LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le premier moyen, pris en ses première et deuxième branches :
Vu l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société SDEI, aux droits de laquelle est venue la société Lyonnaise des eaux France (la société Lyonnaise des eaux), devenue la société Suez eau France, a conclu avec la société Les Vignerons du Castelas un contrat d'exploitation d'une station d'épuration stipulant que l'exploitant s'engageait à assurer la qualité de l'effluent rejeté, sous réserve que la société Les Vignerons du Castelas respecte son obligation relative à la qualité des effluents bruts contractuellement définis ; que cette dernière ayant invoqué l'exception d'inexécution pour ne pas payer des factures dans l'attente d'un arbitrage de l'Agence de l'eau, la société Suez eau France l'a assignée en paiement ; que reconventionnellement, la société Les Vignerons du Castelas a demandé réparation de son préjudice tenant à l'exécution défectueuse du contrat par la société Lyonnaise des eaux ;
Attendu que pour faire droit à l'exception d'inexécution de la société Les Vignerons du Castelas et rejeter la demande en paiement de la société Lyonnaise des eaux, l'arrêt retient que, s'il résulte des données du rapport d'audit que la société Les Vignerons du Castelas ne respectait pas toujours son obligation d'envoyer à la station d'épuration des eaux usées respectant les caractéristiques stipulées à l'annexe 1 du contrat d'exploitation, et que par conséquent la société Lyonnaise des eaux conteste à bon droit être tenue d'une obligation de résultat au visa de l'article 11 du contrat d'exploitation qui ne met à sa charge une telle obligation que dans la mesure où la cave respecte son obligation relative à la qualité des effluents, il n'en demeure pas moins que l'article 22 du contrat mettait à la charge de la société Lyonnaise des eaux une obligation de conseil en cas d'insuffisance de la capacité d'épuration de la station et que celle-ci n'a pas proposé les adaptions nécessaires ; qu'il en déduit que la société Les Vignerons du Castelas était dès lors fondée à opposer une exception d'inexécution aux demandes de la société Lyonnaise des eaux en paiement de ses prestations ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle avait constaté que la société Les Vignerons du Castelas n'avait pas respecté son obligation, préalable, de rejeter des effluents bruts d'une certaine qualité, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :
CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 6 octobre 2016, entre les parties, par la cour d'appel de Nîmes ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;
Condamne la société Les Vignerons du Castelas aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer à la société Suez eau France la somme de 3 000 euros et rejette sa demande ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze février deux mille dix-huit.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, avocat aux Conseils, pour la société Suez eau France
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR fait droit à l'exception d'inexécution de la société LES VIGNERONS DU CASTELAS et d'avoir débouté la société LYONNAISE DES EAUX FRANCE de sa demande en paiement de la somme de 67 646,74 € ;
AUX MOTIFS QUE « la société Lyonnaise des Eaux France soutient que l'article 21 du contrat d'exploitation ne charge pas l'exploitant d'assister le maître de l'ouvrage aux opérations de réception mais l'y associe et que c'est à juste titre qu'elle n'a émis aucune réserve puisque la station fonctionnait bien à cette époque. En conséquence, il ne peut lui être reproché un défaut d'assistance du maitre de l'ouvrage et le jugement déféré doit être infirmé en ce sens.
La société LES VIGNERONS DU CASTELAS conclut à la confirmation du jugement car les dysfonctionnements de la station d'épuration existaient déjà lors de la réception des travaux au vu du rapport d'autosurveillance de 2005 et l'exploitant, professionnel, est bel et bien tenu d'une mission d'assistance du maître de l'ouvrage profane en la matière.
L'article 21 du contrat d'exploitation prévoit que les installations sont réceptionnées par la cave dans le cadre du marché de construction conclu avec B... , en présence de l'exploitant. Celui-ci doit adresser à la cave la liste des réserves qu'il estime devoir être levées afin d'être à même d'exécuter ses propres obligations. A compter de la réception des installations, l'article précité stipule que l'exploitant prend en charge les installations et assure leur bon fonctionnement dans les conditions prévues au contrat.
