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27/02/2018 | FRANCE | N°17-80537

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 27 février 2018, 17-80537


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

-
La société Locacil,

contre l'arrêt de la cour d'appel de NANCY, chambre correctionnelle, en date du 16 septembre 2016, qui, sur renvoi après cassation (Crim., 24 février 2015, pourvoi n° 14-83.104), dans la procédure suivie contre elle du chef d'infraction au code de l'urbanisme, a prononcé sur les intérêts civils ;

La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 16 janvier 2018 où étaient présents dans la formation prévue à l'art

icle 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Soulard, président, Mme Ingall-Montagnier  , co...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

-
La société Locacil,

contre l'arrêt de la cour d'appel de NANCY, chambre correctionnelle, en date du 16 septembre 2016, qui, sur renvoi après cassation (Crim., 24 février 2015, pourvoi n° 14-83.104), dans la procédure suivie contre elle du chef d'infraction au code de l'urbanisme, a prononcé sur les intérêts civils ;

La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 16 janvier 2018 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Soulard, président, Mme Ingall-Montagnier  , conseiller rapporteur, M. Pers, conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : M. Bétron ;

Sur le rapport de Mme le conseiller Ingall-Montagnier, les observations de la société civile professionnelle PIWNICA et MOLINIÉ, de la société civile professionnelle ODENT et POULET, avocats en la Cour, et les conclusions de Mme l'avocat général LE DIMNA ;

Vu les mémoires produits en demande et en défense ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué, du jugement qu'il confirme et des pièces de procédure, que la société Locacil a été poursuivie pour avoir à [...], entre le 1er février 2012 et le 31 mars 2013, exercé une activité relevant des installations classées pour la protection de l'environnement malgré l'interdiction du plan d'occupation des sols (POS) ; que par jugement du 22 octobre 2013, le tribunal correctionnel l'a déclarée coupable des faits reprochés, l'a condamnée à une peine d'amende et, sur l'action civile, l'a condamnée à réparer le dommage causé à la commune de [...] par une mise en conformité de ses locaux et des lieux, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ; qu'appel a été interjeté ;

En cet état ;

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 121-2 du code pénal, L. 123-1 et suivants du code de l'urbanisme, devenus les articles L. 151-1 et suivants depuis l'ordonnance n°2015-1174 du 23 septembre 2015, L. 160-1, devenu l'article L. 610-1 depuis l'ordonnance n°2015-1174 du 23 septembre 2015, L. 480-4, L. 480-4-2 et L. 600-1 du code de l'urbanisme, L. 513-1 et R 512-68 du code de l'environnement, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré que la société Locacil avait commis une faute civile pour avoir exercé une activité relevant du classement des installations classées pour l'environnement malgré l'interdiction résultant des dispositions du POS, et l'a condamnée à mettre ses locaux en conformité avec les prescriptions du POS dans un délai de six mois sous peine d'une astreinte de 100 euros par jour de retard ;

