La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

07/02/2018 | FRANCE | N°16-23123

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 07 février 2018, 16-23123


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Douai, 30 juin 2016), qu'engagée à compter du 5 avril 2005 par la société Pepe Jeans France en qualité de vendeuse suivant contrat à durée déterminée de trois mois, Mme Y... a ensuite été nommée pour une durée indéterminée aux fonctions de première vendeuse puis responsable de magasin ; qu'après avoir signé une rupture conventionnelle le 7 août 2013, elle s'est rétractée et a été réintégrée ; qu'elle a été placée en arrêt maladie

pour un syndrome anxio-dépressif à compter du 26 septembre 2013 ; qu'estimant être victime ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Douai, 30 juin 2016), qu'engagée à compter du 5 avril 2005 par la société Pepe Jeans France en qualité de vendeuse suivant contrat à durée déterminée de trois mois, Mme Y... a ensuite été nommée pour une durée indéterminée aux fonctions de première vendeuse puis responsable de magasin ; qu'après avoir signé une rupture conventionnelle le 7 août 2013, elle s'est rétractée et a été réintégrée ; qu'elle a été placée en arrêt maladie pour un syndrome anxio-dépressif à compter du 26 septembre 2013 ; qu'estimant être victime de harcèlement moral, elle a saisi la juridiction prud'homale le 27 novembre 2013 en résiliation judiciaire de son contrat de travail ainsi qu'en paiement de diverses sommes et indemnités ;

Attendu que la salariée fait grief à l'arrêt de la débouter de sa demande tendant à voir constater que l'employeur n'a pas exécuté le contrat de travail de manière loyale, dire que ses agissements sont constitutifs de harcèlement moral, prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l'employeur, de rejeter en conséquence ses diverses demandes, alors, selon le moyen :

1°/ qu'aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ; que lorsque survient un litige relatif à l'application des articles L. 1152-1 à L. 1152-3 et L. 1153-1 à L. 1153-4, le candidat à un emploi, à un stage ou à une période de formation en entreprise ou le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'un harcèlement ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que la procédure de rupture conventionnelle n'avait pas été respectée, que la salariée s'était vue restreindre ses attributions par le biais d'instructions vexatoires et humiliantes et que les parties s'accordaient sur la réalité de la créance de Mme Y... au titre de la commission sur chiffre d'affaires du mois d'août, le tout ayant eu des conséquences néfastes sur sa santé ; qu'en décidant néanmoins que la salariée devait être déboutée de ses demandes au titre du harcèlement moral et au titre de la résiliation judiciaire de son contrat de travail, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations en violation les articles L. 1152-1, L. 1154-1, L. 1231-1 du code du travail et 1184 du code civil ;

2°/ que lorsque le salarié établit la matérialité de faits précis et concordants constituant selon lui un harcèlement, il appartient au juge d'apprécier si ces éléments pris dans leur ensemble permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral ; qu'en l'espèce, pour débouter la salariée de ses demandes, la cour d'appel a analysé de façon indépendante les divers éléments que la salariée a versés aux débats ; qu'elle a en effet d'abord examiné les circonstances entourant la rupture conventionnelle puis la dégradation des conditions de travail imposée à la salariée et enfin les éléments concernant la commission sur chiffre d'affaires ; qu'en statuant comme elle l'a fait, en appréciant séparément les éléments permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral, la cour d'appel a violé les articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail ;

Mais attendu que le moyen ne tend qu'à contester l'appréciation souveraine par la cour d'appel des éléments de preuve et de fait dont elle a, sans méconnaître les règles spécifiques de preuve et exerçant les pouvoirs qu'elle tient de l'article L. 1154-1 du code du travail, déduit que la salariée n'établissait pas de faits qui permettaient de présumer l'existence d'un harcèlement ; que le moyen, inopérant en sa seconde branche, n'est pas fondé pour le surplus ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne Mme Y... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du sept février deux mille dix-huit.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, avocat aux Conseils, pour Mme Y....