C'est à juste titre que la société Lyonnaise des Eaux France considère, au vu de la formulation de cette clause qui mentionne la présence de l'exploitant mais ne définit aucune mission d'assistance, qu'elle avait pour seule fonction de vérifier lors de la réception des travaux si elle était en mesure d'exploiter l'ouvrage dans le respect de ses propres obligations contractuelles car, faute d'émettre une réserve sur un dysfonctionnement visible de l'ouvrage l'empêchant de l'exploiter conformément au contrat, elle n'était plus recevable à invoquer postérieurement ce dysfonctionnement.
Il est constant que cette réception a été actée sans aucune réserve de la société Lyonnaise des Eaux France.
Il est tout aussi constant que le rapport d'autosurveillance de 2005 n'est pas communiqué, de sorte que la cave ne démontre pas la réalité du dysfonctionnement qu'elle invoque lors des opérations de réception.
En tout état de cause, et par application de l'article 21 du contrat, la société Lyonnaise des Eaux France a pris en charge les installations et devait assurer leur bon fonctionnement dans les conditions prévues au contrat à compter du 14 juin 2005.
La société Lyonnaise des Eaux France conteste cependant être tenue d'une obligation de résultat car la cave ne respectait pas elle-même ses obligations relatives aux caractéristiques des effluents bruts tels que définie à l'annexe 1 du contrat d'exploitation, de sorte que, par application de l'article 11 du contrat, elle n'était redevable que d'une obligation de moyens parfaitement remplie en l'espèce, comme le met en évidence l'audit versé aux débats. L'appelante fait valoir en outre que le tribunal ne pouvait exonérer la société Les Vignerons du Castelas de son obligation de payer les factures émises par la société Lyonnaise des Eaux France car elle n'invoque aucun préjudice lié à ce manquement contractuel.
La société Les Vignerons du Castelas réfute cette argumentation et soutient que la société Lyonnaise des Eaux France a manqué à son obligation d'entretien et de tenir en bon état de fonctionnement et de conservation la station d'épuration et ce, en vertu des articles 4 et 21 du contrat d'exploitation. Elle fait valoir que ce manquement contractuel ressort clairement du rapport d'audit réalisé par la société IRH Ingénieur le 8 mars 2011 à la demande des caves vinicoles et en respectant le principe du contradictoire avec la SDEI, ainsi que de l'état des lieux de la station établi le 26 juin 2013 par IRH Ingénieur en raison de la reprise des installations par la cave à la fin du contrat.
Il convient de préciser qu'en 2009, cinq caves coopératives vinicoles, dont l'intimée, ont demandé la réalisation d'un audit suite à des dysfonctionnements de leur station d'épuration exploitée par la société Lyonnaise des Eaux France. Le cabinet IRH a été mandaté par les cinq caves coopératives et la société Lyonnaise des Eaux France a été associée à cet audit, ainsi que démontré par les courriels de convocation, feuilles d'émargement des réunions du 12 août 2010, 22 novembre 2010, courrier de convocation du 25 octobre 2010 et compte rendu de la réunion du 22 novembre 2010.
Si le rapport d'audit constate des dysfonctionnements décrits dans le jugement déféré, il est indiqué dans la synthèse que les moyens mis en oeuvre par l'exploitant sont globalement satisfaisants. En effet, d'un point de vue technique, les objectifs de rejet définis dans le contrat ne sont pas atteints mais la nature des eaux épurées n'est pas non plus conforme en permanence aux données du contrat. Il est proposé de revoir les modalités d'autosurveillance, de piloter plus finement l'injection des nutrients et d'analyser le fonctionnement de la recirculation, afin d'éventuellement le modifier dans un but d'optimisation du traitement des effluents.
Les données de ce rapport d'audit très documenté font apparaître que la société Les Vignerons du Castelas ne respectait pas toujours son obligation d'envoyer à la station d'épuration des eaux usées respectant les caractéristiques stipulées à l'annexe 1 du contrat d'exploitation. Dès lors, c'est à bon droit que la société Lyonnaise des Eaux France conteste être tenue par une obligation de résultat, au visa de l'article 11 du contrat d'exploitation qui ne met à sa charge une telle obligation que dans la mesure où la cave respecte ses propres obligations relatives à la qualité des effluents bruts définis en annexe 1.
