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28/02/2018 | FRANCE | N°16-24867

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 28 février 2018, 16-24867


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 12 avril 2016), que la société La Choisylienne a été mise en redressement judiciaire le 9 avril 2014, la société Gauthier-Sohm étant désignée mandataire judiciaire ; que la Société générale (la banque) a déclaré une créance, au titre d'un prêt, pour un montant global non échu de 298 242 euros intégrant les cotisations d'assurance décès-invalidité et les intérêts au taux contractuel de 3,65 % l'a

n, à titre privilégié ; que le juge-commissaire a admis la créance à concurrence de la ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 12 avril 2016), que la société La Choisylienne a été mise en redressement judiciaire le 9 avril 2014, la société Gauthier-Sohm étant désignée mandataire judiciaire ; que la Société générale (la banque) a déclaré une créance, au titre d'un prêt, pour un montant global non échu de 298 242 euros intégrant les cotisations d'assurance décès-invalidité et les intérêts au taux contractuel de 3,65 % l'an, à titre privilégié ; que le juge-commissaire a admis la créance à concurrence de la somme de 262 079,43 euros à titre nanti, correspondant au capital de la dette non échue, outre les intérêts au taux de 3,65 % ;

Attendu que la banque fait grief à l'arrêt de confirmer l'ordonnance alors, selon le moyen, que l'article R. 622-23 du code de commerce n'exige l'indication des modalités de calcul des intérêts dont le cours n'est pas arrêté que dans le cas où leur montant ne peut être calculé au jour de la déclaration de la créance ; qu'en revanche, lorsque le montant des intérêts à échoir peut être calculé à la date de la déclaration, la créance doit être admise en principal et en intérêts, sans que le créancier n'ait à opérer de distinction entre ces deux postes de créance ; qu'en l'espèce, par acte du 20 mai 2014, la banque a déclaré au passif du redressement judiciaire de la société débitrice sa créance sur cette société, au titre d'un prêt accordé le 27 septembre 2011, à hauteur de 298 242 euros comprenant le capital restant dû et les intérêts contractuels au taux de 3,65 %, selon tableau d'amortissement joint à la déclaration ; que pour n'admettre que le montant du capital restant dû au jour du jugement d'ouverture, en précisant que ce montant serait assorti des intérêts au taux conventionnel de 3,65 % l'an, la cour d'appel a considéré que les intérêts de la dette, qui naissent de la mise à disposition dans le futur de la somme prêtée, ne pouvaient figurer sur l'état du passif au jour du jugement déclaratif, de sorte qu'en n'admettant la créance de la banque qu'à hauteur du capital restant dû au jour du jugement d'ouverture, soit 262 079,43 euros, en précisant que cette somme serait assortie des intérêts au taux de 3,65 % par an, et en rejetant la demande d'admission de la somme correspondant aux intérêts contractuels à échoir, le juge-commissaire avait fait une correcte application des dispositions légales et réglementaires et évité que les intérêts "ne soient admis deux fois" ; qu'en statuant de la sorte, quand le montant des intérêts à échoir dont était créancière la banque avait pu être calculé au jour du jugement d'ouverture, selon décompte joint à la déclaration de créance, de sorte que ces intérêts devaient être admis au passif pour leur montant déclaré, la cour d'appel a violé les articles L. 622-25 et R. 622-23 du code de commerce ;

Mais attendu que si aucun texte n'oblige le créancier à distinguer, dans la déclaration de créance, le montant des intérêts à échoir du montant du capital restant dû, il est loisible au juge-commissaire d'admettre la créance d'intérêts de manière distincte et de substituer à leur montant déclaré les modalités de calcul qui résultent du contrat de prêt ; que le moyen, qui postule le contraire, n'est pas fondé ;

Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le moyen, pris en ses deuxième et troisième branches, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la Société générale aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer la somme de 3 000 euros à la société La Choisylienne ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit février deux mille dix-huit.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, avocat aux Conseils, pour la Société générale

Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR arrêté la créance de la SOCIETE GENERALE au passif de la procédure collective de la SARL LA CHOISYLIENNE à la somme de 262.079,43 € à titre nanti, outre intérêts au taux de 3,65 % l'an, et D'AVOIR rejeté la créance de l'exposante à hauteur de 30.639,57 € ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE « la Société Générale soutient que la créance qu'elle détient sur la société La choisylienne au titre du solde débiteur de son compte courant a été oubliée. Elle ajoute, s'agissant du prêt, que le juge commissaire a procédé à une confusion entre les intérêts dont le cours est arrêté et ceux dont le cours ne l'est pas ; que s'agissant de la créance relative au solde débiteur du compte courant, il convient d'observer qu'il ne saurait être reproché au juge commissaire de ne pas avoir tenu compte de la déclaration de créance de ce chef pour un montant de 798,03 euros alors que cette créance n'était pas contestée par le mandataire liquidateur de sorte que le juge commissaire n'a pas été saisi d'une créance sur laquelle il n'avait pas à statuer, à défaut de contestation. Il n'y a donc pas lieu à infirmation de l'ordonnance de ce chef ; que S'agissant du prêt, il résulte des dispositions de l'article L 622-24 du code de commerce qu'à partir de la publication du jugement, tous les créanciers dont la créance est née antérieurement au jugement d'ouverture, à l'exception des salariés, adressent la déclaration de leur créance au mandataire judiciaire (
) ; L'article L 622-25 du code de commerce prévoit que la déclaration porte le montant de la créance due au jour du jugement d'ouverture avec indication des sommes à échoir et de la date de leurs échéances ; Enfin l'article R 622-23 du même code précise qu'outre les indications prévues à l'article L 622-25, la déclaration de créance contient : 1° Les éléments de nature à prouver l'existence et le montant de la créance si elle ne résulte pas d'un titre ; à défaut une évaluation de la créance si son montant n'a pas encore été fixé ; 2° Les modalités de calcul des intérêts dont le cours n'est pas arrêté, cette indication valant déclaration pour le montant ultérieurement arrêt (
) ; Dans son ordonnance en date du 11 février 2015, le juge commissaire a arrêté la créance de la Société Générale à la somme de 5523,00 euros qualifiée d'admission à titre privilégié, correspondant à l'échéance du prêt due au jour de l'ouverture de la procédure de redressement, outre la somme de 262 079,43 correspondant au capital restant dû au 29 mars 2014 à titre nanti, avec intérêts au taux de 3,65 % l'an ; qu'il a rejeté la somme de 30 639,57 euros ; qu'il apparaît qu'en procédant de la sorte le premier juge a respecté les dispositions légales et conventionnelles ci-dessus et qu'en retranchant la somme de 30 639,57 euros réclamée au titre des intérêts conventionnels à échoir, il a, compte tenu des précisions apportées, à la fois indiqué que lesdits intérêts étaient admis au passif, précisé leur mode de calcul, et évité qu'ils ne soient admis deux fois » ;

ET AUX MOTIFS, A LES SUPPOSER ADOPTES, QUE « la SOCIETE GENERALE a déclaré une créance au passif de la procédure de redressement Judiciaire de la société LA CHOISYLIENNE SARL pour la somme de 298 242,00 Euros à titre privilégié à échoir au titre d'un prêt ; que le mandataire judiciaire a notifié au créancier le motif et le quantum de la discussion de sa créance déclarée, conformément aux dispositions de l'article L.622-27 du code de commerce. Que le créancier a fait connaître son désaccord quant au rejet de sa créance ; que les intérêts de la dette qui naissent de la mise à disposition dans le futur de la somme prêtée, ne peuvent figurer sur l'état du passif au jour du jugement déclaratif. Qu'en cas de remboursement anticipé ou de paiement tardif, les intérêts seront calculés spécifiquement. Que conformément aux dispositions des articles L.622-25 et R.622-23 du Code de Commerce, il convient d'arrêter la créance au 08 avril 2014, pour son capital restant dû, assorti des modalités de calcul des intérêts dont le cours n'est pas arrêté » ;

