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30/01/2018 | FRANCE | N°17-81728

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 30 janvier 2018, 17-81728


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

-
M. Jean-Claude X...,

contre l'arrêt de la cour d'appel de DIJON, chambre correctionnelle, en date du 16 février 2017, qui, pour homicides et blessures involontaires, et contravention au code de la route, l'a condamné à six mois d'emprisonnement avec sursis, six mois de suspension du permis de conduire et 100 euros d'amende ;

La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 19 décembre 2017 où étaient présents dans la formation prévue à

l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Soulard, président, Mme A..., conseil...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

-
M. Jean-Claude X...,

contre l'arrêt de la cour d'appel de DIJON, chambre correctionnelle, en date du 16 février 2017, qui, pour homicides et blessures involontaires, et contravention au code de la route, l'a condamné à six mois d'emprisonnement avec sursis, six mois de suspension du permis de conduire et 100 euros d'amende ;

La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 19 décembre 2017 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Soulard, président, Mme A..., conseiller rapporteur, M. Pers, conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme Guichard ;

Sur le rapport de Mme le conseiller A..., les observations de Me HAAS, avocat en la Cour, et les conclusions de Mme l'avocat général référendaire Y... ;

Vu le mémoire produit ;

Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 122-2, 221-6, 221-6-1, 221-8, 221-10, 222-19, 222-20, 222-20-1, 222-44 et 222-46 du code pénal, L. 232-1, R. 413-17 et R. 413-19 du code de la route, 591 et 593 du code de procédure pénale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré M. Jean-Claude X... coupable des faits qui lui étaient reprochés et l'a, en répression, condamné à une peine de six mois d'emprisonnement assorti du sursis et une peine complémentaire de six mois de suspension du permis de conduire ainsi qu'à une amende de 100 euros pour la contravention de gêne à la circulation en conduisant un ensemble routier à une vitesse anormalement réduite sans raison valable, sur autoroute et de nuit ;

"aux motifs que, dans la nuit au cours de laquelle l'accident est survenu, le prévenu, employé intérimaire de la société Stef transport, effectuait un transport de marchandises depuis Chaumont jusqu'à Toussieu, situé dans le département du Rhône ; qu'il résulte du procès-verbal de transport sur les lieux, dressé par les gendarmes de l'escadron départemental de sécurité routière de Saône-et-Loire, de l'analyse des chronotachygraphes équipant l'ensemble articulé et l'autocar, du rapport établi par M. Z..., expert, désigné par le magistrat instructeur de Mâcon, que l'autocar a percuté de plein fouet l'arrière du poids-lourd, sans manoeuvre d'évitement ou de freinage, qu'au moment de l'impact, le camion conduit par le prévenu circulait à une vitesse de 44 km/h, que, lors de la collision, la vitesse de l'autocar a décru de 96 km/h à 64 km/h en une seconde, qu'entre 19 heures 26 et 0 heure 22, le véhicule conduit par le prévenu a circulé à une vitesse moyenne de 47 km/h ; que M. X... indique qu'il a circulé à une vitesse réduite du fait qu'il portait des chaussures de sécurité qui lui provoquaient des fourmillements dans les jambes ; que, cependant, il n'explique pas la raison pour laquelle il se serait trouvé dans l'impossibilité absolue d'immobiliser quelques instants son véhicule pour enlever les équipements entraînant des troubles physiques ; que l'expert a relevé que l'allure réduite du poids lourd présentait un danger pour les véhicules arrivant derrière ; que, par ailleurs, aucun élément objectif n'autorisait l'expert à considérer que le conducteur de l'autocar s'était assoupi au volant au moment de la collision, de sorte qu'une faute de la victime ayant joué un rôle causal dans la survenance de l'accident n'est pas démontrée ; que, dans ces conditions, il est établi que le prévenu a circulé à une vitesse anormalement réduite, de nuit, qu'il a commis une imprudence et que, ce faisant, il est l'unique responsable de l'accident ayant provoqué la mort de deux personnes et causé des blessures à trois autres ;

"1°) alors que les délits d'homicide et de blessures involontaires sont constitués dès lors que le décès ou les blessures ont été directement causées par la maladresse, l'imprudence, l'inattention, la négligence ou le manquement à une obligation législative ou réglementaire de prudence ou de sécurité commis par le prévenu ; que ne commet pas de faute le conducteur qui, conduisant de nuit un véhicule poids-lourd dont le chargement excède neuf tonnes, circule durant la nuit sur la voie de droite de l'autoroute à une allure réduite ; qu'en retenant que l'allure réduite à laquelle circulait le poids-lourd conduit par M. X... était constitutive d'une imprudence directement à l'origine de l'accident, sans tenir compte, pour apprécier le caractère ou non anormal de la vitesse du véhicule conduit par le prévenu, du poids du véhicule et de son chargement, ainsi que de sa position sur la chaussée, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;

" 2°) alors que, s'il est interdit à tout conducteur de gêner la marche normale des autres véhicules en circulant sans raison valable à une vitesse anormalement réduite, ne commet pas de faute le conducteur qui, conduisant de nuit un véhicule poids-lourd dont le chargement excède neuf tonnes, circule durant la nuit sur la voie de droite de l'autoroute à une allure réduite ; qu'en affirmant que l'allure réduite à laquelle circulait le poids-lourd conduit par M. X... était constitutive de la contravention prévue à l'article R. 413-19 du code de la route, sans tenir compte, pour apprécier le caractère ou non anormal de la vitesse du véhicule conduit par le prévenu, du poids du véhicule et de son chargement, ainsi que de sa position sur la chaussée, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;