Mais le jugement déféré retient à juste titre que l'article 22 du contrat (et non 21 comme mentionné par erreur dans la motivation, ainsi que dans les écritures de la cave vinicole) stipule : « l'exploitant doit, en cas d'insuffisance de la capacité d'épuration de la station, telle qu'elle a été définie en annexe 1 et 2, faire toute proposition à la cave pour adapter les installations aux besoins nouveaux ». Or, la société Lyonnaise des Eaux France qui connaissait la qualité de l'eau rejetée par la cave vinicole au moyen des rapports d'autosurveillance, devait proposer les adaptations nécessaires au respect de l'obligation de résultat contractée dans les conditions de l'article 11 du contrat. Pourtant, elle ne justifie pas avoir émis une quelconque proposition.
L'inexécution de cette obligation prévue par l'article 22 par la société Lyonnaise des Eaux France porte atteinte à un élément fondamental du contrat, à savoir la répartition de la prise en charge des installations définie à l'article 21 du contrat, car par son abstention, la société Lyonnaise des Eaux France se libère elle-même de son obligation de résultat et n'exécute pas le contrat de bonne foi.
Etant prévu qu'en vertu de l'article 15 du contrat d'exploitation la cave et l'exploitant devaient, en cas de litige, saisir l'Agence de l'Eau afin qu'elle mène une mission de conciliation avant toute action contentieuse, le tribunal a justement retenu que la société Les Vignerons du Castelas pouvait légitimement suspendre ses règlements en se fondant sur le principe d'inexécution de [son] prestataire.
[
] Enfin, le tribunal n'a pas méconnu les dispositions de l'article 1147 du Code civil en déboutant l'appelante de sa demande en paiement sans avoir recherché si la société Les Vignerons du Castelas faisait état d'une demande de dommages-intérêts d'un montant équivalent. En effet l'exception d'inexécution consiste à suspendre volontairement l'exécution de ses engagements et si elle est justifiée, comme en l'espèce, conduit au rejet de la demande en paiement du cocontractant qui n'exécute pas l'obligation réciproque mise à sa charge. La demande de dommages-intérêts de la part de la cave vinicole est, elle, subordonnée à la démonstration d'un préjudice, alors même qu'elle a déjà suspendu son obligation.
Au vu de l'ensemble de ces éléments, le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a fait droit à l'exception d'inexécution et a débouté la société Lyonnaise des Eaux France de sa demande en paiement de la somme de 67 646,74 euros TTC » ;
1°/ ALORS QUE l'exception d'inexécution ne peut être invoquée par le cocontractant auquel l'exécution défectueuse du contrat est, même pour partie seulement, imputable ; qu'en l'espèce, le contrat conclu entre les parties stipulait qu'« à compter de la réception de l'installation, l'exploitant s'engage à assurer une qualité de l'effluent rejeté conforme à l'annexe 2, sous réserve que la cave respecte les obligations qui lui incombent, à savoir la qualité des effluents bruts définis en annexe 1 » (art. 11 du contrat d'exploitation, prod.) et que « les caractéristiques des effluents bruts sont définies en annexe 1. Si les prescriptions de l'annexe 1 ne sont pas respectées (notamment en cas d'un accident ou d'une fausse manoeuvre causées par les activités de la cave) : - la cave s'engage à prévenir immédiatement l'exploitant, - l'exploitant sera dégagé de ses responsabilités et des garanties auxquelles il est engagé, - l'exploitant mettra cependant tout en oeuvre pour faire fonctionner la station d'épuration » (Ib., art. 20) ; que la Cour d'appel a expressément constaté, à cet égard que « la société Les Vignerons du Castelas ne respectait pas toujours son obligation d'envoyer à la station d'épuration des eaux usées respectant les caractéristiques stipulées à l'annexe 1 du contrat d'exploitation » (arrêt attaqué, p.6, § 4) ; qu'elle a également constaté que ce manquement était, selon l'audit versé aux débats, à l'origine des dysfonctionnements constatés, puisqu'elle a relevé que selon ce rapport, « les moyens mis en oeuvre par l'exploitant sont globalement satisfaisants.
