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24/01/2018 | FRANCE | N°16-24409;16-24410;16-24411;16-24412;16-24413;16-24414;16-24415;16-24416;16-24417;16-24418;16-24419;16-24420;16-24421;16-24422;16-24423;16-24424;16-24425;16-24426;16-25243;16-25244

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 24 janvier 2018, 16-24409 et suivants


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Vu la connexité, joint les pourvois n° N 16-24.409 à F 16-24.426, U 16-25.243 et V 16-25.244 ;

Sur le moyen unique :

Attendu, selon les arrêts attaqués (Douai, 18 décembre 2015), que M. Y... et dix-neuf autres mineurs, engagés entre 1962 et 1975 en qualité d'ouvrier mineur de fond par les houillères du Bassin Nord Pas-de-Calais, relevant à ce titre du statut du mineur, et ayant pris leur retraite entre 1989 et 2005, ont saisi la juridiction prud'homale aux fins d'obtenir la condamnation de l'Agenc

e nationale pour la garantie des droits des mineurs (l'ANGDM), qui assure le...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Vu la connexité, joint les pourvois n° N 16-24.409 à F 16-24.426, U 16-25.243 et V 16-25.244 ;

Sur le moyen unique :

Attendu, selon les arrêts attaqués (Douai, 18 décembre 2015), que M. Y... et dix-neuf autres mineurs, engagés entre 1962 et 1975 en qualité d'ouvrier mineur de fond par les houillères du Bassin Nord Pas-de-Calais, relevant à ce titre du statut du mineur, et ayant pris leur retraite entre 1989 et 2005, ont saisi la juridiction prud'homale aux fins d'obtenir la condamnation de l'Agence nationale pour la garantie des droits des mineurs (l'ANGDM), qui assure le service des prestations et avantages dus aux anciens agents retraités des mines et à leurs ayants droit, au paiement de diverses sommes au titre d'un capital représentant les prestations de logement, d'un capital représentant les prestations de chauffage et de dommages-intérêts pour perte de chance résultant d'une discrimination fondée sur leur nationalité marocaine et leur âge ;

Attendu que les mineurs retraités font grief aux arrêts de les débouter de l'intégralité de leurs demandes alors, selon le moyen :

1°/ qu'en matière de discrimination, s'il appartient au salarié d'établir les éléments laissant présumer l'existence d'une discrimination, c'est à l'employeur de prouver l'absence de discrimination ; qu'il est constant que l'ANGR, pendant plus de dix ans, puis, l'ANGDM, en 2005, se sont systématiquement opposés à toutes les demandes de rachat des prestations de logement et de chauffage au motif que le rachat n'était accordé qu'« aux agents français ou étrangers ressortissants de la CEE » et sous réserve, pour les prestations de logement, de ne pas avoir atteint, au moment de la demande, l'âge limite de 65 ans » ; que le refus systématique opposé par l'ANGDM aux mineurs marocains à leurs demandes de rachat d'indemnités de logement et de chauffage laissait supposer par lui-même une discrimination à l'égard de l'ensemble des mineurs répondant à ces caractéristiques et il appartenait dès lors à l'ANGDM de démontrer que ceux-ci n'avaient pas fait l'objet d'une discrimination ; qu'en refusant d'examiner l'existence d'une discrimination aux seuls motifs que les anciens mineurs n'apportaient pas la preuve qu'ils avaient fait une demande écrite, la cour d'appel a violé les articles 6 et 9 du code de procédure civil, L. 1134-1 du code du travail, ensemble l'article 14 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales amendée par le Protocole n° 11, l'article 1er du premier Protocole additionnel à ladite Convention, l'article 3, alinéa 1er, paragraphe c, de la directive n° 2000/78/CE du Conseil de l'Union européenne du 27 novembre 2000 portant création d'un cadre général en faveur de l'égalité de traitement en matière d'emploi et de travail, chapitre I de la directive n° 2000/43/CE du Conseil de l'Union européenne du 29 juin 2000 relative à la mise en oeuvre du principe de l'égalité de traitement entre les personnes sans distinction de race ou d'origine ethnique, l'article 64 de l'accord euro-méditerranéen CE - Maroc du 26 février 1996 et l'article 38 de l'accord de coopération entre la CEE et la République algérienne démocratique et populaire signé le 26 avril 1976 et approuvé par le règlement communautaire n° 2210/78 du 26 septembre 1978 ;