Le moyen fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir débouté la salariée de sa demande tendant à voir constater que l'employeur n'a pas exécuté le contrat de travail de manière loyale, que ses agissements sont constitutifs de harcèlement moral, prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l'employeur, rejeté en conséquence ses demandes tendant au paiement des indemnités de préavis et licenciement et congés payés afférents, indemnité pour congés non pris, dommages et intérêts pour licenciement non causé, et préjudice moral et financier, et remise des documents sociaux et dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile et dit que chaque partie supportera ses propres dépens ;

AUX MOTIFS QUE I) Sur les griefs invoqués à l'appui de la demande de résiliation judiciaire du contrat de travail et au titre du harcèlement moral et sur les demandes financières subséquentes ; qu'en l'espèce, Mme Y... dénonce divers agissements et manquements imputables à son employeur qui seraient révélateurs, à la fois, d'un harcèlement moral et constitutifs de motifs propres à justifier la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de la SARL Pepe Jeans France qu'elle dénonce, ainsi : - les circonstances dans lesquelles son employeur lui a proposé une rupture conventionnelle ; - le comportement de la société SARL Pepe Jeans France tendant à restreindre ses fonctions et à l'humilier ; - la privation d'une partie de sa rémunération ; qu'en application des dispositions des articles 1184 du code civil et L 1231-1 du code du travail, le salarié est fondé à obtenir la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de son employeur si ce dernier ne respecte pas ses obligations contractuelles ; qu'il appartient au salarié de prouver la réalité des manquements invoqués, lesquels doivent revêtir une gravité suffisante pour empêcher la poursuite de la relation de travail ; que le juge dispose en la matière d'un pouvoir souverain d'appréciation et doit, pour ce faire, se placer au jour où il prend sa décision ; que le harcèlement moral défini, en vertu de l'article 1152-1 du code du travail, comme des agissements répétés qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail du salarié susceptibles de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel, peut justifier la résiliation judiciaire du contrat outre l'octroi de dommages-intérêts distincts ; qu'il incombe, au préalable, au salarié d'établir la matérialité de faits précis, concordants et objectifs permettant de présumer l'existence d'un harcèlement moral. Le juge apprécie alors si ces éléments, pris dans leur ensemble, permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral ; que dans l'affirmative, l'employeur doit prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs à tout harcèlement ; 1) que sur les circonstances entourant la rupture conventionnelle proposée à Mme Y... ; que la salariée expose qu'à son retour de congés, soit le 7 août 2013, la direction de l'entreprise l'a informée de son souhait de se séparer d'elle et lui a soumis un formulaire de rupture conventionnelle de son contrat de travail antidaté et mentionnant des dates d'entretiens fictives ; qu'elle estime que l'attitude de son employeur constitue un manquement grave à ses obligations contractuelles et qu'elle participe d'un procédé tendant à faire pression sur elle pour l'évincer de l'entreprise ; que cette présentation des faits est contestée par la société SARL Pepe Jeans France qui affirme que des entretiens ont bien eu lieu et qu'un accord était intervenu quant à une cessation de la relation de travail au 31 août 2013, la salariée ne donnant plus satisfaction au regard de son comportement à l'égard de certains de ses collègues et des clients ; que la cour constate, en premier lieu, qu'elle ne produit pas l'original de la rupture conventionnelle litigieuse ; que l'analyse des pièces produites par Mme Y... (copie de mails entre la salariée et Mme Aurélie B..., Directrice des ressources humaines – pièce 7, courrier de Mme Y... daté du 9 août 2013 – pièce 8, constat d'huissier en date du 19 novembre 2015) permet toutefois d'établir, d'une part, qu'un formulaire de rupture conventionnelle a été adressé à la salariée le 7 août 2013, lequel était déjà pré-rempli et ne comportait aucune signature, d'autre part, que ce document a été retourné par mail par Mme Y... le 8 août 2013 après qu'elle y ait apposé sa signature ; que la SARL Pepe Jeans, à propos de ces différences omissions et anomalies, objecte qu'il était parfaitement possible à la salariée de modifier le formulaire litigieux depuis son poste informatique ; que force est néanmoins de constater que l'intimée, face aux documents présentés par la partie adverse, se contente de dénégations et n'apporte aucun élément probant de nature à remettre en cause leur contenu ni à reconsidérer le témoignage de Mme Audrey C..., (retails manager de l'époque), laquelle confirme qu'aucun entretien n'a été organisé dans le cadre de la rupture conventionnelle de Mme Y... (pièce 16) ; qu'il était pourtant loisible à l'employeur de justifier de la réalité des entretiens réalisés préalablement à la rupture par la production des lettres de convocation, note de frais pour le déplacement de la salariée au siège de la société, d'une attestation du personnel ayant procédé aux entretiens ; que ces premières constatations suffisent à établir la non-conformité des mentions figurant sur le formulaire de rupture conventionnelle avec la réalité de la situation ; que toutefois, si les circonstances d'établissement de l'acte de rupture conventionnelle trahissent le souhait de la SARL Pepe Jeans de se séparer rapidement de son employée, elles ne suffisent pas à démontrer une volonté chez l'employeur de faire pression sur Mme Y... pour l'inciter à quitter son poste ; qu'en effet, la société joint divers témoignages établissant qu'il existait une mauvaise ambiance au sein du magasin géré par l'appelante, ce qui l'a conduit à discuter avec la salariée de la cessation de la relation de travail ; qu'à ce titre, il ne résulte pas de la lecture du courrier de dénonciation en date du 9 août 2013, rédigé par l'appelante, que celle-ci ait initialement émis des objections sur le principe d'une rupture amiable ; qu'en effet, l'intéressée fait état de pourparlers dans cette correspondance (« Vous avez argué chez Pepe Jeans d'une générosité sans équivalent ») et indique clairement, refuser ladite rupture en raison du caractère insuffisant de la proposition financière de son employeur (Pièce 8 appelante) ; qu'en outre, la cour observe que Mme Y... après avoir