LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nîmes, 24 novembre 2016), que, le 23 septembre 2011, MM. X... et Y... ont pris à bail une maison d'habitation dont M. et Mme Z... sont devenus propriétaires le 15 février 2013 ; que, se plaignant du caractère non décent de leur logement, les preneurs, après avoir restitué les lieux, le 22 décembre 2014, ont assigné les bailleurs en indemnisation de leurs préjudices ;
Sur le moyen unique :
Vu l'article 1719 du code civil ;
Attendu que le bailleur est obligé, par la nature du contrat, et sans qu'il soit besoin d'aucune stipulation particulière, de délivrer au preneur la chose louée et, s'il s'agit de son habitation principale, un logement décent ;
Attendu que, pour rejeter la demande, l'arrêt relève que le, 21 janvier 2014, un expert a identifié plusieurs désordres et indiqué les travaux propres à y remédier, que, le 12 février 2014, un diagnostic de la caisse d'allocations familiales a révélé un état d'indécence du logement, que, le 7 mars 2014, le maire de la commune a mis en demeure les bailleurs de réaliser les travaux prescrits par l'expert et que, le 17 octobre 2014, un arrêté préfectoral a déclaré le logement insalubre à titre remédiable et retient qu'il ne peut être reproché aucun manquement aux bailleurs qui ont respecté leur engagement d'indemniser les preneurs à concurrence de trois mois de loyers ;
Qu'en statuant ainsi, sans rechercher si les bailleurs avaient pris les mesures nécessaires pour remédier au caractère non décent du logement, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE en toutes ses dispositions l'arrêt rendu le 24 novembre 2016 par la cour d'appel de Nîmes ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Montpellier ;
Condamne M. et Mme Z... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de M. et Mme Z... et les condamne à payer à MM. X... et Y... la somme globale de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du premier février deux mille dix-huit.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Gadiou et Chevallier, avocat aux Conseils, pour MM. X... et Y...
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté MM. X... et Y... de leurs demandes tendant à l'indemnisation de préjudices de jouissance et moral, de préjudices médicaux et de surconsommation électrique ;
Aux motifs que, le nouvel acquéreur d'un immeuble loué auquel la location est opposable, est automatiquement tenu de toutes les obligations du précédent bailleur qui lui ont été transmises, à compter de la vente, particulièrement de l'obligation continue de délivrer un logement décent, prévue par l'article 6 de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989 ; que toutefois, les pièces produites révèlent que les intimés, prenant rapidement contact avec leurs locataires, se sont heurtés à la résistance de ceux-ci, qui par courriers en date des 4 et 11 mars 2013, contestent leur qualité de propriétaires et s'opposent à toute visite d'entrepreneur ; que malgré les prises de contact répétées et conciliantes des bailleurs, confirmées par leurs lettres en date des 21 février 2013 (pièce nº 5 des appelants), 8 mars 2013, 29 mars 2013, 11 juillet 2013 et 12 novembre 2013, la difficulté à établir le dialogue nécessaire en vue de déterminer les travaux nécessaires et les conditions de leur exécution ressort encore des documents dactylographiés, non signés, mais rédigés sur le même modèle et dans le même style que les 2 premiers courriers précités, intitulés « en communication » suite à notre communication du 19/7/2013, «entretiens » après une visite du 29 juillet 2013 et « en communication » en date du 16 novembre 2013, ce dernier courrier faisant état de « mensonges », « trahison de votre propre parole, harcèlement moral et magouilles » ; que c'est ainsi que par ordonnance du 16 janvier 2014, le juge des référés rejetant la demande d'expertise de MM. X... et Y... leur a enjoint sous astreinte, de laisser tout entrepreneur mandaté par M. et Mme Z... de visiter librement et intégralement les lieux loués afin d'établir tout devis de travaux nécessaires ; qu'il n'est pas justifié d'autres courriers échangés entre les parties, ni de leurs relations postérieurement à cette décision jusqu'à l'attestation sur l'honneur du 19 novembre 2014 par laquelle M. Z... s'engage à payer à MM. X... et Y... « le montant des 3 premiers loyers du logement qu'ils auront librement choisi et de rembourser la caution du logement de [...] (600 €), permettant la résiliation du bail actuellement suspendu», tandis que par lettre du 2 décembre 2014, l'association pour le logement dans le Gard, précisant que MM. X... et Y... ont trouvé à se reloger, moyennant un loyer de 555 €, rappelle au bailleur son engagement de régler une indemnité égale à 3 mois de loyer, outre le dépôt de garantie