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17/01/2018 | FRANCE | N°16-26965

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 17 janvier 2018, 16-26965


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon le jugement attaqué (tribunal d'instance PARIS 8e  , 7 novembre 2016), que le 24 mai 2016, la fédération des services publics et des services de santé Force Ouvrière (la fédération) a désigné Mmes Y... et Z... en qualité de délégué syndical central au sein de l'unité économique et sociale formée par différentes sociétés du groupe Korian ; que la société Korian (la société), contestant la représentativité de la fédération au niveau de l'unité économ

ique et sociale, a saisi le tribunal d'instance d'une demande d'annulation de ces désignat...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon le jugement attaqué (tribunal d'instance PARIS 8e  , 7 novembre 2016), que le 24 mai 2016, la fédération des services publics et des services de santé Force Ouvrière (la fédération) a désigné Mmes Y... et Z... en qualité de délégué syndical central au sein de l'unité économique et sociale formée par différentes sociétés du groupe Korian ; que la société Korian (la société), contestant la représentativité de la fédération au niveau de l'unité économique et sociale, a saisi le tribunal d'instance d'une demande d'annulation de ces désignations ;

Attendu que la société fait grief au jugement de la débouter de sa demande d'annulation des désignations par la fédération des personnels des services publics et des services de santé Force Ouvrière, de Mmes Y... et Z... en qualité de délégué syndical central, alors, selon le moyen :

1°/ que la représentativité d'un syndicat pour la désignation d'un délégué syndical central d'entreprise s'apprécie par rapport à l'ensemble du personnel de l'entreprise ; qu'un syndicat ne peut désigner un délégué syndical central que s'il est présent et jouit d'une influence significative dans chaque établissement de l'entreprise quand bien même le cumul des suffrages au niveau de l'entreprise toute entière lui permettrait d'atteindre plus de 10 % des suffrages exprimés ; qu'en l'espèce, le tribunal d'instance a constaté que si la fédération des personnels des services publics et des services de santé Force Ouvrière avait obtenu lors des dernières élections aux comités d'établissement 11,51 % des voix au niveau de l'entreprise Korian France, composée de quatre établissements distincts, et obtenu plus de 10 % des suffrages exprimés aux élections au sein du comité d'établissement « EHPAD Sud » et au comité d'établissement « sanitaire », elle n'avait pas présenté de candidats aux élections du comité d'établissement « Direction d'établissement et services supports » et n'avait pas atteint le seuil de 10 % au sein du comité d'établissement « EHPAD Nord » ; qu'il a également relevé qu'aux termes de l'article 4.2 de l'avenant n° 1 à l'accord collectif au dialogue social au sein de l'Ues Korian, les organisations syndicales devaient veiller à désigner en qualité de délégués syndicaux centraux, dans la mesure du possible, des salariés appartenant aux deux principales activités de Korian France (EHPAD/Sanitaire) ; qu'en retenant cependant qu'à l'aune de cette disposition conventionnelle la fédération des personnels des services publics et des services de santé Force Ouvrière pouvait procéder aux désignations de délégués syndicaux centraux, le tribunal d'instance a violé les articles L. 2121-1, L. 2122-1 et L. 2143-5 du code du travail ;

2°/ qu'en toute hypothèse, les critères posés par l'article L. 2121-1 du code du travail doivent être tous réunis pour établir la représentativité d'un syndicat ; qu'il appartient au juge du fond de constater la réunion des critères tenant au respect des valeurs républicaines, à l'indépendance et à la transparence financière qui doivent être satisfaits de manière autonome, et de ceux relatifs à l'influence, aux effectifs d'adhérents, aux cotisations, à l'ancienneté et à l'audience électorale appréciés globalement ; qu'en retenant que la fédération des services publics et des services de santé Force Ouvrière satisfaisait aux critères de représentativité dans le périmètre de l'entreprise Korian France sans aucunement justifier en quoi, en dehors même de l'audience électorale, ce syndicat aurait rempli les autres critères de représentativité, le tribunal d'instance a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 2121-1, L. 2122-1 et L. 2143-5 du code du travail ;

Mais attendu que la représentativité d'une union de syndicats pour la désignation d'un représentant syndical au comité central d'entreprise doit s'apprécier par rapport à l'ensemble du personnel de l'entreprise, sans qu'il soit nécessaire que cette union soit représentative dans tous les établissements de l'entreprise ;