2°/ que l'article 23 du décret n° 46-1433 du 14 juin 1946 portant statut des mineurs accordait aux agents retraités le bénéfice des prestations de logement, sans soumettre cet avantage à une limite d'âge des demandeurs ; qu'il est constant que l'ANGR, pendant plus de dix ans, puis, l'ANGDM, en 2005, se sont systématiquement opposés à toutes les demandes de rachat des prestations de logement et de chauffage de mineurs marocains ou algériens âgés de plus de 65 ans au motif que le rachat n'était accordé qu'« aux agents français ou étrangers ressortissants de la CEE et sous réserve, pour les prestations de logement, de ne pas avoir atteint, au moment de la demande, l'âge limite de 65 ans » ; que le dépassement d'âge et la nationalité des réclamants entraînaient l'impossibilité de fait de présenter une demande, lors de leur mise à la retraite, face au refus de principe de l'ANGDM ; qu'en exigeant des mineurs que chacun apporte la preuve qu'il avait fait une telle demande écrite quand le refus systématique opposé par l'ANGDM rendait, en toute hypothèse, vaine une telle demande, la cour d'appel a violé l'article 23 du décret n° 46-1433 du 14 juin 1946 portant statut des mineurs, ensemble l'article L. 1134-1 du code du travail, l'article 14 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales amendée par le Protocole n° 11, l'article 1er du premier Protocole additionnel à ladite Convention, l'article 3, alinéa 1er, paragraphe c, de la directive n° 2000/78/CE du Conseil de l'Union européenne du 27 novembre 2000 portant création d'un cadre général en faveur de l'égalité de traitement en matière d'emploi et de travail, chapitre I de la directive n° 2000/43/CE du Conseil de l'Union européenne du 29 juin 2000 relative à la mise en oeuvre du principe de l'égalité de traitement entre les personnes sans distinction de race ou d'origine ethnique, l'article 64 de l'accord euro-méditerranéen CE - Maroc du 26 février 1996 et l'article 38 de l'accord de coopération entre la CEE et la République algérienne démocratique et populaire signé le 26 avril 1976 et approuvé par le règlement communautaire n° 2210/78 du 26 septembre 1978 ;

3°/ qu'il est constant que l'ANGR, pendant plus de dix ans, puis, l'ANGDM, en 2005, se sont systématiquement opposés à toutes les demandes de rachat des prestations de logement et de chauffage faite par les anciens mineurs marocains ou algériens au motif que le rachat n'était accordé qu'« aux agents français ou étrangers ressortissants de la CEE et sous réserve, pour les prestations de logement, de ne pas avoir atteint, au moment de la demande, l'âge limite de 65 ans » ; que la circulaire du 88/092 de l'EPIC Charbonnages de France du 9 février 1988 a été jugée illégale par un arrêt du Conseil d'Etat du 5 juin 2009 (n° 312990) ; qu'en se fondant sur cette circulaire pour retenir que chacun des mineurs devait apporter la preuve qu'il avait fait une telle demande écrite, la cour d'appel a violé l'article 23 du décret n° 46-1433 du 14 juin 1946 portant statut des mineurs, ensemble l'article L. 1134-1 du code du travail, l'article 14 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales amendée par le Protocole n° 11, l'article 1er du premier Protocole additionnel à ladite Convention, l'article 3, alinéa 1er, paragraphe c, de la directive n° 2000/78/CE du Conseil de l'Union européenne du 27 novembre 2000 portant création d'un cadre général en faveur de l'égalité de traitement en matière d'emploi et de travail, chapitre I de la directive n° 2000/43/CE du Conseil de l'Union européenne du 29 juin 2000 relative à la mise en oeuvre du principe de l'égalité de traitement entre les personnes sans distinction de race ou d'origine ethnique, l'article 64 de l'accord euro-méditerranéen CE - Maroc du 26 février 1996 et l'article 38 de l'accord de coopération entre la CEE et la République algérienne démocratique et populaire signé le 26 avril 1976 et approuvé par le règlement communautaire n° 2210/78 du 26 septembre 1978 ;

