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31/01/2018 | FRANCE | N°17-80481

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 31 janvier 2018, 17-80481


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur les pourvois formés par :

- M. Michel X...,
- M. Claude Y...,

contre l'arrêt de la cour d'appel de POITIERS, chambre correctionnelle, en date du 20 octobre 2016, qui les a condamnés, le premier à quatre mois d'emprisonnement pour faux et complicité de tentative d'escroquerie, le second à huit mois d'emprisonnement avec sursis pour complicité de faux et tentative d'escroquerie, et a prononcé sur les intérêts civils ;

La COUR, statuant après débats en l'audience publique

du 20 décembre 2017 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur les pourvois formés par :

- M. Michel X...,
- M. Claude Y...,

contre l'arrêt de la cour d'appel de POITIERS, chambre correctionnelle, en date du 20 octobre 2016, qui les a condamnés, le premier à quatre mois d'emprisonnement pour faux et complicité de tentative d'escroquerie, le second à huit mois d'emprisonnement avec sursis pour complicité de faux et tentative d'escroquerie, et a prononcé sur les intérêts civils ;

La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 20 décembre 2017 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Soulard, président, M. d'Huy, conseiller rapporteur, Mme de la Lance, conseiller de la chambre ;

Avocat général : M. Z... ;

Sur le rapport de M. le conseiller D'HUY, les observations de la société civile professionnelle PIWNICA et MOLINIÉ, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général Z... ;

Joignant les pourvois en raison de la connexité ;

Sur le pourvoi formé par M. Claude Y... :

Attendu qu'aucun moyen n'est produit ;

Sur le pourvoi formé par M. Michel X... :

Vu le mémoire produit ;

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, 313-1 du code pénal, préliminaire, 388, 485, 512, 551, 591, 593 et 802 du code de procédure pénale, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale, ensemble violation des droits de la défense ;

"en ce que l'arrêt attaqué a refusé de prononcer la nullité de la citation introductive d'instance délivrée à M. X... ;

"aux motifs propres que, contrairement à ce qu'affirme M. Michel X... les termes de la citation devant le tribunal correctionnel de La Rochelle qui lui a été délivrée le 28 septembre 2015 sont suffisamment précis et explicites pour lui permettre de comprendre clairement ce qui lui est reproché ; qu'en tout état de cause, M. X..., qui a pu se défendre et faire valoir l'ensemble de ses droits tant en première instance qu'en appel, ne démontre pas en quoi cette citation lui aurait causé un grief ;

"aux motifs éventuellement adoptés que la nullité de la citation est sollicitée par M. X... au regard de l'imprécision des préventions qui lui ferait grief ; que, s'agissant de la complicité de tentative d'escroquerie au jugement, elle est explicite sur la complicité et mentionne l'auteur principal, M. Claude Y... ; que si elle omet d'indiquer la juridiction saisie, le lieu des faits est La Roche-sur-Yon et Rennes ; qu'au demeurant il convient de rappeler que des conclusions de relaxe ont été établies et que M. X..., entendu déjà à trois reprises sur ces faits, a été en mesure de se défendre quant aux faits reprochés ;

"1°) alors que la citation délivrée au prévenu doit informer celui-ci de manière détaillée de la nature et de la cause de l'accusation portée contre lui et que la méconnaissance de ce principe, qui constitue un élément essentiel du procès équitable, porte par elle-même atteinte aux droits de la défense ;

"2°) alors qu'est nulle la citation qui ne comporte pas le détail des faits reprochés au prévenu ; que la citation du chef de d'escroquerie au jugement ou de sa tentative doit préciser, pour être valable, dans quelle instance et devant quelle juridiction il est reproché au prévenu d'avoir présenté, de mauvaise foi, des éléments mensongers destinés à tromper le juge et à faire condamner son adversaire à payer des sommes qui ne sont pas dues ; qu'en énonçant que les termes de la citation de M. X... du chef de complicité de tentative d'escroquerie au jugement étaient suffisamment précis et explicites bien que la citation ne mentionne pas dans quelle procédure et devant quelle juridiction il était reproché à M. X... d'avoir présenté des éléments mensongers, la cour d'appel a méconnu les textes susvisés ;