" 3°) alors que le délit d'homicide involontaire n'est pas constitué lorsque le décès de la victime trouve sa cause exclusive dans une faute de cette dernière ; que la victime qui perd le contrôle de son véhicule et percute de plein fouet le véhicule qui la précède sans procéder à aucune manoeuvre d'évitement ni de freinage commet une faute qui constitue la cause exclusive de sa collision avec ce dernier et, partant, de son décès ; qu'en écartant toute faute de la victime ayant joué un rôle causal dans la survenance de l'accident au prétexte qu'aucun élément objectif n'autorisait l'expert à considérer que le conducteur de l'autocar s'était assoupi au volant au moment de la collision, cependant qu'elle avait constaté qu'il résultait du procès-verbal de transport sur les lieux dressé par les gendarmes, de l'analyse des chronotachygraphes équipant l'ensemble articulé et l'autocar, ainsi que du rapport établi par l'expert judiciaire désigné par le magistrat instructeur, que l'autocar conduit par la victime avait percuté de plein fouet l'arrière du poids-lourd conduit par le prévenu sans procéder à aucune manoeuvre d'évitement ni de freinage, de sorte que celle-ci avait commis une faute constituant la cause exclusive de l'accident, la cour d'appel, qui s'est contredite, n'a pas justifié sa décision ;

"4°) alors que les délits d'homicide et de blessures involontaires ne sont pas constitués lorsque le décès ou les blessures de la victime trouvent leur cause exclusive dans le fait d'un tiers présentant les caractères de la force majeure ; que la personne qui perd le contrôle de son véhicule et percute de plein fouet le véhicule qui la précède sans procéder à aucune manoeuvre d'évitement ni de freinage commet une faute qui constitue la cause exclusive de sa collision avec ce dernier et, partant, du décès et des blessures subis par les passagers de son véhicule ; qu'en écartant toute faute du conducteur de l'autocar ayant joué un rôle causal dans la survenance de l'accident au prétexte qu'aucun élément objectif n'autorisait l'expert à considérer que celui-ci s'était assoupi au volant au moment de la collision, cependant qu'elle avait constaté qu'il résultait du procès-verbal de transport sur les lieux dressé par les gendarmes, de l'analyse des chronotachygraphes équipant l'ensemble articulé et l'autocar, ainsi que du rapport établi par l'expert judiciaire désigné par le magistrat instructeur, que l'autocar conduit par l'une des victimes avait percuté de plein fouet l'arrière du poids-lourd conduit par le prévenu sans procéder à aucune manoeuvre d'évitement ni de freinage, de sorte que celle-ci avait commis une faute imprévisible et irrésistible constituant la cause exclusive de l'accident, la cour d'appel, qui s'est contredite, n'a pas justifié sa décision" ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure que le 17 août 2013, vers 0 heure 25, sur l'autoroute A6, un camion semi-remorque conduit par M. Jean-Claude X..., roulant à faible allure, a été percuté par l'arrière par un autocar immatriculé en Allemagne, occasionnant le décès du chauffeur de ce véhicule ainsi que d'un passager, trois autres passagers étant victimes de blessures ; que M. X... a été poursuivi devant le tribunal correctionnel des chefs d'homicides et blessures involontaires, et circulation à une vitesse anormalement réduite ; que le prévenu ayant été renvoyé des fins de la poursuite, le procureur de la République a interjeté appel ;

Attendu que, pour déclarer le prévenu coupable des chefs susvisés, l'arrêt retient qu'il résulte du procès-verbal dressé par les gendarmes, de l'analyse des chronotachygraphes équipant les véhicules et du rapport d'expertise judiciaire qu'au moment de l'impact, le camion conduit par le prévenu circulait à une vitesse de 44 km/h, qu'entre 19 heures 26 et 0 heure 22, il avait circulé à une vitesse moyenne de 47 km/h, que M. X... indiquait avoir circulé à une vitesse réduite du fait qu'il portait des chaussures de sécurité qui lui provoquaient des fourmillements dans les jambes, sans expliquer la raison pour laquelle il se serait trouvé dans l'impossibilité absolue d'immobiliser quelques instants son véhicule pour enlever les équipements entraînant des troubles physiques et que l'expert a relevé que l'allure réduite du poids lourd présentait un danger pour les véhicules arrivant derrière ; que les juges ajoutent qu' aucun élément objectif n'autorisait l'expert à considérer que le conducteur de l'autocar s'était assoupi au volant au moment de la collision, de sorte qu'une faute de la victime ayant joué un rôle causal dans la survenance de l'accident n'est pas démontrée ; que la cour d'appel en déduit qu'il est établi que le prévenu a circulé à une vitesse anormalement réduite, de nuit, qu'il a commis une imprudence et que, ce faisant, il est l'unique responsable de l'accident ayant provoqué la mort de deux personnes et causé des blessures à trois autres ;

Attendu qu'en l'état de ces énonciations d'où il résulte que le prévenu avait commis une imprudence en lien de causalité avec le dommage et que la faute du conducteur de l'autocar, à la supposer établie, ne pouvait en conséquence, constituer la cause exclusive du dommage ou revêtir les caractères de la force majeure, la cour d'appel a, sans insuffisance ni contradiction, caractérisé en tous leurs éléments les délits d'homicides et blessures involontaires ainsi que la contravention de circulation à une vitesse anormalement réduite dont elle a déclaré le prévenu coupable ;

D'où il suit que le moyen, qui ne tend qu'à remettre en cause, l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause, ainsi que des éléments de preuve contradictoirement débattus, ne saurait être accueilli ; Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le trente janvier deux mille dix-huit ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 17-81728
Date de la décision : 30/01/2018
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Dijon, 16 février 2017


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 30 jan. 2018, pourvoi n°17-81728


Composition du Tribunal
Président : M. Soulard (président)
Avocat(s) : Me Haas

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:17.81728
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