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07/03/2018 | FRANCE | N°16-17223

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 07 mars 2018, 16-17223


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nancy, 15 mars 2016, RG n° 14/02134), que la société Arcelormittal Atlantique et Lorraine (la société Arcelormittal), qui utilise, dans son établissement industriel de Rombas, du gaz naturel dans ses procédés métallurgiques, est assujettie à ce titre à la taxe intérieure de consommation de gaz naturel (TICGN) ; que l'administration des douanes lui a notifié, par procès-verbal du 23 janvier 2012, que la TICGN acquittée pour la période du 1e

r avril 2008 au 30 juin 2009 lui avait été indûment remboursée, puis a émis à ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nancy, 15 mars 2016, RG n° 14/02134), que la société Arcelormittal Atlantique et Lorraine (la société Arcelormittal), qui utilise, dans son établissement industriel de Rombas, du gaz naturel dans ses procédés métallurgiques, est assujettie à ce titre à la taxe intérieure de consommation de gaz naturel (TICGN) ; que l'administration des douanes lui a notifié, par procès-verbal du 23 janvier 2012, que la TICGN acquittée pour la période du 1er avril 2008 au 30 juin 2009 lui avait été indûment remboursée, puis a émis à son encontre, le 30 mars 2012, un avis de mise en recouvrement (AMR) de cette taxe ; que sa contestation ayant été rejetée, la société Arcelormittal a assigné l'administration des douanes en annulation de l'AMR ;

Attendu que la société Arcelormittal fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes tendant à la constatation de l'illégalité de l'article 3 du décret n° 2008-1001 du 24 septembre 2008, à l'annulation de la décision rejetant sa contestation de l'AMR et à la condamnation de l'administration des douanes à lui rembourser la somme de 189 406 euros alors, selon le moyen :

1°/ que la société Arcelormittal faisait valoir, dans ses conclusions d'appel, que le paiement de la TICGN constituait une atteinte à un bien au sens de l'article 1er du premier protocole additionnel à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (CESDH), dans la mesure où elle est exclue du bénéfice de l'exonération de cette taxe prévue au profit de certains codes ICPE visés par les dispositions du décret du 24 septembre 2008 susvisé, alors pourtant que la société est dans une situation analogue à celle d'entreprises bénéficiaires de cette exonération et que cette différence de traitement prévue par ledit décret constituait, faute d'être d'utilité publique ou fondée sur des critères rationnels objectifs en rapport avec l'objet de la loi, une discrimination dans la protection conventionnelle de son droit de propriété, en violation des stipulations combinées de l'article 1er du premier protocole additionnel avec celles de l'article 14 CESDH, qui prohibe les discriminations dans l'exercice des droits fondamentaux garantis par cette convention ; qu'en omettant de répondre à ce moyen d'inconventionnalité opérant, la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de réponse à conclusions, en violation de l'article 455 du code de procédure civile ;

2°/ que le juge judiciaire des accises douanières a pleine compétence pour connaître de la validité des textes réglementaires qui fondent les impositions qu'il est appelé à contrôler ; qu'en affirmant néanmoins qu'elle n'était pas compétente pour statuer sur la constitutionnalité d'un texte réglementaire, la cour d'appel a violé le principe de séparation des autorités administratives et judiciaires résultant de l'article 13 de la loi des 16- 24 août 1790 et du décret du 16 fructidor an III ;

3°/ qu'en jugeant, pour écarter les moyens tirés de l'inconstitutionnalité du décret du 24 septembre 2008, que la décision du Conseil constitutionnel du 29 janvier 2015, portant sur le seul article 265 C du code des douanes dont le décret litigieux précisait les règles relatives à l'assiette des taxes intérieures de consommation dont un contribuable peut être exonéré lorsqu'un produit énergétique fait l'objet d'un double usage au sens de l'article du code des douanes, y faisait obstacle et en faisant ainsi bénéficier ce décret d'une présomption irréfragable de constitutionnalité, la cour d'appel a violé l'article 62 de la Constitution définissant la portée et l'autorité absolue de chose jugée des décisions du Conseil constitutionnel ;

