LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en sa première branche, ci-après annexé :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 18 novembre 2016),qu'à la suite du décès de son époux, Mme B... a mis en vente un immeuble commun dépendant de la communauté ; que, le 26 octobre 2010, M. X..., bénéficiaire d'un pacte de préférence que lui avait accordé Emile B..., a déposé une offre d'achat auprès du notaire chargé de la succession, la société civile professionnelle Eluard-Pradin, Gambert, Granier, Bonnin ; que, le 5 novembre 2010, Mme B... a consenti une promesse de vente à M. et Mme Y... ; que cette vente a été réitérée le 10 février 2011 par un acte authentique dressé par la société civile professionnelle Renier et Malterre Auriacombe ; que M. X... a assigné Mme B..., M. et Mme Y... et les SCP notariales en annulation de l'acte de vente et en substitution aux acquéreurs ;
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes ;
Mais attendu qu'ayant retenu exactement que le bénéficiaire d'un pacte de préférence n'était en droit d'exiger l'annulation de la vente consentie à un tiers en méconnaissance de ses droits que s'il établissait la connaissance par ce tiers de l'existence du pacte et souverainement que la preuve de cette connaissance n'était pas rapportée, la cour d'appel a justement déduit de ces seuls motifs que les demandes de M. X... devaient être rejetées ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur les autres griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de M. X... et le condamne à payer la somme de 2 000 euros à Mme B... représentée par sa tutrice Mme C..., la somme de 2 000 euros à M. et Mme Y... et la somme globale de 2 000 euros aux sociétés civiles professionnelles Eluard-Pradin, Gambert, Granier, Bonnin et Renier et Malterre Auriacombe ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit février deux mille dix-huit.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Meier-Bourdeau et Lécuyer, avocat aux Conseils, pour M. X...
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt confirmatif attaqué de débouter M. X... de ses demandes d'annulation de la vente, de substitution dans la vente et de publication de la décision et de condamnation des acquéreurs, de la SCP Eluard-Praquin Gambert Granier Bonin et de la venderesse à lui verser des dommages-intérêts ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE le pacte de préférence est un engagement personnel qui n'oblige que son auteur, d'où il suit que Mme Eliane A... veuve B... qui n'y était pas partie n'avait nulle obligation de s'y soumettre ; qu'en effet, cet engagement souscrit par son époux seul sur un bien dépendant de la communauté ne lui est pas opposable en sa qualité d'épouse commune en biens ; qu'en outre, dans la mesure où le bénéficiaire d'un pacte de préférence n'est en droit d'exiger l'annulation de la vente consentie à un tiers en méconnaissance de ses droits que s'il établit la connaissance qu'avait ce tiers de l'existence du pacte de préférence, cette preuve n'est pas suffisamment rapportée au cas présent par les attestations délivrées par un couple ami de M. Michaël X..., M. D... et Mme E..., ces attestations étant dépourvues de force probante en ce qu'elles évoquent une discussion autour d'un « accord » revendiqué par M. Michael X... sur la vente de la maison voisine en présence de M. Y..., ce qui ne démontre pas que M. et Mme Y... avaient connaissance de l'existence d'un pacte de préférence écrit et signé par Emile B... ; qu'enfin, dès lors que la preuve de l'envoi d'une copie du pacte de préférence qui aurait été annexée à l'offre d'achat du 26 octobre 2010 ne peut résulter d'un récépissé de fax mentionnant l'envoi de deux pages, M. Michael X... n'établit pas qu'il aurait, lors de la communication de son offre d'achat à la SCP notariale Eluard-Praquin Gambert Granier Bonin par lettre du 28 novembre 2010, fait état expressément de son intention de se prévaloir du pacte de préférence, se bornant à évoquer les « négociations intervnues avec Mme veuve B... et de son intention de vendre son bien » d'où il suit qu'il ne peut reprocher à ce notaire d'en avoir délibérément ignoré les termes, d'autant plus