4°/ qu'une personne qui s'estime victime d'une discrimination est tenue d'établir des faits qui permettent de présumer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte ; que pour apprécier les éléments présentés par le demandeur, les juges sont tenus de les apprécier dans leur ensemble et ne peuvent pour conclure à l'absence de discrimination, les examiner un à un pour retenir qu'ils ne permettent pas de présumer l'existence d'une discrimination ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a examiné un à un les éléments établis par les anciens salariés pour écarter tour à tour les éléments produits aux fins d'établir l'existence d'une pratique discriminatoire de l'ANGDM à l'encontre des mineurs retraités marocains, en retenant que les arrêts rendus dont se prévalaient les mineurs retraités marocains l'avaient été dans des espèces distinctes, de même que la lettre de l'ANGDM adressée à la HALDE et par laquelle elle reconnaissait avoir recouru à un critère discriminatoire prohibé en refusant aux mineurs marocains le bénéfice du rachat d'indemnité de logement et de chauffage, alors qu'il appartient au juge d'apprécier ensemble les éléments de faits pour déterminer s'ils permettent de présumer l'existence d'une discrimination, la cour d'appel a violé ensemble les articles L. 1132-1 et L. 1134-1 du code du travail, ensemble l'article 14 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales amendée par le Protocole n° 11, l'article 1er du premier Protocole additionnel à ladite Convention, l'article 3, alinéa 1er, paragraphe c, de la directive n° 2000/78/CE du Conseil de l'Union européenne du 27 novembre 2000 portant création d'un cadre général en faveur de l'égalité de traitement en matière d'emploi et de travail, chapitre I de la directive n° 2000/43/CE du Conseil de l'Union européenne du 29 juin 2000 relative à la mise en oeuvre du principe de l'égalité de traitement entre les personnes sans distinction de race ou d'origine ethnique, l'article 64 de l'accord euro-méditerranéen CE - Maroc du 26 février 1996 et l'article 38 de l'accord de coopération entre la CEE et la République algérienne démocratique et populaire signé le 26 avril 1976 et approuvé par le règlement communautaire n° 2210/78 du 26 septembre 1978 ;

Mais attendu que la cour d'appel, qui a retenu que les mineurs retraités ne justifiaient pas avoir formé auprès de l'ANGDM une demande de rachat sous forme de capital des indemnités de logement et de chauffage, ni avoir reçu de l'ANGDM une décision de refus, a, par ce seul motif, légalement justifié sa décision ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE les pourvois ;

Condamne les demandeurs aux dépens ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre janvier deux mille dix-huit.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen - rédigé en termes identiques aux pourvois n° N 16-24.409 à F 16-24.426, U 16-25.243 et V 16-25.244 - produit par Me Rémy-Corlay, avocat aux Conseils, pour, respectivement, MM. Y..., Z...      , A..., B..., C..., D..., E...   ,        F...    , P...  , T...  , G..., H..., U...         , I..., XX..., V...  , J..., W... , K... et L...