"aux motifs que sur la légalité de la modification du POS, le POS de la commune de [...] a été modifié le 21 décembre 2009 afin d'interdire les installations classées pour la protection de l'environnement (ICPE) en zone UE ainsi définie : "Dans la zone UE, sauf dans le soussecteur UEm, les constructions comprenant des installations classées au titre de la protection de l'environnement soumises à autorisation, à enregistrement ou à déclaration sont interdites, sauf celles liées à la dépollution du site (y compris les opérations de surveillance de la nappe phréatique)" ; que la société Locacil fait tout d'abord valoir, au titre de la légalité externe de la modification du POS, que l'initiative de cette modification est venue du maire, alors qu'elle aurait dû venir du conseil municipal ; que, toutefois, c'est à juste titre que la commune de [...] réplique qu'en application de l'article L. 600-1 du code de l'urbanisme, l'illégalité pour vice de forme ou de procédure d'un POS ne peut être invoquée par voie d'exception après l'expiration d'un délai de six mois à compter de la prise d'effet dudit POS ; qu'en l'occurrence, le POS ayant été adopté le 21 décembre 2009, ce moyen tiré d'une illégalité pour vice de procédure soulevé à l'occasion des poursuites engagées à la suite du procès-verbal dressé par le maire le 30 avril 2012, soit plusieurs années après la prise d'effet du POS modifié, ne peut qu'être déclaré irrecevable ; que la société Locacil invoque ensuite la légalité interne de cette modification du POS en reprochant à la commune de [...] d'avoir utilisé la procédure de modification du POS plutôt que celle de la révision, compte-tenu de la généralité de l'interdiction édictée ; que, toutefois, il ne s'agit pas d'un moyen concernant la légalité interne, mais la légalité externe, puisque c'est un vice de procédure qui est invoqué ; que ce vice de procédure se heurte à l'irrecevabilité prévue par l'article L. 600-1 précité ; que la société Locacil allègue ensuite, au titre de la légalité interne, la "disproportion manifeste de l'interdiction générale des ICPE" décidée par la commune de [...] ; que sur ce point, par arrêt du 28 avril 2016, la cour administrative d'appel de Nancy a jugé en ces termes que l'interdiction édictée n'était pas disproportionnée : "L'interdiction de mener des activités relatives aux installations classées en zone UE est au nombre des prescriptions qui pouvaient être légalement fixées par le règlement du POS de la commune dès lors que les POS fixent, en application des dispositions alors applicables de l'article L. 123-1 du code de l'urbanisme, les règles générales et les servitudes d'utilisation des sols, qui peuvent notamment comporter l'interdiction de construire, déterminent l'affectation des sols selon l'usage principal qui doit en être fait ou la nature des activités dominantes qui peuvent y être exercées et peuvent définir en fonction des situations locales les règles concernant le droit d'implanter des constructions, leur destination et leur nature. Il ne ressort en outre pas des pièces du dossier que les choix communaux relatifs aux dispositions retenues pour la zone UE soient manifestement erronés au regard de la configuration des lieux et des objectifs de la commune, laquelle souhaitait privilégier le développement d'un projet touristique situé à proximité ainsi que la qualité de vie des zones d'habitation limitrophes" ; qu'au vu des pièces produites aux débats, la cour de céans est amenée à faire la même analyse que la cour administrative : il était dans les pouvoirs de la commune de [...] d'interdire les ICPE en zone UE et le choix de cette interdiction était motivé par les circonstances locales ; qu'enfin, la société Locacil se prévaut d'un détournement de pouvoir de la commune ; que néanmoins, privilégier le développement d'un projet touristique envisagé à proximité de la zone concernée ainsi que la qualité de vie des secteurs d'habitation limitrophes constitue un motif légitirne, de nature à justifier l'interdiction des ICPE dans ladite zone, même si la société Locacil constitue la seule entreprise exploitant une ICPE dans cette zone ; qu'aucun détournement de pouvoir n'est donc caractérisé ; que par conséquent, aucun des moyens développés par la société Locacil pour voir déclarer illégale la modification du POS n'apparaît fondé ; que sur les droits acquis de la société Locacil, la société Locacil soutient que l'arrêté préfectoral du 24 septembre 2001 autorisant la société Ecomix à exploiter l'ICPE valait également pour elle, car cet arrêté visait ses activités ; qu'il résulte de l'extrait du registre des commerces et des sociétés que la société Locacil, créée en 1993 et dont le gérant est M. René X..., a étendu à compter du 31 janvier 1998 ses activités à la revalorisation et au recyclage de déchets industriels ainsi qu'à la fabrication de tous produits dérivés de déchets recyclés ; que sur le même site, à [...], la société Ecomix, également gérée par M. René X..., exerçait depuis l'année 2000 une activité relevant des ICPE ; que les locaux de cette entreprise ont toutefois été détruits le 12 juillet 2009 par un violent incendie et celle-ci a été mise en liquidation judiciaire ; que d'après un courrier des services de la préfecture du Haut-Rhin, la société Locacil avait déposé le 20 février 1998 un dossier de déclaration pour une installation de revalorisation de matières plastiques qui