de 600 € et l'invite à s'acquitter de la somme totale de 2 265 € ; qu'entre temps sont intervenus : le 21 janvier 2014, le rapport de l'expertise confiée à M. C... par le tribunal administratif de Nîmes le 16 janvier 2014, saisi par la commune de [...], excluant un péril imminent, mais retenant un état de péril ordinaire, en précisant les travaux permettant d'y remédier, le 12 février 2014, le diagnostic sollicité par la Caisse d'Allocations Familiales du Gard, retenant une indécence évaluée à 2 (indécence liée à la qualité), le 7 mars 2014, l'arrêté du maire de [...] mettant en demeure M. et Mme Z... d'effectuer les travaux préconisés par l'expert dans le délai d'un an à compter de sa notification, le 11 avril 2014, la lettre par laquelle l'Agence Régionale de Santé (ARS) informe MM. X... et Y... d'une procédure de déclaration d'insalubrité, compte tenu des anomalies présentées par l'immeuble préjudiciables à la santé des occupants (humidité, chauffage insuffisant et déperditions thermiques, installation électrique dangereuse, affaissement des plafonds), le 1er août 2014, le courrier par lequel le préfet du Gard invite MM. X... et Y... à faire valoir leurs observations sur le rapport du Conseil Départemental de l'Environnement et des Risques Sanitaires et Technologiques (CODERST) du 21 juillet 2014, proposant de déclarer l'immeuble insalubre remédiable, avec prescription de travaux et interdiction d'habiter au départ des occupants, qui devra intervenir au plus tard dans le délai de 3 mois à compter de la notification de l'arrêté préfectoral, le 15 octobre 2014, l'arrêté préfectoral déclarant l'immeuble insalubre à titre remédiable et prescrivant les travaux nécessaires, à réaliser dans le délai d'un an à compter de sa signification ; que MM. X... et Y... ne produisent aucun élément de preuve rendant compte du refus délibéré des bailleurs de se conformer à leur obligation de délivrance, il résulte des éléments qui précèdent qu'en l'état des procédures administratives de décence et d'insalubrité mises en oeuvre à compter du mois de janvier 2014 et dans l'attente de leurs conclusions, il ne peut finalement être reproché aucun manquement aux bailleurs, dont il n'est pas contesté qu'ils ont cependant respecté leur engagement d'indemniser les appelants à concurrence de 3 mois de loyers ; que c'est dès lors justement que le tribunal a rejeté les demandes de MM. X... et Y... fondées sur un préjudice médical et un préjudice de surconsommation électrique, le jugement étant infirmé en ce qu'il condamne M. et Mme Z... à indemniser MM. Y X... et Y... pour leurs préjudices de jouissance et moral ;
1°) Alors que, le bailleur est obligé de délivrer aux locataires la chose louée et, s'il s'agit de son habitation principale, un logement décent ; qu'en l'espèce, la cour a constaté, d'une part, que le bien immobilier donné en location à usage d'habitation principale par M. et Mme Z... à MM. X... et Y... avait fait l'objet, entre les mois de janvier et octobre 2014, d'un rapport d'expertise judiciaire concluant à un état de péril précisant les travaux permettant d'y remédier dans un délai de deux à trois mois, d'un diagnostic sollicité par la CAF du Gard retenant une indécence de l'habitation liée à la qualité, d'un arrêt municipal mettant en demeure les bailleurs de procéder aux travaux préconisés par l'expert, d'une procédure d'insalubrité initiée par l'Agence régionale de santé, enfin, d'un arrêté préfectoral d'insalubrité avec prescription de travaux, d'autre part, que par une ordonnance de référé du 16 janvier 2014, le juge des référés avait enjoint les locataires de laisser tout entrepreneur mandaté par les bailleurs de visiter librement les lieux loués afin d‘établir tout devis ; qu'en se bornant à relever, pour écarter tout manquement de M. et Mme Z... et débouter en conséquence MM. X... et Y... de leurs demandes d'indemnisation au titre de l'ensemble des préjudices subis, que lors du départ des locataires, les bailleurs ont respecté leur engagement de les indemniser à concurrence de 3 mois de loyers sans constater qu'au cours de l'année 2014, les bailleurs avaient fait exécuter les travaux de conformité qui leur avaient été impartis et fait intervenir des entrepreneurs dans le logement loué, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1719 1°) du code civil ;
2°) Alors que, il appartient au bailleur, tenu de délivrer la chose louée, de prouver qu'il s'est entièrement libéré de cette obligation ; qu'en relevant, pour débouter MM. X... et Y... de leur demande d'indemnisation, qu'ils ne produisent aucun élément de preuve rendant compte du refus délibéré des bailleurs de se conformer à leur obligation de délivrance, la cour d'appel, qui a inversé la charge de la preuve, a violé les articles 1315 ancien et 1719 1° du code civil.