accepté ladite rupture, s'est rétractée, et a pu réintégrer son poste ; qu'en conséquence, s'il existe un manquement de la SARL Pepe Jeans, lié au non-respect de la procédure de rupture conventionnelle, celui-ci n'a pas eu d'incidence sur le sort du contrat de travail et la poursuite de la relation contractuelle ; que ce grief ne saurait donc justifier la résiliation judiciaire du contrat de travail ou caractériser un comportement constitutif de pression sur la salariée ; 2) que s'agissant de la dégradation des conditions de travail imposée à la salariée ; que Mme Y... soutient que la société Pepe Jean l'a soumise à des conditions de travail insupportables ainsi qu'à des procédures vexatoires, en réduisant ses attributions ; que la SARL Pepe jeans conteste les éléments avancés par la partie adverse et affirme n'avoir jamais donné les directives évoquées par la partie appelante ; qu'elle soutient que la salariée s'est constituée des preuves dans la perspectives de la procédure prud'homale et souligne que les faits de harcèlement moral allégués n'ont pas été évoqués en première instance ; que pour justifier de ses dires, la salariée produit notamment : - un mail daté du 17 septembre 2013, adressé à une certaine Lily D... travaillant à Pepe Jeans (sans autre indication) dans laquelle elle mentionne « Audrey m'a appelée hier de ses vacances américaines un peu avant la fermeture pour me dire que Philippe lui avait demandé de me dire que dorénavant je n'avais plus droit de toucher la caisse de faire des encaissements, d'aller à la banque pour y déposer la recette de la veille, que je ne devais plus détenir les clefs du magasin » ; - Un autre email daté du 25 septembre et non horodaté, adressé au même destinataire, dans laquelle elle évoque à nouveau, le contenu de consignes qui lui ont été données en précisant : « je n'y comprends plus rien, on me dit une chose et dans les faits rien ne se passe et je ne sais toujours pas ce qu'il va advenir de moi et j'ai la triste impression que l'on veut me mettre la pression pour que je démissionne »
« je ne sais vraiment pas quoi penser et me trouve dans un situation délicate comme tu peux t'en douter... » ; - une copie de mail rédigé le 25 septembre 2013 à 16h39 à l'attention de Mme B... (directrice des ressources humaines) dont l'envoi effectif au destinataire ne peut être établi et dans lequel elle fait état de ces nouvelles directives sans autres observations ; - une attestation émanant de Mme C... établie le 8 juillet 2014 confirmant les instructions verbales données ; - une attestation de son conjoint, M. Arnaud E... faisant état de la mise à exécution des directives par l'employeur au 27 septembre et décrivant l'état psychologique de sa compagne (pièce n°11) ; - des pièces médicales dont un arrêt de travail initial du 26 septembre 2013 au 25 octobre 2013, ainsi que plusieurs avis de prolongation de cet arrêt, le dernier allant jusqu'au 14 mars 2014 et faisant tous état d'un syndrome anxio dépressif liés à des difficultés processionnelles ; - une attestation de suivi psychologique ; que l'analyse de ces pièces permet de relever que les instructions vexatoires et humiliantes évoquées par la salariée auraient été données verbalement, sans jamais être confirmées par écrit, ce, dans le cadre d'une seule et unique conversation ; qu'elles auraient été transmises de façon indirecte par Mme C..., laquelle n'est pas la responsable des ressources humaines au sein de l'entreprise ; qu'il convient de souligner que malgré l'impact que peut avoir de telles consignes en ce qu'elles restreignent considérablement les attributions de la salariée, la partie appelante ne démontre pas avoir alors réagi en sollicitant des explications à ce sujet auprès de sa direction, notamment pour s'assurer de leur réalité ; qu'en tout état de cause, les consignes portées à la connaissance de Mme Y... n'ont manifestement pas été suivies d'une mise en application effective puisque la veille de la suspension de son contrat de travail pour maladie, intervenue à compter du 26 septembre, Mme Y... indiquait dans un des courriels cités, être étonnée « que dans les faits rien ne passe » ; que cet élément est confirmé par le témoignage du conjoint de l'appelante lequel évoque une mise en application des directives vexatoires à compter du 27 septembre, soit à une époque où la salariée était en arrêt, ce que n'ignorait pas l'employeur ; qu'il s'ensuit que le comportement reproché, par ailleurs isolé, en ce qu'il résulterait de propos tenus de façon indirecte, dont le contenu n'a pu être vérifié, en ce qu'il n'a pas été accompagné ou suivi d'actes concrets de nature à porter atteinte aux droits de la salariée ou à ses conditions de travail, ne saurait caractériser les faits de harcèlement moral tels que décrits ni justifier la résiliation judiciaire du contrat de travail ; 3) que sur la commission sur chiffre d'affaires ; que Mme Y... fait enfin valoir que sa prime sur chiffre d'affaires pour le mois d'août 2013 aurait été réduite ; qu'elle soutient que par cette pratique, l'employeur a voulu la priver de sa rémunération de responsable ; qu'elle précise toutefois que le conseil de prud'hommes a remédié à cette irrégularité en condamnant la partie adverse à lui verser la somme de 49,43 euros qu'elle estime satisfactoire ; que la SARL Pepe Jeans France , soutient que le défaut de versement de l'intégralité de la prime est lié à une erreur et non à une volonté de léser la salariée ; qu'elle rappelle qu'elle a rectifié cette erreur qui porte sur une petite somme et ne saurait donc justifier la résiliation du contrat de travail ; qu'en l'espèce, les parties s'accordent sur la réalité de la créance de Mme Y... au titre de la commission sur chiffre d'affaires du mois d'août et sur son caractère modique voire « anecdotique » ; que ce constat, associé à l'absence de réclamation antérieure de la part de la salariée avant la saisine de la juridiction prud'homale, permet de conclure que ce défaut de paiement dont le caractère volontaire n'est pas établi, ne saurait justifier la résiliation du contrat de travail ni étayer les accusations portées sur le fondement du harcèlement moral qui serait antérieur et contemporain aux premiers arrêts de travail ; que l'ensemble de ces éléments permet de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté la salariée de l'intégralité de ses demandes à l'exception de celle relative au rappel sur commission sur chiffre d'affaires, et de le compléter, au vu des prétention nouvelles formées devant la cour au titre du harcèlement moral, en déboutant la partie appelante de ses prétentions de ce chef.