n'a pas abouti à la délivrance d'un récépissé de déclaration, faute d'avoir été complété par l'exploitant conformément à la demande qui lui avait été faite ; que par contre, un récépissé de déclaration a été délivré à la société Ecomix le 3 juillet 2000 pour une unité de granulation de caoutchouc provenant de pneumatiques usagés ; que cette dernière a bénéficié le 24 septembre 2001 d'un arrêté d'autorisation d'exploiter une installation de ransformation de stockage de matières plastiques, caoutchouc, élastomères, résines et adhésifs synthétiques ; que souhaitant poursuivre ses activités, la société Locacil a sollicité en février 2011 la reprise du dossier déposé par elle en 1998 ; que suite à une lettre de la direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement (DREAL) du 25 mars 2011 faisant état d'un risque de confusion entre les activités de ces deux personnes morales, la société Locacil a déposé le 16 juin 2011 un nouveau dossier de déclaration pour exercer une activité visant à l'élaboration de sols équestres à partir de déchets traités de polymères, relevant des installations classées, et donnant lieu à la délivrance d'un récépissé de déclaration le 1er septembre 2011 ; que cependant antérieurement à cette date, la société Locacil n'a jamais sollicité un tel récépissé, étant relevé en outre que ce dernier concerne une activité autre que celle exploitée avant 2009, date de modification du POS ; que, par ailleurs, selon l'article 512-68 du code de l'environnement, lorsqu'une installation change d'exploitant, le nouvel exploitant doit en faire la déclaration au préfet dans le mois qui suit la prise en charge de l'exploitation et il appartient au préfet de délivrer un récépissé de cette déclaration ; qu'en l'occurrence, en admettant même que l'installation litigieuse ait changé d'exploitant, celui-ci devenant la société Locacil après avoir été la société Ecomix, il appartenait à la première d'en faire la déclaration au préfet, ce qui n'a jamais été fait avant la modification du POS en 2009 ; que, dès lors, il résulte de l'ensemble de ces éléments que la société Locacil ne peut se prévaloir, pour elle-même, d'aucun droit d'antériorité en ce qui concerne son activité industrielle litigieuse et qui lui permettrait d'échapper aux prescriptions du POS modifié en décembre 2009 ; que sur le procès-verbal constatant l'infraction, l'article L. 480-1 du code de l'urbanisme dispose que les infractions en matière d'urbanisme sont constatées notamment par tous officiers ou agents de police judiciaire ; que suivant l'article 16 du code de procédure pénale, les maires ont la qualité d'officier de police judiciaire ; que le maire de la commune de [...] avait ainsi qualité pour dresser procès-verbal le 30 avril 2012 à l'encontre de la société Locacil pour la violation des prescriptions du POS et le reproche que la société Locacil lui fait de manquer de neutralité et d'objectivité parce qu'il est le maire de la commune est donc dénué de toute pertinence ; que si les indications du PV du 30 avril 2012 sont peu explicites en ce qui concerne la ou les infractions reprochées par la commune de [...] à la société Locacil, l'enquête de gendarmerie qui a suivi ce PV dressé par le maire permet aux juridictions saisies de disposer de tous les éléments utiles pour vérifier la réalité des violations de la loi et leur permettre d'en apprécier la gravité ; que sur la régularisation de la situation, la société Locacil soutient qu'elle est désormais nantie de toutes les autorisations nécessaires pour la poursuite de son activité industrielle ; que toutefois, si la société Locacil s'est vu notifier par le préfet A... les 1er septembre 2011 et 19 juin 2012 le récépissé de sa déclaration d'activité d'élaboration de sols équestres à partir de matériaux recyclés et si elle s'est vu notifier le 5 mai 2014 le récépissé de reprise des installations précédemment exploitées par la société Ecomix, elle ne justifie pas s'être mise en conformité avec les prescriptions du POS ; que c'est ce défaut de mise en conformité qui lui est reproché et qui constitue la faute qui fonde les poursuites de la commune de [...] en qualité de partie civile ; que la société Locacil ne peut donc prétendre avoir régularisé sa situation ; que sur la constitution de l'infraction pénale, le prévenu ayant été définitivement relaxé, le débat n'est plus de savoir si l'infraction pénale est constituée dans ses éléments légaux, matériel et moral, mais si, à partir et dans la limite des faits objet de la poursuite, peut être caractérisée une faute civile ayant entraîné pour la partie civile un préjudice direct et personnel ouvrant droit à réparation ; qu'en l'espèce, le fait pour la société Locacil d'exploiter une ICPE dans une zone pour laquelle la commune a, en modifiant le POS, régulièrement décidé que ce type d'installation était interdit constitue une faute civile ; que cette faute civile est en outre intentionnelle, puisque le gérant de la société Locacil avait tenté de s'opposer à la modification du POS, sachant que cette modification rendrait impossible l'activité litigieuse ; que cette faute civile entraîne un préjudice direct et personnel pour la commune qui voit tenue en échec sa volonté de préserver de toute activité potentiellement dangereuse une zone de laquelle elle voulait bannir ce type d'activités, compte-tenu de ses projets et de la proximité de secteurs d'habitation ;