En effet, d'un point de vue technique, les objectifs de rejet définis dans le contrat ne sont pas atteints mais la nature des eaux épurées n'est pas non plus conforme en permanence aux données du contrat » (arrêt attaqué, p.6, § 3) ; qu'en faisant néanmoins droit à l'exception d'inexécution soulevée par la société LES VIGNERONS DU CASTELAS en vue de faire échec à la demande en paiement des redevances contractuellement dues formée à son encontre par l'exposante, la Cour d'appel a refusé de tirer les conséquences légales de ses propres constatations et a violé l'article 1147 du Code civil dans sa rédaction applicable au litige ;
2°/ QU'IL EN VA D'AUTANT PLUS AINSI QUE l'exception d'inexécution ne peut pas être soulevée par le cocontractant assujetti à une obligation dont l'exécution est préalable à celle de son partenaire ; qu'en l'espèce, le contrat prévoyait qu' « à compter de la réception de l'installation, l'exploitant s'engage à assurer une qualité de l'effluent rejeté conforme à l'annexe 2, sous réserve que la cave respecte les obligations qui lui incombent, à savoir la qualité des effluents bruts définis en annexe 1 » (art. 11 du contrat d'exploitation, prod.) ; que l'exécution de son obligation relative à la qualité des eaux usées par la société LES VIGNERONS DU CASTELAS subordonnait ainsi l'obligation de l'exposante d'assurer une certaine qualité des eaux traitées ; qu'en jugeant en conséquence que la société LES VIGNERONS DU CASTELAS était fondée à s'opposer au paiement des redevances sollicité par l'exposante, après avoir pourtant constaté que la cave n'avait pas respecté son obligation relative aux eaux usées, la Cour d'appel a violé de plus fort l'article 1147 du Code civil dans sa rédaction applicable au litige ;
3°/ ET ALORS EN TOUT ETAT DE CAUSE QUE l'exception d'inexécution doit constituer une riposte proportionnée, de sorte que l'inexécution d'une obligation essentielle ne peut être justifiée que par l'inexécution d'une obligation réciproque elle même essentielle ; que le contrat prévoyait que «l'exploitant s'engage à assurer une qualité de l'effluent rejeté conforme à l'annexe 2, sous réserve que la cave respecte les obligations qui lui incombent, à savoir la qualité des effluents bruts définis en annexe 1 » (art. 11 du contrat d'exploitation, prod.) et que « si les prescriptions de l'annexe 1 ne sont pas respectées (notamment en cas d'un accident ou d'une fausse manoeuvre causées par les activités de la cave) : - la cave s'engage à prévenir immédiatement l'exploitant, - l'exploitant sera dégagé de ses responsabilités et des garanties auxquelles il est engagé, - l'exploitant mettra cependant tout en oeuvre pour faire fonctionner la station d'épuration » (Ib., art. 20) ; que le contrat ajoutait que « l'exploitant doit, en cas d'insuffisance de la capacité d'épuration de la station, telle qu'elle a été définie en annexes 1 et 2, faire toutes propositions à la Cave pour adapter les installations aux besoins nouveaux » (Ib., art. 22) ; qu'il s'en déduit que cette dernière obligation était de toute évidence accessoire par rapport à celles, essentielles, consistant pour l'exposante à traiter les eaux usées et, pour la cave, à fournir des eaux usées d'une certaine qualité et à payer les redevances afférentes à la prestation de l'exposante ; qu'en jugeant le contraire, au prétexte qu'en s'abstenant de faire une proposition à la cave pour adapter les installations aux besoins nouveaux, l'exposante se serait libérée elle-même de son obligation de résultat et n'aurait pas exécuté le contrat de bonne foi, la Cour d'appel a violé les articles 1134 et 1147 du Code civil ;
4°/ QU'IL EN VA D'AUTANT PLUS AINSI QUE le contrat prévoyant que «l'exploitant s'engage à assurer une qualité de l'effluent rejeté conforme à l'annexe 2, sous réserve que la cave respecte les obligations qui lui incombent, à savoir la qualité des effluents bruts définis en annexe 1 » (art. 11 du contrat d'exploitation, prod.) et que « si les prescriptions de l'annexe 1 ne sont pas respectées (notamment en cas d'un accident ou d'une fausse manoeuvre causées par les activités de la cave) : - la cave s'engage à prévenir immédiatement l'exploitant, - l'exploitant sera dégagé de ses responsabilités et des garanties auxquelles il est engagé, - l'exploitant mettra cependant tout en oeuvre pour faire fonctionner la station d'épuration » (Ib., art.20), il s'en déduit que c'est l'inexécution par la société LES VIGNERONS DU CASTELAS de son obligation relative aux eaux usées qui avait libéré l'exposante de son obligation de résultat, de sorte qu'en jugeant qu'elle s'en était libérée elle-même en s'abstenant de faire toute proposition pour adapter l'installation aux besoins nouveaux, la Cour d'appel a de plus fort violé les articles 1134 et 1147 du Code civil.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné la société LYONNAISE DES EAUX FRANCE à payer à la SCA VIGNERONS DU CASTELAS la somme de 50 000 € au titre des redevances indûment perçues ;
AUX MOTIFS QUE « par application de l'article 21 du contrat, la société Lyonnaise des Eaux France a pris en charge les installations et devait assurer leur bon fonctionnement dans les conditions prévues au contrat à compter du 14 juin 2005.
