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28/02/2018 | FRANCE | N°16-25069

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 28 février 2018, 16-25069


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :

Vu l'article 2290 du code civil ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, rendu sur renvoi après cassation (chambre commerciale, financière et économique, 11 juin 2014, pourvoi n° 13-11.329), que le 30 novembre 2005, M. Z... et Mme Y... (les cautions) se sont rendus cautions solidaires envers la société Fuchs lubrifiant France (le fournisseur), pour quatre années, des sommes dues par la société Garage Vincent Z...    (la société) au titre d'un c

ontrat de fourniture de lubrifiants, ainsi que d'un prêt consenti en contrepartie ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :

Vu l'article 2290 du code civil ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, rendu sur renvoi après cassation (chambre commerciale, financière et économique, 11 juin 2014, pourvoi n° 13-11.329), que le 30 novembre 2005, M. Z... et Mme Y... (les cautions) se sont rendus cautions solidaires envers la société Fuchs lubrifiant France (le fournisseur), pour quatre années, des sommes dues par la société Garage Vincent Z...    (la société) au titre d'un contrat de fourniture de lubrifiants, ainsi que d'un prêt consenti en contrepartie par la Société générale ; que la société restant débitrice de certaines sommes, le fournisseur a, par lettre du 9 décembre 2009, mis en demeure la société de payer les sommes dues puis, cette dernière ayant été mise en liquidation judiciaire, a assigné les cautions en paiement ;

Attendu que pour rejeter la demande du fournisseur tendant à voir condamner solidairement les cautions à lui payer la somme de 4 487,05 euros, l'arrêt retient, par motifs adoptés, que, sauf stipulation contractuelle limitant dans le temps le droit de poursuite du créancier, est sans incidence sur l'obligation de la caution le fait qu'elle soit appelée à payer postérieurement à la date limite de son engagement, dès lors que la dette du débiteur principal était échue auparavant ;

Qu'en statuant ainsi, alors que, sauf clause contraire, l'engagement de la caution pour une durée limitée demeure pour les obligations nées avant le terme fixé, peu important la date de leur exigibilité et celle des poursuites, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 7 juillet 2016, entre les parties, par la cour d'appel de Douai ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Amiens ;

Condamne M. Z... et Mme Y... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette leur demande et les condamne à payer à la société Fuchs lubrifiant France la somme globale de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit février deux mille dix-huit.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

.

Moyen produit par la SCP Potier de La Varde, Buk-Lament et Robillot, avocat aux Conseils, pour la société Fuchs lubrifiant France.

