LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'après le divorce de M. X... et de Mme Y..., des difficultés sont survenues au cours des opérations de partage de leur communauté ;
Sur le premier moyen :
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de dire qu'il doit récompense à la communauté de la somme de 22 718,42 euros au titre des cotisations versées sur le compte préfon-retraite au 23 août 2005, alors, selon le moyen :
1°/ que le juge ne peut modifier l'objet du litige tel qu'il est déterminé par les prétentions respectives des parties ; qu'en retenant, pour dire que M. X... était redevable d'une récompense à la communauté au titre des cotisations versées sur le compte préfon-retraite pendant le mariage, que « le financement des cotisations par des deniers communs (
) ouvre droit à une récompense », cependant qu'il ressort des écritures des parties que le litige portait uniquement sur l'intégration du contrat préfon-retraite dans l'actif de la communauté, la cour d'appel a modifié l'objet du litige et violé l'article 4 du code de procédure civile ;
2°/ que, le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'il ne peut fonder sa décision sur les moyens qu'il a relevés d'office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations ; qu'en relevant d'office le moyen tiré du droit à récompense résultant du paiement, par des fonds communs, des cotisations au titre du contrat préfon-retraite souscrit par M. X..., sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile ;
3°/ que les cotisations dues par un époux au titre d'un contrat de retraite complémentaire, liquidé uniquement sous la forme d'une rente viagère versée postérieurement à la cessation de l'activité professionnelle du titulaire, constituent des dettes définitives de la communauté n'ouvrant pas droit à récompense ; qu'en jugeant que M. X... était redevable d'une récompense à la communauté au titre des cotisations versées, avec des fonds communs, au préfon-retraite, cependant qu'il ressortait de ses propres constatations que ce contrat de retraite complémentaire ne pouvait être liquidé que sous forme de rente viagère lors de la cessation d'activité de M. X..., ce dont il résultait que les cotisations réglées à ce titre constituaient des dettes définitives de la communauté n'ouvrant pas droit à récompense, la cour d'appel a violé les articles 1409 et 220 du code civil ;
Mais attendu que l'arrêt relève que, le 1er mai 2001, M. X... a souscrit un contrat préfon-retraite ouvrant droit à une rente complémentaire indisponible à la date de la dissolution de la communauté, lequel a été alimenté par des fonds communs pour une somme de 22 718,42 euros ; qu'il retient que ce contrat, qui ne profite qu'à l'affilié, constitue un propre par nature, sans qu'il y ait lieu d'avoir égard à son mode de financement ; qu'il ajoute que les cotisations ayant été payées avec des deniers communs, l'époux doit récompense à la communauté ; que, de ces énonciations et appréciations, sans modifier l'objet du litige, dès lors que la question de la récompense était dans le débat, ni relever d'office un moyen, la cour d'appel a exactement déduit que les droits nés du contrat de retraite complémentaire ne pouvant qu'être attribués, après la dissolution de la communauté, au souscripteur ou au bénéficiaire désigné, il devait en être tenu compte dans les opérations de partage ; que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
Mais sur le second moyen :
Vu les articles 832-1 et 1476 du code civil ;
Attendu que, pour attribuer préférentiellement à Mme Y... un immeuble situé à Hyères dépendant de l'indivision postcommunautaire, l'arrêt retient que M. X..., qui n'a pas présenté en appel de demande concurrente, a exprimé son accord à cette attribution devant le notaire et qu'une telle attribution est préférable à une vente aux enchères à un prix aléatoire ;
Qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher, comme il le lui était demandé, si l'immeuble servait effectivement de résidence à Mme Y..., alors que celle-ci soutenait qu'il était à vocation locative, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il attribue à titre préférentiel à Mme Y... l'immeuble situé à Hyères (83400), l'arrêt rendu le 14 décembre 2016, entre les parties, par la cour d'appel de Poitiers ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Poitiers, autrement composée ;
Condamne Mme Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit février deux mille dix-huit.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Marlange et de La Burgade, avocat aux Conseils, pour M. X....
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR dit qu'il était dû récompense par M. X... à la communauté de la somme de 22.718,42 euros au titre des cotisations versées sur le compte Préfon-Retraite au 23 août 2005 ;
AUX MOTIFS QUE M. X... s'étant affilié le 1er mai 2001 à Préfon-Retraite, il est constant que le contrat ainsi souscrit a été alimenté par des fonds communs à hauteur d'une somme totale de 13.718,42 euros à la date de l'ordonnance de non-conciliation, outre une somme de 9.000 euros débitée du CCP commun le 13 juillet 2005 et non comprise dans le décompte des avoirs bancaires précité ; que la valeur du contrat Préfon-Retraite, évalué à 92.647,52 euros au 31 décembre 2012, étant selon le tribunal compris dans l'actif net de communauté, M. X... conteste cette décision, faisant valoir que la rente n'est pas capitalisable et qu'il ne pourra en bénéficier qu'à compter de sa liquidation sous forme d'une rente viagère mensuelle, et au plus tard en 2029 ; que Préfon-Retraite est un régime de retraite complémentaire facultatif, avec une sortie en rente viagère à compter de la liquidation de la retraite ; que déduction faite des frais de gestion, les cotisations versées par l'affilié sont transformées en points ouvrant droit à des prestations calculées à partir du nombre de points acquis et de la valeur de service du point ; que le contrat souscrit par M. X... ouvrant droit à une rente complémentaire indisponible à la date de la dissolution de la communauté, la valeur de celui-ci constitue un propre par nature, et non un actif commun ; que le financement des cotisations par des deniers communs est indifférent à cette qualification, mais ouvre droit à une récompense égale à la dépense faite en valeur nominale, soit une somme totale de 22.718,42 euros comprenant celle de 9.000 euros ; que le jugement sera infirmé en ce sens ;
ALORS QUE 1°), le juge ne peut modifier l'objet du litige tel qu'il est déterminé par les prétentions respectives des parties ; qu'en retenant, pour dire que M. X... était redevable d'une récompense à la communauté au titre des cotisations versées sur le compte Préfon-Retraite pendant le mariage, que « le financement des cotisations par des deniers communs (
) ouvre droit à une récompense » (arrêt attaqué, p. 8, §6), cependant qu'il ressort des écritures des parties que le litige portait uniquement sur l'intégration du contrat Préfon-Retraite dans l'actif de la communauté, la cour d'appel a modifié l'objet du litige et violé l'article 4 du code de procédure civile ;
ALORS QUE 2°), le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'il ne peut fonder sa décision sur les moyens qu'il a relevés d'office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations ; qu'en relevant d'office le moyen tiré du droit à récompense résultant du paiement, par des fonds communs, des cotisations au titre du contrat Préfon-Retraite souscrit par M. X..., sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile ;
ALORS, SUBSIDIAIREMENT, QUE 3°), les cotisations dues par un époux au titre d'un contrat de retraite complémentaire, liquidé uniquement sous la forme d'une rente viagère versée postérieurement à la cessation de l'activité professionnelle du titulaire, constituent des dettes définitives de la communauté n'ouvrant pas droit à récompense ; qu'en jugeant que M. X... était redevable d'une récompense à la communauté au titre des cotisations versées, avec des fonds communs, au Préfon-Retraite, cependant qu'il ressortait de ses propres constatations que ce contrat de retraite complémentaire ne pouvait être liquidé que sous forme de rente viagère lors de la cessation d'activité de M. X..., ce dont il résultait que les cotisations réglées à ce titre constituaient des dettes définitives de la communauté n'ouvrant pas droit à récompense, la cour d'appel a violé les articles 1409 et 220 du code civil.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR fixé à 140 000 euros la valeur de l'immeuble sis à Hyères (83400),[...] cadastré section [...] pour 2 ha 82 a et 88 ca, et attribué à titre préférentiel l'immeuble ainsi évalué à Mme Y... ;
AUX MOTIFS QUE la valeur de l'appartement commun sis à Hyères ayant été fixée à 168 000 euros dans le projet d'état liquidatif, sur la base de l'expertise faite le 9 avril 2013 par M. B..., cette somme a été retenue par le tribunal et est acceptée, tant par Mme Y..., que par M. X..., dans l'hypothèse d'une vente aux enchères du bien ; que Mme Y... sollicite l'attribution préférentielle de l'appartement sur la base de la valeur de 140 000 euros donnée au bien par M. X..., et ce dernier n'a pas présenté en appel de demande concurrente ; qu'en vertu de l'article 1476 du code civil, l'attribution préférentielle n'est jamais de droit et il appartient au juge d'apprécier cette demande dans l'exercice de son pouvoir souverain ; qu'en l'espèce, l'attribution de l'appartement commun à celui des copartageants qui en fait la demande, sur la base de la valeur retenue par l'autre, étant préférable à une vente aux enchères à un prix aléatoire, le jugement sera infirmé tant sur l'évaluation que sur le sort de ce bien commun qui sera évalué à 140 000 euros et attribué à titre préférentiel sur cette base à Mme Y..., étant observé que cela correspond à l'accord exprimé par M. X... devant Me C... le 9 décembre 2013 ;
ALORS QUE, en cas de dissolution de la communauté par divorce, un époux peut demander l'attribution préférentielle de la propriété du local qui lui sert effectivement d'habitation ; qu'en attribuant à titre préférentiel l'appartement sis à Hyères évalué à 140 000 € à Mme Y..., sans toutefois constater que ce bien lui servait effectivement d'habitation, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 831-2 et 1476 du code civil.