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07/03/2018 | FRANCE | N°16-19822

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 07 mars 2018, 16-19822


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 29 avril 2016), que Mme X... a été engagée le 8 juin 2009 par la société Structura en qualité d'assistante de direction ; qu'elle a bénéficié d'un congé de maternité du 21 juin au 29 octobre 2010 ; qu'après un entretien qui s'est déroulé le 4 novembre 2010, les parties ont signé une convention de rupture qui a été homologuée le 16 décembre 2010 ; que la salariée a saisi le 17 juin 2011 la juridiction prud'homale de demande

s de nullité de la rupture et de dommages-intérêts ; que le défenseur des droits e...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 29 avril 2016), que Mme X... a été engagée le 8 juin 2009 par la société Structura en qualité d'assistante de direction ; qu'elle a bénéficié d'un congé de maternité du 21 juin au 29 octobre 2010 ; qu'après un entretien qui s'est déroulé le 4 novembre 2010, les parties ont signé une convention de rupture qui a été homologuée le 16 décembre 2010 ; que la salariée a saisi le 17 juin 2011 la juridiction prud'homale de demandes de nullité de la rupture et de dommages-intérêts ; que le défenseur des droits est intervenu à l'instance ;

Attendu que la salariée fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande tendant à voir prononcer la nullité de la rupture conventionnelle, et ses demandes indemnitaires subséquentes, alors, selon le moyen :

1°/ qu'entre les parties, les actes sous seing privé font foi de leur date, jusqu'à preuve du contraire ; qu'en considérant que la mention du 23 novembre comme date de signature de la convention de rupture ne devait pas être retenue sans rechercher, comme elle y était invitée, si l'employeur rapportait la preuve qu'il ne s'agissait pas de la date réelle de conclusion, la cour d'appel a entaché sa décision de défaut de base légale au regard des articles 1372 du code civil et L. 1237-13 du code du travail ;

2°/ que, à supposer que l'inscription de la date du 23 novembre comme date de conclusion de la convention de rupture procède d'une erreur matérielle, comme le prétendait l'employeur, il était alors nécessaire de rechercher quelle avait été la date réelle de signature de cette convention, date à partir de laquelle courait le délai de rétractation de 15 jours ; qu'en se contentant de souligner l'incohérence entre la mention de la date de signature et celle de la date de fin de délai de rétractation, sans préciser à quelle date avait été réellement conclue la convention de rupture, ainsi que cela lui était demandé, la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de base légale au regard des articles 1372 du code civil et L. 1237-13 du code du travail ;

3°/ que Mme X... affirmait, dans ses écritures, que la mention du 23 novembre comme date de conclusion de la convention de rupture ne relevait « d'aucune coquille ou erreur de plume » et que les dates devaient faire foi, jusqu'à preuve du contraire ; qu'en jugeant qu'il ressortait des différences de dates une incohérence flagrante, d'ailleurs admise par la salariée, pour en déduire que la date réelle ne pouvait pas être fixée au 23 novembre, la cour d'appel a, par motifs propres, dénaturé les conclusions et, partant, violé les articles 1103 du code civil et 4 du code de procédure civile ;

4°/ que, même à considérer que la date de la signature ait été identique à celle du jour de la tenue de l'entretien préalable, il incombait alors à la cour d'appel de rechercher si cette absence totale de délai entre la tenue de l'entretien et la signature de la convention n'était pas un indice supplémentaire du fait que le consentement de la salariée avait été vicié ; qu'en ne le recherchant pas, la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de base légale au regard de l'article L. 1237-11 et L. 1237-12 du code du travail ;

Mais attendu d'abord que la cour d'appel, qui a constaté qu'il ressortait de l'examen du document qui lui était soumis une incohérence flagrante entre la mention, non remise en cause par les parties, d'une date de fin du délai de rétractation le 22 novembre 2010, et celle de la signature de la convention supposée être intervenue le lendemain, et qu'une erreur matérielle affectait la date de l'acte qui avait été en réalité conclu le 4 novembre 2010, a procédé aux recherches visées aux deux premières branches ;

Attendu, ensuite, que sous le couvert d'un grief non fondé de manque de base légale, le moyen ne tend en sa dernière branche qu'à contester l'appréciation souveraine par la cour d'appel de l'absence de vice du consentement ;

D'où il suit que le moyen, qui, en sa troisième branche, critique des motifs surabondants, n'est pas fondé pour le surplus ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne Mme X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du sept mars deux mille dix-huit.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat aux Conseils, pour Mme X...

