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07/03/2018 | FRANCE | N°16-16812

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 07 mars 2018, 16-16812


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant tant sur le pourvoi principal formé par les sociétés Jasmin et Café indigo que sur le pourvoi incident relevé par Mme S... B... ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 4 mars 2016), que Mme S... B... (Mme B...) a été embauchée par la société Les Bistrots du quai, en 2000, afin d'assurer la direction opérationnelle d'un restaurant qui a pris le nom de "Chez Y..." ; qu'en 2002, cette société a ouvert un autre restaurant sous l'enseigne "Chez Y...", le premier devenant "Le Petit Y... " ;

que ces fonds de commerce ont fait l'objet d'un apport partiel d'actifs à l...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant tant sur le pourvoi principal formé par les sociétés Jasmin et Café indigo que sur le pourvoi incident relevé par Mme S... B... ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 4 mars 2016), que Mme S... B... (Mme B...) a été embauchée par la société Les Bistrots du quai, en 2000, afin d'assurer la direction opérationnelle d'un restaurant qui a pris le nom de "Chez Y..." ; qu'en 2002, cette société a ouvert un autre restaurant sous l'enseigne "Chez Y...", le premier devenant "Le Petit Y... " ; que ces fonds de commerce ont fait l'objet d'un apport partiel d'actifs à la société Jasmin, qui a déposé, le 21 octobre 2003, la marque "Y..." n° 3 253 205 pour désigner des services de restauration ; qu'un troisième établissement, "Le Comptoir de Y...", a été ouvert en 2004 par la société Café indigo ; que Mme B... a été licenciée en 2012 ; que, faisant valoir qu'elle était connue, dans le milieu culinaire, sous le pseudonyme de Y... et que la marque Y... avait été déposée à son insu, elle a agi en revendication de la marque n° 3 253 205, ainsi qu'en concurrence déloyale et parasitaire contre les sociétés Jasmin et Café indigo ;

Sur les premier et deuxième moyens du pourvoi principal, réunis :

Attendu que les sociétés Jasmin et Café indigo font grief à l'arrêt de déclarer recevable et fondée l'action de Mme B... en revendication de la marque française semi-figurative n° 3 253 205 "Y..." alors, selon le moyen :

1°/ que la mauvaise foi doit être appréciée globalement en tenant compte de tous les facteurs pertinents du cas d'espèce et en se plaçant à la date du dépôt de la marque ; que la circonstance que le déposant ait eu connaissance de l'usage antérieur du signe litigieux par un tiers ne suffit pas, à elle seule, pour que soit établie sa mauvaise foi ; il convient également de prendre en considération son intention au moment du dépôt ; que cette intention est un élément subjectif qui doit être déterminé par référence aux circonstances objectives du cas d'espèce ; qu'en l'espèce, pour écarter le moyen de la société Jasmin faisant valoir qu'elle avait déposé la marque "Y..." dans la seule intention de sécuriser, à l'égard des tiers, les investissements qu'elle avait supportés pour lancer et exploiter les restaurants "Y..." et "Petit Y...", la cour d'appel a, en particulier, relevé que l'usage des enseignes "Y..." et "Petit Y..." pour désigner ces restaurants "se rapport[ait] nécessairement à une dénomination sociale et non à une marque", que certaines des pièces produites étaient postérieures au dépôt de la marque et que ce ne serait qu'après le dépôt de la marque que des commandes de vaisselle portant la marque déposée Y... auraient été passées, "ce qui démontre une volonté de développer un service de restauration identifié par cette marque et une spécificité commune qui était de proposer une cuisine thaï" ; qu'en statuant ainsi, cependant qu'elle constatait elle-même que les restaurants "Y..." et "Le Petit Y... " avaient été ouverts avant le dépôt de la marque "Y..." n° 3 253 203 en date du 21 octobre 2003, ce dont il résultait qu'avant même de procéder à ce dépôt, la société Jasmin avait déjà fait usage de ces signes à titre de marque pour désigner des services de restauration, la cour d'appel, qui n'a pas justifié en quoi, en l'état d'une telle exploitation antérieure pour des services de restauration, réalisée avec l'accord de Mme B..., le dépôt, en 2003, de la marque « Y... » pour désigner ces mêmes services dans la classe 43 n'aurait pas été effectué par la société Jasmin dans l'intention légitime de sécuriser l'exploitation commerciale des restaurants à laquelle Mme B... était intéressée, et non dans l'intention d'empêcher cette dernière d'utiliser ce signe, a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 712-6 du code de la propriété intellectuelle ;

2°/ qu'en affirmant, sans autre explication, que si les différents établissements ont utilisé les enseignes "Y...", "Marine de Y..." et "Petit Y...", ces éléments se rapportent nécessairement à une dénomination sociale et non à une marque", sans donner aucun motif de nature à justifier en quoi de tels usages ne pouvaient être regardés comme constituant des usages faits à titre de marque pour désigner des services de restauration, la cour d'appel a entaché sa décision d'une insuffisance de motivation, en violation de l'article 455 du code de procédure civile ;

3°/ qu'en relevant, d'une part, que si les différents établissements ont notamment utilisé les enseignes "Y...", "Marine de Y..." et "Petit Y...", "ces éléments se rapportent nécessairement à une dénomination sociale et non à une marque", et d'autre part, qu'en bénéficiant d'un salaire et d'un intéressement sur le chiffre d'affaires réalisé par les restaurants exerçant à l'enseigne Y..., au [...]          , et "La Marine de Y..." devenu " Le Petit Y... ", [...]   , Mme B... avait "bénéficié ainsi de l'exploitation de la marque puisque celle-ci a eu pour objet des services de restauration", la cour d'appel, qui a ainsi tout à la fois retenu que l'exploitation des restaurants aux enseignes "Y...", "Marine de Y..."" et "Petit Y..." constituait un usage du signe "Y..." effectué à titre de marque pour des services de restauration et qu'elle ne constituait pas un tel usage, s'est contredite, en violation de l'article 455 du code de procédure civile ;

4°/ que les juges du fond ne peuvent accueillir ou rejeter les demandes dont ils sont saisis sans examiner les éléments de preuve qui leur sont soumis par les parties à l'appui de leurs prétentions ; qu'en l'espèce, la société Jasmin se prévalait notamment de factures pour de la vaisselle revêtue de la marque "Y..." en date du 28 février 2002 (pièce n° 7) et des 12 et 21 mars 2003 ainsi que d'une facture pour des casquettes revêtues de cette même marque, destinées au personnel de son restaurant, en date du 7 octobre 2002 ; qu'en affirmant que ce ne serait qu'après le dépôt de la marque « Y... » n° 3 253 203, en date du 21 octobre 2003, que la société Jasmin aurait passé des commandes de vaisselle et en retenant ainsi implicitement qu'il n'était pas établi que la marque "Y..." aurait été apposée sur de quelconques supports avant cette date, sans procéder à une analyse même sommaire des pièces précitées, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;

5°/ que le bien-fondé d'une action en revendication de marque suppose la démonstration d'une intention frauduleuse du déposant au jour du dépôt de la marque ; en l'espèce, pour écarter le moyen de la société Jasmin faisant valoir qu'elle avait déposé la marque "Y..." dans la seule intention de sécuriser, à l'égard des tiers, les investissements qu'elle avait supportés pour lancer et exploiter les restaurants "Y..." et "Petit Y...", la cour d'appel a, en particulier, relevé que l'usage des enseignes "Y..." et "Petit Y..." pour désigner ces restaurants "se rapport[ait] nécessairement à une dénomination sociale et non à une marque", que certaines des pièces produites étaient postérieures au dépôt de la marque et que ce ne serait qu'après le dépôt de la marque que des commandes de vaisselle portant la marque déposée Y... auraient été passées, "ce qui démontre une volonté de développer un service de restauration identifié par cette marque et une spécificité commune qui était de proposer une cuisine thaï" ; qu'en statuant ainsi, cependant qu'elle constatait elle-même que les restaurants "Y..." et "Le Petit Y... " avaient été ouverts avant le dépôt de la marque "Y..." n° 3 253 203 en date du 21 octobre 2003, ce dont il résultait qu'avant même de procéder à ce dépôt, la société Jasmin avait déjà fait usage de ces signes à titre de marque pour désigner des services de restauration, la cour d'appel, qui n'a pas justifié en quoi, en l'état d'une telle exploitation antérieure pour des services de restauration, réalisée avec l'accord de Mme B..., le dépôt, en 2003, de la marque "Y..." pour désigner ces mêmes services dans la classe 43 n'aurait pas été effectué par la société Jasmin dans l'intention légitime de sécuriser l'exploitation commerciale des restaurants à laquelle Mme B... était intéressée, et non dans l'intention d'empêcher cette dernière d'utiliser ce signe, a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 712-6 du code de la propriété intellectuelle ;

6°/ qu'en affirmant, sans autre explication, que si les différents établissements ont utilisé les enseignes "Y...", "Marine de Y..." et "Petit Y...", ces éléments se rapportent nécessairement à une dénomination sociale et non à une marque", sans donner aucun motif de nature à justifier en quoi de tels usages ne pouvaient être regardés comme constituant des usages faits à titre de marque pour désigner des services de restauration, la cour d'appel a entaché sa décision d'une insuffisance de motivation, en violation de l'article 455 du code de procédure civile ;

7°/ qu'en relevant, d'une part, que si les différents établissements ont notamment utilisé les enseignes "Y...", "Marine de Y..." et "Petit Y...", "ces éléments se rapportent nécessairement à une dénomination sociale et non à une marque", et d'autre part, qu'en bénéficiant d'un salaire et d'un intéressement sur le chiffre d'affaires réalisé par les restaurants exerçant à l'enseigne Y..., au [...]          , et "La Marine de Y..." devenu "Le Petit Y... ", [...], Mme B... avait "bénéficié ainsi de l'exploitation de la marque puisque celle-ci a eu pour objet des services de restauration", la cour d'appel, qui a ainsi tout à la fois retenu que l'exploitation des restaurants aux enseignes "Y...", "Marine de Y..." et "Petit Y..." constituait un usage du signe "Y..." effectué à titre de marque pour des services de restauration et qu'elle ne constituait pas un tel usage, s'est contredite, en violation de l'article 455 du code de procédure civile ;

8°/ que les juges du fond ne peuvent accueillir ou rejeter les demandes dont ils sont saisis sans examiner les éléments de preuve qui leur sont soumis par les parties à l'appui de leurs prétentions ; qu'en l'espèce, la société Jasmin se prévalait notamment de factures pour de la vaisselle revêtue de la marque "Y..." en date du 28 février 2002 et des 12 et 21 mars 2003 ainsi que d'une facture pour des casquettes revêtues de cette même marque, destinées au personnel de son restaurant, en date du 7 octobre 2002 ; qu'en affirmant que ce ne serait qu'après le dépôt de la marque "Y..." n° 3 253 203, en date du 21 octobre 2003, que la société Jasmin aurait passé des commandes de vaisselle et en retenant ainsi implicitement qu'il n'était pas établi que la marque "Y..." aurait été apposée sur de quelconques supports avant cette date, sans procéder à une analyse même sommaire des pièces précitées, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;

Mais attendu, en premier lieu, qu'ayant retenu que Mme B... avait acquis sous le pseudonyme Y... une notoriété en matière culinaire avant le dépôt de la marque, que ce n'est qu'après la rupture de son contrat de travail qu'elle avait appris que cette marque avait été déposée sans son accord, que ce dépôt pouvait l'empêcher d'exercer toute exploitation indépendante de son nom pour des services de restauration et qu'il avait été effectué, de mauvaise foi, au mépris de ses droits, la cour d'appel a ainsi répondu, en les écartant, aux conclusions soutenant que le déposant n'aurait ainsi procédé que dans l'intention de sécuriser ses investissements à l'égard des tiers ;

Attendu, en deuxième lieu, que c'est dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation que la cour d'appel, relevant notamment que cet usage s'inscrivait dans le cadre du seul droit concédé par Mme B..., a retenu qu'avant son dépôt en tant que marque, ce pseudonyme n'avait été utilisé qu'à titre de dénomination sociale ;

Et attendu, enfin, que la cour d'appel, qui n'était pas tenue de s'expliquer sur les éléments de preuve qu'elle décidait d'écarter, ne s'est pas contredite en retenant, d'un côté, qu'avant ce dépôt, ce pseudonyme n'avait été utilisé qu'à titre de dénomination sociale ou d'enseigne, et, de l'autre, qu'après ce dépôt, Mme B... avait, sous forme d'intéressement, bénéficié de son exploitation en tant que marque ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le troisième moyen du pourvoi principal :

Attendu que les sociétés Jasmin et Café indigo font grief à l'arrêt de leur interdire d'utiliser la dénomination Y... dans le cadre de leurs activités de restauration et de gastronomie alors, selon le moyen :