La société Fuchs Lubrifiant fait grief à l'arrêt attaqué de l'avoir déboutée de sa demande tendant à voir M. Z... et Mme Y... condamnés solidairement à lui payer la somme de 4.487,05 euros avec intérêts au taux légal à compter du 9 décembre 2009 ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE sur la demande principale de la société Fuchs Lubrifiant ; qu'arguant du non-paiement par le débiteur principal des sommes qu'il lui devait, nées avant le 30 novembre 2009, elle sollicite l'infirmation du jugement déféré et la condamnation des deux cautions solidaires à lui régler sa créance telle que fixée par le tribunal de commerce ; que M. Z... et Mme Y... soutiennent que leur engagement de caution était limité dans le temps, qu'il prenait fin le 30 novembre 2009 et que la somme réclamée en principal n'a été exigible qu'après cette date, de sorte qu'ils ne peuvent être tenus de la régler ; que l'article 1134 dans son premier alinéa dispose que "les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites" ; qu'aux termes de l'article 1156 de ce même code, "on doit dans les conventions rechercher quelle a été la commune intention des parties contractantes, plutôt que de s'arrêter au sens littéral des termes" ; qu'enfin, l'article 1158 de ce code dispose que "dans le doute, la convention s'interprète contre celui qui a stipulé et en faveur de celui qui a contracté l'obligation" ; que les moyens soutenus par les parties concernant la durée de l'engagement de caution solidaire et la date d'exigibilité des sommes réclamées ne font que réitérer, sans justification complémentaire utile, ceux dont le premier juge a connu et auxquels il a répondu par des motifs pertinents et exacts que la cour adopte, sans qu'il soit nécessaire de suivre les parties dans le détail d'une discussion se situant au niveau d'une simple argumentation ; qu'il convient d'ajouter que la société Fuchs Lubrifiant ne conteste pas avoir reçu des versements partiels de la part de la société garage Vincent Z...    après qu'elle l'a mise en demeure le 18 mars 2010 de lui régler la somme de 16.643,30 € ; que d'ailleurs, elle produit l'échéancier qui avait été convenu entre les parties (cf. Pièce n° 9) et qui prévoyait un premier versement de 6.643,30 € le 29 mars 2010, puis des versements de 1.900 ou 1.400 € à compter du mois suivant ; que cette pièce porte une mention manuscrite qui fait référence à un chèque émis par la société garage Vincent Z...    correspondant au premier versement prévu ; qu'enfin il résulte de sa déclaration de créance rectificative, faite auprès du mandataire liquidateur et datée du 3 août 2010, que la société Fuchs Lubrifiant ne s'estimait plus créancière à cette date que d'une somme totale de 4.487,05 €, preuve que d'autres versements partiels étaient intervenus après le mois de mars 2010 et que l'appelante a ainsi perçu 12.156,25 € ; qu'or, et comme l'a justement relevé le premier juge, en se fondant sur les règles d'imputation des paiements posées par les articles 1254 et 1256 du code civil, il est établi que ces paiements partiels se sont imputés sur les sommes dues au titre des intérêts puis sur les créances les plus anciennes, qui sont les seules pour lesquelles l'engagement de caution solidaire peut être mis en oeuvre ; qu'or ces sommes, telles que rappelées dans le jugement de première instance, sont inférieures au montant total des versements partiels effectués par la société Garage Vinecent Z... et ont donc été réglées ; qu'en conséquence, c'est à juste titre que le premier juge a estimé que la société Fuchs Lubrifiant ne pouvait plus rien réclamer aux cautions solidaires et l'a déboutée de ses demandes ;

ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE il conviendra de retenir l'interprétation la plus favorable aux débiteurs et de considérer en conséquence qu'ils se sont engagés jusqu'au 30 novembre 2009 ; que par ailleurs, il sera rappelé que la clause d'un acte de cautionnement limitant la durée de l'engagement de la caution a pour seul effet de limiter la garantie de la caution au temps convenu par les parties et non d'imposer au créancier contre elle ses poursuites dans ce même délai ; qu'en d'autres termes, sauf stipulation contractuelle limitant dans le temps le droit de poursuite du créancier, est sans incidence sur l'obligation de la caution le fait qu'elle soit appelée à payer postérieurement à la date limite de son engagement, dès lors que la dette du débiteur principal était échue auparavant ; qu'en conséquence, la société Fuchs Lubrifiant peut exiger des cautions le paiement des sommes échues avant le 30 novembre 2009 ; que sur la date d'exigibilité des sommes réclamées par le créancier : qu'il apparaît que le montant de 4487,05 euros exigé par le prêteur correspond aux sommes suivantes : - solde débiteur (y compris l'annuité du prêt du 30 novembre 2008 et après déduction des avoirs de l'emprunteur) : 5447,27 euros - capital restant dû au 30 novembre 2008 : 10 345,29 euros - intérêts du 30 juin 2010 : 1037,79 euros, à déduire les acomptes versés durant l'année 2010 : 12343,30 euros ; que toutefois, il est constant que si la condition résolutoire est toujours sous-entendue dans les contrats synallagmatiques, en l'absence de dispense expresse et non équivoque prévue par le contrat, la clause résolutoire ne peut être acquise au créancier sans la délivrance préalable d'une mise en demeure restée infructueuse ; qu'en l'espèce, il apparaît que le prêteur a adressé une mise en demeure aux débiteurs au plus tôt le 9 décembre 2009 ; que dans ces conditions, ils ne pouvaient avant cette date invoquer la résolution du contrat et exiger le paiement du capital restant dû (10 345,29 euros) ; qu'en d'autres termes, le capital restant dû n'est donc devenu exigible qu'après le 30 novembre 2009, soit après la fin de l'engagement des cautions ; que dès lors, les seules sommes qui peuvent être exigées des cautions sont celles de 5447,27 euros et 1037,79 euros ; qu'en application de l'article 1254 du code Civil, il y a lieu d'imputer les acomptes versés durant l'année 2010 (12 343,30 euros) d'abord sur les intérêts (c'est-à-dire sur la somme de 1 037,79 euros) puis en application de l'article 1256 du même code, sur la dette la plus ancienne donc sur la somme de 5447,27 euros ; que le prêteur doit donc être débouté de sa demande formée à l'encontre des cautions ;