"3°) alors que M. X... ayant soulevé in limine litis, tant devant les premiers juges, que devant les juges d'appel, la nullité de la citation introductive d'instance, la circonstance qu'il ait déposé des conclusions de relaxe sur le fond et qu'il ait été entendu lors de l'enquête, n'implique aucune acceptation de comparaître volontairement sur les éléments d'une prévention qui était insuffisamment précisée dans la citation" ;

Attendu que, pour écarter l'exception de nullité de la citation, prise de son imprécision, l'arrêt prononce par les motifs repris au moyen ;

Attendu qu'en l'état de ces énonciations, desquelles il résulte que le prévenu était suffisamment informé par la citation des faits servant de base à la prévention et qu'il avait été mis en mesure de présenter ses moyens de défense à l'audience, la cour d'appel n'a pas méconnu les dispositions légales et conventionnelles visées au moyen, lequel ne peut qu'être écarté ;

Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, 121-3 et 441-1 du code pénal, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt a déclaré M. X... coupable de faux, l'a condamné pénalement et a prononcé sur les intérêts civils ;

"aux motifs propres qu'il résulte des investigations des enquêteurs, principalement des auditions des deux intéressés, reprises ci-dessus, et de l'examen de la première version des factures litigieuses présentées à M. Y... par M. X..., et sans qu'il soit besoin de s'interroger sur la réalité des prestations qu'elles constatent, que les factures produites au civil devant le tribunal de grande instance de Rennes à l'appui de l'assignation en paiement du 8 août 2013, bien que datées d'août, septembre et octobre 2005, ont été rédigées en juillet 2013 ; qu'il en ressort également qu'aucune facture de cette sorte n'avait été produite ou même mentionnée au cours de l'instruction et de l'instance pénale antérieure, en dépit de l'intérêt de telles pièces si elles avaient existé, et qu'elles ont été établies pour les seuls besoins de la procédure civile engagée en août 2013 ; qu'il apparaît que ces factures ont été rédigées par M. X..., lequel a reconnu les avoir datées de 2005 bien qu'il les ait confectionnées en 2013, avoir eu plus que des doutes sur leur légalité et avoir clairement pensé que « c'était une escroquerie », mais les a néanmoins réalisées dès juillet/août 2013, ce qui relativise l'importance des hésitations qu'il dit avoir eues et permet de retenir son adhésion éclairée au principe de leur production en justice et sa participation active au processus ; que M. Y... est un professionnel du droit, parfaitement au courant de la portée des pièces fournies à l'occasion d'une procédure et nécessairement convaincu de leur indispensable loyauté ; que ce faisant, d'une part M. X... s'est rendu responsable à titre principal de la confection de faux destinés à être produits en justice et, d'autre part, M. Y..., rédacteur de l'assignation du 8 août 2013, s'est rendu responsable, avec la complicité de M. X..., d'une tentative d'escroquerie au jugement, laquelle n'a manqué qu'en raison de la plainte pénale déposée par l'adversaire ; que le faux commis est pénalement répréhensible puisqu'il consiste bien dans une altération frauduleuse de la vérité, spécialement de la date et des montants, dans un écrit ayant pour objet d'établir la preuve d'un droit – une créance – et d'un fait ayant des conséquences juridiques – l'existence de prestations non réglées facturées en 2005 – ; que ces faux ayant été constitués en 2013, ils n'encourent pas la prescription pénale, la plainte et le début de l'enquête datant de la fin 2013 ; que quant à la prescription civile, celle-ci n'est pas encourue de plein droit et il appartient au juge civil de la constater sans qu'il puisse la relever d'office ; que la production des pièces altérées était donc susceptible de produire un effet devant la juridiction civile ;

