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07/02/2018 | FRANCE | N°17-50008

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 07 février 2018, 17-50008


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon les arrêts attaqués, que Mme X..., née le [...]           à Manakar (Madagascar) a obtenu la délivrance d'un certificat de nationalité française en sa qualité de descendante de Z..., né vers [...] à Mahavel (Madagascar), admis à la qualité de citoyen français par jugement du tribunal de première instance de Fianarantsoa (Madagascar) du 15 avril 1946 ; que le ministère public l'a assignée en constatation de son extranéité ;

Sur le moyen unique du pourvoi additionnel

, dirigé contre l'arrêt du 12 mai 2016, qui est recevable, ci-après annexé :

Attendu q...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon les arrêts attaqués, que Mme X..., née le [...]           à Manakar (Madagascar) a obtenu la délivrance d'un certificat de nationalité française en sa qualité de descendante de Z..., né vers [...] à Mahavel (Madagascar), admis à la qualité de citoyen français par jugement du tribunal de première instance de Fianarantsoa (Madagascar) du 15 avril 1946 ; que le ministère public l'a assignée en constatation de son extranéité ;

Sur le moyen unique du pourvoi additionnel, dirigé contre l'arrêt du 12 mai 2016, qui est recevable, ci-après annexé :

Attendu que ce moyen n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Mais sur le quatrième moyen du pourvoi principal :

Vu l'article 30 du code civil ;

Attendu que si, en matière de nationalité, la charge de la preuve incombe à celui qui conteste la qualité de Français d'une personne titulaire d'un certificat de nationalité française délivré conformément aux règles en vigueur, il en est autrement lorsque, ayant été délivré de manière erronée, le certificat a perdu toute force probante ;

Attendu que, pour rejeter la demande, l'arrêt retient que le certificat de nationalité a été délivré conformément à la loi et que le ministère public échoue à établir, ainsi qu'il lui appartient, que l'intéressée ne remplit pas les conditions d'accession à la nationalité française ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses propres constatations que le jugement du 15 avril 1946 admettant l'ascendant de Mme X... à la nationalité française ne permettait pas, à lui seul, au père de cette dernière de se prévaloir de cette nationalité, dès lors que Madagascar avait accédé à l'indépendance le 26 juin 1960 et que la procédure de déclaration était applicable à ses parents dont la nationalité n'avait pas été maintenue de plein droit, ce dont il se déduisait que le certificat de nationalité avait été délivré à tort, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve et violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :

REJETTE le pourvoi dirigé contre l'arrêt du 12 mai 2016 ;

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il rejette la fin de non-recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée, l'arrêt rendu le 8 décembre 2016, entre les parties, par la cour d'appel de Douai ; remet, en conséquence, sauf sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris ;

Condamne Mme X... aux dépens ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du sept février deux mille dix-huit.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

.

Moyens produits AU POURVOI PRINCIPAL par le procureur général près la cour d'appel de Douai.

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir infirmé le jugement et débouté le ministère public de ses demandes ;

AUX MOTIFS QUE : "Même si M. Z...          a été admis à la qualité de citoyen français par jugement du 15 avril 1946, ainsi que son épouse et ses filles dont Lygie Z...         , mère de l'appelante et épouse de Jules X..., père de cette dernière, la nationalité des parents de celle-ci doit être examinée au regard des dispositions de la loi du 28 juillet 19602, qui a établi une distinction entre les personnes originaires du territoire de la République française tel qu'il restait constitué le 28 juillet 1960, auxquelles la nationalité française devait être maintenue de plein droit, et les autres dont la nationalité française ne pouvait être conservée que selon la procédure de déclaration dite de reconnaissance de la nationalité française, soumise à certaines conditions dont la plus importante était le transfert du domicile [...] .

Madagascar a accédé à l'indépendance le 26 juin 1960, de sorte que la procédure de déclaration était applicable aux parents de Mme X... dont la nationalité n'était pas maintenue de plein droit.

C'est donc à juste titre que le jugement soumis à cette cour constate que le jugement du 15 avril 1946 ne permettait pas à lui seul, à son père de se prévaloir de la nationalité française.

Il constate au surplus que Mme X... ne rapporte pas la preuve que son père avait éventuellement transféré son domicile sur le territoire français et qu'il avait souscrit une déclaration de reconnaissance de la nationalité française.

Cependant l'article 30 du code de la nationalité dispose que la charge de la preuve, en matière de nationalité française, incombe à celui dont la nationalité est en cause. Toutefois, cette charge incombe à celui qui conteste la qualité de Français à un individu titulaire d'un certificat de nationalité française délivré conformément aux articles 31 et suivants du même code.

Or le certificat de nationalité délivré le 3 janvier 2003, l'a été conformément à la loi. Dès lors c'est au ministère public qu'il appartient d'établir que l'intéressée ne remplit pas les conditions d'accession à la nationalité française, ce qu'il ne fait pas.

Il convient en conséquence d'infirmer le jugement et de débouter le ministère public de ses demandes."

ALORS QUE la cassation entraîne l'annulation par voie de conséquence de toute décision qui est la suite du jugement cassé ou qui s 'y rattache par un lien de dépendance nécessaire ; que l'arrêt rendu par la cour d'appel de Douai, le 8 décembre 2016, statuant au fond sur l'appel interjeté par Andréa X..., est la suite du précédent arrêt rendu par cette même cour, le 12 mai 2016, qui avait confirmé l'ordonnance du 19 janvier 2016 du conseiller de la mise en état en ce qu'elle a considéré que les conclusions de l'appelante, transmises par voie électronique le 4 août 2015 à Mme la procureure générale, ont été régulièrement notifiées au ministère public ; que la cassation de l'arrêt du 12 mai 2016 entraînera donc l'annulation par voie de conséquence de celui du 8 décembre 2016, en application de l'article 625, alinéa 2, du code de procédure civile.

ALORS QUE le jugement doit être motivé ; que pour infirmer le jugement, la cour d 'appel s'est bornée à énoncer que "le certificat de nationalité délivré le 3 janvier 2003, l'a été conformément à la loi" ; qu'une telle énonciation générale et imprécise ne constitue pas une motivation permettant à la Cour de cassation d'exercer son contrôle ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile.

ALORS QUE si, en application de l'article 30 du code civil, la charge de la preuve incombe à celui qui conteste la qualité de Français d'un individu titulaire d'un certificat de nationalité française délivré conformément aux règles en vigueur, il en est autrement lorsque, ayant été délivré de manière erronée, le certificat a perdu toute probante ; que la cour d'appel a considéré que "c'est donc à juste titre que le jugement soumis à celle cour constate que le jugement du 15 avril 1946 ne permettait pas à lui seul, à son père de se prévaloir de la nationalité française.
Il constate au surplus que Mme X... ne rapporte pas la preuve que son père avait éventuellement transféré son domicile sur le territoire français et qu'il avait souscrit une déclaration de reconnaissance de la nationalité française" ; qu'en retenant ensuite que c'est au ministère public qu'il appartient d'établir que l'intéressée ne remplit pas les conditions d'accession à la nationalité française, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences de ses propres constatations et a inversé la charge de la preuve, violant ainsi l'article 30 du code civil ;

ALORS QUE le certificat de nationalité française a été délivré à Andréa X... sur le fondement de l'article 17 du code de la nationalité française dans sa rédaction issue de la loi du 9 janvier 1973, lequel dispose qu' "est français l'enfant, légitime ou naturel, dont l'un des parents au moins est français" ; que la cour d 'appel a considéré que "c'est donc à juste titre que le jugement soumis à cette cour constate que le jugement du 15 avril 1946 ne permettait pas à lui seul, à son père de se prévaloir de la nationalité française.
Il constate au surplus que Mme X... ne rapporte pas la preuve que son père avait éventuellement transféré son domicile sur le territoire français et qu'il avait souscrit une déclaration de reconnaissance de la nationalité française" ; qu'en affirmant ensuite que "le certificat de nationalité délivré le 3 janvier 2003, l'a été conformément à la loi", la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences de ses propres constatations et a violé l'article 17 du code de la nationalité française dans sa rédaction issue de la loi du 9 janvier 1973. Moyen produit AU POURVOI ADDITIONNEL par le procureur général près la cour d'appel de Douai.

Sur un moyen unique de cassation, tiré de la violation des articles 748-1 et suivants et 930-1 du code de procédure civile, ensemble l'article 2 de l'arrêté du 30 mars 2011 modifié, d'un défaut de motifs et d'un manque de base légale, il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir dit que les transmissions des conclusions de l'avocat de l'appelante par la voie du RPVA au ministère public constituait une notification régulière,

Aux motifs que : "l'article 748-1 du code de procédure civile dispose que "Les envois, remises et notifications des actes de procédure, des pièces, avis, avertissements ou convocations, des rapports, des procès-verbaux ainsi que des copies et expéditions revêtues de la formule exécutoire des décisions juridictionnelles peuvent être effectués par voie électronique dans les conditions et selon les modalités fixées par le présent titre, sans préjudice des dispositions spéciales imposant l'usage de ce mode de communication."

L'article 748-2 du même code dispose que "Le destinataire des envois, remises et notifications mentionnés à l'article 748-1 doit consentir expressément à l'utilisation de la voie électronique, à moins que des dispositions spéciales n'imposent l'usage de ce mode de communication.
Vaut consentement au sens de l'alinéa précédent l'adhésion par un auxiliaire de justice, assistant ou représentant une partie, à un réseau de communication électronique tel que défini par un arrêté pris en application de l'article 748-6. »

Selon l'article 908 du code de procédure civile "à peine de caducité de la déclaration d'appel, relevée d'office, l'appelant dispose d'un délai de trois mois à compter de la déclaration d'appel pour conclure".

Selon l'article 911 du même code "sous les sanctions prévues aux articles 908 à 910, les conclusions sont notifiées aux avocats des parties dans le délai de leur remise au greffe de la cour. Sous les mêmes sanctions, elles sont signifiées dans le mois suivant l'expiration de ce délai aux parties qui n'ont pas constitué avocat ... »

L'article 930-1 du code de procédure civile dispose: « A peine d'irrecevabilité relevée d'office, les actes de procédure sont remis à la juridiction par voie électronique.

Lorsqu'un acte ne peut être transmis par voie électronique pour une cause étrangère à celui qui l'accomplit, il est établi sur support papier et remis au greffe. En ce cas, la déclaration d'appel est remise au greffe en autant d'exemplaires qu'il y a de parties destinataires, plus deux. La remise est constatée par la mention de sa date et le visa du greffier sur chaque exemplaire, dont l'un est immédiatement restitué.

Les avis, avertissements ou convocations sont remis aux (décret n° 2012-634 du 3 mai 2012, art 19-1o-a) avocats des parties par voie électronique, sauf impossibilité pour cause étrangère à l'expéditeur.

Un arrêté du garde des sceaux définit les modalités des échanges par voie électronique. »

L'article 2 de l'arrêté du 30 mars 2011, modifié par l'arrêté du 18 avril 2012, relatif à la communication par voie électronique dans les procédures avec représentation obligatoire devant les cours d'appel prévoit « peuvent être effectués par voie électronique, entre auxiliaires de justice représentant une partie ou entre un tel auxiliaire et la juridiction, les envois et remises des déclarations d'appel le des actes de constitution, avec les pièces qui leur sont associées, (et depuis 2012) ainsi que les conclusions faites en application des articles 901, 903, 908, 909, 910, 911, 960 et 961 du code de procédure civile»

Le même article 2 de cet arrêté modifié par l'arrêté du 20 décembre 2012 dispose que « sont également effectués par voie électronique les envois et remises au greffe de la cour des déclarations d'appel et des conclusions du ministère public en application de l'article 930-1 du code de procédure civile. »

Ces actes sont remis au greffe de la cour d'appel par la voie électronique au moyen d'un message électronique acheminé au sein du réseau privé virtuel justice depuis la boîte électronique dédiée du ministère public, la réception de ce message génère un avis de réception à destination de son expéditeur. »

L'article 1er de l'arrêté précité du 20 décembre 2012 précise que « le présent arrêté s'applique aux actes effectués par voie électronique par les avocats et le ministère public dans les procédures avec représentation obligatoire devant les cours d'appel. » ; il en résulte que le ministère public, partie dispensée du ministère d'avocat est désormais intégré dans le fonctionnement de la communication par voie électronique dans les procédures avec représentation obligatoire devant les cours d'appel ;

Le conseiller de la mise en état a exactement retenu qu'il doit être déduit de la généralité de l'article 1er précité que « les actes effectués par voie électronique par les avocats et le ministère public », s'ils comprennent explicitement les déclarations d'appel et les conclusions du ministère public en application de l'article 930-1 du code de procédure civile, doivent également inclure les transmissions des conclusions des avocats au ministère public, rendues possible par la mise en place d'une boîte électronique dédiée au ministère public, mais, doit-il être ajouté, à condition que le ministère public en ait effectivement la disposition ;

En l'espèce, Mme X... a interjeté appelle 5 mai 2015 et disposait, sans tenir compte de la prolongation du délai issue de la décision du bureau d'aide juridictionnelle du 27 juillet 2015 lui accordant le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale, d'un délai expirant le 5 août 2015 pour déposer ses conclusions d'appelant ; elle a déposé ses conclusions le 4 août 2015 et les a notifiées au ministère public tant par RPVA que par une remise directe ; or Mme la procureure générale près la cour d'appel de DOUAI a utilise une adresse RPVA puisqu'elle a elle-même notifié ses conclusions d'incident et ses conclusions de déféré par RPVA à l'avocat de Mme X... et au greffe le 10 décembre 2015 et 2 février 2016 ; le parquet général près la cour d'appel de Douai est donc bien relié au RPVA et il est indifférent à cet égard qu'il ne figure pas dans le logiciel WINCI en tant que partie mais en qualité d'autorité administrative ; le délai imparti par l'article 908 du code de procédure civile a été respecté par Mme X....
De plus, la communication par voie électronique s'impose en application des articles 748-1, 748-2 et 930-1 précités ; il ne peut donc lui être fait grief d'avoir utilisé ce mode de communication à l'égard du ministère public alors que ce dernier a bien accès au RPVA.
Alors que, par application de l'article 930-1 du code de procédure civile, la communication électronique est obligatoire pour certains actes tels que les actes de procédure, c'est à dire ceux qui émanent des parties et sont destinés à la juridiction ainsi que les actes du greffe à l'intention des parties ; qu'en revanche les autres actes accomplis au titre de l'instance d'appel relèvent du régime de la communication électronique facultative, conformément au droit commun des articles 748-1 et suivants du code de procédure civile ; que ces dispositions concernent les actes que les parties échangent entre elles, tels que la notification des conclusions et l'acte de constitution ;
qu'il s'ensuit que la notification au ministère public imposée par la loi aux parties, ne peut être valablement effectuée par un mode non prévu par les textes, ce dont il se déduit que la cour d'appel ne pouvait valablement statuer dans un litige portant sur une matière dans laquelle le ministère public est partie obligatoire, sans s'assurer de ce qu'il avait reçu notification des conclusions des parties selon les formes légales, et avait donc été mis en demeure d'y répondre en statuant comme elle l'a fait la cour d'appel a violé les dispositions susvisées.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 17-50008
Date de la décision : 07/02/2018
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Douai, 08 décembre 2016


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 07 fév. 2018, pourvoi n°17-50008


Composition du Tribunal
Président : Mme Batut (président)
Avocat(s) : SCP Rousseau et Tapie

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:17.50008
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