Et attendu qu'usant de son pouvoir d'appréciation des éléments de fait et de preuve qui lui étaient soumis, le tribunal d'instance devant qui n'était pas invoquée l'absence des critères relatifs à l'indépendance, au respect des valeurs républicaines et à la transparence financière, et qui a constaté que si la fédération n'avait pas présenté de candidat dans un établissement, elle était représentative dans les deux établissements regroupant les salariés appartenant aux deux principales activités de l'entreprise et avait obtenu 9,79 % des voix dans un troisième établissement, a ainsi fait ressortir l'influence de la fédération dans l'ensemble de l'unité économique et sociale, et a, procédant à une appréciation globale des critères de l'article L. 2121-1 du code du travail, souverainement estimé que la fédération était représentative au niveau de l'entreprise ;

D'où il suit que le moyen, nouveau et mélangé de fait et de droit en sa seconde branche, partant irrecevable, n'est pas fondé pour le surplus ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Korian à payer à la fédération des services publics et des services de santé Force ouvrière, la somme globale de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept janvier deux mille dix-huit.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

.

Moyen produit par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour la société Korian.

Il est fait grief au jugement attaqué d'avoir débouté la société Korian de l'ensemble de ses demandes et, notamment, de sa demande d'annulation des désignations, par la fédération des personnels des services publics et des services de santé Force Ouvrière, de Mmes Evelyne Y... et Isabelle Z... en qualité de déléguées syndicales centrales au sein de l'entreprise Korian France.

AUX MOTIFS QUE sur l'annulation des désignations litigieuses, aux termes de l'article L 2143-5 du code du travail, dans les entreprises d'au moins deux mille salariés comportant au moins deux établissements d'au moins cinquante salaries chacun, chaque syndicat représentatif dans l'entreprise peut désigner un délégué syndical central d'entreprise, distinct des délégués syndicaux d'établissement ; que ce délégué syndical central est désigné par un syndicat qui a recueilli au moins 10 % des suffrages exprimés au premier tour des dernières élections des titulaires au comité d'entreprise ou de la délégation unique du personnel ou, à défaut, des délégués du personnel, quel que soit le nombre de votants, en additionnant les suffrages de l'ensemble des établissements compris dans ces entreprises ; que l'ensemble des dispositions relatives au délégué syndical d'entreprise est applicable au délégué syndical central ; qu'aux termes de l'article L 2121-1 du même code, la représentativité des organisations syndicales est déterminée d'après les critères cumulatifs suivants : 1° Le respect des valeurs républicaines 2° L'indépendance ; 3° La transparence financière ; 4° Une ancienneté minimale de deux ans dans le champ professionnel et géographique couvrant le niveau de négociation ; que cette ancienneté s'apprécie à compter de la date de dépôt légal des statuts ; 5° L'audience établie selon les niveaux de négociation conformément aux articles L 2122-1, L 2122-5, L 2122-6 et L 2122-9, 6° L'influence, prioritairement caractérisée par l'activité et l'expérience ; 7° Les effectifs d'adhérents et les cotisations ; que lorsque la désignation s'effectue au niveau d'une unité économique et sociale, le seuil de 10 % fixé par l'article L 2121-1 du code du travail se calcule en additionnant la totalité des suffrages obtenus lors des élections au sein des différentes entités composant l'unité économique et sociale ; qu'il en résulte que le calcul de l'audience pour la désignation d'un délégué syndical au sein de l'unité économique et sociale tient compte de tous les suffrages ainsi obtenus par les syndicats affiliés à la même confédération syndicale ; qu'en l'espèce, il est constant que l'entreprise Korian emploie plus de deux mille salariés répartis par l'accord collectif relatif au dialogue social précité en quatre établissements distincts : comité d'établissement "sanitaire", comité d'établissement "EHPAD nord", comité d'établissement "EHPAD sud", comité d'établissement "Direction d'établissement et services supports" ; que des élections aux comités d'établissement ont eu lieu le 08/03/2016 ; qu'au sein du comité d'établissement "EHPAD nord", la Fédération des personnels des services publics, de santé Force Ouvrière a obtenu 499 des 5099 suffrages exprimés dans l'établissement soit 9,79% des voix ; qu'au sein du comité d'établissement "EHPAD Sud", elle a obtenu 600 des 3976 suffrages exprimés dans l'établissement soit 15,09 % des voix, au sein du comité d'établissement "sanitaire", elle a obtenu 381 des 3160 suffrages exprimés soit 12,06 % des voix et, enfin, au sein du comité d'établissement "Direction d'établissement et services supports", elle n'a pas obtenu de suffrage ; que le calcul opéré par la société Korian de l'audience électorale de la Fédération des personnels des services publics de santé Force Ouvrière démontre donc que la Fédération des personnels des services publics de santé Force Ouvrière a obtenu 1480 des 12856 suffrages exprimés soit 11,51 % des voix ; qu'en outre, ces résultats doivent être mis en corrélation avec l'avenant n° 1 à l'accord collectif relatif au dialogue social qui stipule en son article 4.2 que "les organisations syndicales veilleront à designer en qualité de délégués syndicaux centraux, dans la mesure du possible, des salariés appartenant aux deux principales activités de Korian France (EHRD/Sanitaire) afin que l'ensemble des filières métiers soit représenté" ; qu'en effet, à l'aune de cet article, le fait que la Fédération des personnels des services publies de Santé Force Ouvrière n'ait pas présenté de candidat au comité d'établissement "Direction d'établissement et services supports" et n'ait pas atteint le seuil de 10% au sein du comité d'établissement "EHPAD nord" n'est pas suffisant pour contester son audience dans l'entreprise toute entière dans la mesure où elle atteint ce seuil au sein du périmètre de l'unité économique et sociale mais encore au sein du comité d'établissement « sanitaire » et d'un des deux comités d'établissement "EHPAD" ; que dans ces conditions, la Fédération des personnels des services publics de santé Force Ouvrière satisfait aux critères de représentativité dans le périmètre de l'entreprise Korian France ce qui lui permettait de procéder aux désignations contestées ; qu'en conséquence, la société Korian sera déboutée de sa demande d'annulation des désignations de Evelyne Y... et de Isabelle Z... en qualité de déléguées syndicales centrales au sein de l'entreprise Korian France ; que sur les demandes accessoires, il est rappelé qu'il est statué sans frais ni forme conformément à l'article R 2143-5 du code du travail ; que la société Konan, qui succombe en ses prétentions, sera condamné à verser à la Fédération des personnels des services publics de santé Force Ouvrière une somme au titre de l'article 700 du code de procédure civile, que l'équité commande de fixer à 300 euros.