"aux motifs éventuellement adoptés que les trois documents intitulés factures datés des 25 aout, 28 septembre et 20 octobre 2005 et émis par M. X... n'ont pas été réalisés à cette date ; qu'il résulte des investigations réalisées par les enquêteurs sur le numéro de téléphone mentionné et des brouillons du projet de ces documents remis par M. X..., et portant l'écriture de M. Y... que ces factures ont été réalisées par M. X... après le procès devant le tribunal correctionnel le 6 juin 2013 sur les conseils et les corrections de M. Y... ; que les déclarations concordantes des deux prévenus lors de la confrontation, propos confirmés à l'audience, démontrent en outre que dans la perspective d'un procès civil, consécutivement au procès pénal dont appel, M. Y... a demandé à son client l'établissement de ces factures correspondant au travail que l'un et l'autre considérait comme ayant été réalisé en 2005 et que M. Y... a apporté des modifications aux factures présentées par des annotations écrites sur ces documents, avant qu'ils ne soient refaits, et en demandant à M. X... de changer la date de 2013 en 2005 ; que ces factures, réalisées en 2013 et faussement datées de 2005, sont donc des faux matériels ; que leur réalisation relève de l'article 441-1 code pénal dans la mesure où ces documents sont des factures et ont pour objet ou peuvent avoir pour effet d'établir la preuve d'un droit ou d'un fait ayant des conséquences juridiques ; que le caractère maladroit ou imparfait de ces factures est sans portée sur ce point tout autant que la question d'une éventuelle prescription, au demeurant moyen d'ordre privé, dès lors qu'elles pouvaient avoir pour effet la preuve d'un fait ou d'un droit ; que M. X... qui a réalisé ces faux matériels sera déclaré coupable de ce chef ;

"1°) alors que l'inexactitude de la date portée sur une facture ne saurait être considérée comme constitutive d'une altération frauduleuse de la vérité de nature à causer un préjudice au sens de l'article 441-1 du code pénal dès lors que les prestations indiquées sur cette facture correspondent à la réalité et que la cour d'appel ne pouvait refuser d'examiner la réalité des prestations que les factures mentionnaient en considération de la seule date de ces factures ;

"2°) alors que la cour d'appel, qui constatait expressément dans sa décision que les factures arguées de faux correspondaient à des prestations non réglées – ce qui impliquait tout à la fois qu'elles étaient conformes à la réalité et qu'elles étaient insusceptibles de porter préjudice à autrui –, ne pouvait, sans se contredire, entrer en voie de condamnation à l'encontre de M. X... du chef de faux ;

"3°) alors que le faux suppose que la pièce contrefaite ou altérée soit susceptible d'occasionner à autrui un préjudice ; que M. X... faisait valoir dans ses conclusions que les factures n'étaient pas susceptibles d'occasionner le moindre préjudice dès lors qu'elles étaient datées de 2005, que l'action en paiement avait été initiée en 2013 et que l'article 2224 du code civil, devenu l'article 2248, prévoit que les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans ; qu'en déclarant M. X... coupable de faux sans constater l'existence du préjudice qui était susceptible de résulter des factures ni répondre au chef péremptoire des écritures du prévenu, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision ;

"4°) alors que le faux est une infraction instantanée en sorte que l'élément intentionnel de cette infraction suppose pour être constitué qu'au moment précis où le prévenu a forgé les documents argués de faux il ait eu la volonté délibérée d'altérer frauduleusement la vérité et la volonté, par cette altération frauduleuse de la vérité, de porter préjudice aux droits d'autrui ; qu'en retenant M. X... dans les liens de la prévention du chef de faux après avoir constaté que si le prévenu avait adhéré au principe de la production en justice des documents portant une antidate, à la date où il avait confectionné ces documents, il n'était animé que de simples « doutes sur leur légalité », la cour d'appel a méconnu les textes susvisés" ;

Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, 121-4, 121-5, 121-6, 121-7 et 313-1 du code pénal, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré M. X... coupable de complicité de tentative d'escroquerie, l'a condamné pénalement et a prononcé sur les intérêts civils ;

