne justifie même pas avoir sollicité auprès de Madame Monique Y... le remboursement des charges locatives qu'il aurait payées à sa place. Il convient en outre de préciser que Monsieur Robert X... dont la profession est d'être loueur professionnel de logement, selon ce qu'il a indiqué au notaire dans l'acte de vente, a déjà obligé Madame Monique Y..., à lui délivrer un commandement de payer le 13 novembre pour non-paiement des rentes viagères des mois de janvier, février, avril et juillet 2013. Il ne peut donc invoquer avoir commis une quelconque confusion à propos des charges de copropriété et avoir cru, malgré les termes clairs et précis de l'acte de vente, qu'il incombait à Madame Monique Y... de les payer. Quoi qu'il en soit le commandement de payer qui lui a été délivré le 10 juin 2014 ne concerne pas les charges de copropriété, mais bien les rentes qu'il n'a pas payées à Madame Monique Y... et dont il ne s'est pas acquitté un mois après la délivrance du commandement. Dès lors, il convient de constater l'acquisition de la clause résolutoire et par voie de conséquence, la résolution de la vente conclue le 24 août 2010 » ;
ALORS 1°) QUE pour juger que la clause résolutoire était acquise, l'arrêt attaqué a retenu, par motifs propres et adoptés, que monsieur X... devait payer la rente ainsi que les charges de copropriétés sauf à récupérer sur madame Y... les charges locatives s'il les avait acquittées, qu'étaient indépendant le paiement de la rente et de celui des charges ainsi que les comptes y afférents, que monsieur X... ne pouvait procéder unilatéralement à une compensation entre les deux comptes, qu'il ne payait pas régulièrement les charges, qu'il ne justifiait pas avoir réclamé à la venderesse le remboursement des charges, et qu'il n'avait pas réglé dans le mois les 2 404,71 € visés dans le commandement de payer ; qu'en statuant ainsi, sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si monsieur X... n'avait pas payé au syndic le 8 juillet 2003 la part des charges incombant à madame Y... pour un montant de 3 200 €, auquel cas la créance de la venderesse de 2 404,71 € était éteinte de plein droit par l'effet de la compensation légale et la clause résolutoire ne pouvait être acquise, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des anciens articles 1289 et 1290 du code civil ;
ALORS 2°) QUE après avoir rappelé qu'il est de règle que la mauvaise foi d'un créancier s'oppose à l'application de la clause résolutoire, monsieur X... soulignait que madame Y... était de mauvaise foi en ce qu'elle lui avait fait délivrer un commandement de payer visant la clause résolutoire cependant qu'elle était débitrice au titre des charges locatives qu'elle ne réglait pas, à quoi l'exposant ajoutait qu'à supposer même qu'il dût payer toutes les charges madame Y... n'ignorait pas qu'il existait à cet égard une difficulté d'interprétation de l'acte de vente puisqu'il lui avait écrit en ce sens le 8 juillet 2013 et puisqu'elle savait qu'aux termes de la promesse synallagmatique de vente elle devait payer les charges (conclusions, p. 9) ; qu'en ne s'expliquant pas sur ces points pour néanmoins juger acquise la clause résolutoire, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'ancien article 1134, alinéa 3, du code civil.