1) ALORS QUE la représentativité d'un syndicat pour la désignation d'un délégué syndical central d'entreprise s'apprécie par rapport à l'ensemble du personnel de l'entreprise ; qu'un syndicat ne peut désigner un délégué syndical central que s'il est présent et jouit d'une influence significative dans chaque établissement de l'entreprise quand bien même le cumul des suffrages au niveau de l'entreprise toute entière lui permettrait d'atteindre plus de 10 % des suffrages exprimés ; qu'en l'espèce, le tribunal d'instance a constaté que si la fédération des personnels des services publics et des services de santé Force Ouvrière avait obtenu lors des dernières élections aux comités d'établissement 11,51 % des voix au niveau de l'entreprise Korian France, composée de quatre établissements distincts, et obtenu plus de 10 % des suffrages exprimés aux élections au sein du comité d'établissement « EHPAD Sud » et au comité d'établissement « sanitaire », elle n'avait pas présenté de candidats aux élections du comité d'établissement « Direction d'établissement et services supports » et n'avait pas atteint le seuil de 10 % au sein du comité d'établissement « EHPAD Nord » ; qu'il a également relevé qu'aux termes de l'article 4.2 de l'avenant n° 1 à l'accord collectif au dialogue social au sein de l'Ues Korian, les organisations syndicales devaient veiller à désigner en qualité de délégués syndicaux centraux, dans la mesure du possible, des salariés appartenant aux deux principales activités de Korian France (EHPAD/Sanitaire) ; qu'en retenant cependant qu'à l'aune de cette disposition conventionnelle la fédération des personnels des services publics et des services de santé Force Ouvrière pouvait procéder aux désignations de délégués syndicaux centraux, le tribunal d'instance a violé les articles L 2121-1, L 2122-1 et L 2143-5 du code du travail.

2) ALORS QU'en toute hypothèse, les critères posés par l'article L. 2121-1 du code du travail doivent être tous réunis pour établir la représentativité d'un syndicat ; qu'il appartient au juge du fond de constater la réunion des critères tenant au respect des valeurs républicaines, à l'indépendance et à la transparence financière qui doivent être satisfaits de manière autonome, et de ceux relatifs à l'influence, aux effectifs d'adhérents, aux cotisations, à l'ancienneté et à l'audience électorale appréciés globalement ; qu'en retenant que la fédération des services publics et des services de santé Force Ouvrière satisfaisait aux critères de représentativité dans le périmètre de l'entreprise Korian France sans aucunement justifier en quoi, en dehors même de l'audience électorale, ce syndicat aurait rempli les autres critères de représentativité, le tribunal d'instance a privé sa décision de base légale au regard des articles L 2121-1, L 2122-1 et L 2143-5 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 16-26965
Date de la décision : 17/01/2018
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Tribunal d'instance de Paris 8ème, 07 novembre 2016


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 17 jan. 2018, pourvoi n°16-26965


Composition du Tribunal
Président : M. Huglo (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Haas, SCP Gatineau et Fattaccini

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:16.26965
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