1°) ALORS QUE l'article R. 622-23 du code de commerce n'exige l'indication des modalités de calcul des intérêts dont le cours n'est pas arrêté que dans le cas où leur montant ne peut être calculé au jour de la déclaration de la créance ; qu'en revanche, lorsque le montant des intérêts à échoir peut être calculé à la date de la déclaration, la créance doit être admise en principal et en intérêts, sans que le créancier n'ait à opérer de distinction entre ces deux postes de créance ; qu'en l'espèce, par acte du 20 mai 2014, la SOCIETE GENERALE a déclaré au passif du redressement judiciaire de la SARL LA CHOISYLIENNE sa créance sur cette société, au titre d'un prêt accordé le 27 septembre 2011, à hauteur de 298.242 € comprenant le capital restant dû et les intérêts contractuels au taux de 3,65%, selon tableau d'amortissement joint à la déclaration ; que pour n'admettre que le montant du capital restant dû au jour du jugement d'ouverture, en précisant que ce montant serait assorti des intérêts au taux conventionnel de 3,65% l'an, la cour d'appel a considéré que les intérêts de la dette, qui naissent de la mise à disposition dans le futur de la somme prêtée, ne pouvaient figurer sur l'état du passif au jour du jugement déclaratif, de sorte qu'en n'admettant la créance de la SOCIETE GENERALE qu'à hauteur du capital restant dû au jour du jugement d'ouverture, soit 262.079,43 €, en précisant que cette somme serait assortie des intérêts au taux de 3,65% par an, et en rejetant la demande d'admission de la somme correspondant aux intérêts contractuels à échoir, le juge-commissaire avait fait une correcte application des dispositions légales et réglementaires et évité que les intérêts « ne soient admis deux fois » ; qu'en statuant de la sorte, quand le montant des intérêts à échoir dont était créancière la SOCIETE GENERALE avait pu être calculé au jour du jugement d'ouverture, selon décompte joint à la déclaration de créance, de sorte que ces intérêts devaient être admis au passif pour leur montant déclaré, la cour d'appel a violé les articles L. 622-25 et R. 622-23 du code de commerce ;

2°) ALORS QU' aux termes de sa déclaration du 20 mai 2014, la SOCIETE GENERALE avait déclaré au passif de la procédure collective de la SARL LA CHOISYLIENNE la somme suivante au titre du crédit moyen terme accordé à cette société : « A titre non échu : 298.242,00 € correspondant à 54 échéances impayées de 5.523 €, intégrant assurance et intérêts au taux contractuel de 3,65% l'an, outre majoration de taux et pénalités contractuelles en cas d'échéance impayée (page 33 du prêt) ou d'exigibilité anticipée (page 33 du prêt) » ; qu'il en résulte que les intérêts au taux conventionnel de 3,65% étaient inclus dans la somme de 298.242 € déclarée par la SOCIETE GENERALE ; qu'en jugeant néanmoins qu'en n'admettant que la somme de 262.079,43 €, en précisant que cette somme serait assortie des intérêts au taux de 3,65% par an, le juge-commissaire avait « à la fois indiqué que lesdits intérêts étaient admis au passif, précisé leur mode de calcul, et évité qu'ils ne soient admis deux fois », cependant que l'admission de la somme de 298.242 €, réclamée par la SOCIETE GENERALE dans sa déclaration de créance, n'impliquait en rien une « double admission » des intérêts, la cour d'appel a dénaturé la déclaration de créance de l'exposante, violant ainsi les articles 4 et 5 du code de procédure civile ;

3°) ALORS QUE dans ses conclusions d'appel (p. 2 ; p. 5), la SOCIETE GENERALE sollicitait l'admission des intérêts au taux conventionnel de 7,65% par an en cas de retard de paiement ainsi que l'indemnité forfaitaire de remboursement anticipé, régulièrement déclarés dans l'acte du 20 mai 2014 ; qu'en s'abstenant de se prononcer sur l'admission de ces postes de créance, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 622-24, L. 622-25 et R. 622-23 du code de commerce.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 16-24867
Date de la décision : 28/02/2018
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

ENTREPRISE EN DIFFICULTE (loi du 26 juillet 2005) - Redressement judiciaire - Période d'observation - Créanciers - Déclaration des créances - Modalités d'admission de la créance d'intérêts - Pouvoirs du juge-commissaire - Etendue

ENTREPRISE EN DIFFICULTE (loi du 26 juillet 2005) - Redressement judiciaire - Période d'observation - Créanciers - Déclaration des créances - Procédure - Distinction du montant des intérêts à échoir de celui du capital restant dû - Nécessité (non)

Si aucun texte n'oblige le créancier à distinguer, dans la déclaration de créance, le montant des intérêts à échoir du montant du capital restant dû, il est toutefois loisible au juge-commissaire d'admettre la créance d'intérêts de manière distincte et de substituer à leur montant déclaré les modalités de calcul qui résultent du contrat de prêt


Références :

articles L. 622-25 et R. 622-23 du code de commerce

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 12 avril 2016


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 28 fév. 2018, pourvoi n°16-24867, Bull. civ.Bull. 2018, IV, n° 27
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles Bull. 2018, IV, n° 27

Composition du Tribunal
Président : M. Rémery (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, Me Haas

Origine de la décision
Date de l'import : 20/08/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:16.24867
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