Les demandeurs aux pourvois font grief aux arrêts attaqués de les AVOIR déboutés de l'intégralité de leurs demandes ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE : « En vertu des articles 22 c et 23 d du Décret n° 46-1433 du 14 juin 1946 relatif au statut du personnel des exploitations minières et assimilées, les anciens membres du personnel et leur conjoint survivant, bénéficiaires de prestations à la charge de la Caisse autonome nationale de la sécurité sociale dans les mines ou du régime générale de sécurité sociale, au titre des risques vieillesse, invalidité et décès (pensions de survivants) ou titulaires de rentes prévues par la législation générale sur les accidents du travail et les maladies professionnelles, peuvent recevoir une indemnité de chauffage ainsi que des prestations de logement en nature ou en espèces, dont les montants et les conditions d'attribution sont fixés par arrêté du ministre chargé des mines et du ministre chargé du budget. Il est constant que dans le but de favoriser l'accession à la propriété des mineurs, l'Etablissement public industriel et commercial Charbonnages de France, aux droits duquel se trouve l'ANGDM, a offert à ses salariés la possibilité de demander contractuellement à percevoir les avantages en nature de logement et de chauffage sous forme d'un capital versé en une fois et calculé à partir d'un coefficient de capitalisation déterminé en fonction de l'âge auquel l'ayant droit contracte et de la valeur de l'indemnité annuelle de logement en vigueur à cette date. Les conditions et modalités d'application de cette faculté de rachat sont énoncées dans une circulaire n° 88/092 de l'EPIC Charbonnages de France, en date du 9 février 1988. Il y est notamment énoncé que pour prétendre au bénéfice du rachat, « le demandeur doit avoir acquis à titre définitif le droit à la prestation [de logement ou de chauffage] au moment de son départ, qu'il s'agisse d'un départ à la retraite normale ou en retraite anticipée ». Par ailleurs, les membres du personnel retraités n'ont accès au rachat de l'indemnité de logement que s'ils sont âgés, au moment de leur demande de moins de 65 ans et s'ils s'engagent à acheter un logement attribué par les Houillères. Le rachat des avantages en nature suppose donc que le salarié qui en sollicite le bénéfice ait formulé une demande en ce sens. Au cas d'espèce, Monsieur Y... se fondant sur une série de dix arrêts rendus par la présente Cour, autrement composée, le 31 mars 2011, soutient qu'il s'est vu opposer par l'ANGDM un refus de rachat qui revêt un caractère discriminatoire, au motif que « depuis plus de dix ans » le bénéfice du versement d'un capital a été conditionné au fait d'être ressortissant de la CEE et d'être âgé de moins de 65 ans. En premier lieu et ainsi que le relève à juste titre l'ANGDM, il doit être relevé qu'il n'est produit par l'appelant aucune demande tendant au bénéfice du rachat sous forme de capital des indemnités de logement et de chauffage, ni surtout aucun refus formalisé par l'Association intimée pour les motifs allégués de nationalité et d'âge, de nature à laisser supposer une discrimination tant au regard des dispositions de droit international applicables dans l'ordre juridique interne (article 14 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales amendée par le protocole n° 11, article 3 alinéa 1er paragraphe c de la Directive N°2000/78/CE du Conseil de l'Union Européenne du 27 novembre 2000 portant création d'un cadre général en faveur de l'égalité de traitement en matière d'emploi et de travail, Chapitre I de la Directive N°2000/43/CE du Conseil de l'Union Européenne du 29 juin 2000 relative à la mise en oeuvre du principe de l'égalité de traitement entre les personnes sans distinction de race ou d'origine ethnique), qu'au sens des dispositions de l'article L1132-1 du Code du travail, étant ici observé qu'outre l'absence de demande et de décision négative de l'ANGDM fondé sur des motifs de nature discriminatoire, il n'est produit aucun élément de fait de nature à étayer la demande. A ce dernier titre et outre la prohibition de principe des arrêts de règlement telle qu'elle résulte des dispositions de l'article 5 du Code civil, les décision rendues le 31 mars 2011 par la présente cour, dans des espèces distinctes dans lesquelles des échanges de courriers formalisaient systématiquement une demande de l'ancien mineur et un refus réitéré de l'ANGDM d'accéder à cette demande de rachat sous forme de versement d'un capital, notamment en raison de la non appartenance des intéressés à la Communauté Economique Européenne, ne sauraient dispenser l'appelant d'établir l'existence de faits de nature à laisser supposer une discrimination. En second lieu et après avoir indiqué en page 2 de ses écritures qu'il « a fait plusieurs demandes liées à la reconnaissance de ses droits quant au rachat de ses avantages en nature et ces demandes ont toujours été refusées », ce dont il ne justifie par, Monsieur Y... indique en page suivante en réponse au moyen soulevé par l'ANGDM, « que le fait d'avoir demandé ou pas ne change rien au problème et qu'il s'agit bien comme l'a reconnu l'ANGDM à la HALDE d'une discrimination qui a amené à une perte de chance pour ceux-ci ». La réponse apportée le 31 octobre 2007 par l'ANGDM à la HALDE, dans le cadre d'une instance distincte concernant un sieur Mohamed Q..., ne peut pas plus et pour les mêmes motifs que ceux précédemment développés, formaliser un comportement fautif de l'ANGDM envers Monsieur Y..., dès lors qu'au cas présent, il n'est justifié d'aucun refus fondé sur des motifs discriminatoires en réponse à une demande précise de bénéficier d'un rachat de prestations de logement et de chauffage en capital. L'ANGDM établit en outre que la formulation d'une demande de rachat n'a aucun caractère systématique, puisqu'il résulte d'un courrier de la Direction du service aux bénéficiaires et de la réglementation en date du 10 juillet 2013, que depuis le 1er janvier 2000, seulement 13,26% des agents ayant la possibilité de capitaliser leur prestation logement avaient formulé une demande en ce sens. Enfin, l'interprétation à laquelle se livre Monsieur Y... quant à la motivation des arrêts susvisés du 31 mars 2011 qui ont notamment statué sur le fait que les mineurs concernés par ces procédures n'aient pas formalisé leurs demandes de rachat au moment de faire valoir leurs droits à la retraite, en retenant notamment les circonstances selon laquelle les intéressés ont pu alors être dissuadés « par des refus opposés aux mineurs retraités », est erronée dans la mesure où n'est ici évoquée que la question du moment où a été formalisée la demande et non l'existence même de celle-ci, étant rappelé que dans toutes les instances ayant donné lieu aux arrêts dont se prévaut l'appelant, la Cour, citant les échanges de courriers intervenus entre le demandeur au rachat et l'ANGDM relevait que cette dernière avait « clairement refusé à Mr X l'avantage statutaire lié au contrat de travail de rachat des indemnités, devant favoriser l'accès à la propriété, en raison de sa nationalité et de son âge (
) », ces deux discriminations étant prohibées. En l'absence de toute justification d'une demande de rachat des avantages en nature sous forme de capital et d'un refus discriminatoire opposé par l'ANGDM à Monsieur Y..., ce dernier doit être débouté de l'intégralité de ses demandes, fondée sur une discrimination qui n'est pas établie. Le jugement entrepris sera donc confirmé ».

ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE : « Sur les demandes au titre des indemnités de logement et de chauffage Vu les articles 6 et 9 du code de procédure civile, Attendu qu'il ressort de ces textes que le demandeur a la charge d'alléguer et de prouver les faits à même d'établir le bien fondé de sa demande, Attendu que contrairement à ce qu'il affirme, il ne prouve pas avoir demandé le rachat de ses avantages logement et chauffage, Attendu au surplus que le demandeur ne fournit aucun élément pour justifier les sommes demandées à ce titre qui ne peuvent donc être vérifiées et se borne à solliciter du Conseil « la formule sur deux têtes » pour une somme de 21282,30 euros pour l'indemnité de logement et 25898,27 euros pour l'indemnité de chauffage sans autre précision de fondement et de calcul, Attendu qu'il convient en conséquence de juger ces demandes mal fondées et de les rejeter. Sur la demande de 60000 euros à titre de dommages et intérêts pour la perte de chance subie Attendu que le Demandeur fonde cette demande judiciaire en exposant avoir fait plusieurs demandes liées à la reconnaissance de ses droits au rachat de ses avantages en nature logement et chauffage et que ces demandes ont toujours été refusées par les Houillères en raison de sa nationalité marocaine et de son âge ; qu'il expose que ce refus fondé sur un motif discriminatoire est fautif et qu'il lui a fait perdre une chance de pouvoir acheter à prix modique (estimé à 80000 à 100000 francs pour les années 1980 à 1990) son logement avec le capital de rachat et ainsi se constituer un patrimoine immobilier bonifiable dans le temps (estimé 100000 à 120000 euros aujourd'hui) lui permettant de se loger, aux lieu et place de la mise à disposition gratuite du logement, mais aussi de pouvoir transmettre ce capital bonifié à ses héritiers, alors que l'avantage en nature par essence viager s'annulera à son décès, Attendu que le demandeur invoque à l'appui de sa demande l'article 14 et l'article 1er du Protocole numéro 1 de la Convention Européenne des droits de l'Homme, et apporte une délibération de la Haute Autorité de lutte contre les Discriminations et des courriers du défendeur, Attendu néanmoins, au vu des éléments fournis par le défendeur, que la demande de capitalisation par rachat des avantages viagers de gratuité du logement et du chauffage n'est pas systématique et que certains bénéficiaires préfèrent garder l'avantage viager, Attendu d'autre part que le statut du Mineur prévoit, dans les conditions qu'il précise, le principe de la gratuité du logement et du chauffage pour les mineurs et les retraités, Attendu à ce sujet qu'il n'est reproché aucune discrimination au Défendeur au préjudice du Demandeur quant à l'application de ce statut, Attendu que la capitalisation par rachat de ces avantages de gratuité du logement et du chauffage est une dérogation qui suppose une demande du bénéficiaire, Attendu qu'un refus à une telle demande, motivé par des motifs caractérisant une discrimination illicite serait fautif et susceptible d'ouvrir droit à une indemnisation du préjudice, notamment de perte de chance, pouvant en découler, Attendu cependant qu'en l'espèce le demandeur n'apporte pas la preuve de ses allégations quant à ses demandes de rachat qu'il aurait faites et qui lui aurait été refusées par le défendeur pour des motifs caractérisant une discrimination illicite, Qu'en effet les courriers de refus du Défendeur à des demandes de rachat, produits par le demandeur ne le concerne pas mais concerne d'autres personnes, Attendu en conséquence que le Demandeur n'établit pas une perte de chance qu'il aurait subie du fait du Défendeur, Attendu qu'au vu de ces constatations, il convient de dire la demande mal fondée et de la rejeter ».