"1°) alors qu'un moyen tiré de l'incompétence de l'autorité ayant pris la décision, n'est pas un vice de forme ni un vice de procédure ; que le moyen soulevé par la société Locacil invoquait l'incompétence du maire pour modifier le POS ; qu'en déclarant ce moyen irrecevable aux motifs qu'il s'agissait d'un vice de forme ou de procédure qui devait, en application de l'article L. 600-1 du code de l'urbanisme, être invoqué dans un délai de six mois à compter de la prise d'effet du POS, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;

"2°) alors que le moyen tiré de ce que la commune aurait dû utiliser la procédure de révision du POS plutôt que celle de la modification du POS n'est pas un vice de forme, ni un vice de procédure, mais caractérise un moyen de légalité interne ; que dès lors la cour d'appel ne pouvait pas déclarer irrecevable un tel moyen en ce qu'il constituerait un vice de procédure qui aurait dû être invoqué dans le délai de six mois à compter de la prise d'effet du POS ;

"3°) alors que l'insuffisance ou la contradiction de motifs équivaut à son absence ; que la cour d'appel a relevé que le POS, tel que modifié le 21 décembre 2009, interdit « les constructions » comprenant des ICPE ; que cette disposition du POS n'interdit pas « les ICPE » ; qu'en entrant cependant en voie de condamnation en ce que la société Locacil a exploité une ICPE, la cour d'appel s'est contredite et n'a pas justifié sa décision ;

"4°) alors qu'en tout état de cause, en application du principe des droits acquis, les ICPE existant avant le changement de nomenclature restent soumises à l'ancienne nomenclature ; que la société Locacil invoquait que les activités pour lesquelles la société Ecomix avait obtenu l'autorisation préfectorale étaient exercées par la société Locacil ; qu'en outre l'arrêté préfectoral du 5 mai 2014 autorisait la reprise rétroactive des ICPE disposant expressément que « les prescriptions auxquelles était soumise la société Ecomix à travers notamment l'arrêté préfectoral du 24 septembre 2001, restent applicables à la société Locacil » ; qu'en s'abstenant de toute réponse à ces arguments péremptoires établissant que la modification du POS ne s'appliquait pas à la société Locacil, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision" ;