La société Lyonnaise des Eaux France conteste cependant être tenue d'une obligation de résultat car la cave ne respectait pas elle-même ses obligations relatives aux caractéristiques des effluents bruts tels que définie à l'annexe 1 du contrat d'exploitation, de sorte que, par application de l'article 11 du contrat, elle n'était redevable que d'une obligation de moyens parfaitement remplie en l'espèce, comme le met en évidence l'audit versé aux débats. L'appelante fait valoir en outre que le tribunal ne pouvait exonérer la société Les Vignerons du Castelas de son obligation de payer les factures émises par la société Lyonnaise des Eaux France car elle n'invoque aucun préjudice lié à ce manquement contractuel.
La société Les Vignerons du Castelas réfute cette argumentation et soutient que la société Lyonnaise des Eaux France a manqué à son obligation d'entretien et de tenir en bon état de fonctionnement et de conservation la station d'épuration et ce, en vertu des articles 4 et 21 du contrat d'exploitation. Elle fait valoir que ce manquement contractuel ressort clairement du rapport d'audit réalisé par la société IRH Ingénieur le 8 mars 2011 à la demande des caves vinicoles et en respectant le principe du contradictoire avec la SDEI, ainsi que de l'état des lieux de la station établi le 26 juin 2013 par IRH Ingénieur en raison de la reprise des installations par la cave à la fin du contrat.
(
) Si le rapport d'audit constate des dysfonctionnements décrits dans le jugement déféré, il est indiqué dans la synthèse que les moyens mis en oeuvre par l'exploitant sont globalement satisfaisants. En effet, d'un point de vue technique, les objectifs de rejet définis dans le contrat ne sont pas atteints mais la nature des eaux épurées n'est pas non plus conforme en permanence aux données du contrat. Il est proposé de revoir les modalités d'autosurveillance, de piloter plus finement l'injection des nutrients et d'analyser le fonctionnement de la recirculation, afin d'éventuellement le modifier dans un but d'optimisation du traitement des effluents.
Les données de ce rapport d'audit très documenté font apparaître que la société Les Vignerons du Castelas ne respectait pas toujours son obligation d'envoyer à la station d'épuration des eaux usées respectant les caractéristiques stipulées à l'annexe 1 du contrat d'exploitation. Dès lors, c'est à bon droit que la société Lyonnaise des Eaux France conteste être tenue par une obligation de résultat, au visa de l'article 11 du contrat d'exploitation qui ne met à sa charge une telle obligation que dans la mesure où la cave respecte ses propres obligations relatives à la qualité des effluents bruts définis en annexe 1.
Mais le jugement déféré retient à juste titre que l'article 22 du contrat (et non 21 comme mentionné par erreur dans la motivation, ainsi que dans les écritures de la cave vinicole) stipule : « l'exploitant doit, en cas d'insuffisance de la capacité d'épuration de la station, telle qu'elle a été définie en annexe 1 et 2, faire toute proposition à la cave pour adapter les installations aux besoins nouveaux ». Or, la société Lyonnaise des Eaux France qui connaissait la qualité de l'eau rejetée par la cave vinicole au moyen des rapports d'autosurveillance, devait proposer les adaptations nécessaires au respect de l'obligation de résultat contractée dans les conditions de l'article 11 du contrat. Pourtant, elle ne justifie pas avoir émis une quelconque proposition.