qu'en réponse à une question de la SCP notariale Eluard-Praquin Gambert Granier Bonin, il lui a répondu le 28 novembre 2010 : « Je n'ai effectivement pas d'accord écrit concernant la vente du bien de Mme B... », observation étant faite que le pacte litigieux n'avait fait l'objet d'aucune publication des tiers (arrêt attaqué, p.5-6) ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE le pacte de préférence, s'il n'oblige pas le promettant à conclure avec le bénéficiaire de l'acte, place ce dernier dans une situation particulière puisqu'à conditions équivalentes avec d'autres éventuels acquéreurs, il remportera nécessairement le contrat ; que le pacte de préférence a donc pour effet de restreindre, pour le promettant, le droit de disposer de son bien, le choix du co-contractant étant prédéfini au moins au regard du caractère prioritaire que lui confère la préférence ; que le pacte litigieux prévoit, outre l'attribution préférentielle à M. Michaël X... en cas de vente de l'immeuble, que le montant sera déterminé selon la moyenne de trois devis établis par des professionnels de l'immobilier ; que marié avec Madame B... sous le régime de la communauté légale, M. Emile B... ne pouvait s'engager sur la destination du bien commun, ni sur le choix du cocontractant sans le consentement expresse de son épouse (jugement, p.9) ;
1°) ALORS QUE le pacte de préférence n'emportant qu'une obligation pour le promettant de proposer le bien à la vente en priorité au bénéficiaire, il n'est pas soumis à la cogestion qui concerne les actes entre époux communs en biens emportant aliénation ou constitution de droits réels sur des biens de la communauté ; qu'en considérant que le pacte de préférence litigieux accordé par Emile B... était inopposable à sa veuve tout en constatant qu'il n'emportait création que d'un obligation personnelle, la cour d'appel a violé l'article 1424 du code civil ;
2°) ALORS subsidiairement QU'en ne précisant pas sur le fondement de quelle règle elle a pu déclarer le pacte de préférence conclu par Emile B... inopposable à sa veuve, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 12 du code de procédure civile ;
3°) ALORS QUE lorsque le tiers connaissait l'existence du pacte et l'intention du bénéficiaire de s'en prévaloir, ce dernier peut agir en nullité ou demander au juge de le substituer au tiers dans le contrat conclu ; qu'en exigeant de M. X... la preuve que les acquéreurs aient eu une connaissance d'un pacte écrit et signé par le promettant, cependant que la connaissance par ce tiers de l'existence d'une priorité et de la volonté du bénéficiaire de s'en prévaloir suffit à justifier sa demande de nullité, la cour d'appel a violé l'article 1134, devenu 1103, du code civil et les articles 1583 et 1589 du même code ;
4°) ALORS QUE le notaire engage sa responsabilité délictuelle à l'égard du bénéficiaire d'un pacte de préférence, dès lors qu'il accepte d'instrumenter une vente sans s'assurer que les droits du bénéficiaire ont été respectés ; qu'en subordonnant la faute du notaire à la preuve par le bénéficiaire qu'il a informé le notaire de sa volonté de se prévaloir du pacte de préférence, la cour d'appel a violé l'article 1382, devenu 1240, du code civil ;
5°) ALORS QU'en considérant que la lettre du 28 novembre 2010 : « Je n'ai effectivement pas d'accord écrit concernant la vente du bien de Mme B... », signifiait que M. X... avait indiqué au notaire n'avoir pas de pacte de préférence, quand cette lettre répondait à l'affirmation du notaire contenue dans le courrier du 19 novembre précédent constatant que « Mme B... et vous-même (M. X...) n'(avait) aucun accord écrit sur la chose et sur le prix à sa connaissance », et ne concernait donc aucunement le pacte de préférence litigieux conclu entre M. X... et Emile B..., la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis de la lettre du 28 novembre 2010 en méconnaissance de l'interdiction faite au juge de dénaturer les éléments de la cause ;
6°) ALORS QU'en n'examinant pas, fût-ce succinctement, la pièce n°10 constitué d'une télécopie mentionnant l'envoi d'un fichier intitulé « pact de préférence 21 01 2008 », la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile.