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07/03/2018 | FRANCE | N°16-17936

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 07 mars 2018, 16-17936


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rennes, 30 mars 2016), qu'engagé le 27 octobre 2008 par la société Spie Batignolles Ouest en qualité de directeur régional de sa filiale, la société Mab construction, M. X... a exercé à compter d'avril 2009 plusieurs mandats sociaux au sein de filiales du groupe en qualité de directeur général de la société Mab construction et de directeur général de la société Entreprise générale du bâtiment Kerdiles ; que, licencié pour faute grave le 28 octobre 2011, il a saisi l

a juridiction prud'homale ;

Sur le premier moyen du pourvoi principal du sala...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rennes, 30 mars 2016), qu'engagé le 27 octobre 2008 par la société Spie Batignolles Ouest en qualité de directeur régional de sa filiale, la société Mab construction, M. X... a exercé à compter d'avril 2009 plusieurs mandats sociaux au sein de filiales du groupe en qualité de directeur général de la société Mab construction et de directeur général de la société Entreprise générale du bâtiment Kerdiles ; que, licencié pour faute grave le 28 octobre 2011, il a saisi la juridiction prud'homale ;

Sur le premier moyen du pourvoi principal du salarié :

Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande tendant à juger que son contrat de travail était suspendu durant l'exercice de son mandat social au sein de la société MAB construction et au sein de la société Entreprise générale de bâtiment Kerdiles, alors, selon le moyen, que le contrat de travail d'un salarié devenu mandataire social est suspendu dès lors qu'il a cessé d'exercer des fonctions techniques distinctes de celles exercées dans le cadre de son mandat social ; que, pour dire M. X... mal fondé à soutenir que son contrat de travail était suspendu durant l'exercice de son mandat social au sein des deux sociétés filiales de Spie Batignolles Ouest, en estimant qu'il n'y avait pas lieu de rechercher si l'intéressé exerçait une activité salariée distincte de son mandat social dès lors qu'il exerçait son activité sous la subordination de la société Spie Batignolles Ouest, sous la direction et le contrôle de laquelle il était placé, nonobstant son mandat social au sein des filiales, quand seul l'exercice de fonctions techniques distinctes du mandat social sous la subordination de la société d'origine pouvait permettre l'application des règles du droit du travail, la cour d'appel a violé l'article L. 1221-1 du code du travail ;

Mais attendu que l'exercice d'un mandat social n'étant pas exclusif d'un lien de subordination juridique, la cour d'appel, qui a constaté que la société Spie Batignolles Ouest avait conservé à l'égard de son salarié, dont elle avait fixé la rémunération, les prérogatives de l'employeur et que l'intéressé se trouvait sous sa subordination juridique, a pu décider que, nonobstant le mandat social exercé au sein d'une filiale, M. X... était resté le salarié de cette société ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le moyen unique du pourvoi incident de l'employeur :

Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de le condamner au paiement d'une somme à titre de rémunération variable brute pour l'année 2011 et congés payés afférents alors, selon le moyen, que selon le contrat de travail de M. X..., le montant de sa rémunération variable « pourra être compris entre 0 et 24 % de [sa] rémunération annuelle de base, calculée et versée en fonction de l'atteinte de [ses] objectifs annuels et versée au pro-rata temporis de [son] temps de présence sur l'année de référence » ; que la société SPIE Batignolles Ouest avait versé aux débats les comptes-rendus des entretiens annuels d'appréciation et de développement de M. X... qui définissaient ses objectifs pour l'année suivante ; qu'ainsi le compte-rendu de l'entretien d'appréciation et de développement effectué le 14 décembre 2010 fixait les objectifs quantitatifs (en terme notamment de montant des prises de commande, de chiffre d'affaires et d'EBIT pour les filiales dont il avait la charge) et qualitatifs assignés à M. X... pour l'année 2011 ; que dans ses conclusions d'appel, la société SPIE Batignolles Ouest soulignait que M. X... n'avait pas atteint ces objectifs, au regard d'une part de la gravité de la situation financière de la société MAB construction et d'autre part de ses méthodes de management ; qu'en affirmant, pour condamner la société SPIE Batignolles Ouest à verser à M. X... un rappel de rémunération variable pour l'année 2011, que l'employeur ne justifie pas des éléments permettant de calculer la rémunération variable de M. X... pour l'exercice 2011, sans s'expliquer sur les objectifs fixés lors de l'entretien d'appréciation et de développement du 14 décembre 2010, ni rechercher si le salarié avait réalisé ces objectifs, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du code civil dans sa rédaction applicable au litige, ensemble l'article L. 1221-1 du code du travail ;
Mais attendu que, sous le couvert du grief non fondé de manque de base légale, le moyen ne tend qu'à remettre en discussion l'appréciation souveraine, par les juges du fond, de la valeur et de la portée des éléments de preuve produits, dont ils ont déduit que l'employeur ne justifiait pas des éléments permettant de calculer la rémunération variable du salarié pour l'année 2011 ; que le moyen n'est pas fondé ;

Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le second moyen du pourvoi principal du salarié ci-après annexé, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE les pourvois ;

Laisse à chaque partie la charge de ses propres dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du sept mars deux mille dix-huit.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits au pourvoi principal par la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat aux Conseils, pour M. X....

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR débouté M. X... de sa demande tendant à voir dire et juger que son contrat de travail était suspendu durant l'exercice de son mandat social au sein de la société MAB Construction AB et au sein de la société Entreprise générale de bâtiment Kerdiles, en sorte que le contrat de travail ne pouvait être rompu a fortiori pour des faits tenant à l'exercice du mandat

AUX MOTIFS QUE l'exercice d'un mandat social n'est pas exclusif d'un lien de subordination juridique; qu'il est établi que M. X..., engagé par la société Spie Batignolles Ouest en qualité de directeur régional pour diriger sa filiale Mab Construction, et nommé quelques mois plus tard par celle-ci directeur général de ses deux filiales de la région Bretagne, la société Mab Construction AB et la société Entreprise générale de bâtiment Kerdiles, a toujours exercé ses fonctions sous la dépendance des dirigeants de la société mère, qui le rémunérait directement, à qui il était obligé d'en référer pour toute question plus ou moins importante, ainsi qu'il résulte des courriers électroniques produits concernant par exemple les frais de déplacement des collaborateurs de l'entreprise , à qui il rendait compte régulièrement de son activité et qui avait pouvoir de lui donner des directives et d'en assurer le suivi, ainsi qu'en attestent ses entretiens annuels d'évaluation et les objectifs précis qui lui étaient alors fixés; que l'intéressé exerçait son activité sous la subordination de la société Spie Batignolles Ouest, sous la direction et le contrôle de laquelle il était placé, nonobstant son mandat social au sein des filiales; que M. X... exerçant son mandat social dans une société différente de celle avec laquelle il était lié par un contrat de travail, il n'y a pas lieu de rechercher si l'intéressé exerçait une activité salariée distincte de son mandat social; que M. X... est dès lors mal fondé à soutenir que le contrat de travail conclu avec la société Spie Batignolles Ouest s'est trouvé suspendu durant l'exercice de son mandat social au sein de la société Mab Construction AB et au sein de la société Entreprise générale de bâtiment Kerdiles;

ET AUX MOTIFS éventuellement ADOPTES QUE le contrat de travail de M. X... a été établi par la société SPIE BATIGNOLLES OUEST le 27 octobre 2008; qu'il mentionnait la fonction de directeur régional de MAB CONSTRUCTION; que les bulletins de salaire de M. X... ont toujours été établis par SPIE BATIGNOLLES OUEST ; que le 24 avril 2009, M. X... est nommé directeur général de KERDILES étant précisé qu'il ne recevait aucune rémunération à ce titre; que le 25 mai 2009, M. X... est nommé directeur général de MAB CONSTRUCTION dans les mêmes conditions; que dans les deux mandats, il jouit des pouvoirs les plus étendus pour agir mais: - il a en charge la mise en oeuvre de la stratégie du groupe SPIE BATIGNOLLES - il participe régulièrement au comité de direction du groupe SPIE BATIGNOLLES - il fait l'objet d'entretiens annuels sous l'égide du groupe SPIE BATIGNOLLES; qu'il existe bien un lien réel de subordination entre M. X... et le groupe SPIE BATIGNOLLES et donc il existe bien un contrat de travail entre M. X... et SPIE BATIGNOLLES OUEST, le groupe avait donc parfaitement le droit de sanctionner son salarié;

