LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Vu la connexité, joint les pourvois n° 16-18.219 à n° 16-18.221 ;
Sur le premier moyen :
Attendu, selon les arrêts attaqués (Lyon, 1er avril 2016), que M. Y... et deux autres salariés de l'ADAPEI de l'Ain, employés au sein de l'IME l'Armaillou à [...] en qualité d'éducateurs techniques spécialisés pour deux d'entre eux et d'éducateur sportif pour le troisième, ont saisi la juridiction prud'homale de demandes de rappel de salaire pour heures supplémentaires, de dommages-intérêts pour résistance abusive ; que le syndicat CFDT santé sociaux de l'Ain a également formé une demande de dommages-intérêts en réparation du préjudice causé à l'intérêt collectif de la profession ;
Attendu que les salariés font grief aux arrêts de les débouter de leurs demandes, alors, selon le moyen :
1°/ que les articles 1 et 3 de l'avenant du 14 mars 2000 à l'accord ARTT établissent une répartition du temps de travail pour les personnels à temps plein ou partiel qui distingue : les heures travaillées auprès des usagers, les heures de préparation et la rédaction des rapports et documents administratifs, et les heures de réunion de synthèse ou de coordination, étant précisé que les heures de pédagogie directe ne peuvent excéder 75 % du temps de travail des personnels assurant des charges d'enseignement général, technique ou d'EPS ; que, pour rejeter la demande en paiement des heures de surveillance pendant les repas et les récréations effectuées par les salariés, en estimant que les salariés n'assumaient pas de charge de pédagogie directe, c'est-à-dire d'enseignement, pendant le temps des repas ou des récréations lors même que ces heures de surveillance constituaient indéniablement des heures travaillées auprès des usagers et devaient donc être prises en compte, la cour d'appel a violé l'avenant du 14 mars 2000 à l'accord ARTT ;
2°/ qu'il appartient au juge de trancher le litige en interprétant lui-même l'accord collectif et en se référant à son texte ; qu'en se référant, pour interpréter l'avenant n° 3 du 14 mars 2000 à l'accord ARTT non à son texte mais à son esprit comme à l'article 9 de l'annexe n° 9 relative à la classification des personnels des établissements de mineurs déficients auditifs et visuels, résultant de l'avenant n° 255 du 19 décembre 1994, la cour d'appel a violé l'avenant du 14 mars 2000 à l'accord ARTT ;
3°/ qu'il incombe au juge de trancher le litige conformément à la règle de droit conventionnelle applicable au litige ; que, pour rejeter la demande en paiement d'heures supplémentaires de pédagogie directe pendant les heures des repas ou des récréations, en faisant grief à l'intéressé de ne pas rapporter la preuve de ce qu'il assumait pendant ces heures une charge d'enseignement lors même que le terme « d'enseignement » ne figure nullement dans le texte de l'accord collectif applicable, la cour d'appel a ajouté une condition à la loi qui n'y figure pas ; qu'en statuant de la sorte, la cour d'appel a violé l'avenant du 14 mars 2000 relatif à l'accord ARTT ;
Mais attendu que l'article 3 de l'avenant n° 3 du 14 mars 2000 à l'accord ARTT applicable aux personnels assurant des charges d'enseignement général, technique ou d'EPS dispose que la durée du travail se décompose en tenant compte des heures travaillées auprès des usagers, des heures de préparation et la rédaction des rapports et documents administratifs, des heures de réunion de synthèse ou de coordination ; qu'en tout état de cause, les heures de pédagogie directe ne peuvent excéder 75 % du temps de travail ; qu'il résulte de ce texte que les heures travaillées auprès des usagers ne sont pas nécessairement des heures de pédagogie directe ;
Et attendu, qu'ayant constaté que les salariés n'assumaient pas une charge d'enseignement durant les périodes de surveillance des repas ou des récréations, la cour d'appel en a exactement déduit que ces périodes de surveillance ne constituaient pas des heures de pédagogie directe et que celles-ci n'ayant pas dépassé 75 % du temps de travail, les demandes de rappel de salaire devaient être rejetées ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Et attendu que le rejet du premier moyen rend sans portée le second pris d'une cassation par voie de conséquence ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE les pourvois ;
Condamne MM. Y..., A..., Z... ainsi que le syndicat CFDT santé sociaux de l'Ain aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze février deux mille dix-huit.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits aux pourvois n°s J 16-18.219 à M 16-18.221 par la SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, avocat aux Conseils, pour MM. Y..., Z..., A... et le syndicat CFDT santé sociaux de l'Ain.