4°/ qu'en application de la jurisprudence pertinente du Conseil constitutionnel, le principe d'égalité devant l'impôt comporte comme composante le principe d'égalité devant la loi fiscale, qui exige que des contribuables placés dans des situation semblables fassent l'objet d'un traitement identique et que le législateur ne puisse déroger à cette exigence qu'en réglant de façon différente des situations différentes ou pour des raisons d'intérêt général en rapport avec l'objet de la loi, c'est-à-dire en l'espèce avec l'exonération législative de l'utilisation de produits énergétiques à double usage, dont fait partie le gaz utilisé comme combustible dans les procédés métallurgiques en débat ; que l'exposante établissait dans ses conclusions d'appel, que les procédés métallurgiques, qu'elle mettait en oeuvre et qui n'ont pas été exonérés de la TICGN, ne se distinguaient nullement, au regard de la notion de double usage, de ceux exonérés par l'article 3 du décret du 24 septembre 2008 et que cette absence de distinction se manifestait de façon éclatante par la circonstance que le décret n° 2012-382 du 19 mars 2012 avait modifié l'article 3 du décret du 24 septembre 2008 pour notamment y ajouter le code ICPE 2560, qui inclut le procédé four à brame mis en oeuvre par l'exposante, ce qui montre bien que le pouvoir réglementaire avait, en 2008, fixé une liste incomplète de procédés métallurgiques exonérés de la TICGN ; qu'en se bornant à relever que le code ICPE sous lequel sont classés des procédés correspond au traitement juridique de certaines installations particulières faisant l'objet d'une réglementation spécifique au titre du code de l'environnement en fonction de la gravité des dangers ou des inconvénients qu'elles peuvent présenter, sans caractériser en aucune façon en quoi les installations non exonérées comporteraient des dangers ou des inconvénients supérieurs ou différents de ceux relatifs aux installations exonérées, la cour d'appel n'a nullement mis en exergue une situation différente ou des motifs d'intérêt général justifiant les différences de traitement au regard de l'objet de la loi ainsi indûment introduites par l'article 3 décret du 24 septembre 2008 et a violé le principe d'égalité devant l'impôt, en tant qu'il inclut le principe d'égalité devant la loi fiscale résultant de la combinaison des articles 6 et 13 de la Déclaration de 1789 ;

5°/ que la société Arcelormittal faisait valoir dans ses conclusions d'appel que l'exclusion du bénéfice de l'exonération de TICGN avait tout à la fois limité l'exercice de son droit constitutionnel de propriété, en tant qu'il s'exerçait sur sa trésorerie ou ses investissements potentiels, et qu'il l'avait privée d'un flux de trésorerie correspondant à la charge fiscale indûment imposée, et que, dans ces conditions, l'imposition critiquée sur le fondement du décret 24 septembre 2008 reposait sur une norme anticonstitutionnelle ; qu'en en se bornant à affirmer péremptoirement qu'aucune violation du droit de propriété n'était établie, la cour d'appel a insuffisamment motivé son arrêt en violation de l'article 455 du code de procédure civile ;

6°/ que la société Arcelormittal faisait valoir dans ses conclusions d'appel que l'exclusion du bénéfice de l'exonération de TICGN avait tout à la fois limité l'exercice de son droit constitutionnel de propriété, en tant qu'il s'exerçait sur sa trésorerie ou ses investissements potentiels, et qu'il l'avait privée d'un flux de trésorerie correspondant à la charge fiscale indûment imposée, et que, dans ces conditions, l'imposition critiquée sur le fondement du décret 24 septembre 2008 reposait sur une norme anticonstitutionnelle ; qu'en écartant le grief tiré de la violation du droit de propriété, la cour d'appel a violé les dispositions combinées des articles 2 et 17 de la Déclaration de 1789 ;

7°/ que la société Arcelormittal faisait valoir dans ses dernières écritures que la charge fiscale qu'elle avait subie créait une distorsion de concurrence impactant la liberté de gestion, notamment financière et commerciale, des entreprises indûment exclues de l'exonération de TICGN, s'agissant de surcroît de l'utilisation d'une énergie essentielle, par construction, à leur activité économique, liberté de gestion résultant directement de la liberté d'entreprendre ; qu'en se bornant à affirmer, sans aucune autre précision, qu'aucune violation de la liberté en d'entreprendre n'était établie, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

8°/ que la société Arcelormittal faisait valoir dans ses dernières écritures que la charge fiscale qu'elle avait subie créait une distorsion de concurrence impactant la liberté de gestion, notamment financière et commerciale, des entreprises indûment exclues de l'exonération de TICGN, s'agissant de surcroît de l'utilisation d'une énergie essentielle, par construction, à leur activité économique, liberté de gestion résultant directement de la liberté d'entreprendre ; qu'en écartant un tel grief, la cour d'appel a également violé la liberté d'entreprendre découlant de l'article 4 de la Déclaration de 1789 ;

Mais attendu, en premier lieu, qu'après avoir relevé que le bénéfice de l'exonération de la TICGN est réservé à l'utilisation du gaz naturel dans des procédés métallurgiques relevant de certaines activités figurant dans la nomenclature des installations classées pour la protection de l'environnement (ICPE), en fonction d'objectifs d'intérêt général, l'arrêt retient qu'aucune discrimination ne peut être invoquée sur le fondement des dispositions combinées des articles 14 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et 1er de son protocole additionnel n° 1 ; que par ces motifs, la cour d'appel a répondu au moyen d'inconventionnalité ;

Et attendu, en second lieu, qu'après avoir relevé que le Conseil constitutionnel, par une décision du 29 janvier 2015, avait déclaré conforme à la Constitution le 2° du paragraphe I et le paragraphe II de l'article 265 C du code des douanes en considérant que le législateur avait pu renvoyer au décret le soin de fixer des règles relatives à l'assiette des taxes intérieures de consommation dont un contribuable peut être exonéré lorsqu'un produit énergétique fait l'objet d'un « double usage », la cour d'appel en a déduit à bon droit, abstraction faite du motif surabondant critiqué par la deuxième branche, que le moyen tiré de l'inconstitutionnalité du décret n° 2008-1001 du 24 septembre 2008 devait être rejeté ;

D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Arcelormittal Atlantique et Lorraine aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer au directeur régional des douanes et droits indirects de Lorraine la somme de 3 000 euros et rejette sa demande ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du sept mars deux mille dix-huit.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Lesourd, avocat aux Conseils, pour la société Arcelormittal Atlantique et Lorraine

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'AVOIR rejeté les demandes de l'exposante tendant à la constatation de l'illégalité de l'article 3 du décret no 2008-1 001 du 24 septembre 2008, à l'annulation de la décision du 19 avril 2013 rejetant sa contestation de l'avis de mise en recouvrement du 30 mars 2012 et à la condamnation des douanes à lui rembourser la somme de 189 406 euros, avec intérêts au taux légal à compter de la demande de remboursement du 17 novembre 2009 ;