ALORS QUE 1°) qu'en matière de discrimination, s'il appartient au salarié d'établir les éléments laissant présumer l'existence d'une discrimination, c'est à l'employeur de prouver l'absence de discrimination ; qu'il est constant que l'ANGR, pendant plus de 10 ans, puis, l'ANGDM, en 2005, se sont systématiquement opposés à toutes les demandes de rachat des prestations de logement et de chauffage au motif que le rachat n'était accordé qu'« aux agents français ou étrangers ressortissants de la CEE » et sous réserve, pour les prestations de logement, de ne pas avoir atteint, au moment de la demande, l'âge limite de 65 ans » ; que le refus systématique opposé par l'ANGDM aux mineurs marocains à leurs demandes de rachat d'indemnités de logement et de chauffage laissait supposer par lui-même une discrimination à l'égard de l'ensemble des mineurs répondant à ces caractéristiques et il appartenait dès lors à l'ANGDM de démontrer que ceux-ci n'avaient pas fait l'objet d'une discrimination ; qu'en refusant d'examiner l'existence d'une discrimination aux seuls motifs que les anciens mineurs n'apportaient pas la preuve qu'ils avaient fait une demande écrite, la Cour d'appel a violé les articles 6 et 9 du code de procédure civil, L.1134-1 du code du travail, ensemble l'article 14 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales amendée par le protocole n° 11, l'article 1er du Premier Protocole additionnel à ladite Convention, l'article 3 alinéa 1er paragraphe c de la Directive N°2000/78/CE du Conseil de l'Union Européenne du 27 novembre 2000 portant création d'un cadre général en faveur de l'égalité de traitement en matière d'emploi et de travail, Chapitre I de la Directive N°2000/43/CE du Conseil de l'Union Européenne du 29 juin 2000 relative à la mise en oeuvre du principe de l'égalité de traitement entre les personnes sans distinction de race ou d'origine ethnique, l'article 64 de l'accord Euro-méditerranéen CE - Maroc du 26 février 1996 et l'article 38 de l'accord de coopération entre la CEE et la République algérienne démocratique et populaire signé le 26 avril 1976 et approuvé par le règlement communautaire n° 2210/78 du 26 septembre 1978 ;