1°/ qu'un pseudonyme inséré dans une enseigne, avec l'accord exprès ou implicite de la personne physique qui le porte, devient un objet de propriété incorporelle autonome, qui se détache de la personne physique qui le porte pour s'appliquer au fonds de commerce qu'il distingue ; qu'ainsi, la personne physique qui a autorisé l'insertion de son nom patronymique dans une enseigne ne peut, en principe, pas s'opposer à la poursuite de l'exploitation de cette dernière ; qu'en interdisant, de manière générale, aux sociétés Jasmin et Café indigo toute utilisation de la dénomination "Y..." dans le cadre de leurs activités de restauration et de gastronomie, tout en constatant que Mme B... avait expressément autorisé la société Bistrots du Quai, aux droits de laquelle vient désormais la société Jasmin, à utiliser le nom "Y..." dans son enseigne, la cour d'appel a violé l'article 1382 du code civil ;

2°/ qu'ayant constaté l'existence d'une telle clause, la cour d'appel ne pouvait interdire aux sociétés Jasmin et Café indigo toute utilisation de la dénomination "Y...", "dans le cadre de leurs activités de restauration et de gastronomie", que ce soit à titre de marque ou d'enseigne, sans s'expliquer, à tout le moins, sur la valeur et la portée de l'autorisation qui avait été ainsi donnée par Mme B... pour l'utilisation du nom "Y..." en tant qu'enseigne ; qu'en se bornant à relever que la clause litigieuse n'autorisait pas la société Jasmin à procéder à un dépôt de marque, sans donner aucun motif justifiant en quoi elle n'autorisait pas cette société à poursuivre l'utilisation du nom "Y..." à titre d'enseigne après le départ de Mme B..., la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;

3°/ que les juges du fond ne peuvent prononcer des mesures d'interdiction générales dénuées de lien avec les agissements incriminés ; qu'en l'occurrence, la cour d'appel a retenu que le dépôt, par la société Jasmin, de la marque "Y..." pour des services de la classe 43 présentait un caractère frauduleux et a retenu que la société Café indigo avait commis des actes de concurrence déloyale et parasitaire au titre de l'utilisation frauduleuse qu'elle aurait faite de cette marque ; qu'en prononçant une interdiction générale d'utiliser la dénomination "Y..." dans le cadre d'activités de restauration et de gastronomie, sans limiter la portée de la mesure qu'elle prononçait à l'utilisation de cette dénomination à titre de marque, la cour d'appel a violé l'article 1382 du code civil ;

Mais attendu que les sociétés Jasmin et Café indigo n'ayant pas soutenu devant les juges du fond que cette interdiction devait, le cas échéant, être limitée, le moyen, nouveau et mélangé de fait, en ce qu'il implique l'examen de prétendus droits concurrents des parties sur le même signe, est irrecevable ;

Sur le quatrième moyen du pourvoi principal :

Attendu que les sociétés Jasmin et Café indigo font grief à l'arrêt de les condamner à verser à Mme B... les sommes de 70 000 euros et de 20 000 euros en réparation de son préjudice d'image alors, selon le moyen :

1°/ que seuls peuvent être réparés les chefs de préjudice présentant un lien direct et certain avec la faute alléguée ; qu'en affirmant que "quelle [qu'en] soit la cause", la baisse importante des chiffres d'affaires réalisés par la société Jasmin après le départ de Mme B... serait à l'origine d'une "dépréciation de la marque Y... et donc d'un préjudice d'image pour Mme B...", sans caractériser en quoi un tel chef de préjudice présenterait un lien de causalité direct et certain avec les agissements fautifs reprochés à la société Jasmin, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du code civil ;

2°/ qu'en condamnant les sociétés Jasmin et Café indigo à réparer le préjudice que la fermeture des restaurants "Y..." et "Petit Y..." aurait causé à Mme B..., sans justifier en quoi la fermeture de ces restaurants serait, en elle-même, constitutive d'une faute de la part des sociétés exposantes, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du code civil ;

3°/ que seuls peuvent être réparés les chefs de préjudice présentant un lien direct et certain avec la faute alléguée ; qu'en l'espèce, selon les propres constatations de l'arrêt, Mme B... reprochait aux sociétés Jasmin et Café indigo d'avoir "profité de sa notoriété en exploitant la dénomination "Y..." tant à titre de marque qu'à titre d'enseigne" et d'avoir "continu[é] de tirer profit de son talent culinaire en exploitant pour les besoins de leurs restaurants des menus et les recettes élaborées par elle" ; que l'action en responsabilité civile ainsi intentée par Mme B... visait à voir interdire à ces sociétés tout usage de la dénomination "Y..." dans le cadre de leurs activités de restauration et de gastronomie ; qu'en condamnant les sociétés Jasmin et Café indigo à indemniser le préjudice que la fermeture des restaurants exploités sous les dénominations" Le Petit Y... " et "Les Comptoirs de Y..." aurait causé à Mme B..., quand la cessation de l'usage de ces dénominations était précisément le résultat recherché par l'action intentée par cette dernière, la cour d'appel, qui n'a ainsi aucunement caractérisé en quoi le préjudice qui aurait résulté de la fermeture de ces restaurants présenterait un quelconque lien avec les fautes reprochées aux sociétés exposantes, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du code civil ;

Mais attendu que l'arrêt relève qu'après le départ de Mme B..., les trois restaurants ont continué de proposer aux clients des recettes mises au point par cette dernière, que la presse s'en est fait l'écho et qu'ils se sont ainsi appuyés sur la notoriété dont ils avaient bénéficié depuis le dépôt de la marque ; qu'il constate encore que le site internet du restaurant "Y..." a présenté Mme B..., après son licenciement, comme étant "chef" des établissements ouverts sous son enseigne et a diffusé jusqu'en novembre 2013 une vidéo la mettant en situation, et que les deux restaurants "Le Petit Y... " et "Le comptoir de Y..." étant à présent fermés, la clientèle pouvait attribuer cette fermeture à Mme B..., ce qui contribuait à une dépréciation de la marque ; qu'en l'état de ces constatations et appréciations, dont il résultait que le dommage procédait de la présentation fautive de ces faits au public, la cour d'appel a caractérisé le lien de causalité entre les fautes des sociétés Jasmin et Café indigo et le préjudice subi par Mme B... ; que le moyen n'est pas fondé ;

Et sur le moyen unique du pourvoi incident :

Attendu que Mme B... fait grief à l'arrêt de rejeter son action en concurrence déloyale et parasitaire contre la société Jasmin, et de limiter la réparation mise à la charge de la société Café indigo alors, selon le moyen :

1°/ que constitue un acte de concurrence parasitaire le fait, pour un opérateur économique, de se placer dans le sillage d'une personne en profitant indûment de sa notoriété ; qu'en se fondant sur la circonstance inopérante que Mme B..., dite "Y...", avait perçu un intéressement sur le chiffre d'affaires réalisé par la société Jasmin jusqu'à son licenciement et ainsi bénéficié de l'exploitation de la marque "Y..." pendant l'exécution de son contrat de travail, pour en déduire que cette société n'avait commis aucun acte de concurrence déloyale ou parasitaire, après avoir constaté que cette dernière avait utilisé cette marque dans le but de profiter de la notoriété de Mme B... et avait procédé frauduleusement à son dépôt dans l'intention d'empêcher Mme B... d'utiliser ce signe pour ses activités ultérieures, la cour d'appel a violé l'article 1382 du code civil dans sa rédaction applicable à la cause ;

2°/ que doivent être réparés les chefs de préjudice présentant un lien direct et certain avec la faute alléguée ; qu'en refusant d'indemniser le préjudice financier subi par Mme B... au titre de l'exploitation frauduleuse, par la société Jasmin, de la marque "Y..." après son licenciement, au prétexte qu'un tel préjudice ne résultait pas de l'usage de la marque "Y..." mais de la rupture de son contrat de travail qui prévoyait un intéressement sur le chiffre d'affaires, quand il résultait de ses constatations que la société Jasmin avait continué à faire un usage de la marque "Y..." et à présenter Mme B... après son licenciement comme étant toujours "la chef" des établissements ouverts sous son enseigne, la cour d'appel a violé l'article 1382 du code civil dans sa rédaction applicable à la cause ;

3°/ que le préjudice doit être indemnisé intégralement, sans perte, ni profit pour la victime ; qu'en fixant le préjudice financier subi par Mme B... au titre de l'usage frauduleux, par la société Café indigo, de la marque "Y..." au regard de l'intéressement dont celle-ci bénéficiait aux termes du contrat de travail conclu avec la société Jasmin, au prétexte qu'elle ne pouvait connaître le bénéfice retiré de l'exploitation de cette marque, la cour d'appel, qui devait procéder à l'évaluation de l'entier préjudice, au besoin en recourant à une mesure d'expertise, a violé l'article 1382 du code civil dans sa rédaction applicable à la cause ;

Mais attendu que c'est dans l'exercice de son pouvoir souverain que la cour d'appel a évalué les préjudices, notamment en prenant en compte l'intéressement dont bénéficiait Mme B... selon son contrat de travail ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE les pourvois principal et incident ;

Condamne les sociétés Jasmin et Café indigo aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette leur demande et les condamne à payer à Mme S... B... la somme globale de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du sept mars deux mille dix-huit.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits, au pourvoi principal, par la SCP Hémery et Thomas-Raquin, avocat aux Conseils, pour les sociétés Jasmin et Café indigo

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré recevable l'action en revendication de la marque française semi-figurative n° 3253205 « Y... » intentée par Mme X... S... B... et d'avoir ensuite déclaré cette action bien fondée, dit que la société Jasmin a déposé cette marque en fraude des droits de Mme X... S... B..., condamné, sous astreinte, la société Jasmin à effectuer toutes les diligences nécessaires auprès de l'INPI aux fins de réaliser le transfert de la propriété de cette marque au profit de Mme B..., ordonné des mesures d'interdiction d'usage sous astreinte et de publication et condamné les sociétés Jasmin et Café Indigo au paiement de dommages-intérêts à Mme B... ;

AUX MOTIFS QUE « l'article L.712-6 alinéa 2 du code de la propriété intellectuelle dispose que :
« Si un enregistrement a été demandé soit en fraude des droits d'un tiers, soit en violation d'une obligation légale ou conventionnelle, la personne qui estime avoir un droit sur la marque peut revendiquer sa propriété en justice.
À moins que le déposant ne soit de mauvaise foi, l'action en revendication se prescrit par trois ans à compter de la publication de la demande d'enregistrement » ; que la société Jasmin, poursuivant la confirmation du jugement, oppose à cette action une fin de non-recevoir tirée de la prescription de trois ans dès lors que la marque Y... a été déposée en octobre 2003 et que la première mise en demeure de Mme B... lui a été délivrée le 17 janvier 2013 ; que Mme B... invoque la mauvaise foi de la société Jasmin et fait valoir que les premiers juges ont considéré à tort que son action était prescrite en retenant que, d'une part, la renommée du signe Y... était attachée « non à la personne de Mme B... mais à l'activité développée par la société Jasmin», d'autre part que le signe « Y...» était utilisé non « seulement comme enseigne » mais « également à usage de marque sur les nappes, vaisselle, menus ou tenues du personnel », ce dont elle « aurait eu connaissance dès le début de l'exploitation des restaurants » ; que le critère de mauvaise foi se caractérise par un manque d'intention honnête et une volonté de nuire de la part du déposant qui s'apprécient au jour du dépôt ; que le contrat de travail de Mme B..., rédigé par la société Les Bistrots du Quai qui a stipulé « Madame B... X... donne son accord exprès à la SA LES Bistrots du Quai de déposer et d'exploiter le restaurant sis au [...] , sous l'enseigne « Chez Y... » » n'était pas parfaitement clair en ce qu'il a utilisé le terme de « déposer » ; que, pour autant il n'était aucunement fait clairement mention d'un dépôt de marque portant sur le terme « Y... » ; que cette rédaction confuse ne saurait traduire une intention des parties portant sur un dépôt futur, ni être interprétée en ce sens; que de plus Mme B... d'origine thaïlandaise, arrivée en France en 1981 et qui n'avait travailler précédemment que dans le milieu de la restauration ne pouvait à l'évidence pas considérer cette clause comme valant double autorisation, d'enseigne et de dépôt de marque quand bien même tenues du personnel et vaisselle ont arboré ce signe ; que Mme B... fait valoir que le pseudonyme de Y... a toujours été le sien, et que lors de la signature de son contrat, elle était connue sous ce pseudonyme ce que conteste la société Jasmin qui affirme qu'elle a bénéficié de la notoriété attachée à l'établissement et non à sa personne ; que, si la recommandation dont elle a fait l'objet ne fait pas état de ce pseudonyme, elle indique « Si tu l'embauches, tu y gagneras tout car elle connaît beaucoup de monde, fait de la bonne cuisine, et beaucoup de monde apprécie sa cuisine. Elle est connue », elle affirme néanmoins que l'intéressée est alors déjà connue ; que Mme B... produit pour en attester deux courriers de personnalités qui lui ont été adressés personnellement sous ce pseudonyme, l'un de l'acteur Gérard C... en janvier 1988, l'autre du couturier W...      U...      en novembre 1988 et qui évoque ses talents culinaires ; que la société Jasmin qui est un professionnel de la restauration ne peut prétendre que ce pseudonyme n'était pas attaché à la personne de Mme B... puisqu'elle a pris la précaution d'insérer dans son contrat de travail l'autorisation de l'intéressée pour l'utiliser à titre d'enseigne, ni que Mme B... n'était pas une personne qualifiée alors même qu'elle lui a confié des fonctions de direction et un salaire correspondant outre un intéressement ; que ces conditions de travail ne pouvaient être justifiées que par la notoriété de l'intéressée et sa capacité à attirer de la clientèle ce qui était la raison même de son embauche; que, si la société Jasmin prétend avoir découvert, peu après l'ouverture du restaurant, que la clientèle escomptée n'était pas au rendez-vous et affirme désormais que Mme B... n'avait ni compétence, ni notoriété, et que pour y pallier elle a initié une campagne dans la presse spécialisée, pour autant les articles ont été publiés par divers organes de presse indépendants dont la presse spécialisée; que ceux-ci ont évoqué de façon systématique « Y... » et ont fait référence à son activité passée aux Bains Douches, le Figaroscope faisant état en septembre 2000 de « la cantine chic de Y..., cuisinière thai qui se lance en solo... », le Point en août mentionnant « ex chef des Bains, (elle) ouvre table à son nom », le magazine Saveurs du mois d'octobre 2000 rappelle que Y... - dont le portrait est représenté - est « devenu le Chef favori des stars »; qu'il n'était fait mention que de manière accessoire au cadre lui-même quand bien même il avait fait l'objet d'aménagements onéreux préalables à la réouverture du restaurant ; qu'il résulte de ces éléments que la société Jasmin a bien recruté Mme B... sous le pseudonyme de Y... et que la communication s'est ensuite faite autour de la personne de Mme B... répondant à ce pseudonyme ; que la société Jasmin n'en dénie pas l'efficacité car, si elle affirme qu'elle n'a porté ses fruits que pendant environ 18 mois; il n'empêche qu'elle a ouvert un second restaurant à proximité dénommé le petit Y..., les deux établissements faisant l'objet d'apports à la société Jasmin le 30 septembre 2002 puis un troisième [...]        , utilisant encore ce pseudonyme, Les Comptoirs de Y... ; que si elle conteste toute mauvaise foi dans le dépôt de la marque Y..., indiquant avoir voulu sécuriser les investissements supportés, notamment en cas de déplacement de son établissement ou de l'ouverture de nouveaux fonds, pour autant elle n'ignorait pas qu'à la date du dépôt en octobre 2003, soit trois ans après l'ouverture du premier restaurant et alors qu'elle en avait ouvert deux autres, Mme B... avait acquis une importante expérience professionnelle et une notoriété certaine, ne serait-ce que par la publicité dont elle a personnellement bénéficié au titre de son activité de chef cuisinier et qui ne la citait que sous son pseudonyme de Y... ; que, si les différents établissements ont utilisé les enseignes « Y... », « Petit Y... », « marine de Y... » et « Comptoir de Y... » et si le terme Y... figurait sur son contrat de travail, sur son avenant de 2002, sur ses bulletins de salaire qui lui ont été adressés par la sas Jasmin (Petit Y...) et par la sas Jasmin (Y...) et sur le papier à en-tête, ces éléments se rapportent nécessairement à une dénomination sociale et non à une marque ; que ces pièces sont pour un certain nombre postérieures au dépôt de la marque; qu'en toute hypothèse elles ne démontrent pas que Mme B... a eu connaissance du dépôt à titre de marque de son pseudonyme par la société Jasmin puisque celle-ci ne justifie ni l'en avoir informée ni avoir recueilli son accord et qu'elle était fondée à considérer que l'usage qui était fait de son pseudonyme s'inscrivait dans le cadre exclusif du seul droit qu'elle avait concédé et qui portait sur l'enseigne commerciale ; que, de plus, il résulte des documents commerciaux produits notamment des factures que c'est après le dépôt de la marque et alors que les trois restaurants avaient été ouverts que des commandes de vaisselle portant la marque déposée Y... ont été passées, ce qui démontre une volonté de développer un service de restauration identifié par cette marque et une spécificité commune qui était de proposer une cuisine thaï; que ces circonstances dénotent une véritable stratégie du déposant, lors même du dépôt, afin de préserver son intérêt exclusif au mépris de celui de son partenaire qui, au contraire avait intérêt à préserver l'intégralité de ses droits sur son pseudonyme sauf à renégocier son contrat de travail pour bénéficier de ce dépôt ; que, si la société Jasmin conteste toute intention de priver Mme B... de la possibilité d'exercer son activité et affirme que le dépôt de la marque Y... ne l'empêche pas de le faire, elle ne peut contester que le succès d'un chef de cuisine repose sur son talent mais aussi sur sa capacité à médiatiser le nom sous lequel il exerce ; qu'en procédant au dépôt du pseudonyme de sa salariée connue dans le milieu culinaire sous ce seul pseudonyme, alors qu'elle n'avait pas au préalable recueilli son accord ni lors de la signature de son contrat de travail, ni postérieurement, elle a agi dans son intérêt personnel au mépris des droits de celle-ci ce qui caractérise la mauvaise foi ; qu'en conséquence elle ne saurait opposer à Mme B... l'acquisition du délai de prescription ; que, si la société Jasmin invoque les dispositions de l'article L.714-3 du Code de la propriété intellectuelle pour solliciter la forclusion de l'action intentée par Mme B... et soutient que cette dernière avait nécessairement connaissance du dépôt de la marque litigieuse puisque celle-ci figurait depuis plus de dix ans sur la devanture, les documents commerciaux, les cartes menus, le site internet plus généralement sur tous les documents marketings et administratifs des établissements » dont la demanderesse a été la directrice opérationnelle, la forclusion par tolérance suppose la preuve d'une « connaissance de l'usage de la marque contestée par le titulaire » d'un droit antérieur et que cette « preuve incombe à celui qui se prévaut du délai de forclusion » ; que la Cour a retenu que la société Jasmin ne rapporte pas la preuve que Mme B... aurait eu connaissance de ce dépôt avant la rupture de son contrat de travail ainsi que l'atteste notamment la mise en demeure qu'elle a adressée à la société Jasmin le 17 janvier 2013, ni qu'elle a toléré cette exploitation puisqu'elle ignorait le dépôt de sorte qu'il ne saurait lui être opposé une forclusion » ;

ET AUX MOTIFS QUE « la société Jasmin soutient que le véritable surnom de Mme B... est R... et non Y... et qu'en tout état de cause elle ne justifie pas d'une notoriété publique et manifeste avant son usage commercial ; que l'article L.711-4 du code de la propriété intellectuelle dispose que :
« Ne peut être adopté comme marque un signe portant atteinte à des droits antérieurs, et notamment (...)
g) Au droit de la personnalité » ;
que la société Jasmin conteste le pseudonyme s'appuyant sur la traduction d'un interview de Mme B... par une journaliste thaïlandaise ; que celui-ci précise seulement qu'il existe deux prononciations de Y... et de R... ; qu'il n'en demeure pas moins que dans aucune des pièces produites, ni même dans cet article de plusieurs pages, il n'est fait mention du terme R... pour désigner Mme B..., seul le pseudonyme de Y... étant utilisé ; que Mme B... justifie être connue depuis sa naissance sous le pseudonyme Y... et qu'elle est devenue notoirement connue sous celui-ci dans le milieu de la gastronomie dès avant 2003, peu importe que le terme Y... soit susceptible de correspondre à d'autres signifiants ; qu'elle produit des attestations justifiant de cet usage constant selon la coutume thaïlandaise, ainsi Monsieur V...   T...    , Ministre aux affaires commerciales près l'Ambassade Royale de Thaïlande à Paris, attestant « connaître X... S... sous son petit nom de « Y... » depuis plus de 30 ans », Monsieur P confirmant « connaître Y... (X... S... ) depuis 1988 (...)» et rappelle que comme le veut « la coutume thaïlandaise, nous nous appelons par notre surnom que nos parents nous ont donné à notre naissance » ; qu'elle justifie avoir été connue en France sous ce même pseudonyme, dans le cadre de son activité professionnelle ce qui résulte des articles de presse versés aux débats, dont notamment ceux antérieurs au 21 octobre 2003, date du dépôt litigieux ; qu'elle produit des attestations de nombreux clients l'ayant connue lorsqu'elle officiait aux « Bains Douches », Monsieur Henry-Jean D..., client régulier du restaurant des Bains Douches puis du restaurant « Y... », attestant ne jamais l'avoir connue sous « d'autres appellations que celle de Y... » et que « tout le monde l'appelle ainsi ; ses clients, ses relations, ses employés et ses amis », Monsieur Bernard E..., directeur des relations extérieures de la société Christian Dior Couture ayant « ses habitudes » au restaurant « Y... », attestant également « connaître Y... depuis plus de vingt ans, lorsqu'elle était chef au restaurant des « Bains Douches » et que celle-ci proposait « des plats nouveaux de très haute qualité » à des clients « très heureux de découvrir sa cuisine » lesquels « revenaient non seulement pour faire un excellent dîner mais aussi pour le plaisir de bavarder avec elle », Monsieur Gérald F..., chef d'entreprise et client des restaurants précités attestant « Depuis vingt ans, je n 'ai connu Madame X... S... que sous le nom de Y... comme l'ensemble de nos amis et clients du restaurant ou de la boîte de nuit. Tout le monde allait d'ailleurs chez Y... et non au Y..., ce qui symbolise bien le lien très fort entre ce restaurant et sa personne et le nom par lequel tout le monde la désigne depuis si longtemps » ; qu'elle justifie également avoir acquis sous ce pseudonyme une notoriété en matière culinaire, le magazine spécialisé Saveurs, publiant au mois de septembre 2000 un article intitulé « Dîner thaï chez Michel G... » et consacré à Y... « Devenu le chef favori des stars – Catherine H... ne jure que par son bar grillé à la menthe et Mathilda I... ne se lasse pas de sa salade verte à la thaï -, elle crée pour l'hôtel Costes un de ses plats phares de la carte : un filet de boeuf mariné et grillé, « le tigre qui pleure » », le magazine GaultMillau d'octobre et novembre 2000 écrivant: « (...) Nous vous invitons cette fois à répondre présent à l'appel de Y... pour les dix raisons suivantes : Le fameux « tigre qui pleure », l'un des derniers plats mis sur orbite mode (vu au Georges, aux Bains....), est d'abord un plat « Y... ». Rendons à Y... ce qui est à Y... » ; qu'elle justifie que dès avant 2003 sa notoriété s'est étendue à l'étranger, le magazine néerlandais « Parijs » du mois d'avril 2001 indiquant que « son talent et sa passion pour la cuisine thaïlandaise » ont immédiatement incité « de nombreux clients fidèles des Bains » à « changer leur table contre celle de chez Y... », le magazine japonais « ARIGATTO - PARIS Branché » de l'année 2001 qualifiant Mme B... de « talentueuse » et dont le succès du restaurant à l'enseigne Y... est dû à sa « cuisine exceptionnelle » ; que le Figaroscope de juin 2004 la compare au Chef étoilé Alain J..., écrivant « Comme Guy K..., Michel L... encore Alain J..., Y... jongle aujourd'hui avec trois adresses sur les deux rives de la Seine » ;que le Magazine « Etoile Michelin » rappelle qu'avant sa venue, le restaurant situé [...]      était « un établissement plus modeste, qui avait dû fermer ses portes » et dont la réussite économique s'est exclusivement bâtie sur la clientèle acquise par Y... lors de son précédent passage aux « Bains Douches » ; que l'émission télévisée « Envoyé Spécial », diffusée sur la chaîne France 2 en juin 2007, lui a consacré un reportage intitulé « Le Monde est dans l'assiette », au terme duquel elle a été présentée comme « un chef et une femme d'affaire autodidacte » dont « le nom s'affiche sur les façades de trois restaurants situés dans les quartiers les plus chics de la capitale » et dont la cuisine séduit « une clientèle Jet-set » citant Nathalie M..., Gérard N..., ou encore Nicolas O... ; qu'il résulte de ces éléments que le nom « Y... » désigne bien en personne la concluante et non un établissement, une ambiance ou un service de restauration et que sa notoriété depuis son passage aux Bains Douches était en plein essor et n'a fait que se confirmer après l'ouverture du restaurant Y... au cours de l'année 2000 ; qu'en déposant la marque française semi-figurative n° 3253205 « Y... » en 2003, la société Jasmin ne pouvait ignorer qu'un tel dépôt était de nature à empêcher la concluante d'exercer désormais toute exploitation indépendante de son nom dans des services de restauration; qu'elle a donc nécessairement porté atteinte au pseudonyme de l'appelante sous lequel celle-ci est notoirement connue dans le milieu culinaire; qu'en conséquence et au regard des constatations qui précédent, la concluante est fondée à solliciter le transfert de la marque semi-figurative n°3253205 « Y... » déposée pour des services de classe 43 en fraude de ses droits par la société Jasmin » ;