"aux motifs propres qu'il résulte des investigations des enquêteurs, principalement des auditions des deux intéressés, reprises ci-dessus, et de l'examen de la première version des factures litigieuses présentées à M. Y... par M. X..., et sans qu'il soit besoin de s'interroger sur la réalité des prestations qu'elles constatent, que les factures produites au civil devant le tribunal de grande instance de Rennes à l'appui de l'assignation en paiement du 8 août 2013, bien que datées d'août, septembre et octobre 2005, ont été rédigées en juillet 2013 ; qu'il en ressort également qu'aucune facture de cette sorte n'avait été produite ou même mentionnée au cours de l'instruction et de l'instance pénale antérieure, en dépit de l'intérêt de telles pièces si elles avaient existé, et qu'elles ont été établies pour les seuls besoins de la procédure civile engagée en août 2013 ; qu'il apparaît que ces factures ont été rédigées par M. X..., lequel a reconnu les avoir datées de 2005 bien qu'il les ait confectionnées en 2013, avoir eu plus que des doutes sur leur légalité et avoir clairement pensé que « c'était une escroquerie », mais les a néanmoins réalisées dès juillet/août 2013, ce qui relativise l'importance des hésitations qu'il dit avoir eues et permet de retenir son adhésion éclairée au principe de leur production en justice et sa participation active au processus ; que M. Y..., rédacteur de l'assignation du 8 août 2013, s'est rendu responsable, avec la complicité de M. X..., d'une tentative d'escroquerie au jugement, laquelle n'a manqué qu'en raison de la plainte pénale déposée par l'adversaire ; qu'en ce qui concerne l'escroquerie au jugement, les deux prévenus ne se sont pas contentés de produire des factures existantes établies à la date qu'elles indiquaient et constatant une facturation au prix exact, en laissant à la juridiction civile l'appréciation de leur valeur probante quant aux prestations facturées ; qu'en effet, au-delà du seul mensonge, ils ont établi ad hoc des factures portant des mentions délibérément trompeuses – et donc déployé des manoeuvres frauduleuses – dans le but d'emporter la conviction du tribunal et d'obtenir un jugement de condamnation à payer portant en tant que tel atteinte au patrimoine de leur adversaire ;

"aux motifs éventuellement adoptés que les trois documents intitulés factures datés des 25 aout, 28 septembre et 20 octobre 2005 et émis par M. X... n'ont pas été réalisés à cette date ; qu'il résulte des investigations réalisées par les enquêteurs sur le numéro de téléphone mentionné et des brouillons du projet de ces documents remis par M. X..., et portant l'écriture de M. Y... que ces factures ont été réalisées par M. X... après le procès devant le tribunal correctionnel le 6 juin 2013 sur les conseils et les corrections de M. Y... ; que les déclarations concordantes des deux prévenus lors de la confrontation, propos confirmés à l'audience, démontrent en outre que dans la perspective d'un procès civil, consécutivement au procès pénal dont appel, M. Y... a demandé à son client l'établissement de ces factures correspondant au travail que l'un et l'autre considérait comme ayant été réalisé en 2005 et que M. Y... a apporté des modifications aux factures présentées par des annotations écrites sur ces documents, avant qu'ils ne soient refaits, et en demandant à M. X... de changer la date de 2013 en 2005 ; que M. X... et M. Y... seront également déclarés coupables de la tentative d'escroquerie au jugement puisque M. Y... a rédigé l'assignation et fait communiquer ces faux (bordereau 26 septembre 2013), en parfaite connaissance de la fausseté de celles-ci pour les raisons exposées précédemment, invoquant qu'il s'agissait de facturation (assignation « 2.1 Facturation » « liste des pièces
1- facture du 25 août 2005 2- facture du 28 septembre 2005 3-facture du 20 octobre 2005 ») afin que le tribunal condamne sur le fondement de l'article 1134 du code civil, à leur paiement ; que ce faisant il a tenté de tromper le tribunal en lui faisant croire que ces factures étaient matériellement vraies et ce, si le subterfuge avait fonctionné, au préjudice de M. Patrick A... ;

"1°) alors que la cour d'appel de Poitiers ayant déclaré M. X... coupable de complicité de tentative d'escroquerie au jugement sur le fondement de sa déclaration de culpabilité pour faux, la cassation à intervenir sur le deuxième moyen de cassation entraînera, par voie de conséquence, celle du chef de dispositif de l'arrêt déclarant le prévenu coupable de complicité de tentative d'escroquerie ;