ALORS QUE 2°) l'article 23 du décret n° 46-1433 du 14 juin 1946 portant Statut des mineurs accordait aux agents retraités le bénéfice des prestations de logement, sans soumettre cet avantage à une limite d'âge des demandeurs ; qu'il est constant que l'ANGR, pendant plus de 10 ans, puis, l'ANGDM, en 2005, se sont systématiquement opposés à toutes les demandes de rachat des prestations de logement et de chauffage de mineurs marocains ou algériens âgés de plus de 65 ans au motif que le rachat n'était accordé qu'« aux agents français ou étrangers ressortissants de la CEE et sous réserve, pour les prestations de logement, de ne pas avoir atteint, au moment de la demande, l'âge limite de 65 ans » ; que le dépassement d'âge et la nationalité des réclamants entraînaient l'impossibilité de fait de présenter une demande, lors de leur mise à la retraite, face au refus de principe de l'ANGDM ; qu'en exigeant des mineurs que chacun apporte la preuve qu'il avait fait une telle demande écrite quand le refus systématique opposé par l'ANGDM rendait en toute hypothèse vaine une telle demande la cour d'appel a violé l'article 23 du décret n° 46-1433 du 14 juin 1946 portant Statut des mineurs ensemble L.1134-1 du code du travail, l'article 14 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales amendée par le protocole n° 11, l'article 1er du Premier Protocole additionnel à ladite Convention, l'article 3 alinéa 1er paragraphe c de la Directive N°2000/78/CE du Conseil de l'Union Européenne du 27 novembre 2000 portant création d'un cadre général en faveur de l'égalité de traitement en matière d'emploi et de travail, Chapitre I de la Directive N°2000/43/CE du Conseil de l'Union Européenne du 29 juin 2000 relative à la mise en oeuvre du principe de l'égalité de traitement entre les personnes sans distinction de race ou d'origine ethnique, l'article 64 de l'accord Euro-méditerranéen CE - Maroc du 26 février 1996 et l'article 38 de l'accord de coopération entre la CEE et la République algérienne démocratique et populaire signé le 26 avril 1976 et approuvé par le règlement communautaire n° 2210/78 du 26 septembre 1978 ;