L'inexécution de cette obligation prévue par l'article 22 par la société Lyonnaise des Eaux France porte atteinte à un élément fondamental du contrat, à savoir la répartition de la prise en charge des installations définie à l'article 21 du contrat, car par son abstention, la société Lyonnaise des Eaux France se libère elle-même de son obligation de résultat et n'exécute pas le contrat de bonne foi.
(
) La société Les Vignerons du Castelas réclame le remboursement de la moitié des redevances réglées à l'exploitante pendant la durée du contrat de 10 ans, à savoir la somme de 163 923,30 euros en raison du préjudice qui en résulte pour elle tant sur le plan financier que sur le risque encouru pendant cette période de poursuites pénales contre le président de la cave puisque le non-respect des effluents est sanctionnable pénalement.
La société Lyonnaise des eaux France s'oppose à cette demande en l'absence de préjudice démontré par l'appelante incidente, alors même qu'elle a satisfait à son obligation de moyen, étant déchargée de son obligation de résultat par suite de la non-conformité des effluents bruts.
Sur ce dernier point, l'exploitante s'est trouvée déchargée de son obligation de résultat parce qu'elle n'a pas exécuté le contrat de bonne foi en s'abstenant de proposer les adaptations nécessaires au respect de ses obligations par la cave. Elle ne peut donc s'en prévaloir pour échapper à la réparation du préjudice subi par la cave, à supposer que celui-ci soit établi et causé par la faute de l'exploitante.
En l'occurrence, la société Les Vignerons du Castelas ne produit aucune pièce justifiant du préjudice financier allégué. Elle ne saurait donc être indemnisée à ce titre.
Par contre, il est établi que la qualité de l'effluent rejeté n'était pas conforme à ce qui était défini dans le contrat et entraînait un non-respect des objectifs réglementaires fixés au rejet (cf. page 41 du rapport d'audit). La société Les Vignerons du Castelas était donc exposée au risque de se voir reprocher un non respect des normes causé par la faute de la société Lyonnaise des eaux qui n'a pas exécuté loyalement le contrat. Etant rappelé d'une part que l'appelante incidente n'a pas payé les factures du 11 janvier 2012, 9 juillet 2012 et 23 janvier 2013 pour un total de 67 646,74 euros en raison de l'inexécution de l'obligation de l'exploitante et qu'elle ne peut donc pas prétendre à un remboursement des redevances sur cette période et que d'autre part, les dysfonctionnements n'étaient pas permanents, la Cour évalue le préjudice subi par la société Les Vignerons du Castelas au titre des redevances indûment perçues à la somme de 50 000 euros » ;
1°/ ALORS QUE la cassation à intervenir du chef du premier moyen entraînera, par voie de conséquence, la cassation de l'arrêt en ce qu'il a condamné l'exposante au paiement de la somme de 50 000 euros au motif que « l'exploitante s'est trouvée déchargée de son obligation de résultat parce qu'elle n'a pas exécuté le contrat de bonne foi en s'abstenant de proposer les adaptations nécessaires au respect de ses obligations par la cave. Elle ne peut donc s'en prévaloir pour échapper à la réparation du préjudice subi par la cave »
et ce, en application de l'article 625 du Code de procédure civile ;
2°/ ET ALORS EN TOUT ETAT DE CAUSE QUE les dommages-intérêts ne doivent comprendre à l'égard de la perte éprouvée par le créancier et du gain dont il a été privé, que ce qui est une suite immédiate et directe de l'inexécution de la convention ; qu'en l'espèce, la Cour d'appel a estimé que l'exposante n'avait pas exécuté son obligation, en cas d'insuffisance de la capacité d'épuration de la station, de faire toute proposition à la cave pour adapter les installations aux besoins nouveaux ; que ce manquement à une simple obligation de conseil ne présente pas un lien de causalité certain et direct avec le préjudice prétendument subi par la société LES VIGNERONS DU CASTELAS, consistant à avoir été exposée au risque de se voir reprocher un non respect des normes relatives à la qualité de l'eau, de sorte qu'en condamnant l'exposante au paiement de la somme de 50 000 euros, après avoir dispensé la cave du paiement des redevances à hauteur de 67 646,74 euros, la Cour d'appel a violé l'article 1151 du Code civil.