Attendu que, saisi des seules dispositions relatives aux intérêts civils, pour confirmer le jugement et déclarer que la société Locacil avait commis une faute civile pour avoir exercé une activité relevant des installations classées pour l'environnement malgré l'interdiction résultant des dispositions du POS, l'arrêt retient, reprenant l'analyse de la cour administrative d'appel de Nancy du 28 avril 2016 qu'il était dans les pouvoirs de la commune de [...] par modification du POS d'interdire les ICPE en zone UE ; que les juges ajoutent que l'autorisation antérieure à la modification du POS d'exploiter une installation classée pour la protection de l'environnement a été délivrée à la seule société Ecomix, que la société Locacil n'a pas, antérieurement à 2011 fait de déclaration et sollicité de récépissé pour exercer une activité relevant des installations classées, que, de plus, cette déclaration de 2011 concerne une activité autre que celle exploitée avant la modification du POS et qu'en outre le gérant de la société Locacil avait tenté de s'opposer à la modification du POS, sachant que cette modification rendrait impossible l'activité litigieuse ;

Attendu que si c'est à tort que la cour d'appel a retenu que le moyen d'illégalité de la modification du POS, tiré de l'incompétence du maire et du recours à la procédure de modification et non à celle de révision, constituait un vice de procédure se heurtant à l'irrecevabilité prévue par l'article L. 600-1 du code de l'urbanisme, l'arrêt n'encourt pas sur ce point pour autant la censure dès lors qu'à la date de la modification contestée, celle-ci pouvait être régulièrement engagée par le maire et a été validée par la cour administrative d'appel de Nancy le 28 avril 2016 ; que, pour le surplus, la cour d'appel, qui ne s'est pas contredite et qui n'avait pas à suivre les parties dans le détail de leur argumentation, a justifié sa décision ;

D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;

Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, 6 du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels du 16 décembre 1966, 112-1 et 121-2 du code pénal, L. 123-1 et suivants du code de l'urbanisme, devenus les articles L. 151-1 et suivants depuis l'ordonnance n°2015-1174 du 23 septembre 2015, L. 160-1, devenu l'article L. 610-1 depuis l'ordonnance n°2015-1174 du 23 septembre 2015, L. 480-4, L. 480-4-2, L. 480-5 et L. 480-7 du code de l'urbanisme, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré que la société Locacil avait commis une faute civile pour avoir exercé une activité relevant du classement des installations classées pour l'environnement malgré l'interdiction résultant des dispositions du POS et l'a condamnée à mettre ses locaux en conformité avec les prescriptions du POS dans un délai de six mois sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

"aux motifs que la modalité la plus efficace à mettre en oeuvre pour réparer intégralement le préjudice subi par la commune du fait de la faute commise par la société Localil est de condamner cette dernière à mettre ses locaux en conformité avec les prescriptions du POS, ce qui implique qu'elle supprime toutes les installations et tous les équipements destinés à l'exercice d'une activité relevant des ICPE ; par conséquent, les dispositions civiles du jugement rendu le 22 octobre 2013 par le tribunal correctionnel de Colmar seront confirmées ;

"et aux motifs adoptés qu'en application des articles L. 480-5 et L. 480-7 du code de l'urbanisme et au vu de l'avis émis le 4 mars 2013 par la direction départementale des territoires du Haut-Rhin, la société Localil sera également condamnée à réparer le dommage causé à la commune de [...] par une mise en conformité de ses locaux et des lieux visant à la suppression de toutes les installations et équipements destinés à l'exercice d'une activité relevant des installations classées et ce dans un délai de six mois, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;

"1°) alors que les mesures de démolition ou de mise en conformité prévues par l'article L. 480-5 du code de l'urbanisme ne peuvent être ordonnées que si le prévenu a été déclaré coupable des infractions prévues aux articles L. 160-1 et L. 480-4 du code de l'urbanisme ; que cette disposition ne s'applique pas aux mesures ordonnées à titre de réparation civile ; que la cour d'appel qui a constaté le caractère définitif de la relaxe de la société et qui statuait sur les seuls intérêts civils, ne pouvait pas confirmer le jugement qui, après avoir déclaré la société coupable de l'infraction au code de l'urbanisme, avait, au visa de l'article L. 480-5 du code de l'urbanisme, ordonné la mise en conformité des lieux ;