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR débouté les salariés de leurs demande de condamnation de l'association ADAPEI de l'Ain à leur payer des rappels de salaires et les congés payés afférents, ainsi que des dommages et intérêts pour résistance abusive et dilatoire;
AUX MOTIFS QUE selon les articles 1er et 3 de l'avenant n° 3 du 14 mars 2000 à l'accord ARTT, la répartition du temps de travail des personnels à temps plein ou à temps partiel se décompose en tenant compte : . des heures travaillées auprès des usagers, . des heures de préparation et la rédaction des rapports et documents administratifs, des heures de réunion de synthèse ou de coordination, les heures de pédagogie directe ne pouvant excéder 75% du temps de travail des personnels assurant des charges d'enseignement général, technique ou d'EPS; qu'en l'espèce, est en litige la qualification des temps de surveillance pendant les repas et les récréations; que selon Daniel Y..., ces temps, qui sont indéniablement des heures travaillées auprès des usagers, sont aussi des heures de pédagogie directe; qu'en effet, le temps de contact pédagogique ne contient aucune sous-distinction; que les fonctions exercées par le salarié en récréation ou en temps de repas sont des temps de présence pédagogique réelle et directe; qu'il s'agit de déterminer si, au sens de l'avenant n° 3 du 14 mars 2000 à l'accord ARTT, toute heure travaillée auprès des usagers est une heure de pédagogie directe ou si, au contraire la première catégorie de temps est plus large que la seconde; que dans l'esprit des signataires de l'avenant, heures travaillées auprès des usagers et heures de pédagogie directe ne sont pas des notions similaires; que l'article 2 de l'avenant, qui concerne les personnels éducatifs, paramédicaux, d'animation et les moniteurs d'EPS, ne fait aucune référence à des temps de pédagogie directe qui demeurent l'apanage des personnels assurant des charges d'enseignement général, technique ou d'EPS; que lorsque les partenaires sociaux ont entendu assimiler heures travaillées auprès des usagers et heures de pédagogie directe, ils l'ont indiqué explicitement; qu'ainsi, l'article 9 de l'annexe n° 9 relative à la classification des personnels des établissements de mineurs déficients auditifs et visuels, résultant de l'avenant n° 255 du 19 décembre 1994, précise que les périodes de travail en présence effective des élèves (récréations ou intercours, etc) sont imputées sur les heures de pédagogie directe; que l'assimilation à laquelle se livre (le salarié) n'est pas justifiée en droit pour ce qui le concerne; qu'en fait, aucun élément ne permet de tenir pour établi qu'il assumait une charge de pédagogie directe, c'est-à-dire d'enseignement, pendant le temps des repas ou des récréations; que les heures de pédagogie directe (du salarié) n'ayant pas excédé 75% de son temps de travail, sa demande de rappel de salaire est mal fondée; que l'ADAPEI de l'Ain répond à un moyen tiré de la règle de l'égalité de traitement qui n'est pas articulé par (le salarié), raison pour laquelle celui-ci ne démontre pas l'identité de situation des salariés de l'I.M.E l'Armaillou et de ceux de l'établissement George Loiseau de Villereversure , relevant tous deux de l'ADAPEI de l'Ain; que pour tenter de fragiliser la thèse soutenue par son ancien employeur dans le présent litige, (le salarié) se borne à soutenir que ce dernier fait des interprétations variables des dispositions conventionnelles selon les établissements; qu'il suffit de constater ici que la direction de l'I.M.E. L'Armaillou fait une exacte interprétation de l'avenant n° 3 du 14 mars 2000 à l'accord ARTT et que la position divergente attribuée à la direction de l'établissement Georges Loiseau , et à celle de l'I.M.E de [...] que ne relève pas de l'Adapei, reste à l'état d'allégation;
1. ALORS QUE les articles 1 et 3 de l'avenant du 14 mars 2000 à l'accord ARTT établissent une répartition du temps de travail pour les personnels à temps plein ou partiel qui distingue: les heures travaillées auprès des usagers, les heures de préparation et la rédaction des rapports et documents administratifs, et les heures de réunion de synthèse ou de coordination, étant précisé que les heures de pédagogie directe ne peuvent excéder 75% du temps de travail des personnels assurant des charges d'enseignement général, technique ou d'EPS; que, pour rejeter la demande en paiement des heures de surveillance pendant les repas et les récréations effectuées par les salariés, en estimant que les salariés n'assumaient pas de charge de pédagogie directe, c'est-à-dire d'enseignement, pendant le temps des repas ou des récréations lors même que ces heures de surveillance constituaient indéniablement des heures travaillées auprès des usagers et devaient donc être prises en compte, la cour d'appel a violé l'avenant du 14 mars 2000 à l'accord ARTT;
2. ALORS encore QU' il appartient au juge de trancher le litige en interprétant lui-même l'accord collectif et en se référant à son texte; qu'en se référant, pour interpréter l'avenant n° 3 du 14 mars 2000 à l'accord ARTT non à son texte mais à son esprit comme à l'article 9 de l'annexe n° 9 relative à la classification des personnels des établissements de mineurs déficients auditifs et visuels, résultant de l'avenant n° 255 du 19 décembre 1994, la cour d'appel a violé l'avenant du 14 mars 2000 à l'accord ARTT;
3. ALORS surtout QU' il incombe au juge de trancher le litige conformément à la règle de droit conventionnelle applicable au litige ; que, pour rejeter la demande en paiement d'heures supplémentaires de pédagogie directe pendant les heures des repas ou des récréations, en faisant grief à l'intéressé de ne pas rapporter la preuve de ce qu'il assumait pendant ces heures une charge d'enseignement lors même que le terme « d'enseignement » ne figure nullement dans le texte de l'accord collectif applicable, la cour d'appel a ajouté une condition à la loi qui n'y figure pas ; qu'en statuant de la sorte, la cour d'appel a violé l'avenant du 14 mars 2000 relatif à l'accord ARTT.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR débouté le syndicat CFDT Santé sociaux de l'Ain de sa demande de dommages et intérêts en réparation du préjudice porté à l'intérêt collectif de la profession;
AUX MOTIFS QUE l'intervention du Syndicat CFDT santé sociaux de l'Ain est mal fondée; qu'en conséquence le jugement entrepris doit être infirmé dans toutes ses dispositions;
ALORS QUE la cassation qui sera prononcée sur le premier moyen emportera la cassation du chef du dispositif de l'arrêt qui a débouté le syndicat CFDT Santé sociaux de sa demande de dommages et intérêts en réparation du préjudice porté à l'intérêt collectif de la profession, en application de l'article 624 du Code de procédure civile.