ALORS QUE le contrat de travail d'un salarié devenu mandataire social est suspendu dès lors qu'il a cessé d'exercer des fonctions techniques distinctes de celles exercées dans le cadre de son mandat social; que, pour dire M. X... mal fondé à soutenir que son contrat de travail était suspendu durant l'exercice de son mandat social au sein des deux sociétés filiales de Spie Batignolles Ouest, en estimant qu'il n'y avait pas lieu de rechercher si l'intéressé exerçait une activité salariée distincte de son mandat social dès lors qu'il exerçait son activité sous la subordination de la société Spie Batignolles Ouest, sous la direction et le contrôle de laquelle il était placé, nonobstant son mandat social au sein des filiales, quand seul l'exercice de fonctions techniques distinctes du mandat social sous la subordination de la société d'origine pouvait permettre l'application des règles du droit du travail, la cour d'appel a violé l'article L.1221-1 du code du travail.

SECOND MOYEN DE CASSATION :
(subsidiaire)

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR débouté M. X... de sa demande tendant à voir dire et juger son licenciement sans cause réelle et sérieuse et D'AVOIR débouté M. X... de sa demande de condamnation de la société Spie Batignolles Ouest SAS à lui payer des indemnités de rupture et des rappels de salaires pour mise à pied à titre conservatoire et des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