ALORS QUE 3°) qu'il est constant que l'ANGR, pendant plus de 10 ans, puis, l'ANGDM, en 2005, se sont systématiquement opposés à toutes les demandes de rachat des prestations de logement et de chauffage faite par les anciens mineurs marocains ou algériens au motif que le rachat n'était accordé qu'« aux agents français ou étrangers ressortissants de la CEE et sous réserve, pour les prestations de logement, de ne pas avoir atteint, au moment de la demande, l'âge limite de 65 ans » ; que la circulaire du 88/092 de l'EPIC Charbonnages de France du 9 février 1988 a été jugée illégale par un arrêt du Conseil d'Etat du 5 juin 2009 (n° 312990) ; qu'en se fondant sur cette circulaire pour retenir que chacun des mineurs devait apporter la preuve qu'il avait fait une telle demande écrite la cour d'appel a violé l'article 23 du décret n° 46-1433 du 14 juin 1946 portant Statut des mineurs ensemble L.1134-1 du code du travail, l'article 14 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales amendée par le protocole n° 11, l'article 1er du Premier Protocole additionnel à ladite Convention, l'article 3 alinéa 1er paragraphe c de la Directive N°2000/78/CE du Conseil de l'Union Européenne du 27 novembre 2000 portant création d'un cadre général en faveur de l'égalité de traitement en matière d'emploi et de travail, Chapitre I de la Directive N°2000/43/CE du Conseil de l'Union Européenne du 29 juin 2000 relative à la mise en oeuvre du principe de l'égalité de traitement entre les personnes sans distinction de race ou d'origine ethnique l'article 64 de l'accord Euro-méditerranéen CE - Maroc du 26 février 1996 et l'article 38 de l'accord de coopération entre la CEE et la République algérienne démocratique et populaire signé le 26 avril 1976 et approuvé par le règlement communautaire n° 2210/78 du 26 septembre 1978 ;

ALORS QUE 4°) une personne qui s'estime victime d'une discrimination est tenue d'établir des faits qui permettent de présumer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte ; que pour apprécier les éléments présentés par le demandeur, les juges sont tenus de les apprécier dans leur ensemble et ne peuvent pour conclure à l'absence de discrimination, les examiner un à un pour retenir qu'ils ne permettent pas de présumer l'existence d'une discrimination ; qu'en l'espèce, la Cour a examiné un à un les éléments établis par les anciens salariés pour écarter tour à tour les éléments produits aux fins d'établir l'existence d'une pratique discriminatoire de l'ANGDM à l'encontre des mineurs retraités marocains, en retenant que les arrêts rendus dont se prévalaient les mineurs retraités marocains l'avaient été dans des espèces distinctes, de même que la lettre de l'ANGDM adressée à la HALDE et par laquelle elle reconnaissait avoir recouru à un critère discriminatoire prohibé en refusant aux mineurs marocains le bénéfice du rachat d'indemnité de logement et de chauffage, alors qu'il appartient au juge d'apprécier ensemble les éléments de faits pour déterminer s'ils permettent de présumer l'existence d'une discrimination, la cour d'appel a violé ensemble les articles L. 1132-1 et L. 1134-1 du code du travail, ensemble l'article 14 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales amendée par le protocole n° 11, l'article 1er du Premier Protocole additionnel à ladite Convention, l'article 3 alinéa 1er paragraphe c de la Directive N°2000/78/CE du Conseil de l'Union Européenne du 27 novembre 2000 portant création d'un cadre général en faveur de l'égalité de traitement en matière d'emploi et de travail, Chapitre I de la Directive N°2000/43/CE du Conseil de l'Union Européenne du 29 juin 2000 relative à la mise en oeuvre du principe de l'égalité de traitement entre les personnes sans distinction de race ou d'origine ethnique l'article 64 de l'accord Euro-méditerranéen CE - Maroc du 26 février 1996 et l'article 38 de l'accord de coopération entre la CEE et la République algérienne démocratique et populaire signé le 26 avril 1976 et approuvé par le règlement communautaire n° 2210/78 du 26 septembre 1978.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 16-24409;16-24410;16-24411;16-24412;16-24413;16-24414;16-24415;16-24416;16-24417;16-24418;16-24419;16-24420;16-24421;16-24422;16-24423;16-24424;16-24425;16-24426;16-25243;16-25244
Date de la décision : 24/01/2018
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Douai, 18 décembre 2015


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 24 jan. 2018, pourvoi n°16-24409;16-24410;16-24411;16-24412;16-24413;16-24414;16-24415;16-24416;16-24417;16-24418;16-24419;16-24420;16-24421;16-24422;16-24423;16-24424;16-24425;16-24426;16-25243;16-25244


Composition du Tribunal
Président : M. Huglo (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Rémy-Corlay, SCP Thouin-Palat et Boucard

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:16.24409
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