"2°) alors qu'en tout état de cause, toute atteinte à une liberté ou à un droit ne peut être ordonnée que si elle est nécessaire et proportionnée ; qu'en prononçant une mise en conformité des locaux et des lieux visant à la suppression de toutes les installations et équipements destinés à l'exercice d'une activité relevant des installations classées, sans motiver sa décision au regard de l'atteinte pouvant être portée à la liberté d'entreprendre et de travailler, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision ;

"3°) alors que la contradiction entre les motifs et le dispositif équivaut à son absence ; que la cour d'appel ne pouvait pas « confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions civiles », jugement qui a condamné la société à la mise en conformité de ses locaux dans un délai de six mois sous astreinte de 50 euros par jour de retard, et cependant condamné tout à la fois la société à la mise en conformité de ses locaux dans un délai de six mois sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

"4°) alors qu'en tout état de cause, peuvent seules être prononcées les mesures légalement applicables à la date de commission des faits ; qu'en 2012 et 2013, date des faits, l'article L. 480-7 du code de l'urbanisme ne prévoyait qu'une astreinte de 75 euros maximum par jour de retard ; qu'en condamnant la société Locacil à une astreinte de 100 euros par jour de retard, la cour d'appel n'a donné de base légale à sa décision" ;

Sur le moyen, pris en ses deux premières branches :

Attendu que, pour confirmer le jugement en ses dispositions civiles sauf à relever le montant de l'astreinte, la cour d'appel, après avoir démontré à partir et dans les limites des faits objet de la poursuite que la société Locacil a commis une faute civile entraînant pour la commune de [...] un préjudice personnel et direct ouvrant droit à réparation, retient que la modalité la plus efficace à mettre en œuvre pour réparer intégralement ce préjudice est de condamner cette dernière à mettre ses locaux en conformité avec les prescriptions du POS ;

Attendu qu'en statuant ainsi les juges du second degré n'ont fait qu'user de leur pouvoir d'apprécier souverainement, dans la limite des conclusions des parties, les modalités de réparation de l'infraction ;

D'où il suit que le moyen, inopérant en sa première branche en ce qu'il allègue une méconnaissance de l'article L. 480-5 du code de l'urbanisme qui ne s'applique pas aux mesures de remise en état des lieux ordonnées à titre de réparation civile et nouveau en sa deuxième branche, ne saurait être accueilli ;

Sur le moyen, pris en ses deux dernières branches :

Attendu que le moyen, irrecevable en sa troisième branche en ce qu'elle se fonde sur une erreur matérielle du dispositif susceptible d'être rectifiée, compte tenu des motifs, suivant la procédure prévue aux articles 710 et 711 du code de procédure pénale, et inopérant en sa quatrième branche dès lors que les dispositions de l'article L. 480-7 du code de l'urbanisme, dans leur rédaction consécutive à la loi du 24 mars 2014, entrée en vigueur le 27 mars, portant le montant maximum de l'astreinte à 500 euros par jour de retard, étaient applicables aux instances en cours, n'est pas fondé ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi ;

FIXE à 2 500 euros la somme que la société Locacil devra payer à la commune de [...], au titre de l'article 618-1 du code de procédure pénale ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le vingt-sept février deux mille dix-huit ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.


Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Nancy, 16 septembre 2016


Publications
Proposition de citation: Cass. Crim., 27 fév. 2018, pourvoi n°17-80537

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Composition du Tribunal
Président : M. Soulard (président)
Avocat(s) : SCP Odent et Poulet, SCP Piwnica et Molinié

Origine de la décision
Formation : Chambre criminelle
Date de la décision : 27/02/2018
Date de l'import : 15/09/2022

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 17-80537
Numéro NOR : JURITEXT000036697042 ?
Numéro d'affaire : 17-80537
Numéro de décision : C1800109
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.cassation;arret;2018-02-27;17.80537 ?
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