ET AUX MOTIFS ÉVENTUELLEMENT ADOPTES QUE les articles 1134 et 1184 du code civil ; que les articles 1315 du code civil et 6 et 9 du code de procédure civile ; que le salarié qui reproche à son employeur des manquements à ses obligations peut demander au conseil de prud'hommes la résiliation de son contrat de travail ; que si les juges estiment que les manquements le justifient le contrat de travail est résilié ; et qu'à défaut la relation contractuelle se poursuit ; qu'il appartient aux juges d'apprécier la gravité des manquements justifiant la rupture de la relation de travail, et ce, à la date de leur décision ; qu'en l'espèce, Madame Myriam Y... allègue que la société SARL Pepe Jeans France a manqué gravement à ses obligations contractuelles et qu'en conséquence ces manquements fondent la demande de la salariée de faire dire par les juges la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts exclusifs de l'employeur avec toutes les conséquences de droit qui en découlent et ce, à la date du présent jugement ; que Mme Myriam Y... argue que la société SARL Pepe Jean F... après avoir tenté de conclure en date du 7 août 2013 une rupture conventionnelle du contrat de travail les liant, a failli aux dispositions légales en datant ladite rupture conventionnelle au 24 juillet 2013, date à laquelle la salariée était en poste au sein du [...]               et qu'elle n'a donc pas pu se présenter au siège de l'entreprise comme l'indique ladite rupture conventionnelle ; que pour autant, Mme Y... précise qu'elle n'a jamais fait part de son souhait de quitter l'entreprise qui l'emploie ; et que la société SARL Pepe Jeans France n'a pas organisé d'entreprise préalable à la rupture conventionnelle pourtant prévue à la procédure de rupture et comme l'atteste Mme Audrey C..., alors salariée de l'entreprise précisant qu'elle a « eu un rôle de messager » et que après l'inventaire effectué les 6 et 7 août 2013 elle a « dû proposer la fameuse rupture conventionnelle à Myriam sans même avoir le droit de lui donner un motif » ; par ailleurs, Mme C... atteste également avoir reçu par téléphone et pendant ses congés du 13 au 30 septembre 2013 des directives de la direction afin de réduire les attributions de Mme Y... concernant la caisse, l'ordinateur, les clefs de la boutique et les remises en banque ; de même, Mme C... atteste également avoir demandé à une collaboratrice de fouiller les affaires personnelles de Mme Y... lors des entrées et sorties de celle-ci du magasin ; que les échanges de mail entre la salariée et sa hiérarchie font état d'un relationnel difficile entre les membres de l'équipe employée au magasin ; qu'en réplique, la société SARL Pepe Jeans France  rétorque que sur la rupture conventionnelle deux entretiens préalables se sont tenus les 15 et 24 juillet 2013 comme l'indique le document CERFA établi et signé par les parties ; que Mme Y... a fait valoir son droit de rétractation par courrier du 9 août 2013 adressé au siège parisien de l'entreprise ; et qu'à la demande de la salariée l'employeur a procédé à sa réintégration ; que concernant la pose de congés payés, la société SARL Pepe Jeans France                  indique que par mail du 28 août 2013 et suite à l'annulation de la rupture conventionnelle Mme Audrey C... a informé Mme Myriam Y... « suite à ta lettre tu trouveras ci-joint ton planning de septembre » ; que par la suite la salariée a été placée en arrêt de travail jusqu'au 25 septembre 2013 ; que rien ne démontre que Mme Myriam Y... se soit vue obliger de prendre ses congés par sa hiérarchie ; qu'enfin et concernant les difficultés que dit avoir éprouvées Mme Y... dans ses relations professionnelles et en particulier avec sa hiérarchie, la salariée fait valoir l'attestation établie par son conjoint ainsi qu'un mail du 25 septembre faisant allusion à une conversation téléphonique du même jour et dans lequel Mme Y... indique avoir « pris note des nouvelles directives à appliquer... » ; que rien ne vient confirmer ses dires ; que ces seuls éléments ne démontrent pas de manquements graves ; que les juges constatent qu'au vu de l'ensemble des pièces produites au dossier Mme Myriam Y... n'apporte aucun élément probant à l'appui de ses allégations ; que les manquements graves reprochés par la demanderesse à la société SARL Pepe Jeans France ne sont pas avérés et que le contrat de travail doit se poursuivre entre les parties ; qu'en conséquence, le bureau de jugement dit et juge que Mme Myriam Y... est mal fondée en sa demande de dire la résiliation judiciaire de son contrat de travail et la déboute ; que déboute Mme Myriam Y... sur l'ensemble des conséquences de droit qui en découlent, en ce l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, l'indemnité compensatrice de préavis et congés payés afférents, l'indemnité légale de licenciement, l'indemnité pour le reliquat de congés payés ainsi que sur les dommages-intérêts pour préjudice moral et préjudice financier ;