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté Madame X... de sa demande de voir prononcée la nullité de la rupture conventionnelle et par conséquent de ses demandes d'indemnités de préavis et congés payés afférents, dommages et intérêts pour licenciement nul et solde d'indemnité de licenciement, ainsi que d'une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile

AUX MOTIFS propres QUE la discussion initiée par la salariée sur les raisons ayant motivé une première rupture conventionnelle avortée et les circonstances dans lesquelles la relation contractuelle s'est finalement poursuivie est sans incidence sur la solution du présent litige qui vise à apprécier la validité d'une convention intervenue un an plus tard, dès lors que le libre consentement de la salariée n'est pas discuté tant au regard de la conclusion de cette première convention qu'au regard de l'acceptation d'une reprise de la relation contractuelle dont rien n'établit, pas même les échanges de mails produits par la salariée, qu'elle est résultée de la seule initiative de l'employeur. S'agissant de la convention de rupture en cause, il sera rappelé que les périodes de suspension du contrat de travail auxquelles la salariée a droit au titre de son congé de maternité ainsi que pendant les quatre semaines suivant l'expiration de ces périodes ne font pas obstacle à la signature d'une rupture conventionnelle sauf pour la salariée à prouver l'existence d'une fraude et d'un vice du consentement. En l'espèce, le seul fait que Madame X... ait été convoquée rapidement après son retour de congé maternité pour un entretien en vue de la rupture conventionnelle ne suffit pas à établir que son consentement a été forcé comme elle le prétend sans apporter d'autre élément que l'invocation d'une forme de présomption, par ailleurs inopérante ; au demeurant, il n'est imposé le respect d'aucun délai minimum entre l'entretien et la conclusion de la convention ni l'organisation de plusieurs entretiens, la lettre de convocation dont il n'est pas contesté qu'elle fait suite à une discussion entre les parties rappelle bien la possibilité pour la salariée de se faire assister ; l'entretien de même que l'ensemble de la procédure s'inscrit dans un cadre par nature consensuel et il lui était donc lisible si elle estimait ne pas être dans les conditions pour bénéficier de l'assistance d'un conseiller de solliciter un report ou de ne pas se présenter à cet entretien ; enfin, la thèse de l'employeur qui affirme qu'en réalité il a avec la salariée, convenu de la conclusion de la rupture conventionnelle le jour même de l'entretien, portant ainsi le terme du délai de rétractation au vendredi 19 novembre 2010 à minuit, prorogé par ses soins au lundi 22 novembre 2010 à minuit à titre de délai supplémentaire pour prendre en compte le week-end, et que c'est par erreur qu' a été apposée comme date de signature sur l'imprimé CERFA le 23 novembre 2010, soit le lendemain, date de transmission pour homologation, est confirmée par l'examen de ce document ; il en ressort effectivement une incohérence flagrante, d'ailleurs admise par la salariée, entre la mention non remise en cause d'une date de fin du délai de rétractation le 22 novembre et celle de la signature de ladite convention supposée être intervenue le lendemain ; il s'ensuit que la salariée est mal fondée à prétendre ne pas avoir pu exercer son droit de rétractation, qu'elle est également mal fondée par voie de conséquence à invoquer un non-respect du délai d'homologation qui a bien débuté le 23 novembre 2010, à l'expiration du délai de rétractation ; qu'en conséquence, Madame X... sera déboutée, par confirmation du jugement entrepris, de sa demande de nullité de ladite convention de rupture et de toutes ses demandes indemnitaires subséquentes.

