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14/02/2018 | FRANCE | N°16-20349

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 14 février 2018, 16-20349


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 12 novembre 2015), que M. Y... a été engagé le 4 mai 2009 par la société 2B Consulting en qualité de directeur d'affaires ; qu'ayant pris acte de la rupture de son contrat de travail le 29 août 2014, il a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes ;

Sur le premier moyen, ci-après annexé :

Attendu que sous le couvert d'un grief non fondé de violation de la loi, le moyen ne tend qu'à remettre en cause l'appréciation souveraine par les juges du fo

nd de la valeur et de la portée des éléments produits devant eux au terme de laq...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 12 novembre 2015), que M. Y... a été engagé le 4 mai 2009 par la société 2B Consulting en qualité de directeur d'affaires ; qu'ayant pris acte de la rupture de son contrat de travail le 29 août 2014, il a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes ;

Sur le premier moyen, ci-après annexé :

Attendu que sous le couvert d'un grief non fondé de violation de la loi, le moyen ne tend qu'à remettre en cause l'appréciation souveraine par les juges du fond de la valeur et de la portée des éléments produits devant eux au terme de laquelle ils ont estimé que la demande en rappel d'heures supplémentaires devait être rejetée ;

Sur le second moyen :

Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande de nullité de la clause de non-concurrence et de le condamner à verser une certaine somme à titre de pénalité pour violation de la clause, alors, selon le moyen :

1°/ que la clause de non-concurrence comportant deux séries d'interdictions, en retranchant de son analyse celle des deux qui en pratique portait une plus grave atteinte au principe fondamental de libre exercice d'une activité professionnelle, puisqu'elle obligeait le salarié « à ne pas entrer en contact direct ou indirect avec les clients ou prospects de la société en vue de les démarcher pour les ventes de prestations ou de logiciels », la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de ce principe, ensemble l'article L. 1121-1 du code du travail ;

2°/ qu'en jugeant que la clause comporte une contrepartie financière proportionnée à la mesure de l'interdiction, sans répondre au moyen d'annulation dénonçant le caractère dérisoire d'une indemnité égale à 30 % de la moyenne mensuelle de la rémunération brute fixe, cependant que la part variable représentait près de la moitié de la rémunération, de sorte que la contrepartie était en réalité limitée à 15 %, tandis que la pénalité de concurrence imposée au salarié était, elle, assise sur la totalité de la rémunération, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du principe fondamental de libre exercice d'une activité professionnelle, ensemble l'article L. 1121-1 du code du travail ;

3°/ que le salarié débiteur de la clause faisait valoir qu'elle était abusive, en ce qu'elle s'étendait à toute la France, alors que l'essentiel de l'activité de l'employeur se concentrait sur l'Ile-de-France ; qu'en négligeant ce moyen, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du principe fondamental de libre exercice d'une activité professionnelle, ensemble l'article L. 1121-1 du code du travail ;

4°/ qu'une clause d'interdiction de concurrence est d'interprétation stricte ; qu'en jugeant que l'infraction à la clause était démontrée par des annonces dans lesquelles le salarié se déclarait cofondateur d'une société INTIS au sein de laquelle il occupait la fonction de « director business development» et dont l'activité commerciale était concurrente de celle de l'employeur, cependant que la société INTIS pouvait être concurrente de la société 2B Consulting sans pour autant commercialiser les logiciels énumérés par la clause, de sorte que ni l'entrée au service d'une entreprise commercialisant les logiciels limitativement énumérés par la clause, ni le démarchage effectif de clients de l'employeur, actuels ou potentiels, n'étaient démontrés, la cour d'appel a violé le principe fondamental de libre exercice d'une activité professionnelle, ensemble les articles 1147 du code civil et L. 1121-1 du code du travail ;

Mais attendu d'abord, que sous le couvert de griefs non fondés de manque de base légale, le moyen ne tend qu'à remettre en cause l'appréciation par la cour d'appel de la valeur et de la portée des éléments de fait et de preuve qui lui étaient soumis, dont elle a déduit, sans être tenue de répondre à une argumentation dépourvue d'offre de preuve, que la clause de non-concurrence figurant dans le contrat de travail du 2 janvier 2012, appréhendée dans son intégralité, ne faisait pas obstacle à l'exercice d'une activité professionnelle par le salarié, que la contrepartie financière prévue était proportionnée à la mesure de l'interdiction et qu'elle était justifiée tant par ses limites géographique et temporelle que par la nécessité pour la société 2B Consulting de protéger les intérêts de l'entreprise ;