1°) ALORS QUE la mauvaise foi doit être appréciée globalement en tenant compte de tous les facteurs pertinents du cas d'espèce et en se plaçant à la date du dépôt de la marque ; que la circonstance que le déposant ait eu connaissance de l'usage antérieur du signe litigieux par un tiers ne suffit pas, à elle seule, pour que soit établie sa mauvaise foi ; qu'il convient également de prendre en considération son intention au moment du dépôt ; que cette intention est un élément subjectif qui doit être déterminé par référence aux circonstances objectives du cas d'espèce ; qu'en l'espèce, pour écarter le moyen de la société Jasmin faisant valoir qu'elle avait déposé la marque « Y... » dans la seule intention de sécuriser, à l'égard des tiers, les investissements qu'elle avait supportés pour lancer et exploiter les restaurants « Y... » et « Petit Y... », la cour d'appel a, en particulier, relevé que l'usage des enseignes « Y... » et « Petit Y... » pour désigner ces restaurants « se rapport[ait] nécessairement à une dénomination sociale et non à une marque », que certaines des pièces produites étaient postérieures au dépôt de la marque et que ce ne serait qu'après le dépôt de la marque que des commandes de vaisselle portant la marque déposée Y... auraient été passées, « ce qui démontre une volonté de développer un service de restauration identifié par cette marque et une spécificité commune qui était de proposer une cuisine thaï » ; qu'en statuant ainsi, cependant qu'elle constatait elle-même que les restaurants « Y... » et « Le Petit Y... » avaient été ouverts avant le dépôt de la marque « Y... » n° 3 253 203 en date du 21 octobre 2003, ce dont il résultait qu'avant même de procéder à ce dépôt, la société Jasmin avait déjà fait usage de ces signes à titre de marque pour désigner des services de restauration, la cour d'appel, qui n'a pas justifié en quoi, en l'état d'une telle exploitation antérieure pour des services de restauration, réalisée avec l'accord de Mme B..., le dépôt, en 2003, de la marque « Y... » pour désigner ces mêmes services dans la classe 43 n'aurait pas été effectué par la société Jasmin dans l'intention légitime de sécuriser l'exploitation commerciale des restaurants à laquelle Mme B... était intéressée, et non dans l'intention d'empêcher cette dernière d'utiliser ce signe, a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 712-6 du code de la propriété intellectuelle ;

2°) ALORS, SUBSIDIAIREMENT, QU'en affirmant, sans autre explication, que si les différents établissements ont utilisé les enseignes « Y... », « Marine de Y... » et « Petit Y... », « ces éléments se rapportent nécessairement à une dénomination sociale et non à une marque », sans donner aucun motif de nature à justifier en quoi de tels usages ne pouvaient être regardés comme constituant des usages faits à titre de marque pour désigner des services de restauration, la cour d'appel a entaché sa décision d'une insuffisance de motivation, en violation de l'article 455 du code de procédure civile ;

3°) ALORS, EN TOUTE HYPOTHESE, QU'en relevant, d'une part, que si les différents établissements ont notamment utilisé les enseignes « Y... », « Marine de Y... » et « Petit Y... », « ces éléments se rapportent nécessairement à une dénomination sociale et non à une marque » (arrêt, p. 6, dernier §.), et d'autre part, qu'en bénéficiant d'un salaire et d'un intéressement sur le chiffre d'affaires réalisé par les restaurants exerçant à l'enseigne Y..., au [...]          , et « La Marine de Y... » devenu « Le Petit Y... », [...]   , Mme B... avait « bénéficié ainsi de l'exploitation de la marque puisque celle-ci a eu pour objet des services de restauration » (arrêt, p. 9, dernier §.), la cour d'appel, qui a ainsi tout à la fois retenu que l'exploitation des restaurants aux enseignes « Y... », « Marine de Y... » et « Petit Y... » constituait un usage du signe « Y... » effectué à titre de marque pour des services de restauration et qu'elle ne constituait pas un tel usage, s'est contredite, en violation de l'article 455 du code de procédure civile ;

4°) ALORS, EN TOUTE HYPOTHESE, QUE les juges du fond ne peuvent accueillir ou rejeter les demandes dont ils sont saisis sans examiner les éléments de preuve qui leur sont soumis par les parties à l'appui de leurs prétentions ; qu'en l'espèce, la société Jasmin se prévalait notamment de factures pour de la vaisselle revêtue de la marque « Y... » en date du 28 février 2002 (pièce n° 7) et des 12 et 21 mars 2003 (pièce n° 8) ainsi que d'une facture pour des casquettes revêtues de cette même marque, destinées au personnel de son restaurant, en date du 7 octobre 2002 (pièce n° 4) ; qu'en affirmant que ce ne serait qu'après le dépôt de la marque « Y... » n° 3 253 203, en date du 21 octobre 2003, que la société Jasmin aurait passé des commandes de vaisselle et en retenant ainsi implicitement qu'il n'était pas établi que la marque « Y... » aurait été apposée sur de quelconques supports avant cette date, sans procéder à une analyse même sommaire des pièces précitées, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré bien fondée l'action en revendication de la marque française semi-figurative n° 3 253 205 « Y... » intentée par Mme X... S... B..., d'avoir dit que la société Jasmin a déposé cette marque pour des services de classe 43, le 21 octobre 2003, en fraude des droits de Mme X... S... B..., d'avoir, en conséquence, condamné, sous astreinte, la société Jasmin à effectuer toutes les diligences nécessaires auprès de l'INPI aux fins de réaliser le transfert de la propriété de cette marque au profit de Mme X... S... B..., ordonné des mesures d'interdiction sous astreinte et de publication et condamné les sociétés Jasmin et Café Indigo à payer des dommages-intérêts à Mme X... S... B... ;

AUX MOTIFS QUE « la société Jasmin soutient que le véritable surnom de Mme B... est R... et non Y... et qu'en tout état de cause elle ne justifie pas d'une notoriété publique et manifeste avant son usage commercial ; que l'article L.711-4 du code de la propriété intellectuelle dispose que :
« Ne peut être adopté comme marque un signe portant atteinte à des droits antérieurs, et notamment (...)
g) Au droit de la personnalité » ;
que la société Jasmin conteste le pseudonyme s'appuyant sur la traduction d'un interview de Mme B... par une journaliste thaïlandaise ; que celui-ci précise seulement qu'il existe deux prononciations de Y... et de R... ; qu'il n'en demeure pas moins que dans aucune des pièces produites, ni même dans cet article de plusieurs pages, il n'est fait mention du terme R... pour désigner Mme B..., seul le pseudonyme de Y... étant utilisé ; que Mme B... justifie être connue depuis sa naissance sous le pseudonyme Y... et qu'elle est devenue notoirement connue sous celui-ci dans le milieu de la gastronomie dès avant 2003, peu importe que le terme Y... soit susceptible de correspondre à d'autres signifiants ; qu'elle produit des attestations justifiant de cet usage constant selon la coutume thaïlandaise, ainsi Monsieur V...        T... , Ministre aux affaires commerciales près l'Ambassade Royale de Thaïlande à Paris, attestant « connaître X... S... sous son petit nom de « Y... » depuis plus de 30 ans », Monsieur P confirmant « connaître Y... (X... S... ) depuis 1988 (...)» et rappelle que comme le veut « la coutume thaïlandaise, nous nous appelons par notre surnom que nos parents nous ont donné à notre naissance » ; qu'elle justifie avoir été connue en France sous ce même pseudonyme, dans le cadre de son activité professionnelle ce qui résulte des articles de presse versés aux débats, dont notamment ceux antérieurs au 21 octobre 2003, date du dépôt litigieux ; qu'elle produit des attestations de nombreux clients l'ayant connue lorsqu'elle officiait aux « Bains Douches », Monsieur Henry-Jean D..., client régulier du restaurant des Bains Douches puis du restaurant « Y... », attestant ne jamais l'avoir connue sous « d'autres appellations que celle de Y... » et que « tout le monde l'appelle ainsi ; ses clients, ses relations, ses employés et ses amis », Monsieur Bernard E..., directeur des relations extérieures de la société Christian Dior Couture ayant « ses habitudes » au restaurant « Y... », attestant également « connaître Y... depuis plus de vingt ans, lorsqu'elle était chef au restaurant des « Bains Douches » et que celle-ci proposait « des plats nouveaux de très haute qualité » à des clients « très heureux de découvrir sa cuisine » lesquels « revenaient non seulement pour faire un excellent diner mais aussi pour le plaisir de bavarder avec elle », Monsieur Gérald F..., chef d'entreprise et client des restaurants précités attestant « Depuis vingt ans, je n 'ai connu Madame X... S... que sous le nom de Y... comme l'ensemble de nos amis et clients du restaurant ou de la boîte de nuit. Tout le monde allait d'ailleurs chez Y... et non au Y..., ce qui symbolise bien le lien très fort entre ce restaurant et sa personne et le nom par lequel tout le monde la désigne depuis si longtemps » ; qu'elle justifie également avoir acquis sous ce pseudonyme une notoriété en matière culinaire, le magazine spécialisé Saveurs, publiant au mois de septembre 2000 un article intitulé « Dîner thaï chez Michel G... » et consacré à Y... « Devenu le chef favori des stars – Catherine H... ne jure que par son bar grillé à la menthe et Mathilda I... ne se lasse pas de sa salade verte à la thaï -, elle crée pour l'hôtel Costes un de ses plats phares de la carte : un filet de boeuf mariné et grillé, « le tigre qui pleure » », le magazine GaultMillau d'octobre et novembre 2000 écrivant: « (...) Nous vous invitons cette fois à répondre présent à l'appel de Y... pour les dix raisons suivantes : Le fameux « tigre qui pleure », l'un des derniers plats mis sur orbite mode (vu au Georges, aux Bains....), est d'abord un plat « Y... ». Rendons à Y... ce qui est à Y... » ; qu'elle justifie que dès avant 2003 sa notoriété s'est étendue à l'étranger, le magazine néerlandais « Parijs » du mois d'avril 2001 indiquant que « son talent et sa passion pour la cuisine thaïlandaise » ont immédiatement incité « de nombreux clients fidèles des Bains » à « changer leur table contre celle de chez Y... », le magazine japonais « ARIGATTO - PARIS Branché » de l'année 2001 qualifiant Mme B... de « talentueuse » et dont le succès du restaurant à l'enseigne Y... est dû à sa « cuisine exceptionnelle » ; que le Figaroscope de juin 2004 la compare au Chef étoilé Alain J..., écrivant « Comme Guy K..., Michel L... encore Alain J..., Y... jongle aujourd'hui avec trois adresses sur les deux rives de la Seine » ;que le Magazine « Etoile Michelin » rappelle qu'avant sa venue, le restaurant situé [...] était « un établissement plus modeste, qui avait dû fermer ses portes » et dont la réussite économique s'est exclusivement bâtie sur la clientèle acquise par Y... lors de son précédent passage aux « Bains Douches » ; que l'émission télévisée « Envoyé Spécial », diffusée sur la chaîne France 2 en juin 2007, lui a consacré un reportage intitulé « Le Monde est dans l'assiette », au terme duquel elle a été présentée comme « un chef et une femme d'affaire autodidacte » dont « le nom s'affiche sur les façades de trois restaurants situés dans les quartiers les plus chics de la capitale » et dont la cuisine séduit « une clientèle Jet-set » citant Nathalie M..., Gérard N..., ou encore Nicolas O... ; qu'il résulte de ces éléments que le nom « Y... » désigne bien en personne la concluante et non un établissement, une ambiance ou un service de restauration et que sa notoriété depuis son passage aux Bains Douches était en plein essor et n'a fait que se confirmer après l'ouverture du restaurant Y... au cours de l'année 2000 ; qu'en déposant la marque française semi-figurative n° 3253205 « Y... » en 2003, la société Jasmin ne pouvait ignorer qu'un tel dépôt était de nature à empêcher la concluante d'exercer désormais toute exploitation indépendante de son nom dans des services de restauration; qu'elle a donc nécessairement porté atteinte au pseudonyme de l'appelante sous lequel celle-ci est notoirement connue dans le milieu culinaire; qu'en conséquence et au regard des constatations qui précédent, la concluante est fondée à solliciter le transfert de la marque semi-figurative n°3253205 « Y... » déposée pour des services de classe 43 en fraude de ses droits par la société Jasmin » ;