AUX MOTIFS QUE la lettre de licenciement notifiée à M. X... le 28 octobre 2011, qui fixe les limites du litige, est rédigée comme suit : "Nous faisons suite à l'entretien préalable qui s'est tenu le mercredi 19 octobre 2011 au cours duquel nous vous avons fait part des motifs nous conduisant à envisager à votre encontre une mesure de licenciement pour faute grave. Les explications que vous nous avez fournies lors de cet entretien, au cours duquel vous avez souhaité vous présenter seul, ne nous ont pas permis de modifier notre appréciation des faits. Nous vous notifions donc, par la présente, votre licenciement pour faute grave fondé sur les éléments suivants. Vous êtes entré au sein de notre société le 27 octobre 2008, en qualité de directeur régional Bretagne (en charge de nos entités Mab Construction et Kerdiles). En votre qualité de directeur régional, il vous incombe notamment de définir et mettre en place des stratégies commerciales fiables et réalistes, de veiller à ce que les engagements que vous prenez sur votre périmètre le soient dans le respect des politiques du groupe et de la filiale et de nous faire part des résultats de votre région et de leur évolution, afin que nos actions soient cohérentes et que nous puissions anticiper les événements. C'est également la raison pour laquelle vous êtes membre du comité de direction, afin de participer à l'élaboration d'une stratégie constructive, en cohérence avec les actions menées par les autres directeurs de régions et les membres du CODIR. Cette démarche est d'autant plus essentielle dans les circonstances économiques actuelles que vous ne pouvez ignorer. l/ Force est de constater que la qualité de votre activité professionnelle est en-deçà du niveau que nous sommes légitimement en droit d'attendre d'un cadre de votre niveau sans qu'aucune amélioration ne puisse être constatée. Les résultats de la région dont vous avez la responsabilité n'ont de cesse de se dégrader. Ainsi, la présentation à date des résultats, que vous avez faite lors de la réunion de gestion du mercredi 4 mai 2011, n'était assortie d'aucun point de vigilance ou d'alerte spécifique, particulièrement sur le niveau de commandes estimé. Or, nous constatons pourtant que ces mêmes résultats sur affaires sont aujourd'hui fortement dégradés : vous avez présenté à mai 2011 une marge positive de 100 KE. Or, elle était de - 400 KE afin août 2011, pour un objectif initial à + 500 KE. Alors que vous avez la responsabilité de ces résultats, vous ne pouvez ignorer que ces derniers ont une incidence significative, particulièrement quant à la -gestion de l'activité de collaborateurs qui pourraient se retrouver sans occupation dès le mois de décembre 2011, compte tenue de la baisse du carnet de commandes et de l'absence de toute alerte de votre part. En dépit de cette situation, aucune mesure claire n 'a été prise pour anticiper cette situation, notamment pour renforcer le contact pris auprès de prospects. Pire, vous n 'avez pas estimé nécessaire ou même utile de nous alerter de cette situation commerciale désastreuse afin que des mesures soient prises et que les conséquences puissent être mieux anticipées. Il relève de vos responsabilités, non seulement d'alerter sur cette situation, mais également d'envisager des solutions afin de gérer ce qui précède. Or, à ce jour, nous déplorons l'absence de toute stratégie claire, sur votre secteur, proportionnelle à la gravité de la situation. Lors du dernier comité de direction en date du 21 septembre 2011, ces résultats ont été mis en évidence par la direction financière au travers du flash mensuel commercial et de gestion. Vous avez, à cet énoncé, simplement indiqué que vous n'aviez pas de projet spécifique à présenter et aucune visibilité sur les affaires qui seraient prochainement prises, alors même que l'avancement de vos prises de commande était déjà dégradé. Il s'avère que cette situation ne s'explique pas uniquement par la crise économique mais également par l'absence de politique commerciale réellement déployée, malgré la présence de forces commerciales embauchées par vos soins sur la Bretagne et celle de directeurs commerciaux sur la filiale mis à votre disposition mais avec lesquels vous avez toujours refusé de collaborer, voire freiné l'action. Illustrant de la même façon votre absence d'anticipation et d'appréhension claire des situations, lors de ma visite du mardi 26 juillet 2011 à Lorient sur le chantier de l'ENSIB, je n 'ai pas eu d'autre choix que de dresser le constat de votre approche très approximative des pièces contractuelles du chantier générant des risques juridiques et financiers conséquents et l'engagement non maîtrisé que vous avez fait prendre à la Société vis-à-vis du client. Nous avons mis à voire disposition un certain nombre de moyens pour vous accompagner dans cette démarche mais force est de constater que vous ne manifestez pas le souhait de vous inscrire dans un changement de position. Bien au contraire, vous n'avez de cesse, en dernier lieu lors de votre entretien préalable, de nier l'évidence et de soutenir, de manière pour le moins abusive, qu'il n'y aurait aucune difficulté. Cette situation traduit l'absence de toute volonté de vous préoccuper de la situation actuelle, d'anticiper, en cohérence avec les actions menées par le CODIR, et de prendre la mesure de vos responsabilités. 2/Plus grave encore, malgré de nombreuses relances, vous demeurez le seul directeur régional à ne pas respecter les règles du Groupe et de la filiale, en terme d'engagement. En effet, l'affaire du CEA, en cours, a été établie sans envoi de la fiche d'arrêt de prix de vente et de ses annexes explicatives à la direction générale et a été signée de votre part pour un montant de 7,1 millions d'euros sans que vous ayez de délégation pour la signer et sans autorisation formelle de la direction générale. La FAPV et ses annexes n'ont d'ailleurs été finalement envoyées par vos services qu'une fois votre mise à pied déclenchée. Vous faites ainsi preuve d'une légèreté pour le moins blâmable. En effet, il vous incombe de tenir au moins informée la société des engagements à prévoir, notamment compte tenu de la situation économique actuelle, afin de vérifier que cet engagement est cohérent avec notre stratégie. Or, vous avez pris cette décision sans avoir pris le soin d'échanger sur sa pertinence et/ou de recueillir la moindre autorisation préalable. Un tel comportement est d'autant plus inacceptable que ce n'est pas la première fois que nous devons faire face à votre volonté délibérée de ne pas être transparent sur les éléments financiers reportés. Cela fut notamment le cas lors de la transmission de la gestion financière du chantier du CELAR du 29 septembre 2011. En effet, un document atteste de la correction mensongère des chiffres de ce chantier dont vous avez la responsabilité. En effet, notre attention a été attirée sur la demande que vous auriez formulée auprès du contrôle de gestion aux, termes de laquelle vous sollicitiez qu'une perte de près de 200.000 € sur ce même chantier ne soit pas déclarée dans le reporting. Une telle manipulation démontre votre volonté délibérée d'agir sans vous préoccuper des conséquences de vos actions pour la Société et pour ses collaborateurs. Cette initiative démontre clairement votre absence de travail en équipe, lequel suppose une transparence et une confiance mutuelle, et la volonté de rechercher, par tous moyens, à masquer la situation économique de la région dont vous avez la responsabilité. Cette démarche démontre également que vous avez tenté de retarder la date à laquelle le comité de direction aurait pu s'apercevoir de cette perte. Vous avez donc délibérément retardé les actions à conduire, sans vous préoccuper des conséquences de vos actions. De tels griefs constituent, à eux seuls, compte tenu de la nature de vos fonctions, de vos responsabilités et de votre niveau d'expérience, une faute grave. 3/Outre ces graves manquements liés à la gestion économique et financière de notre société, nous constatons que votre management est pour le moins préjudiciable à vos équipes. Lors de votre prise de fonctions, nous avions expressément attiré votre attention sur la nécessité de réussir votre prise de fonction managériale. Lors de vos différents entretiens d'appréciation et de développement, votre hiérarchie n'a eu de cesse de vous rappeler à l'ordre sur la nécessité de motiver vos équipes et de partager avec vos collaborateurs. Or, nous constatons que, malgré l'accompagnement dont vous avez bénéficié pour y parvenir et ces rappels à l'ordre récurrents depuis plus de deux ans, vous persistez à instaurer des méthodes managériales pour le moins autoritaires et sans aucune création d'un esprit d'équipe. En effet, depuis votre embauche, vous avez systématiquement mis en place des barrières autoritaires de nature à empêcher l'intégration de vos collaborateurs dans l'entreprise et à adopter une stratégie non partagée et non participative. Force est de constater la multiplication des démissions au cours de l'année 2010, lesquelles ont atteint 15% de l'effectif, combiné à une totalité de 43 départs sur un effectif moyen de 138 salariés. Certains collaborateurs se sont notamment plaints de l'absence de soutien de votre part dans l'exécution de leurs missions et du désintérêt que vous démontrez dans ce cadre. Ce sentiment de désintérêt pour vos équipes et le travail à mener est d'autant plus caractérisé que nous constatons, depuis quelques mois, un usage abusif de votre téléphone portable, notamment par l'envoi de multiples SMS sur votre temps de travail qui nuisent sensiblement à votre concentration et implication sur les dossiers en cours. Ce type de management, que vous ne souhaitez manifestement pas faire évoluer, ne peut être cautionné par la société. De tels faits sont d'une extrême gravité de la part d'un cadre de votre niveau de responsabilité et sont de nature à caractériser, à eux seuls, une faute grave. 4/En conséquence, tout ce qui précède rend insusceptible la poursuite de votre contrat de travail et nous contraint à votre notifier par la présente votre licenciement pour faute grave, privatif d'indemnité de préavis et de licenciement. "; que le licenciement disciplinaire doit être fondé sur des éléments constituant un manquement aux obligations qui résultent du contrat de travail ; que les fautes commises par le salarié d'une société mère dans le cadre d'un mandat social exercé dans une filiale ne peuvent dès lors être invoquées à l'appui du licenciement prononcé par celle-ci que si elles sont liées à l'exécution du contrat de travail; que les griefs invoqués par la société Spie Batignolles Ouest à l'encontre du salarié tenant à la dégradation des résultats de sa région, à l'absence de stratégie claire sur son secteur, aux risques juridiques et financiers générés par son absence de maîtrise des engagements contractés et à ses méthodes de gestion de ses équipes, à les supposer établis, se sont produits dans l'exercice par ce dernier de son mandat social au sein de la filiale; qu'ils ne peuvent dès lors fonder son licenciement; que la société Spie Batignolles Ouest reproche également à M. X... d'avoir manqué de loyauté dans l'exécution de son contrat de travail, en s'abstenant de l'alerter sur la situation commerciale réelle des filiales qu'il dirigeait et de l'informer des engagements à prévoir et en cherchant par tous moyens à masquer les difficultés rencontrées et à en retarder la connaissance par son employeur ; que les attestations précises et circonstanciés de M. Z..., directeur administratif et financier, de M. A..., contrôleur de gestion de la région Bretagne et de Mme B..., contrôleur de gestion junior ayant remplacé M. A... de septembre à novembre 2011 démontrent que M. X... a délibérément dissimulé les pertes importantes de certains chantiers, notamment le chantier du CELAR, en demandant que partie des charges soient imputées sur d'anciens chantiers, où des provisions avaient été constituées, et que partie des frais généraux soient imputés sur le compte SAV des agences pour éviter d'imputer les dépenses réelles sur les chantiers en cours et qu'il a volontairement retardé la connaissance par la société Spie Batignolles Ouest de la dégradation de la situation de la société MAB Construction en demandant que ne figurent pas dans le reporting à fin septembre 2011 à la société mère une annulation de chantier et la dégradation des comptes de plusieurs chantiers, dont le chantier CELAR; que ces faits caractérisent un manquement à son obligation de loyauté dans l'exécution de son contrat de travail caractérisant un comportement fautif rendant impossible son maintien dans l'entreprise; que la seule existence d'un différend entre M. X... et son employeur concernant les frais de déplacement des salariés est impropre à établir que la faute grave reprochée au salarié ne serait pas la cause exacte du licenciement; qu'il convient en conséquence d'infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a dit le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse et a alloué au salarié la somme de 57 244 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement abusif; que la faute grave étant caractérisée, la mise à pied conservatoire dont le salarié a fait l'objet était justifiée; que M. X... ne peut donc prétendre à un rappel de salaire pour cette période ainsi qu'aux congés payés afférents; que la faute grave étant privative du préavis et de l'indemnité de licenciement, M. X... ne peut prétendre à l'indemnité compensatrice de préavis, aux congés payés afférents et à l'indemnité de licenciement; que le jugement sera donc infirmé de ces chefs et le salarié débouté de ses demandes y afférentes;

1. ALORS QUE la lettre de licenciement forme un tout ; que l'ensemble des griefs qui y sont énoncés constitue autant de motifs qu'il appartient au juge d'examiner; qu'en l'espèce, la lettre de licenciement de M. X... mentionnait quatre griefs: la dégradation des résultats de sa région, l'absence de stratégie claire sur son secteur, les risques juridiques et financiers générés par son absence de maîtrise des engagements contractés et à ses méthodes de gestion de ses équipes et le manque de loyauté dans l'exécution de son contrat de travail; qu'en écartant trois des griefs en raison de ce que, à les supposer établis, ils s'étaient produits dans l'exercice par M. X... de son mandat social au sein de la filiale, pour ne retenir que le grief relatif au manque de loyauté dans l'exécution de son contrat de travail et dire fondée la faute grave retenue contre le salarié lors même que la faute grave était fondée sur les quatre griefs ensemble, et non sur un seul, la cour d'appel a dénaturé la lettre de licenciement et, partant, a violé les articles 1134 du code civil et L.1232-1, L.1232-6 et L.1235-1 du Code du travail;

2. ALORS encore QUE la faute grave se caractérise par des faits imputables personnellement au salarié constituant une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise; qu'en l'espèce, M. X... avait indiqué que son contrat de travail ne prévoyait aucune limite d'engagement financier; qu'en lui faisant cependant reproche d'avoir manqué de loyauté à cet égard en dissimulant délibérément des pertes importantes de certains chantiers en demandant que partie des charges soit imputée sur d'anciens chantiers sans rechercher s'il devait respecter un montant pour ses engagements financiers, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles L.1234-1 et L.1234-5 du Code du travail.

3. ET ALORS en tout état de cause QUE Monsieur X... soutenait que la véritable cause de son licenciement était le différend l'opposant, dans l'exercice de son mandat, sur les frais de déplacement, son mandant n'ayant pas entendu assumer ses responsabilités tant en matière de législation et de risques URSSAF qu'en matière de juste rémunération des collaborateurs ; qu'en ne s'expliquant nullement sur ce moyen déterminant, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles L.1234-1 et L.1234-5 du Code du travail. Moyen produit au pourvoi incident par la SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, avocat aux Conseils, pour la société Spie Batignolles Ouest.

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné la société SPIE Batignolles Ouest à payer à Monsieur X... la somme de 15.833,33 euros à titre de rémunération variable brute pour l'année 2011, ainsi que la somme de 1.583,33 euros au titre des congés payés afférents ;

AUX MOTIFS QUE « considérant que la société Spie Batignolles Ouest, qui s'est engagée contractuellement à verser à M. X... une rémunération variable en fonction de l'atteinte des objectifs fixés, ne justifie pas des éléments permettant de calculer la rémunération variable de M. X... pour la période du 1er janvier au 28 octobre 2011 ; qu'à défaut d'accord entre l'employeur et le salarié sur le montant de cette rémunération, il incombe au juge de la déterminer au vu des critères visés au contrat et des accords conclus les années précédentes ; que M. X... a perçu en 2010 une rémunération variable de 19 000 euros ; que l'intéressé ayant travaillé durant dix mois en 2011, il convient d'infirmer le jugement entrepris et de condamner la société Spie Batignolles Ouest à payer à M. X... la somme de 15 833,33 euros à titre de rémunération variable pour l'année 2011, ainsi que la somme de 1583,333 euros au titre des congés payés afférents » ;

ALORS QUE selon le contrat de travail de Monsieur X..., le montant de sa rémunération variable « pourra être compris entre 0 et 24 % de [sa] rémunération annuelle de base, calculée et versée en fonction de l'atteinte de [ses] objectifs annuels et versée au pro-rata temporis de [son] temps de présence sur l'année de référence » ; que la société SPIE Batignolles Ouest avait versé aux débats les comptes-rendus des entretiens annuels d'appréciation et de développement de Monsieur X... qui définissaient ses objectifs pour l'année suivante ; qu'ainsi le compte-rendu de l'entretien d'appréciation et de développement effectué le 14 décembre 2010 fixait les objectifs quantitatifs (en terme notamment de montant des prises de commande, de chiffre d'affaires et d'EBIT pour les filiales dont il avait la charge) et qualitatifs assignés à Monsieur X... pour l'année 2011 ; que dans ses conclusions d'appel, la société SPIE Batignolles Ouest soulignait que Monsieur X... n'avait pas atteint ces objectifs, au regard d'une part de la gravité de la situation financière de la société MAB Construction et d'autre part de ses méthodes de management ; qu'en affirmant, pour condamner la société SPIE Batignolles Ouest à verser à Monsieur X... un rappel de rémunération variable pour l'année 2011, que l'employeur ne justifie pas des éléments permettant de calculer la rémunération variable de Monsieur X... pour l'exercice 2011, sans s'expliquer sur les objectifs fixés lors de l'entretien d'appréciation et de développement du 14 décembre 2010, ni rechercher si le salarié avait réalisé ces objectifs, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du Code civil dans sa rédaction applicable au litige, ensemble l'article L. 1221-1 du Code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 16-17936
Date de la décision : 07/03/2018
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Rennes, 30 mars 2016


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 07 mar. 2018, pourvoi n°16-17936


Composition du Tribunal
Président : Mme Farthouat-Danon (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, SCP Thouvenin, Coudray et Grévy

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:16.17936
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