Et attendu ensuite, qu'après avoir relevé, sans être critiquée sur ce point, que le salarié ne contestait pas avoir violé les dispositions de la clause de non-concurrence et retenu, au terme d'une appréciation souveraine des éléments produits, que ce dernier publiait des annonces dans lesquelles il se présentait comme « director business développement » d'une société qui exploitait une activité concurrente de la société 2B consulting, la cour d'appel en a exactement déduit que le salarié devait être condamné à s'acquitter du montant de la pénalité prévue au contrat ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. Y... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze février deux mille dix-huit.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle et Hannotin, avocat aux Conseils, pour M. Y...

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté M. Y..., salarié, de sa demande de condamnation de la société 2B Consulting, employeur, au paiement de la somme de 29 897,64 € au titre d'un rappel d'heures supplémentaires pour la période allant du 1er août 2011 au 31 août 2014, outre 2 989,76 € de congés payés afférents ;

AUX MOTIFS QUE M. Y... ne démontre pas qu'il a dû effectuer, à la demande de l'employeur, des heures de travail en nombre supérieur à 38 heures 30 par semaine pour accomplir la mission qui lui était confiée en se bornant à affirmer qu'il travaillait les samedis et les dimanches et tard le soir, sans que les messages adressés à des heures tardives suffisent à faire la preuve d'un tel dépassement sur la semaine ; de sorte que sa demande en paiement de rappel d'heures supplémentaires doit être rejetée ;

ALORS QUE la preuve des heures supplémentaires ne repose particulièrement ni sur l'employeur ni sur le salarié ; qu'en déboutant ce dernier de sa demande pour ne reposer que sur l'affirmation qu'il travaillait les samedis et les dimanches et tard le soir, sans que les messages adressés à des heures tardives suffisent à faire la preuve d'un tel dépassement sur la semaine, mais sans tenir compte du décompte précis présenté dans ses conclusions, qui, conforté par ces éléments, laissait présumer un dépassement du temps de travail conventionnel, et devait conduire l'employeur à présenter ses éléments de détermination du temps de travail, la cour d'appel a violé l'article L 3171-4 du code du travail.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté M. Y..., salarié, de sa demande tendant à voir juger que la clause de non-concurrence inscrite au contrat de travail conclu avec la société 2B Consulting, employeur, le 2 janvier 2012 est nulle ; de l'avoir débouté de sa demande tendant à voir dire en conséquence n'y avoir lieu à son application et que la société 2B Consulting n'a pas à verser la contrepartie financière ; d'avoir refusé de lui donner acte de ce qu'il a procédé à la restitution des sommes versées à ce titre depuis la rupture du contrat de travail ; et de l'avoir condamné au paiement de la somme de 106 391 € à titre de pénalité pour violation de la clause de non-concurrence ;