ALORS QU'aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ; que lorsque survient un litige relatif à l'application des articles L 1152-1 à L 1152-3 et L 1153-1 à L 1153-4, le candidat à un emploi, à un stage ou à une période de formation en entreprise ou le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'un harcèlement ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que la procédure de rupture conventionnelle n'avait pas été respectée, que la salariée s'était vue restreindre ses attributions par le biais d'instructions vexatoires et humiliantes et que les parties s'accordaient sur la réalité de la créance de Mme Y... au titre de la commission sur chiffre d'affaires du mois d'août, le tout ayant eu des conséquences néfastes sur sa santé ; qu'en décidant néanmoins que la salariée devait être déboutée de ses demandes au titre du harcèlement moral et au titre de la résiliation judiciaire de son contrat de travail, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations en violation les articles L 1152-1, L 1154-1, L 1231-1 du code du travail et 1184 du code civil ;

ALORS QUE lorsque le salarié établit la matérialité de faits précis et concordants constituant selon lui un harcèlement, il appartient au juge d'apprécier si ces éléments pris dans leur ensemble permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral ; qu'en l'espèce, pour débouter la salariée de ses demandes, la cour d'appel a analysé de façon indépendante les divers éléments que la salariée a versés aux débats ; qu'elle a en effet d'abord examiné les circonstances entourant la rupture conventionnelle puis la dégradation des conditions de travail imposée à la salariée et enfin les éléments concernant la commission sur chiffre d'affaires ; qu'en statuant comme elle l'a fait, en appréciant séparément les éléments permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral, la cour d'appel a violé les articles L 1152-1 et L 1154-1 du code du travail ;


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 16-23123
Date de la décision : 07/02/2018
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Douai, 30 juin 2016


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 07 fév. 2018, pourvoi n°16-23123


Composition du Tribunal
Président : M. Huglo (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, SCP Thouvenin, Coudray et Grévy

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:16.23123
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award