"2°) alors que ne constitue pas une manoeuvre frauduleuse la seule production, à l'appui d'une action en justice, de pièces, serait-elles mensongères, dont le juge a pour mission de déterminer la valeur probante après débat contradictoire entre les parties ; qu'en retenant comme frauduleuse la production dans le cadre de la procédure opposant M. X... et M. A... devant le tribunal de grande instance de Rennes de trois factures dont la valeur probante devait être soumise à la contradiction et à l'appréciation du juge sans relever d'autres manoeuvres destinées à imprimer force et crédit à ces documents et à tromper la juridiction, la cour d'appel a méconnu les dispositions susvisées";

Les moyens étant réunis ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et du jugement qu'il confirme que M. Michel X..., ayant pour avocat M. Claude Y..., a assigné M. Patrick A... devant le tribunal de grande instance en paiement de trois factures communiquées par bordereau portant le cachet de son avocat ; que M. A... a porté plainte en soutenant que lesdites factures avaient été fabriquées a posteriori pour les seuls besoins de l'instance civile ; qu'au terme de l'enquête, M. Michel X... a été cité à comparaître pour faux et complicité de tentative d'escroquerie devant le tribunal correctionnel qui l'a déclaré coupable de ces chefs et condamné à quatre mois d'emprisonnement par un jugement dont l'intéressé ainsi que la partie civile et le ministère public ont interjeté appel ;

Attendu que pour déclarer le prévenu coupable de faux, l'arrêt énonce notamment que les factures litigieuses ont été rédigées par M. X... qui a reconnu les avoir datées de 2005, bien qu'il les ait confectionnées en 2013, avoir eu plus que des doutes sur leur légalité et clairement pensé que "c'était une escroquerie" ; que les juges relèvent qu'il les a néanmoins réalisées dès juillet-août 2013, ce qui relativise l'importance des hésitations qu'il dit avoir eues et permet de retenir son adhésion éclairée au principe de leur production en justice et sa participation active au processus frauduleux ; qu'ils indiquent que le faux commis consiste bien en une altération frauduleuse de la vérité, spécialement de la date et des montants, dans un écrit ayant pour objet d'établir la preuve d'un droit, une créance, et d'un fait ayant des conséquences juridiques, l'existence de prestations non réglées facturées en 2005 ; qu'ils ajoutent que la prescription civile invoquée par la défense n'est pas encourue de plein droit et il appartient au juge civil de la constater sans qu'il puisse la relever d'office, qu'ainsi, la production des pièces altérées était susceptible de produire un effet devant la juridiction civile ;

Attendu que pour déclarer le prévenu coupable de complicité de tentative d'escroquerie, l'arrêt énonce notamment qu'au-delà du seul mensonge, M. X... et M. Y... ont spécialement établi ces factures pour les besoins de la cause en portant des mentions délibérément trompeuses et donc déployé des manoeuvres frauduleuses dans le but d'emporter la conviction du tribunal et d'obtenir une condamnation en paiement de nature à préjudicier aux intérêts de leur adversaire ;

Que la cour d'appel en conclut que M. X... s'est rendu coupable, d'une part, de la confection de faux destinés à être produits en justice, d'autre part, de complicité de la tentative d'escroquerie au jugement commise par M. Y..., rédacteur de l'assignation, qui n'a manqué son effet qu'en raison de la plainte pénale déposée par M. A... ;

Attendu qu'en l'état de ces énonciations, relevant de son appréciation souveraine, la cour d'appel, qui a caractérisé les délits reprochés au prévenu en tous leurs éléments constitutifs, a justifié sa décision ;

D'où il suit que les moyens ne sauraient être accueillis ;

Sur le quatrième moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 et 7 de la Convention européenne des droits de l'homme, 121-4, 121-5, 121-6, 121-7, 130-1, 132-1, 132-19, 313 1, 441-1 du code pénal, préliminaire, 485, 512, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, contradiction de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré M. X... coupable de faux et de complicité de tentative d'escroquerie et l'a condamné à quatre mois d'emprisonnement ferme ;