AUX MOTIFS QUE le contrat de travail comporte une clause rédigée comme suit : « le salarié s'engage en cas de rupture du contrat de travail, quelle qu'en soit la cause, y compris pendant la période d'essai, à ne pas entrer au service d'une société ayant une activité pouvant concurrencer directement ou indirectement celle de la société sur le territoire français, à ne pas s'intéresser directement ou indirectement et sous quelque forme que ce soit à une entreprise de cet ordre dans les conditions précitées. Par activité concurrente il convient d'entendre toute prestation de commercialisation et/ou de services relative à la mise en oeuvre du logiciel Cognos Tm1, Spss, Clarity, Open Pages, Datastage et tout nouveau produit entrant dans l'offre business analytics et information management de la nouvelle société IBM » ; que M. Y... prétend que cette clause porte atteinte à sa liberté de travailler par sa généralité et son étendue ; que compte tenu du secteur d'activité concerné, de la formation de M. Y... et des postes qu'il a précédemment occupés, tels que ces éléments ressortent du curriculum vitae qu'il verse aux débats, la clause contenue dans le contrat de travail signé le 2 janvier 2012 ne constitue pas un obstacle à toute activité professionnelle, ses compétences professionnelles l'autorisant à vendre d'autres produits et services que ceux qui sont visés dans la clause litigieuse ; que la clause qui, comporte une contrepartie financière proportionnée à la mesure de l'interdiction, se trouve également justifiée tant au regard des limites géographiques qu'au regard de sa durée, par la nécessité pour la société 2B Consulting de protéger les intérêts de l'entreprise dont l'activité porte sur la vente et la mise en oeuvre des logiciels mentionnés dans la clause ; qu'il en ressort que la clause de non-concurrence est valable et qu'elle doit être respectée par le salarié qui s'y est engagé ; qu'il ressort de l'article 13 de l'avenant du 2 janvier 2012 qu'en cas de violation de l'interdiction de concurrence par le salarié, celui-ci sera redevable d'une pénalité fixée forfaitairement au montant de l'ensemble des rémunérations brutes de toute nature perçues au cours de la dernière année d'activité, et ce, pour chaque infraction constatée ; que l'article prévoit également que le paiement de cette pénalité ne porte pas atteinte aux droits de la société à poursuivre le remboursement de son préjudice pécuniaire et moral et que le manquement du salarié à cette interdiction libère la société 2B Consulting de son obligation de verser la contrepartie financière et lui ouvre droit au remboursement de ce qu'il aurait pu recevoir ; que la violation de la clause de non-concurrence par M. Y..., qui ne le conteste pas, ressort démontrée par les annonces qu'il publie dans lesquelles il se déclare cofondateur de la société INTIS au sein de laquelle il occupe la fonction de « director business development » depuis le 5 novembre 2014, dont l'activité commerciale est concurrente de celle de la société 2B Consulting ; qu'en conséquence, et en application des dispositions précitées de la clause de non-concurrence figurant dans le contrat de travail, il sera fait droit à la demande de la société 2B Consulting en paiement d'une pénalité de 106 391,00 euros, calculée sur la base d'une rémunération mensuelle brute moyenne sur les 12 derniers mois de 8 865,99 euros ;

1°) ALORS QUE la clause de non-concurrence comportant deux séries d'interdictions, en retranchant de son analyse celle des deux qui en pratique portait une plus grave atteinte au principe fondamental de libre exercice d'une activité professionnelle, puisqu'elle obligeait le salarié « à ne pas entrer en contact direct ou indirect avec les clients ou prospects de la société en vue de les démarcher pour les ventes de prestations ou de logiciels », la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de ce principe, ensemble l'article L 1121-1 du code du travail ;

2°) ALORS DE MÊME QU'en jugeant que la clause comporte une contrepartie financière proportionnée à la mesure de l'interdiction, sans répondre au moyen d'annulation dénonçant le caractère dérisoire d'une indemnité égale à 30 % de la moyenne mensuelle de la rémunération brute fixe, cependant que la part variable représentait près de la moitié de la rémunération, de sorte que la contrepartie était en réalité limitée à 15 %, tandis que la pénalité de concurrence imposée au salarié était, elle, assise sur la totalité de la rémunération, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du principe fondamental de libre exercice d'une activité professionnelle, ensemble l'article L 1121-1 du code du travail ;

3°) ALORS ENCORE QUE le salarié débiteur de la clause faisait valoir qu'elle était abusive, en ce qu'elle s'étendait à toute la France, alors que l'essentiel de l'activité de l'employeur se concentrait sur l'Ile-de-France ; qu'en négligeant ce moyen, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du principe fondamental de libre exercice d'une activité professionnelle, ensemble l'article L 1121-1 du code du travail ;

4°) ALORS ENFIN subsidiairement QU'une clause d'interdiction de concurrence est d'interprétation stricte ; qu'en jugeant que l'infraction à la clause était démontrée par des annonces dans lesquelles le salarié se déclarait cofondateur d'une société INTIS au sein de laquelle il occupait la fonction de « director business development » et dont l'activité commerciale était concurrente de celle de l'employeur, cependant que la société INTIS pouvait être concurrente de la société 2B Consulting sans pour autant commercialiser les logiciels énumérés par la clause, de sorte que ni l'entrée au service d'une entreprise commercialisant les logiciels limitativement énumérés par la clause, ni le démarchage effectif de clients de l'employeur, actuels ou potentiels, n'étaient démontrés, la cour d'appel a violé le principe fondamental de libre exercice d'une activité professionnelle, ensemble les articles 1147 du code civil et L 1121-1 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 16-20349
Date de la décision : 14/02/2018
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 12 novembre 2015


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 14 fév. 2018, pourvoi n°16-20349


Composition du Tribunal
Président : Mme Goasguen (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Lyon-Caen et Thiriez, SCP Nicolaý, de Lanouvelle et Hannotin

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:16.20349
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