ET AUX MOTIFS QUE « l'article L.712-6 alinéa 2 du code de la propriété intellectuelle dispose que :
« Si un enregistrement a été demandé soit en fraude des droits d'un tiers, soit en violation d'une obligation légale ou conventionnelle, la personne qui estime avoir un droit sur la marque peut revendiquer sa propriété en justice.
À moins que le déposant ne soit de mauvaise foi, l'action en revendication se prescrit par trois ans à compter de la publication de la demande d'enregistrement » ; que la société Jasmin, poursuivant la confirmation du jugement, oppose à cette action une fin de non-recevoir tirée de la prescription de trois ans dès lors que la marque Y... a été déposée en octobre 2003 et que la première mise en demeure de Mme B... lui a été délivrée le 17 janvier 2013 ; que Mme B... invoque la mauvaise foi de la société Jasmin et fait valoir que les premiers juges ont considéré à tort que son action était prescrite en retenant que, d'une part, la renommée du signe Y... était attachée « non à la personne de Mme B... mais à l'activité développée par la société Jasmin», d'autre part que le signe « Y...» était utilisé non « seulement comme enseigne » mais « également à usage de marque sur les nappes, vaisselle, menus ou tenues du personnel », ce dont elle « aurait eu connaissance dès le début de l'exploitation des restaurants » ; que le critère de mauvaise foi se caractérise par un manque d'intention honnête et une volonté de nuire de la part du déposant qui s'apprécient au jour du dépôt ; que le contrat de travail de Mme B..., rédigé par la société Les Bistrots du Quai qui a stipulé « Madame B... X... donne son accord exprès à la SA LES Bistrots du Quai de déposer et d'exploiter le restaurant sis au [...] , sous l'enseigne « Chez Y... » » n'était pas parfaitement clair en ce qu'il a utilisé le terme de « déposer » ; que, pour autant il n'était aucunement fait clairement mention d'un dépôt de marque portant sur le terme « Y... » ; que cette rédaction confuse ne saurait traduire une intention des parties portant sur un dépôt futur, ni être interprétée en ce sens; que de plus Mme B... d'origine thaïlandaise, arrivée en France en 1981 et qui n'avait travailler précédemment que dans le milieu de la restauration ne pouvait à l'évidence pas considérer cette clause comme valant double autorisation, d'enseigne et de dépôt de marque quand bien même tenues du personnel et vaisselle ont arboré ce signe ; que Mme B... fait valoir que le pseudonyme de Y... a toujours été le sien, et que lors de la signature de son contrat, elle était connue sous ce pseudonyme ce que conteste la société Jasmin qui affirme qu'elle a bénéficié de la notoriété attachée à l'établissement et non à sa personne ; que, si la recommandation dont elle a fait l'objet ne fait pas état de ce pseudonyme, elle indique « Si tu l'embauches, tu y gagneras tout car elle connaît beaucoup de monde, fait de la bonne cuisine, et beaucoup de monde apprécie sa cuisine. Elle est connue », elle affirme néanmoins que l'intéressée est alors déjà connue ; que Mme B... produit pour en attester deux courriers de personnalités qui lui ont été adressés personnellement sous ce pseudonyme, l'un de l'acteur Gérard C... en janvier 1988, l'autre du couturier U...              en novembre 1988 et qui évoque ses talents culinaires ; que la société Jasmin qui est un professionnel de la restauration ne peut prétendre que ce pseudonyme n'était pas attaché à la personne de Mme B... puisqu'elle a pris la précaution d'insérer dans son contrat de travail l'autorisation de l'intéressée pour l'utiliser à titre d'enseigne, ni que Mme B... n'était pas une personne qualifiée alors même qu'elle lui a confié des fonctions de direction et un salaire correspondant outre un intéressement ; que ces conditions de travail ne pouvaient être justifiées que par la notoriété de l'intéressée et sa capacité à attirer de la clientèle ce qui était la raison même de son embauche; que, si la société Jasmin prétend avoir découvert, peu après l'ouverture du restaurant, que la clientèle escomptée n'était pas au rendez-vous et affirme désormais que Mme B... n'avait ni compétence, ni notoriété, et que pour y pallier elle a initié une campagne dans la presse spécialisée, pour autant les articles ont été publiés par divers organes de presse indépendants dont la presse spécialisée; que ceux-ci ont évoqué de façon systématique « Y... » et ont fait référence à son activité passée aux Bains Douches, le Figaroscope faisant état en septembre 2000 de « la cantine chic de Y..., cuisinière thai qui se lance en solo... », le Point en août mentionnant « ex chef des Bains, (elle) ouvre table à son nom », le magazine Saveurs du mois d'octobre 2000 rappelle que Y... - dont le portrait est représenté - est « devenu le Chef favori des stars »; qu'il n'était fait mention que de manière accessoire au cadre lui-même quand bien même il avait fait l'objet d'aménagements onéreux préalables à la réouverture du restaurant ; qu'il résulte de ces éléments que la société Jasmin a bien recruté Mme B... sous le pseudonyme de Y... et que la communication s'est ensuite faite autour de la personne de Mme B... répondant à ce pseudonyme ; que la société Jasmin n'en dénie pas l'efficacité car, si elle affirme qu'elle n'a porté ses fruits que pendant environ 18 mois; il n'empêche qu'elle a ouvert un second restaurant à proximité dénommé le petit Y..., les deux établissements faisant l'objet d'apports à la société Jasmin le 30 septembre 2002 puis un troisième avenue Georges V, utilisant encore ce pseudonyme, Les Comptoirs de Y... ; que si elle conteste toute mauvaise foi dans le dépôt de la marque Y..., indiquant avoir voulu sécuriser les investissements supportés, notamment en cas de déplacement de son établissement ou de l'ouverture de nouveaux fonds, pour autant elle n'ignorait pas qu'à la date du dépôt en octobre 2003, soit trois ans après l'ouverture du premier restaurant et alors qu'elle en avait ouvert deux autres, Mme B... avait acquis une importante expérience professionnelle et une notoriété certaine, ne serait-ce que par la publicité dont elle a personnellement bénéficié au titre de son activité de chef cuisinier et qui ne la citait que sous son pseudonyme de Y... ; que, si les différents établissements ont utilisé les enseignes « Y... », « Petit Y... », « marine de Y... » et « Comptoir de Y... » et si le terme Y... figurait sur son contrat de travail, sur son avenant de 2002, sur ses bulletins de salaire qui lui ont été adressés par la sas Jasmin (Petit Y...) et par la sas Jasmin (Y...) et sur le papier à en-tête, ces éléments se rapportent nécessairement à une dénomination sociale et non à une marque ; que ces pièces sont pour un certain nombre postérieures au dépôt de la marque; qu'en toute hypothèse elles ne démontrent pas que Mme B... a eu connaissance du dépôt à titre de marque de son pseudonyme par la société Jasmin puisque celle-ci ne justifie ni l'en avoir informée ni avoir recueilli son accord et qu'elle était fondée à considérer que l'usage qui était fait de son pseudonyme s'inscrivait dans le cadre exclusif du seul droit qu'elle avait concédé et qui portait sur l'enseigne commerciale ; que, de plus, il résulte des documents commerciaux produits notamment des factures que c'est après le dépôt de la marque et alors que les trois restaurants avaient été ouverts que des commandes de vaisselle portant la marque déposée Y... ont été passées, ce qui démontre une volonté de développer un service de restauration identifié par cette marque et une spécificité commune qui était de proposer une cuisine thaï; que ces circonstances dénotent une véritable stratégie du déposant, lors même du dépôt, afin de préserver son intérêt exclusif au mépris de celui de son partenaire qui, au contraire avait intérêt à préserver l'intégralité de ses droits sur son pseudonyme sauf à renégocier son contrat de travail pour bénéficier de ce dépôt ; que, si la société Jasmin conteste toute intention de priver Mme B... de la possibilité d'exercer son activité et affirme que le dépôt de la marque Y... ne l'empêche pas de le faire, elle ne peut contester que le succès d'un chef de cuisine repose sur son talent mais aussi sur sa capacité à médiatiser le nom sous lequel il exerce ; qu'en procédant au dépôt du pseudonyme de sa salariée connue dans le milieu culinaire sous ce seul pseudonyme, alors qu'elle n'avait pas au préalable recueilli son accord ni lors de la signature de son contrat de travail, ni postérieurement, elle a agi dans son intérêt personnel au mépris des droits de celle-ci ce qui caractérise la mauvaise foi ; qu'en conséquence elle ne saurait opposer à Mme B... l'acquisition du délai de prescription ; que, si la société Jasmin invoque les dispositions de l'article L.714-3 du Code de la propriété intellectuelle pour solliciter la forclusion de l'action intentée par Mme B... et soutient que cette dernière avait nécessairement connaissance du dépôt de la marque litigieuse puisque celle-ci figurait depuis plus de dix ans sur la devanture, les documents commerciaux, les cartes menus, le site internet plus généralement sur tous les documents marketings et administratifs des établissements » dont la demanderesse a été la directrice opérationnelle, la forclusion par tolérance suppose la preuve d'une « connaissance de l'usage de la marque contestée par le titulaire » d'un droit antérieur et que cette « preuve incombe à celui qui se prévaut du délai de forclusion » ; que la Cour a retenu que la société Jasmin ne rapporte pas la preuve que Mme B... aurait eu connaissance de ce dépôt avant la rupture de son contrat de travail ainsi que l'atteste notamment la mise en demeure qu'elle a adressée à la société Jasmin le 17 janvier 2013, ni qu'elle a toléré cette exploitation puisqu'elle ignorait le dépôt de sorte qu'il ne saurait lui être opposé une forclusion » ;

1°) ALORS QUE le bien-fondé d'une action en revendication de marque suppose la démonstration d'une intention frauduleuse du déposant au jour du dépôt de la marque ; qu'en l'espèce, pour écarter le moyen de la société Jasmin faisant valoir qu'elle avait déposé la marque « Y... » dans la seule intention de sécuriser, à l'égard des tiers, les investissements qu'elle avait supportés pour lancer et exploiter les restaurants « Y... » et « Petit Y... », la cour d'appel a, en particulier, relevé que l'usage des enseignes « Y... » et « Petit Y... » pour désigner ces restaurants « se rapport[ait] nécessairement à une dénomination sociale et non à une marque », que certaines des pièces produites étaient postérieures au dépôt de la marque et que ce ne serait qu'après le dépôt de la marque que des commandes de vaisselle portant la marque déposée Y... auraient été passées, « ce qui démontre une volonté de développer un service de restauration identifié par cette marque et une spécificité commune qui était de proposer une cuisine thaï » ; qu'en statuant ainsi, cependant qu'elle constatait elle-même que les restaurants « Y... » et « Le Petit Y... » avaient été ouverts avant le dépôt de la marque « Y... » n° 3 253 203 en date du 21 octobre 2003, ce dont il résultait qu'avant même de procéder à ce dépôt, la société Jasmin avait déjà fait usage de ces signes à titre de marque pour désigner des services de restauration, la cour d'appel, qui n'a pas justifié en quoi, en l'état d'une telle exploitation antérieure pour des services de restauration, réalisée avec l'accord de Mme B..., le dépôt, en 2003, de la marque « Y... » pour désigner ces mêmes services dans la classe 43 n'aurait pas été effectué par la société Jasmin dans l'intention légitime de sécuriser l'exploitation commerciale des restaurants à laquelle Mme B... était intéressée, et non dans l'intention d'empêcher cette dernière d'utiliser ce signe, a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 712-6 du code de la propriété intellectuelle ;

2°) ALORS, SUBSIDIAIREMENT, QU'en affirmant, sans autre explication, que si les différents établissements ont utilisé les enseignes « Y... », « Marine de Y... » et « Petit Y... », « ces éléments se rapportent nécessairement à une dénomination sociale et non à une marque », sans donner aucun motif de nature à justifier en quoi de tels usages ne pouvaient être regardés comme constituant des usages faits à titre de marque pour désigner des services de restauration, la cour d'appel a entaché sa décision d'une insuffisance de motivation, en violation de l'article 455 du code de procédure civile ;

3°) ALORS, EN TOUTE HYPOTHESE, QU'en relevant, d'une part, que si les différents établissements ont notamment utilisé les enseignes « Y... », « Marine de Y... » et « Petit Y... », « ces éléments se rapportent nécessairement à une dénomination sociale et non à une marque » (arrêt, p. 6, dernier §.), et d'autre part, qu'en bénéficiant d'un salaire et d'un intéressement sur le chiffre d'affaires réalisé par les restaurants exerçant à l'enseigne Y..., au [...]          , et « La Marine de Y... » devenu « Le Petit Y... », [...]  , Mme B... avait « bénéficié ainsi de l'exploitation de la marque puisque celle-ci a eu pour objet des services de restauration » (arrêt, p. 9, dernier §.), la cour d'appel, qui a ainsi tout à la fois retenu que l'exploitation des restaurants aux enseignes « Y... », « Marine de Y... » et « Petit Y... » constituait un usage du signe « Y... » effectué à titre de marque pour des services de restauration et qu'elle ne constituait pas un tel usage, s'est contredite, en violation de l'article 455 du code de procédure civile ;

4°) ALORS, EN TOUTE HYPOTHESE, QUE les juges du fond ne peuvent accueillir ou rejeter les demandes dont ils sont saisis sans examiner les éléments de preuve qui leur sont soumis par les parties à l'appui de leurs prétentions ; qu'en l'espèce, la société Jasmin se prévalait notamment de factures pour de la vaisselle revêtue de la marque « Y... » en date du 28 février 2002 (pièce n° 7) et des 12 et 21 mars 2003 (pièce n° 8) ainsi que d'une facture pour des casquettes revêtues de cette même marque, destinées au personnel de son restaurant, en date du 7 octobre 2002 (pièce n° 4) ; qu'en affirmant que ce ne serait qu'après le dépôt de la marque « Y... » n° 3 253 203, en date du 21 octobre 2003, que la société Jasmin aurait passé des commandes de vaisselle et en retenant ainsi implicitement qu'il n'était pas établi que la marque « Y... » aurait été apposée sur de quelconques supports avant cette date, sans procéder à une analyse même sommaire des pièces précitées, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir fait interdiction aux sociétés Jasmin et Café Indigo d'utiliser la dénomination « Y... » dans le cadre de leurs activités de restauration et de gastronomie et ce, sous astreinte de 500 euros par jour de retard à compter de la signification de l'arrêt à intervenir ;

AUX MOTIFS QUE « l'article L.712-6 alinéa 2 du code de la propriété intellectuelle dispose que :

« Si un enregistrement a été demandé soit en fraude des droits d'un tiers, soit en violation d'une obligation légale ou conventionnelle, la personne qui estime avoir un droit sur la marque peut revendiquer sa propriété en justice.
À moins que le déposant ne soit de mauvaise foi, l'action en revendication se prescrit par trois ans à compter de la publication de la demande d'enregistrement » ; que la société Jasmin, poursuivant la confirmation du jugement, oppose à cette action une fin de non-recevoir tirée de la prescription de trois ans dès lors que la marque Y... a été déposée en octobre 2003 et que la première mise en demeure de Mme B... lui a été délivrée le 17 janvier 2013 ; que Mme B... invoque la mauvaise foi de la société Jasmin et fait valoir que les premiers juges ont considéré à tort que son action était prescrite en retenant que, d'une part, la renommée du signe Y... était attachée « non à la personne de Mme B... mais à l'activité développée par la société Jasmin», d'autre part que le signe « Y...» était utilisé non « seulement comme enseigne » mais « également à usage de marque sur les nappes, vaisselle, menus ou tenues du personnel », ce dont elle « aurait eu connaissance dès le début de l'exploitation des restaurants » ; que le critère de mauvaise foi se caractérise par un manque d'intention honnête et une volonté de nuire de la part du déposant qui s'apprécient au jour du dépôt ; que le contrat de travail de Mme B..., rédigé par la société Les Bistrots du Quai qui a stipulé « Madame B... X... donne son accord exprès à la SA LES Bistrots du Quai de déposer et d'exploiter le restaurant sis au [...] , sous l'enseigne « Chez Y... » » n'était pas parfaitement clair en ce qu'il a utilisé le terme de « déposer » ; que, pour autant il n'était aucunement fait clairement mention d'un dépôt de marque portant sur le terme « Y... » ; que cette rédaction confuse ne saurait traduire une intention des parties portant sur un dépôt futur, ni être interprétée en ce sens; que de plus Mme B... d'origine thaïlandaise, arrivée en France en 1981 et qui n'avait travailler précédemment que dans le milieu de la restauration ne pouvait à l'évidence pas considérer cette clause comme valant double autorisation, d'enseigne et de dépôt de marque quand bien même tenues du personnel et vaisselle ont arboré ce signe ; que Mme B... fait valoir que le pseudonyme de Y... a toujours été le sien, et que lors de la signature de son contrat, elle était connue sous ce pseudonyme ce que conteste la société Jasmin qui affirme qu'elle a bénéficié de la notoriété attachée à l'établissement et non à sa personne ; que, si la recommandation dont elle a fait l'objet ne fait pas état de ce pseudonyme, elle indique « Si tu l'embauches, tu y gagneras tout car elle connaît beaucoup de monde, fait de la bonne cuisine, et beaucoup de monde apprécie sa cuisine. Elle est connue », elle affirme néanmoins que l'intéressée est alors déjà connue ; que Mme B... produit pour en attester deux courriers de personnalités qui lui ont été adressés personnellement sous ce pseudonyme, l'un de l'acteur Gérard C... en janvier 1988, l'autre du couturier W...     U...     en novembre 1988 et qui évoque ses talents culinaires ; que la société Jasmin qui est un professionnel de la restauration ne peut prétendre que ce pseudonyme n'était pas attaché à la personne de Mme B... puisqu'elle a pris la précaution d'insérer dans son contrat de travail l'autorisation de l'intéressée pour l'utiliser à titre d'enseigne, ni que Mme B... n'était pas une personne qualifiée alors même qu'elle lui a confié des fonctions de direction et un salaire correspondant outre un intéressement ; que ces conditions de travail ne pouvaient être justifiées que par la notoriété de l'intéressée et sa capacité à attirer de la clientèle ce qui était la raison même de son embauche; que, si la société Jasmin prétend avoir découvert, peu après l'ouverture du restaurant, que la clientèle escomptée n'était pas au rendez-vous et affirme désormais que Mme B... n'avait ni compétence, ni notoriété, et que pour y pallier elle a initié une campagne dans la presse spécialisée, pour autant les articles ont été publiés par divers organes de presse indépendants dont la presse spécialisée; que ceux-ci ont évoqué de façon systématique « Y... » et ont fait référence à son activité passée aux Bains Douches, le Figaroscope faisant état en septembre 2000 de « la cantine chic de Y..., cuisinière thai qui se lance en solo... », le Point en août mentionnant « ex chef des Bains, (elle) ouvre table à son nom », le magazine Saveurs du mois d'octobre 2000 rappelle que Y... - dont le portrait est représenté - est « devenu le Chef favori des stars »; qu'il n'était fait mention que de manière accessoire au cadre lui-même quand bien même il avait fait l'objet d'aménagements onéreux préalables à la réouverture du restaurant ; qu'il résulte de ces éléments que la société Jasmin a bien recruté Mme B... sous le pseudonyme de Y... et que la communication s'est ensuite faite autour de la personne de Mme B... répondant à ce pseudonyme ; que la société Jasmin n'en dénie pas l'efficacité car, si elle affirme qu'elle n'a porté ses fruits que pendant environ 18 mois; il n'empêche qu'elle a ouvert un second restaurant à proximité dénommé le petit Y..., les deux établissements faisant l'objet d'apports à la société Jasmin le 30 septembre 2002 puis un troisième avenue Georges V, utilisant encore ce pseudonyme, Les Comptoirs de Y... ; que si elle conteste toute mauvaise foi dans le dépôt de la marque Y..., indiquant avoir voulu sécuriser les investissements supportés, notamment en cas de déplacement de son établissement ou de l'ouverture de nouveaux fonds, pour autant elle n'ignorait pas qu'à la date du dépôt en octobre 2003, soit trois ans après l'ouverture du premier restaurant et alors qu'elle en avait ouvert deux autres, Mme B... avait acquis une importante expérience professionnelle et une notoriété certaine, ne serait-ce que par la publicité dont elle a personnellement bénéficié au titre de son activité de chef cuisinier et qui ne la citait que sous son pseudonyme de Y... ; que, si les différents établissements ont utilisé les enseignes « Y... », « Petit Y... », « marine de Y... » et « Comptoir de Y... » et si le terme Y... figurait sur son contrat de travail, sur son avenant de 2002, sur ses bulletins de salaire qui lui ont été adressés par la sas Jasmin (Petit Y...) et par la sas Jasmin (Y...) et sur le papier à en-tête, ces éléments se rapportent nécessairement à une dénomination sociale et non à une marque ; que ces pièces sont pour un certain nombre postérieures au dépôt de la marque; qu'en toute hypothèse elles ne démontrent pas que Mme B... a eu connaissance du dépôt à titre de marque de son pseudonyme par la société Jasmin puisque celle-ci ne justifie ni l'en avoir informée ni avoir recueilli son accord et qu'elle était fondée à considérer que l'usage qui était fait de son pseudonyme s'inscrivait dans le cadre exclusif du seul droit qu'elle avait concédé et qui portait sur l'enseigne commerciale ; que, de plus, il résulte des documents commerciaux produits notamment des factures que c'est après le dépôt de la marque et alors que les trois restaurants avaient été ouverts que des commandes de vaisselle portant la marque déposée Y... ont été passées, ce qui démontre une volonté de développer un service de restauration identifié par cette marque et une spécificité commune qui était de proposer une cuisine thaï; que ces circonstances dénotent une véritable stratégie du déposant, lors même du dépôt, afin de préserver son intérêt exclusif au mépris de celui de son partenaire qui, au contraire avait intérêt à préserver l'intégralité de ses droits sur son pseudonyme sauf à renégocier son contrat de travail pour bénéficier de ce dépôt ; que, si la société Jasmin conteste toute intention de priver Mme B... de la possibilité d'exercer son activité et affirme que le dépôt de la marque Y... ne l'empêche pas de le faire, elle ne peut contester que le succès d'un chef de cuisine repose sur son talent mais aussi sur sa capacité à médiatiser le nom sous lequel il exerce ; qu'en procédant au dépôt du pseudonyme de sa salariée connue dans le milieu culinaire sous ce seul pseudonyme, alors qu'elle n'avait pas au préalable recueilli son accord ni lors de la signature de son contrat de travail, ni postérieurement, elle a agi dans son intérêt personnel au mépris des droits de celle-ci ce qui caractérise la mauvaise foi ; qu'en conséquence elle ne saurait opposer à Mme B... l'acquisition du délai de prescription ; que la société Jasmin soutient que le véritable surnom de Mme B... est R... et non Y... et qu'en tout état de cause elle ne justifie pas d'une notoriété publique et manifeste avant son usage commercial ; que l'article L.711-4 du code de la propriété intellectuelle dispose que :

« Ne peut être adopté comme marque un signe portant atteinte à des droits antérieurs, et notamment (...)
g) Au droit de la personnalité » ;
que la société Jasmin conteste le pseudonyme s'appuyant sur la traduction d'un interview de Mme B... par une journaliste thaïlandaise ; que celui-ci précise seulement qu'il existe deux prononciations de Y... et de R... ; qu'il n'en demeure pas moins que dans aucune des pièces produites, ni même dans cet article de plusieurs pages, il n'est fait mention du terme R... pour désigner Mme B..., seul le pseudonyme de Y... étant utilisé ; que Mme B... justifie être connue depuis sa naissance sous le pseudonyme Y... et qu'elle est devenue notoirement connue sous celui-ci dans le milieu de la gastronomie dès avant 2003, peu importe que le terme Y... soit susceptible de correspondre à d'autres signifiants ; qu'elle produit des attestations justifiant de cet usage constant selon la coutume thaïlandaise, ainsi Monsieur V...         T... , Ministre aux affaires commerciales près l'Ambassade Royale de Thaïlande à Paris, attestant « connaître X... S... sous son petit nom de « Y... » depuis plus de 30 ans », Monsieur P confirmant « connaître Y... (X... S... ) depuis 1988 (...)» et rappelle que comme le veut « la coutume thaïlandaise, nous nous appelons par notre surnom que nos parents nous ont donné à notre naissance » ; qu'elle justifie avoir été connue en France sous ce même pseudonyme, dans le cadre de son activité professionnelle ce qui résulte des articles de presse versés aux débats, dont notamment ceux antérieurs au 21 octobre 2003, date du dépôt litigieux ; qu'elle produit des attestations de nombreux clients l'ayant connue lorsqu'elle officiait aux « Bains Douches », Monsieur Henry-Jean D..., client régulier du restaurant des Bains Douches puis du restaurant « Y... », attestant ne jamais l'avoir connue sous « d'autres appellations que celle de Y... » et que « tout le monde l'appelle ainsi ; ses clients, ses relations, ses employés et ses amis », Monsieur Bernard E..., directeur des relations extérieures de la société Christian Dior Couture ayant « ses habitudes » au restaurant « Y... », attestant également « connaître Y... depuis plus de vingt ans, lorsqu'elle était chef au restaurant des « Bains Douches » et que celle-ci proposait « des plats nouveaux de très haute qualité » à des clients « très heureux de découvrir sa cuisine » lesquels « revenaient non seulement pour faire un excellent diner mais aussi pour le plaisir de bavarder avec elle », Monsieur Gérald F..., chef d'entreprise et client des restaurants précités attestant « Depuis vingt ans, je n 'ai connu Madame X... S... que sous le nom de Y... comme l'ensemble de nos amis et clients du restaurant ou de la boîte de nuit. Tout le monde allait d'ailleurs chez Y... et non au Y..., ce qui symbolise bien le lien très fort entre ce restaurant et sa personne et le nom par lequel tout le monde la désigne depuis si longtemps » ; qu'elle justifie également avoir acquis sous ce pseudonyme une notoriété en matière culinaire, le magazine spécialisé Saveurs, publiant au mois de septembre 2000 un article intitulé « Dîner thaï chez Michel G... » et consacré à Y... « Devenu le chef favori des stars – Catherine H... ne jure que par son bar grillé à la menthe et Mathilda I... ne se lasse pas de sa salade verte à la thaï -, elle crée pour l'hôtel Costes un de ses plats phares de la carte : un filet de boeuf mariné et grillé, « le tigre qui pleure » », le magazine GaultMillau d'octobre et novembre 2000 écrivant: « (...) Nous vous invitons cette fois à répondre présent à l'appel de Y... pour les dix raisons suivantes : Le fameux « tigre qui pleure », l'un des derniers plats mis sur orbite mode (vu au Georges, aux Bains....), est d'abord un plat « Y... ». Rendons à Y... ce qui est à Y... » ; qu'elle justifie que dès avant 2003 sa notoriété s'est étendue à l'étranger, le magazine néerlandais « Parijs » du mois d'avril 2001 indiquant que « son talent et sa passion pour la cuisine thaïlandaise » ont immédiatement incité « de nombreux clients fidèles des Bains » à « changer leur table contre celle de chez Y... », le magazine japonais « ARIGATTO - PARIS Branché » de l'année 2001 qualifiant Mme B... de « talentueuse » et dont le succès du restaurant à l'enseigne Y... est dû à sa « cuisine exceptionnelle » ; que le Figaroscope de juin 2004 la compare au Chef étoilé Alain J..., écrivant « Comme Guy K..., Michel L... encore Alain J..., Y... jongle aujourd'hui avec trois adresses sur les deux rives de la Seine » ;que le Magazine « Etoile Michelin » rappelle qu'avant sa venue, le restaurant situé [...] était « un établissement plus modeste, qui avait dû fermer ses portes » et dont la réussite économique s'est exclusivement bâtie sur la clientèle acquise par Y... lors de son précédent passage aux « Bains Douches » ; que l'émission télévisée « Envoyé Spécial », diffusée sur la chaîne France 2 en juin 2007, lui a consacré un reportage intitulé « Le Monde est dans l'assiette », au terme duquel elle a été présentée comme « un chef et une femme d'affaire autodidacte » dont « le nom s'affiche sur les façades de trois restaurants situés dans les quartiers les plus chics de la capitale » et dont la cuisine séduit « une clientèle Jet-set » citant Nathalie M..., Gérard N..., ou encore Nicolas O... ; qu'il résulte de ces éléments que le nom « Y... » désigne bien en personne la concluante et non un établissement, une ambiance ou un service de restauration et que sa notoriété depuis son passage aux Bains Douches était en plein essor et n'a fait que se confirmer après l'ouverture du restaurant Y... au cours de l'année 2000 ; qu'en déposant la marque française semi-figurative n° 3253205 « Y... » en 2003, la société Jasmin ne pouvait ignorer qu'un tel dépôt était de nature à empêcher la concluante d'exercer désormais toute exploitation indépendante de son nom dans des services de restauration; qu'elle a donc nécessairement porté atteinte au pseudonyme de l'appelante sous lequel celle-ci est notoirement connue dans le milieu culinaire; qu'en conséquence et au regard des constatations qui précédent, la concluante est fondée à solliciter le transfert de la marque semi-figurative n°3253205 « Y... » déposée pour des services de classe 43 en fraude de ses droits par la société Jasmin ; que le contrat de travail de Mme B..., rédigé par la société Les Bistrots du Quai qui a stipulé « Madame B... X... donne son accord exprès à la SA LES Bistrots du Quai de déposer et d'exploiter le restaurant sis au [...] , sous l'enseigne « Chez Y... » » n'était pas parfaitement clair en ce qu'il a utilisé le terme de « déposer » ; que, pour autant il n'était aucunement fait clairement mention d'un dépôt de marque portant sur le terme « Y... » ; que cette rédaction confuse ne saurait traduire une intention des parties portant sur un dépôt futur, ni être interprétée en ce sens; que de plus Mme B... d'origine thaïlandaise, arrivée en France en 1981 et qui n'avait travailler précédemment que dans le milieu de la restauration ne pouvait à l'évidence pas considérer cette clause comme valant double autorisation, d'enseigne et de dépôt de marque quand bien même tenues du personnel et vaisselle ont arboré ce signe (
) ; que la société Jasmin (
) a pris la précaution d'insérer dans son contrat de travail l'autorisation de l'intéressée pour l'utiliser à titre d'enseigne (
) ; Sur le préjudice : Mme B... soutient que les deux sociétés intimées, d'une part, la société Jasmin, d'autre part, la société Café Indigo ont profité de sa notoriété en exploitant la dénomination « Y... » tant à titre de marque qu'à titre d'enseigne et qu'elles continuent de tirer profit de son talent culinaire en exploitant pour les besoins de leurs restaurants les cartes des menus et les recettes élaborées par elle ; qu'elle relate que chacune de ses expositions médiatiques sous son pseudonyme de Y... profite nécessairement aux sociétés Jasmin et Café Indigo et, ainsi qu'ayant été l'invitée de l'émission quotidienne « C à vous », diffusée sur la chaîne France 5 le 20 mars 2013, à l'occasion de laquelle elle a démontré ses compétences culinaires auprès de personnalités comme la comédienne Danielle P... ou encore l'animatrice Alessandra Q..., le chiffre d'affaires de la société Jasmin qui exploite les deux restaurants à son enseigne a augmenté ; qu'il ressort à la lecture du chiffre d'affaire total généré par la société Jasmin au cours de l'année 2013, que ce dernier a augmenté de 1.000,94 € HT entre le mois de mars cl le mois d'avril 2013 passant ainsi de 100.703,72 € HT à 101.704,66 € HT ; que, si cette augmentation ne peut être contestée, la société Jasmin explique qu'elle est liée à une variation saisonnière due aux vacances scolaires et qu'elle est récurrente ; que pour autant les passages médiatiques de Mme B... constituent à l'évidence une publicité pour les restaurants utilisant et son enseigne et la marque éponyme ; que les deux sociétés intimées sont des personnes morales autonomes ; que Mme B... a signé un contrat de travail avec la société Les Bistrots du Quai aux droits de laquelle vient la société Jasmin qui a exploité les deux établissements à l'enseigne Y... et le Petit Y...   ; que, sur la base de son contrat de travail, puis de l'avenant en date du 1er avril 2002 Mme B... a bénéficié d'un salaire et d'un intéressement de 1,50% sur le chiffre d'affaires mensuel hors taxe réalisé par les restaurants exerçant à l'enseigne « Y... » sis [...]                                                          , devenu le Petit Y... exploité par la société Jasmin et ce jusqu'à son licenciement, bénéficiant ainsi de l'exploitation de la marque puisque celle-ci a eu pour objet des services de restauration ; qu'il ne saurait dès lors être reproché des actes de concurrence déloyale ou de parasitisme à la société Jasmin de ce chef ; qu'en revanche un troisième restaurant a été ouvert et exploité [...]         sous l'enseigne Les Comptoirs de Y... par la société Café Indigo ; que celle-ci a utilisé la marque Y..., les cartes de menus, la vaisselle et les tenues du personnel étant porteurs de ce signe dès son ouverture, quand bien même elle n'était pas l'auteur du dépôt de marque ; qu'elle a bénéficié de la notoriété de la marque acquise du fait même de l'investissement personnel de Mme B... ; que Mme B... soutient que son préjudice résultant des actes déloyaux et parasitaires précités, doit être apprécié d'une part, à l'aune de la valorisation de la marque déposée en fraude de ses droits, mais également au regard de la marge brute réalisée par les sociétés intimées ; que la société Café Indigo a bénéficié du dépôt de marque frauduleux réalisé par la société Jasmin pour développer ses activités dès l'ouverture de son établissement ; qu'elle a réalisé les chiffres d'affaires suivants :

au titre de l'année 2011, un chiffre d'affaires de 1.350.652 € HT
au titre de l'année 20121.un chiffre d'affaires de 1 041 569 € HT
au titre de l'année 2013.un chiffre d'affaires de 1 260.400 € HT ;

que la marge brute moyenne des activités de restauration est évaluée en moyenne à :

16,8% pour l'année 2011
17,8% pour l'année 2012
14,8% pour l'année 2013 ;

que sur la base de ces chiffres, la marge brute réalisée par la société Café Indigo s'est élevée aux sommes de 226 909,53€, 185 399,28€ et 186 539,20€ pour chacune de ces trois années ; que, pour autant, la marge brute étant calculée avant déduction des charges variables dont les salaires, ces montants ne sont pas significatifs du bénéfice réalisé; que l'usage de la marque Y... ayant eu pour objet de promouvoir l'activité de restauration de cet établissement, Mme B... a perdu le bénéfice qu'elle pouvait escompter de cette exploitation ; qu'à défaut de connaître celui-ci, la Cour appréciera le préjudice de Mme B... à l'aune de l'intéressement dont elle bénéficiait et fixera celui-ci à la somme de 50 000€ au titre de l'activité de la société Café Indigo à l'occasion de l'usage frauduleux de la marque Y... ; qu'après le départ de Mme B..., les trois restaurants ont continué de proposer aux clients des recettes mises au point par cette dernière et dont la presse s'était fait régulièrement l'écho, s'appuyant ainsi sur la notoriété dont elles avaient bénéficié depuis le dépôt de la marque Y... ; que de plus le site internet du restaurant Y... a présenté Mme B..., après son licenciement comme étant toujours comme « la chef » des établissements ouverts sous son enseigne et a diffusé jusqu'en novembre 2013 une vidéo la mettant en situation ; que la société Jasmin a réalisé au titre de l'année 2012, un chiffre d'affaires de 3.097.882 € HT et au titre de l'année 2013 un chiffre d'affaires de 1.811.900 € HT ; que le préjudice financier que Mme B... fonde sur la marge réalisée ne résulte pas de l'usage de la marque Y... au sein des établissements de la société Jasmin mais de la rupture de son contrat de travail puisqu'elle était intéressée au développement du chiffre d'affaires; qu'en revanche, les chiffres d'affaires réalisés par la société Jasmin mettent en évidence une baisse importante enregistrée après le départ de Mme B... que celle-ci attribue à la baisse de la qualité culinaire; que, quelle que soit la cause de cette baisse, il en résulte une dépréciation de la marque Y... et donc un préjudice d'image pour Mme B... ; que, de plus, les deux restaurants Le Petit Y... et les Comptoirs de Y..., ce dernier ayant été exploité par la société Café Indigo, sont aujourd'hui fermés de sorte que la clientèle peut désormais attribuer cette fermeture à Mme Y... ce qui contribue à une dépréciation de la marque imputable à chacune des deux sociétés ; que la Cour fixera le préjudice subi par Mme B... à la somme de 70 000 € à charge de la société Jasmin et de 20 000 € à charge de la société Café Indigo » ;

1°) ALORS QU'un pseudonyme inséré dans une enseigne, avec l'accord exprès ou implicite de la personne physique qui le porte, devient un objet de propriété incorporelle autonome, qui se détache de la personne physique qui le porte pour s'appliquer au fonds de commerce qu'il distingue ; qu'ainsi, la personne physique qui a autorisé l'insertion de son nom patronymique dans une enseigne ne peut, en principe, pas s'opposer à la poursuite de l'exploitation de cette dernière ; qu'en interdisant, de manière générale, aux sociétés Jasmin et Café Indigo toute utilisation de la dénomination « Y... » « dans le cadre de leurs activités de restauration et de gastronomie », tout en constatant que Mme B... avait expressément autorisé la société Bistrots du Quai, aux droits de laquelle vient désormais la société Jasmin, à utiliser le nom « Y... » dans son enseigne, la cour d'appel a violé l'article 1382 du code civil ;

2°) ALORS, SUBSIDIAIREMENT, QU'ayant constaté l'existence d'une telle clause, la cour d'appel ne pouvait interdire aux sociétés Jasmin et Café Indigo toute utilisation de la dénomination « Y... » « dans le cadre de leurs activités de restauration et de gastronomie », que ce soit à titre de marque ou d'enseigne, sans s'expliquer, à tout le moins, sur la valeur et la portée de l'autorisation qui avait été ainsi donnée par Mme B... pour l'utilisation du nom « Y... » en tant qu'enseigne ; qu'en se bornant à relever que la clause litigieuse n'autorisait pas la société Jasmin à procéder à un dépôt de marque, sans donner aucun motif justifiant en quoi elle n'autorisait pas cette société à poursuivre l'utilisation du nom « Y... » à titre d'enseigne après le départ de Mme B..., la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;

3°) ALORS QUE les juges du fond ne peuvent prononcer des mesures d'interdiction générales dénuées de lien avec les agissements incriminés ; qu'en l'occurrence, la cour d'appel a retenu que le dépôt, par la société Jasmin, de la marque « Y... » pour des services de la classe 43 présentait un caractère frauduleux et a retenu que la société Café Indigo avait commis des actes de concurrence déloyale et parasitaire au titre de l'utilisation frauduleuse qu'elle aurait faite de cette marque ; qu'en prononçant une interdiction générale d'utiliser la dénomination « Y... » dans le cadre d'activités de restauration et de gastronomie, sans limiter la portée de la mesure qu'elle prononçait à l'utilisation de cette dénomination à titre de marque, la cour d'appel a violé l'article 1382 du code civil.

QUATRIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir condamné les sociétés Jasmin et Café Indigo à verser respectivement à Mme B... les sommes de 70 000 euros et de 20 000 euros en réparation du préjudice d'image qu'elle a subi ;

AUX MOTIFS QUE « Mme B... soutient que les deux sociétés intimées, d'une part, la société Jasmin, d'autre part, la société Café Indigo ont profité de sa notoriété en exploitant la dénomination « Y... » tant à titre de marque qu'à titre d'enseigne et qu'elles continuent de tirer profit de son talent culinaire en exploitant pour les besoins de leurs restaurants les cartes des menus et les recettes élaborées par elle ; (
) qu'après le départ de Mme B..., les trois restaurants ont continué de proposer aux clients des recettes mises au point par cette dernière et dont la presse s'était fait régulièrement l'écho, s'appuyant ainsi sur la notoriété dont elles avaient bénéficié depuis le dépôt de la marque Y... ; que de plus le site internet du restaurant Y... a présenté Mme B..., après son licenciement comme étant toujours comme « la chef » des établissements ouverts sous son enseigne et a diffusé jusqu'en novembre 2013 une vidéo la mettant en situation ; que la société Jasmin a réalisé au titre de l'année 2012, un chiffre d'affaires de 3.097.882 € HT et au titre de l'année 2013 un chiffre d'affaires de 1.811.900 € HT ; que le préjudice financier que Mme B... fonde sur la marge réalisée ne résulte pas de l'usage de la marque Y... au sein des établissements de la société Jasmin mais de la rupture de son contrat de travail puisqu'elle était intéressée au développement du chiffre d'affaires; qu'en revanche, les chiffres d'affaires réalisés par la société Jasmin mettent en évidence une baisse importante enregistrée après le départ de Mme B... que celle-ci attribue à la baisse de la qualité culinaire; que, quelle que soit la cause de cette baisse, il en résulte une dépréciation de la marque Y... et donc un préjudice d'image pour Mme B... ; que, de plus, les deux restaurants Le Petit Y... et les Comptoirs de Y..., ce dernier ayant été exploité par la société Café Indigo, sont aujourd'hui fermés de sorte que la clientèle peut désormais attribuer cette fermeture à Mme Y... ce qui contribue à une dépréciation de la marque imputable à chacune des deux sociétés ; que la Cour fixera le préjudice subi par Mme B... à la somme de 70 000 € à charge de la société Jasmin et de 20 000 € à charge de la société Café Indigo » ;

1°) ALORS QUE seuls peuvent être réparés les chefs de préjudice présentant un lien direct et certain avec la faute alléguée ; qu'en affirmant que « quelle [qu'en] soit la cause », la baisse importante des chiffres d'affaires réalisés par la société Jasmin après le départ de Mme B... serait à l'origine d'une « dépréciation de la marque Y... et donc d'un préjudice d'image pour Mme B... », sans caractériser en quoi un tel chef de préjudice présenterait un lien de causalité direct et certain avec les agissements fautifs reprochés à la société Jasmin, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du code civil ;

2°) ALORS QU'en condamnant les sociétés Jasmin et Café Indigo à réparer le préjudice que la fermeture des restaurants « Y... » et « Petit Y... » aurait causé à Mme B..., sans justifier en quoi la fermeture de ces restaurants serait, en elle-même, constitutive d'une faute de la part des sociétés exposantes, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du code civil ;

3°) ALORS, EN TOUTE HYPOTHESE, QUE seuls peuvent être réparés les chefs de préjudice présentant un lien direct et certain avec la faute alléguée ;
qu'en l'espèce, selon les propres constatations de l'arrêt, Mme B... reprochait aux sociétés Jasmin et Café Indigo d'avoir « profité de sa notoriété en exploitant la dénomination « Y... » tant à titre de marque qu'à titre d'enseigne » et d'avoir « continu[é] de tirer profit de son talent culinaire en exploitant pour les besoins de leurs restaurants des menus et les recettes élaborées par elle » ; que l'action en responsabilité civile ainsi intentée par Mme B... visait à voir interdire à ces sociétés tout usage de la dénomination « Y... » dans le cadre de leurs activités de restauration et de gastronomie ; qu'en condamnant les sociétés Jasmin et Café Indigo à indemniser le préjudice que la fermeture des restaurants exploités sous les dénominations « Le Petit Y... » et « Les Comptoirs de Y... » aurait causé à Mme B..., quand la cessation de l'usage de ces dénominations était précisément le résultat recherché par l'action intentée par cette dernière, la cour d'appel, qui n'a ainsi aucunement caractérisé en quoi le préjudice qui aurait résulté de la fermeture de ces restaurants présenterait un quelconque lien avec les fautes reprochées aux sociétés exposantes, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du code civil. Moyen produit, au pourvoi incident, par Me Haas, avocat aux Conseils pour Mme S... B...

Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR rejeté la demande de Mme B... tendant à la condamnation de la société Jasmin au titre du préjudice subi par elle du fait des actes de concurrence déloyale et/ou parasitaires dont elle a été victime et D'AVOIR limité à la somme de 50 000 euros la condamnation de la société Café Indigo au titre du préjudice subi par Mme B... du fait des actes de concurrence déloyale et/ou parasitaires dont elle a été victime ;

AUX MOTIFS QUE Mme B... soutient que les deux sociétés intimées, d'une part, la société Jasmin, d'autre part, la société Café Indigo ont profité de sa notoriété en exploitant la dénomination « Y... » tant à titre de marque qu'à titre d'enseigne et qu'elles continuent de tirer profit de son talent culinaire en exploitant pour les besoins de leurs restaurants les cartes des menus et les recettes élaborées par elle ; qu'elle relate que chacune de ses expositions médiatiques sous son pseudonyme de « Y... » profite nécessairement aux sociétés Jasmin et Café Indigo et, ainsi qu'ayant été l'invitée de l'émission quotidienne « C à vous », diffusée sur la chaîne France 5 le 20 mars 2013, à l'occasion de laquelle elle a démontré ses compétences culinaires auprès de personnalités comme la comédienne Danielle P... ou encore l'animatrice Alessandra Q..., le chiffre d'affaires de la société Jasmin qui exploite les deux restaurants à son enseigne a augmenté ; qu'il ressort à la lecture du chiffre d'affaire total généré par la société Jasmin au cours de l'année 2013, que ce dernier a augmenté de 1 000,94 euros HT entre le mois de mars et le mois d'avril 2013 passant ainsi de 100 703,72 euros HT à 101 704,66 euros HT ; que, si cette augmentation ne peut être contestée, la société Jasmin explique qu'elle est liée à une variation saisonnière due aux vacances scolaires et qu'elle est récurrente ; que pour autant les passages médiatiques de Mme B... constituent à l'évidence une publicité pour les restaurants utilisant et son enseigne et la marque éponyme ; que les deux sociétés intimées sont des personnes morales autonomes ; que Mme B... a signé un contrat de travail avec la société Les Bistrots du Quai aux droits de laquelle vient la société Jasmin qui a exploité les deux établissements à l'enseigne « Y... » et « Le Petit Y... » ; que, sur la base de son contrat de travail, puis de l'avenant en date du 1er avril 2002 Mme B... a bénéficié d'un salaire et d'un intéressement de 1,50 % sur le chiffre d'affaires mensuel hors taxe réalisé par les restaurants exerçant à l'enseigne « Y... » sis [...]                                                            , devenu « Le Petit Y... » exploité par la société Jasmin et ce jusqu'à son licenciement, bénéficiant ainsi de l'exploitation de la marque puisque celle-ci a eu pour objet des services de restauration ; qu'il ne saurait dès lors être reproché des actes de concurrence déloyale ou de parasitisme à la société Jasmin de ce chef ; qu'en revanche un troisième restaurant a été ouvert et exploité [...] sous l'enseigne « Les Comptoirs de Y... » par la société Café Indigo ; que celle-ci a utilisé la marque « Y... », les cartes de menus, la vaisselle et les tenues du personnel étant porteurs de ce signe dès son ouverture, quand bien même elle n'était pas l'auteur du dépôt de marque ; qu'elle a bénéficié de la notoriété de la marque acquise du fait même de l'investissement personnel de Mme B... ; que Mme B... soutient que son préjudice résultant des actes déloyaux et parasitaires précités, doit être apprécié d'une part, à l'aune de la valorisation de la marque déposée en fraude de ses droits, mais également au regard de la marge brute réalisée par les sociétés intimées ; que la société Café Indigo a bénéficié du dépôt de marque frauduleux réalisé par la société Jasmin pour développer ses activités dès l'ouverture de son établissement ; qu'elle a réalisé les chiffres d'affaires suivants : au titre de l'année 2011, un chiffre d'affaires de 1 350 652 euros HT, au titre de l'année 20121, un chiffre d'affaires de 1 041 569 euros HT, au titre de l'année 2013, un chiffre d'affaires de 1 260 400 euros HT ; que la marge brute moyenne des activités de restauration est évaluée en moyenne à 16,8 % pour l'année 2011, 17,8 % pour l'année 2012, 14,8 % pour l'année 2013 ; que sur la base de ces chiffres, la marge brute réalisée par la société Café Indigo s'est élevée aux sommes de 226 909,53 euros, 185 399,28 euros et 186 539,20 euros pour chacune de ces trois années ; que, pour autant, la marge brute étant calculée avant déduction des charges variables dont les salaires, ces montants ne sont pas significatifs du bénéfice réalisé ; que l'usage de la marque « Y... » ayant eu pour objet de promouvoir l'activité de restauration de cet établissement, Mme B... a perdu le bénéfice qu'elle pouvait escompter de cette exploitation ; qu'à défaut de connaître celui-ci, le préjudice de Mme B... doit être apprécié à l'aune de l'intéressement dont elle bénéficiait et être fixé à 50 000 euros au titre de l'activité de la société Café Indigo à l'occasion de l'usage frauduleux de la marque « Y... » ; qu'après le départ de Mme B..., les trois restaurants ont continué de proposer aux clients des recettes mises au point par cette dernière et dont la presse s'était fait régulièrement l'écho, s'appuyant ainsi sur la notoriété dont elles avaient bénéficié depuis le dépôt de la marque « Y... » ; que de plus le site internet du restaurant « Y... » a présenté Mme B..., après son licenciement comme étant toujours comme « la chef » des établissements ouverts sous son enseigne et a diffusé jusqu'en novembre 2013 une vidéo la mettant en situation ; que la société Jasmin a réalisé au titre de l'année 2012, un chiffre d'affaires de 3 097 882 euros HT et au titre de l'année 2013, un chiffre d'affaires de 1 811 900 euros HT ; que le préjudice financier que Mme B... fonde sur la marge réalisée ne résulte pas de l'usage de la marque « Y... » au sein des établissements de la société Jasmin mais de la rupture de son contrat de travail puisqu'elle était intéressée au développement du chiffre d'affaires ; qu'en revanche, les chiffres d'affaires réalisés par la société Jasmin mettent en évidence une baisse importante enregistrée après le départ de Mme B... que celle-ci attribue à la baisse de la qualité culinaire ; que, quelle que soit la cause de cette baisse, il en résulte une dépréciation de la marque « Y... » et donc un préjudice d'image pour Mme B... ; que, de plus, les deux restaurants « Le Petit Y... » et « Les Comptoirs de Y... », ce dernier ayant été exploité par la société Café Indigo, sont aujourd'hui fermés de sorte que la clientèle peut désormais attribuer cette fermeture à Mme Y... ce qui contribue à une dépréciation de la marque imputable à chacune des deux sociétés ; que le préjudice subi par Mme B... sera fixé à la somme de 70 000 euros à charge de la société Jasmin et de 20 000 euros à charge de la société Café Indigo ;

ALORS, 1°), QUE constitue un acte de concurrence parasitaire le fait, pour un opérateur économique, de se placer dans le sillage d'une personne en profitant indûment de sa notoriété ; qu'en se fondant sur la circonstance inopérante que Mme B..., dite « Y... », avait perçu un intéressement sur le chiffre d'affaires réalisé par la société Jasmin jusqu'à son licenciement et ainsi bénéficié de l'exploitation de la marque « Y... » pendant l'exécution de son contrat de travail, pour en déduire que cette société n'avait commis aucun acte de concurrence déloyale ou parasitaire, après avoir constaté que cette dernière avait utilisé cette marque dans le but de profiter de la notoriété de Mme B... et avait procédé frauduleusement à son dépôt dans l'intention d'empêcher Mme B... d'utiliser ce signe pour ses activités ultérieures, la cour d'appel a violé l'article 1382 du code civil dans sa rédaction applicable à la cause ;

ALORS, 2°), QUE doivent être réparés les chefs de préjudice présentant un lien direct et certain avec la faute alléguée ; qu'en refusant d'indemniser le préjudice financier subi par Mme B... au titre de l'exploitation frauduleuse, par la société Jasmin, de la marque « Y... » après son licenciement, au prétexte qu'un tel préjudice ne résultait pas de l'usage de la marque « Y... » mais de la rupture de son contrat de travail qui prévoyait un intéressement sur le chiffre d'affaires, quand il résultait de ses constatations que la société Jasmin avait continué à faire un usage de la marque « Y... » et à présenter Mme B... après son licenciement comme étant toujours « la chef » des établissements ouverts sous son enseigne, la cour d'appel a violé l'article 1382 du code civil dans sa rédaction applicable à la cause ;

ALORS, 3°), QUE le préjudice doit être indemnisé intégralement, sans perte, ni profit pour la victime ; qu'en fixant le préjudice financier subi par Mme B... au titre de l'usage frauduleux, par la société Café Indigo, de la marque « Y... » au regard de l'intéressement dont celle-ci bénéficiait aux termes du contrat de travail conclu avec la société Jasmin, au prétexte qu'elle ne pouvait connaître le bénéfice retiré de l'exploitation de cette marque, la cour d'appel, qui devait procéder à l'évaluation de l'entier préjudice, au besoin en recourant à une mesure d'expertise, a violé l'article 1382 du code civil dans sa rédaction applicable à la cause.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 16-16812
Date de la décision : 07/03/2018
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 04 mars 2016


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 07 mar. 2018, pourvoi n°16-16812


Composition du Tribunal
Président : Mme Riffault-Silk (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Haas, SCP Hémery et Thomas-Raquin

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:16.16812
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