"aux motifs propres qu'en ce qui concerne M. X..., les circonstances et la gravité des faits ainsi que la personnalité, la situation et le comportement du prévenu, tels qu'ils résultent des pièces du dossier, en particulier les deux condamnations figurant sur son casier judiciaire pour des faits de faux, escroquerie, banqueroute et abus de confiance, révèlent une forme d'ancrage dans la délinquance économique, démontrent l'inefficacité, que ce soit en termes de risque de récidive ou d'amendement, des peines probatoires dont l'intéressé a bénéficié antérieurement et rendent nécessaire le prononcé d'une peine d'emprisonnement ferme, toute autre sanction apparaissant manifestement inadéquate ; que la peine d'emprisonnement prononcée par le tribunal sera en conséquence confirmée comme répondant aux exigences des articles 130-1 et 132-1 du code pénal ; que la cour ne dispose pas, en l'état, notamment en l'absence de présentation d'un projet structuré, de justificatifs suffisants sur la situation effective du prévenu, et se trouve de ce fait dans l'impossibilité matérielle d'organiser utilement l'aménagement de cette peine d'emprisonnement comme prévu par l'article 132-19 du code pénal ;

"et aux motifs éventuellement adoptés qu'à l'époque des faits reprochés M. X... venait d'être condamné par le tribunal correctionnel pour un abus de confiance à une peine de six mois d'emprisonnement avec sursis (devenue définitive après désistement d'appel constaté le 12 mars 2015) et a réalisé ces infractions en parfaite connaissance de cause et pour en empêcher les effets ; qu'il avait déjà été condamné en 1992 à une peine d'emprisonnement pour partie ferme pour des faux, escroqueries et banqueroute ; qu'au regard de la gravité des faits et de ces éléments seule une peine d'emprisonnement ferme est adaptée et il sera condamné à la peine de quatre mois d'emprisonnement ;

"alors qu'en matière correctionnelle, la juridiction ne peut prononcer une peine d'emprisonnement ferme qu'après avoir spécialement motivé la nécessité de cette peine ferme au regard non seulement de la personnalité de l'auteur de l'infraction et du caractère manifestement inadéquat de toute autre sanction, mais aussi de la gravité de l'infraction ; qu'en prononçant en peine d'emprisonnement ferme à l'égard de M. X... sans référence précise à la gravité des faits et aux circonstances de l'infraction, la cour d'appel a méconnu les textes susvisés" ;

Attendu que, pour condamner M. X... à quatre mois d'emprisonnement, la cour d'appel retient, par motifs propres et adoptés, que les circonstances et la gravité des faits, commis pour empêcher les effets d'une précédente condamnation à des dommages et intérêts résultant d'un abus de confiance dont l'intéressé a été déclaré coupable, au préjudice de M. A..., ainsi que la personnalité, la situation et le comportement du prévenu, tels qu'ils résultent des pièces du dossier, en particulier les deux condamnations figurant sur son casier judiciaire pour des faits de faux, escroquerie, banqueroute et abus de confiance, révèlent une forme d'ancrage dans la délinquance économique et démontrent l'inefficacité, que ce soit en termes de risque de récidive ou d'amendement, des peines probatoires dont l'intéressé a bénéficié antérieurement ; qu'ils en déduisent que toute autre peine que l'emprisonnement est manifestement inadéquate ;

Que, pour refuser d'aménager la peine d'emprisonnement ainsi prononcée, la cour d'appel indique qu'elle ne dispose pas, en l'état, notamment en l'absence de présentation d'un projet structuré, de justificatifs suffisants sur la situation effective du prévenu, et se trouve ainsi dans l'impossibilité matérielle d'organiser utilement l'aménagement de cette peine ;

Attendu qu'en l'état de ces motifs, la cour d'appel a justifié sa décision au regard de l'article 132-19 du code pénal ;

D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE les pourvois ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le trente et un janvier deux mille dix-huit ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 17-80481
Date de la décision : 31/01/2018
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Poitiers, 20 octobre 2016


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 31 jan. 2018, pourvoi n°17-80481


Composition du Tribunal
Président : M. Soulard (président)
Avocat(s) : SCP Piwnica et Molinié

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:17.80481
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