1°) ALORS QUE la caution d'un prêt qui s'est engagée à donner sa garantie pendant une durée limitée demeure tenue de la dette née pendant la durée de son engagement, peu importe que celle-ci ne soit devenue exigible qu'ultérieurement ; qu'en énonçant, pour dire les cautions tenues au paiement des seules sommes de 5.447,27 euros et de 1.037,79 euros, que le capital restant dû n'était devenu exigible qu'après le 30 novembre 2009, soit après la fin de l'engagement des cautions, après avoir pourtant constaté que le capital restant dû au titre du prêt cautionnée, au 30 novembre 2008, était de 10.345,29 €, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a ainsi violé les articles 2290 et 2292 du code civil ;

2°) ALORS QUE en tout état de cause le contrat de prêt dont le paiement était garanti par les cautions stipulait expressément qu'« à défaut de paiement de tout ou partie de l'une des annuités du prêt, l'ensemble des autres annuités, principal, intérêts courus au jour du remboursement, sur la totalité des sommes restant dues, frais et accessoires, dû à cette date, sera immédiatement exigible, la Banque se réservant d'exercer ses recours par toutes voies de droit à sa convenance » ; qu'en énonçant, pour juger que le capital restant dû de 10.345,29 euros n'était devenu exigible qu'après la fin de l'engagement des cautions et débouter ainsi la société Fuchs Lubrifiant de sa demande en paiement dirigée contre ces dernières de la somme de 4.487,05 euros, que le prêteur avait adressé une mise en demeure au débiteur au plus tôt le 9 décembre 2009 de sorte qu'il ne pouvait avant cette date invoquer la résolution du contrat et exiger le paiement du capital restant dû, la cour d'appel a méconnu les stipulations précitées du contrat de prêt dont il résultait que le seul défaut de paiement d'une annuité du prêt rendait immédiatement exigibles l'ensemble des autres annuités, sans autres formalités, violant ainsi l'article 1134 du code civil ;

3°) ALORS QU' au surplus le créancier garanti par un cautionnement solidaire n'a pas à se retourner préalablement à l'encontre du débiteur principal ni donc davantage à le mettre en demeure ; qu'en énonçant que les seules sommes qui pouvaient être exigées des cautions étaient celles de 5.447,27 euros et 1.037,79 euros, le créancier n'ayant pas mis en demeure le débiteur pour le capital restant dû de 10.345,29 euros avant le 9 décembre 2009, après avoir pourtant constaté que l'engagement des cautions était solidaire, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations dont il résultait que la société Fuchs Lubrifiant pouvait indifféremment se retourner contre les cautions solidaires sans avoir à mettre préalablement le débiteur en demeure d'exécuter son engagement et a ainsi violé l'article 2298 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 16-25069
Date de la décision : 28/02/2018
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Douai, 07 juillet 2016


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 28 fév. 2018, pourvoi n°16-25069


Composition du Tribunal
Président : M. Rémery (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, SCP Potier de La Varde, Buk-Lament et Robillot

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:16.25069
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