AUX MOTIFS QUE « pour la période considérée, allant du 1er avril 2008 au 30 juin 2009, la réglementation applicable résultait des articles 266 quinquies 4, a) 2" du code des douanes énonçant que le gaz naturel n'est pas soumis à la taxe intérieure de consommation lorsqu'il est utilisé à un double usage au sens de l'article 265 C 1 2" dudit code lequel indiquait, notamment, qu'étaient considérés comme produits à double usage « les combustibles utilisés dans les procédés métallurgiques ou de réduction chimique » ; que, par ailleurs, l'article 265 C Il du code des douanes précisait que les modalités d'application de l'article 265 C 1 étaient fixées par décret, ce que faisait le décret no 2008-1001 24 septembre 2008 lequel, en son article 3, indiquait que : « Les procédés métallurgiques mentionnés au 2° du 1 de l'article 265 C du code des douanes, au 2o du a du 4 de l'article 266 quinquies et au b du 1 ° du 4 de l'article 266 quinquies B du même code s'entendent des activités de production et de transformation à chaud des métaux ferreux et non ferreux et de leurs alliages, mentionnés dans la colonne A de la nomenclature des installations classées pour la protection de l'environnement, annexée à l'article R. 511-9 du code de l'environnement sous les rubriques suivantes :
2545 - Fabrication d'acier, fer, fonte, ferro-alliages.
2546 - Traitement des minerais non ferreux, élaboration des métaux et alliages non ferreux.
2550- Fonderie de plomb et alliages contenant du plomb.
2551 - Fonderie des métaux et alliages ferreux.
2552 - Fonderie des métaux et alliages non ferreux » ; que, pour soutenir que ce décret est contraire aux stipulations combinées des articles 14 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales interdisant toute discrimination vis-à-vis des droits et libertés protégés par ladite convention et de l'article 1er du premier protocole additionnel à ladite convention garantissant le droit au respect des biens et de la propriété du contribuable, la société Arcelormittal Atlantique et Lorraine fait essentiellement valoir, d'une part, que cette atteinte aux biens résulte de son imposition à la TICGN à laquelle elle estime ne pas devoir être assujettie dès lors que l'exonération du paiement de cette taxe est prévue au profit de certains codes ICPE visés par le décret en cause alors que, si les activités de son établissement industriel de Rombas n'entrent dans aucune des activités visées par les codes ICPE 2545, 2546, 2550, 2551 et 2552, elle se trouve néanmoins dans une situation objectivement analogue à celle des bénéficiaires de l'exonération et, d'autre part, que cette différence de traitement est discriminatoire, dès lors qu'elle ne poursuit pas un objectif d'utilité publique ou n'est pas fondée sur des critères rationnels en rapport avec les buts de la loi ;qu'elle affirme que, pour rechercher si il y a identité de situation, il ne peut étre recouru aux seules classifications douanières et statistiques lesquels reposent sur différentes sources nationales et supranationales qui, de surcroÎt, excluent tout aspect économique et qu'en application de la jurisprudence la plus récente de la Cour de cassation, il y a lieu de se référer uniquement aux produits énergétiques à double usage dont font partie les combustibles utilisés dans certains des procédés métallurgiques ; qu'elle indique qu'à ce titre, l'un des procédés industriels qu'elle met en oeuvre avec du gaz naturel à double usage est le procédé d'agglomération de minerais ferreux inclus sous le code /CPE 2541 qui, s'il n'était pas visé à l'article 3 du décret de 2008, l'est à l'article 3 du décret no 2012-382 du 19 mars 2012 et qu'elle s'est donc trouvée exclue de l'exonération de la T!CGN alors que le procédé qu'elle utilisait répondait à l'exigence du double usage du produit énergétique ; qu'il convient toutefois de rappeler, ainsi que le fait très justement la ORDO!, qu'en l'espèce, aucune discrimination ne peut être utilement invoquée dès lors que le Conseil constitutionnel a déjà jugé que le principe d'égalité ne s'oppose pas à ce que le législateur règle de façon différente des situations différentes ni à ce qu'il déroge à l'égalité pour des raisons d'intérêt général ; qu'en l'espèce, le code /CPE sous lequel sont classées des entreprise correspond au traitement juridique de certaines installations particulières faisant l'objet d'une réglementation spécifique au titre des dispositions législatives et réglementaires du code de l'environnement en fonction de la gravité des dangers ou des inconvénients qu'elles peuvent présenter de par leurs activités, c'est-à-dire en fonction d'objectifs d'intérêt général, dont le droit à la protection de l'environnement; que, de plus, la société Arcelormitta! Atlantique et Lorraine n'invoque ni ne justifie du caractère confiscatoire de la T!CGN, ni de ce qu'elle constituerait une charge excessive au regard de ses facultés contributives, conditions posées par le Conseil constitutionnel au droit reconnu au législateur de déroger au principe d'égalité; qu'aucune violation des dispositions de la CEDH ne peut être valablement invoquée par l'appelante ; que, de plus, aucune violation du droit de propriété ni de la liberté d'entreprendre n'est établie, de telle sorte que l'invocation d'une violation des articles de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 ne peut être considérée comme fondée ; que s'agissant de la constitutionnalité du décret du 24 septembre 2008, outre que le juge judiciaire n'est pas compétent pour statuer sur la constitutionnalité d'un texte réglementaire, il y a lieu de rappeler à l'appelante que, par décision en date du 29 janvier 2015, le Conseil constitutionnel a confirmé la constitutionnalité de l'article 265 C du code des douanes en jugeant que « doit être écarté le grief tiré de ce que le législateur aurait méconnu l'étendue de sa compétence en renvoyant au décret le soin de fixer les règles relatives à l'assiette des taxes intérieures de consommation dont un contribuable peut être exonéré lorsqu'un produit énergétique fait l'objet d'un double usage au sens du 2o du paragraphe de l'article 265 C du code des douanes»; que le moyen tiré de l'inconstitutionnalité sera en conséquence rejeté» ;

1°) ALORS QUE l'exposante faisait valoir, dans ses conclusions d'appel (pp 8 et s.) que le payement de la TICGN constituait une atteinte à un bien au sens de l'article 1er du premier protocole additionnel à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (CESDH), dans la mesure où elle est exclue du bénéfice de l'exonération de cette taxe prévue au profit de certains codes ICPE visés par les dispositions du décret du 24 septembre 2008 susvisé, alors pourtant que la société est dans une situation analogue à celle d'entreprises bénéficiaires de cette exonération et que cette différence de traitement prévue par ledit décret constituait, faute d'être d'utilité publique ou fondée sur des critères rationnels objectifs en rapport avec l'objet de la loi, une discrimination dans la protection conventionnelle de son droit de propriété, en violation des stipulations combinées de l'article 1er du premier protocole additionnel avec celles de l'article 14 CESDH, qui prohibe les discriminations dans l'exercice des droits fondamentaux garantis par cette convention ; qu'en omettant de répondre à ce moyen d'inconventionnalité opérant, la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de réponse à conclusions, en violation de l'article 455 du code de procédure civile ;

2°) ALORS QUE le juge judiciaire des accises douanières a pleine compétence pour connaître de la validité des textes réglementaires qui fondent les impositions qu'il est appelé à contrôler ; qu'en affirmant néanmoins qu'elle n'était pas compétente pour statuer sur la constitutionnalité d'un texte réglementaire, la cour d'appel a violé le principe de séparation des autorités administratives et judiciaires résultant de l'article 13 de la loi des 16- 24 août 1790 et du décret du 16 fructidor an Ill;

3°) ALORS QU'en jugeant, pour écarter les moyens tirés de l'inconstitutionnalité du décret du 24 septembre 2008, que la décision du Conseil constitutionnel du 29 janvier 2015, portant sur le seul article 265 C du code des douanes dont le décret litigieux précisait les règles relatives à l'assiette des taxes intérieures de consommation dont un contribuable peut être exonéré lorsqu'un produit énergétique fait l'objet d'un double usage au sens de l'article du code des douanes, y faisait obstacle et en faisant ainsi bénéficier ce décret d'une présomption irréfragable de constitutionnalité, la cour d'appel a violé l'article 62 de la Constitution définissant la portée et l'autorité absolue de chose jugée des décisions du Conseil constitutionnel ;

4°) ALORS EN TOUTE HYPOTHESE QU'en application de la jurisprudence pertinente du Conseil constitutionnel, le principe d'égalité devant l'impôt comporte comme composante le principe d'égalité devant la loi fiscale, qui exige que des contribuables placés dans des situation semblables fassent l'objet d'un traitement identique et que le législateur ne puisse déroger à cette exigence qu'en réglant de façon différente des situations différentes ou pour des raisons d'intérêt général en rapport avec l'objet de la loi, c'est-à-dire en l'espèce avec l'exonération législative de l'utilisation de produits énergétiques à double usage, dont fait partie le gaz utilisé comme combustible dans les procédés métallurgiques en débat ; que l'exposante établissait dans ses conclusions d'appel (pp 13 et s.), que les procédés métallurgiques, qu'elle mettait en oeuvre et qui n'ont pas été exonérés de la TICGN, ne se distinguaient nullement, au regard de la notion de double usage, de ceux exonérés par l'article 3 du décret du 24 septembre 2008 et que cette absence de distinction se manifestait de façon éclatante par la circonstance que le décret n" 2012-382 du 19 mars 2012 avait modifié l'article 3 du décret du 24 septembre 2008 pour notamment y ajouter le code lCPE 2541 1, qui inclut le procédé d'agglomération de minerais ferreux mis en oeuvre par l'exposante, ce qui montre bien que le pouvoir réglementaire avait, en 2008, fixé une liste incomplète de procédés métallurgiques exonérés de la TICGN ; qu'en se bornant à relever que le code lCPE sous lequel sont classés des procédés correspond au traitement juridique de certaines installations particulières faisant l'objet d'une réglementation spécifique au titre du code de l'environnement en fonction de la gravité des dangers ou des inconvénients qu'elles peuvent présenter, sans caractériser en aucune façon en quoi les installations non exonérées comporteraient des dangers ou des inconvénients supérieurs ou différents de ceux relatifs aux installations exonérées, la cour d'appel n'a nullement mis en exergue une situation différente ou des motifs d'intérêt général justifiant les différences de traitement au regard de l'objet de la loi ainsi indûment introduites par l'article 3 décret du 24 septembre 2008 et a violé le principe d'égalité devant l'impôt, en tant qu'il inclut le principe d'égalité devant la loi fiscale résultant de la combinaison des articles 6 et 13 de la Déclaration de 1789 ;

5") ALORS QUE l'exposante faisait valoir dans ses conclusions d'appel (p 15) que l'exclusion du bénéfice de l'exonération de TICGN avait tout à la fois limité l'exercice de son droit constitutionnel de propriété, en tant qu'il s'exerçait sur sa trésorerie ou ses investissements potentiels, et qu'il l'avait privée d'un flux de trésorerie correspondant à la charge fiscale indûment imposée, et que, dans ces conditions, l'imposition critiquée sur le fondement du décret 24 septembre 2008 reposait sur une norme anticonstitutionnelle ; qu'en en se bornant à affirmer péremptoirement qu'aucune violation du droit de propriété n'était établie, la cour a insuffisamment motivé son arrêt en violation de l'article 455 du code de procédure civile ;

6°) ALORS QUE l'exposante faisait valoir dans ses conclusions d'appel (p. 15) que l'exclusion du bénéfice de l'exonération de TlCGN avait tout à la fois limité l'exercice de son droit constitutionnel de propriété, en tant qu'il s'exerçait sur sa trésorerie ou ses investissements potentiels, et qu'il l'avait privée d'un flux de trésorerie correspondant à la charge fiscale indûment imposée, et que, dans ces conditions, l'imposition critiquée sur le fondement du décret 24 septembre 2008 reposait sur une norme anticonstitutionnelle ; qu'en écartant le grief tiré de la violation du droit de propriété, la cour d'appel a violé les dispositions combinées des articles 2 et 17 de la Déclaration de 1789 ;

7°) ALORS QUE l'exposante faisait valoir dans ses dernières écritures (p. 14) que la charge fiscale qu'elle avait subie créait une distorsion de concurrence impactant la liberté de gestion, notamment financière et commerciale, des entreprises indûment exclues de l'exonération de TICGN, s'agissant de surcroît de l'utilisation d'une énergie essentielle, par construction, à leur activité économique, liberté de gestion résultant directement de la liberté d'entreprendre ; qu'en se bornant à affirmer, sans aucune autre précision, qu'aucune violation de la liberté en d'entreprendre n'était établie, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

8°) ALORS QUE l'exposante faisait valoir dans ses dernières écritures (p. 14) que la charge fiscale qu'elle avait subie créait une distorsion de concurrence impactant la liberté de gestion, notamment financière et commerciale, des entreprises indûment exclues de l'exonération de TICGN, s'agissant de surcroît de l'utilisation d'une énergie essentielle, par construction, à leur activité économique, liberté de gestion résultant directement de la liberté d'entreprendre ; qu'en écartant un tel grief, la cour d'appel a également violé la liberté d'entreprendre découlant de l'article 4 de la Déclaration de 1789.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 16-17223
Date de la décision : 07/03/2018
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Nancy, 15 mars 2016


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 07 mar. 2018, pourvoi n°16-17223


Composition du Tribunal
Président : Mme Riffault-Silk (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, SCP Lesourd

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:16.17223
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