Et AUX MOTIFS éventuellement adoptés QUE Sur la possibilité d'utiliser la procédure de rupture conventionnelle lors d'un congé maternité. L'article L 1225-4 du code du travail dispose qu'aucun employeur ne peut rompre le contrat de travail d'une salariée lorsqu'elle est en état de grossesse médicalement constatée et pendant l'intégralité des périodes de suspension du contrat de travail auxquelles elle a droit au titre du congé de maternité, qu'elle use ou non de ce droit, ainsi que pendant les quatre semaines suivant l'expiration de ces périodes. Il est de jurisprudence que les actes préparatoires à un licenciement sont également interdits, tel la convocation à un entretien préalable. Il ressort clairement que la période de protection dont bénéficiait Suzanne X... en raison de sa maternité était jours en cours à son retour le 30 octobre 2010, le délai de quatre semaines débutant le 30 octobre 2010 pour se terminer le 26 novembre 2010. Or, la convocation pour un entretien préalable à une rupture conventionnelle lui a été remise le 2 novembre 2010 et la convention a été signée le 23 novembre 2010. De même, l'employeur ne peut affirmer que Suzanne X... se trouvait en congé parental à 80% dès son retour dans l'entreprise, et non plus en suite de congé maternité : en effet non seulement la période de protection s'applique également lors d'un congé parental mais il convient de rappeler que le passage à un temps partiel est une modification substantielle du contrat de travail, et l'employeur ne justifie pas de sa signature d'un avenant en ce sens ; le licenciement procédure unilatérale, est clairement interdit au cours d'un congé maternité. Cependant, aux termes de l'article L 1237-11 du code du travail, les parties peuvent convenir en commun des conditions de la rupture du contrat de travail qui les lie. La rupture conventionnelle ne peut être imposée par l'une ou l'autre des parties. La rupture conventionnelle permet donc de mettre fin à la relation de travail hors les cas de démission ou de licenciement, dans le cadre de la rencontre de la volonté des parties. Cette procédure s'analyse donc comme un droit contractuel, accessoire du contrat de travail, le libre consentement des parties étant assuré par les articles 1237-2 et suivants du code du travail, dans le cadre d'un ou plusieurs entretiens au cours desquels le salarié peut se faire assister, par le respect d'un délai de rétractation ouvert aux deux parties, et par l'homologation de la convention de rupture par l'autorité administrative. Il convient de rappeler à cet égard, que la rupture conventionnelle d'un contrat de travail peut être avantageuse pour un salarié qui peut souhaiter quitter une entreprise pour développer un nouveau projet, ou pour toute autre raison, tout en bénéficiant des indemnités de chômage, ce qui n'est pas le cas après une démission. Or, la situation de grosses et de maternité ne fait pas d'une salariée une incapable majeur à qui il serait interdit de bénéficier de ses droits contractuels, l'article L 1225-4 du code du travail ne prohibant que le licenciement. Pourraient être alors soulevés des vices du consentement ou une irrégularité de la procédure, mais seul le Défenseur des droits en a fait état dans ses observations. Or, le Défenseur des droits n'est pas une partie aux débats et s'il présente des observations le conseil ne doit répondre qu'aux seuls moyens soulevés par les parties. Suzanne X... ne démontrer pas que l'employeur a commis une violation manifeste du statut protecteur de la maternité et sera donc déboutée de ses demandes.

ALORS QU'entre les parties, les actes sous seing privé font foi de leur date, jusqu'à preuve du contraire ; qu'en considérant que la mention du 23 novembre comme date de signature de la convention de rupture ne devait pas être retenue sans rechercher, comme elle y était invitée, si l'employeur rapportait la preuve qu'il ne s'agissait pas de la date réelle de conclusion, la cour d'appel a entaché sa décision de base légale au regard des articles 1372 du code civil et L 1237-13 du code du travail.

Et ALORS QUE, à supposer que l'inscription de la date du 23 novembre comme date de conclusion de la convention de rupture procède d'une erreur matérielle, comme le prétendait l'employeur, il était alors nécessaire de rechercher quelle avait été la date réelle de signature de cette convention, date à partir de laquelle courait le délai de rétractation de 15 jours ; qu'en se contentant de souligner l'incohérence entre la mention de la date de signature et celle de la date de fin de délai de rétractation, sans préciser à quelle date avait été réellement conclue la convention de rupture, ainsi que cela lui était demandé, la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de base légale au regard des articles 1372 du code civil et L 1237-13 du code du travail.

ALORS en outre QUE Madame X... affirmait, dans ses écritures, que la mention du 23 novembre comme date de conclusion de la convention de rupture ne relevait « d'aucune coquille ou erreur de plume » et que les dates devaient faire foi, jusqu'à preuve du contraire ; qu'en jugeant qu'il ressortait des différences de dates une incohérence flagrante , d'ailleurs admise par la salariée, pour en déduire que la date réelle ne pouvait pas être fixée au 23 novembre, la cour d'appel a a, par motifs propres, dénaturé les conclusions et, partant, violé les articles 1103 du Code civil et 4 du Code de procédure civile.

ALORS en tout état de cause QUE même à considérer que la date de la signature ait été identique à celle du jour de la tenue de l'entretien préalable, il incombait alors à la cour d'appel de rechercher si cette absence totale de délai entre la tenue de l'entretien et la signature de la convention n'était pas un indice supplémentaire du fait que le consentement de la salariée avait été vicié ; qu'en ne le recherchant pas, la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de base légale au regard de l'article L 1237-11 et L 1237-12 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 16-19822
Date de la décision : 07/03/2018
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 29 avril 2016


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 07 mar. 2018, pourvoi n°16-19822


Composition du Tribunal
Président : Mme Farthouat-Danon (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Thouvenin, Coudray et Grévy

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:16.19822
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