LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le deuxième moyen :
Attendu, selon l'ordonnance attaquée, rendue par le premier président d'une cour d'appel (Douai, 13 octobre 2016, RG 16/03182), qu'un juge des libertés et de la détention a, sur le fondement de l'article L. 38 du livre des procédures fiscales, autorisé des agents de l'administration des douanes à procéder à des visites avec saisies dans des locaux et des dépendances sis à [...] (59), constituant le domicile de Mme Y... et les sièges sociaux des sociétés Akillis, Akillis-Saint-Honoré et Corely, afin de rechercher la preuve de la fraude qui aurait été commise par Mme Y... en matière de contributions indirectes et de taxes diverses s'appliquant à l'ouvrage de métaux précieux, par le biais des sociétés Akillis et Akillis-Saint-Honoré dont elle était gérante, et des sociétés Corely, FG Holding et FG Manufacture, dont elle détenait directement ou indirectement des titres sociaux ; que M. Y... et Mmes X... et Annette Y... (les consorts Y...), les sociétés Akillis, Akillis Saint-Honoré, Corely, FG Manufacture et FG Holding (les sociétés) ont relevé appel de l'ordonnance d'autorisation ;
Attendu que les consorts Y... et les sociétés font grief à l'ordonnance de confirmer la décision du juge des libertés et de la détention autorisant les visites alors, selon le moyen, que le juge doit vérifier de manière concrète que la demande d'autorisation qui lui est soumise est bien fondée, cette demande devant comporter tous les éléments d'information en possession de l'administration de nature à justifier la visite ; qu'il s'en déduit qu'en s'abstenant de produire les pièces justifiant du bien-fondé de sa demande, non seulement à l'appui de sa requête devant le juge des libertés et de la détention mais également devant le juge d'appel, l'administration ne met pas l'autorité judiciaire en mesure de vérifier de manière concrète le bien-fondé de la demande de visite qui lui est soumise ; qu'à cet égard, la circonstance que le juge des libertés et de la détention n'ait pas repris les éléments litigieux dans le texte de son ordonnance est inopérante ; qu'en refusant de censurer l'ordonnance pour ce motif, le juge d'appel a violé, par fausse application, l'article L. 38 du Livre des procédures fiscales ;
Mais attendu qu'ayant constaté que les éléments résultant des documents litigieux qui n'avaient pas été soumis au juge des libertés et de la détention n'avaient pas été repris dans la motivation de l'ordonnance, le premier président a pu retenir que le défaut de production de ces documents, qui n'avaient pas fondé la décision du juge des libertés et de la détention, n'était pas de nature à vicier celle-ci ; que le moyen n'est pas fondé ;
Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur les premier, troisième, quatrième et cinquième moyens, qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. Y... et Mmes X... et Annette Y..., les sociétés Akillis, Akillis Saint-Honoré, Corely, FG Manufacture et FG Holding aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette leur demande et les condamne à payer au directeur général des douanes et droits indirects la somme globale de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept janvier deux mille dix-huit.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Odent et Poulet, avocat aux Conseils, pour M. Y..., Mmes X... et Annette Y..., les sociétés Akillis, Akillis Saint-Honoré, Corely, FG Manufacture et FG Holding
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Le moyen reproche à l'ordonnance attaquée d'avoir confirmé une ordonnance du juge des libertés et de la détention ayant autorisé une perquisition dans divers locaux et dépendances sur le fondement de l'article 38-1 du Livre des procédures fiscales (LPF) ;
AUX MOTIFS QUE s'il est bien exact que les dispositions du titre III de la première partie du livre Ier du code général des impôts ne prévoient nullement une infraction relative au trafic occulte d'ouvrages en métaux précieux, en revanche sont incluses dans ce titre III l'article 534 et les articles 537 et 538 le non-respect de ces dispositions pouvant constituer une infraction prévue et réprimée aux articles 1791 et 1794 du même code et que, nonobstant la rédaction imparfaite de l'ordonnance, il est constant que cette ordonnance vise bien tant le défaut de déclaration d'existence que la mauvaise tenue du livre de police qui sont bien des infractions rendant possible la mise en oeuvre de la visite domiciliaire prévue à l'article L. 38 du Livre des procédures fiscales (ordonnance p.6 dernier alinéa et p.7 alinéas 1 et 2) ;
ALORS QUE les textes fiscaux sont d'interprétation stricte et qu'il ressort des dispositions de l'article L. 38 du Livre des procédures fiscales qu'une autorisation de visite domiciliaire ne peut être délivrée que pour rechercher et constater certaines infractions limitativement énumérées, à savoir celles aux obligations du titre III de la première partie du livre 1er du code général des impôts, infractions au nombre desquelles on ne peut inclure le trafic occulte d'ouvrages en métaux précieux qui ne répond à aucune qualification pénale et pour la répression duquel l'autorisation a été délivrée, de telle sorte qu'en confirmant la régularité de l'ordonnance du 3 mai 2016 l'ordonnance attaquée du 13 octobre 2016 n'a pas tiré les conséquences des faits établis et a méconnu les prescriptions précitées de l'article L. 38 du Livre des procédures fiscales.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
Le moyen reproche à l'ordonnance attaquée d'avoir confirmé une ordonnance du juge des libertés et de la détention ayant autorisé une perquisition dans divers locaux et dépendances sur le fondement de l'article L.38-1 du Livre des procédures fiscales (LPF) ;
AU MOTIF QUE s'il est exact que la requête présentée par la DNRED au juge des libertés et de la détention faisait état d'une demande de renseignements des autorités russes, sans la produire, ainsi que des chiffres relatifs aux déclarations à l'export de la société AKILLIS pour les années 2012 à 2015 et l'évolution des importations de la société AKILLIS entre les années 2012 à 2015 sans produire les documents sur lesquels elle s'était fondée pour indiquer ces chiffres énoncés dans sa requête, ces éléments n'étaient toutefois pas repris dans l'ordonnance, de sorte qu'ils ne pouvaient être considérés comme des éléments déterminants de la décision du juge des libertés et de la détention et entraîner son annulation (ordonnance p. 7 alinéas 4 et 5) ;
ALORS QUE le juge doit vérifier de manière concrète que la demande d'autorisation qui lui est soumise est bien fondée, cette demande devant comporter tous les éléments d'information en possession de l'administration de nature à justifier la visite ; qu'il s'en déduit qu'en s'abstenant de produire les pièces justifiant du bien-fondé de sa demande, non seulement à l'appui de sa requête devant le juge des libertés et de la détention mais également devant le juge d'appel, l'administration ne met pas l'autorité judiciaire en mesure de vérifier de manière concrète le bien-fondé de la demande de visite qui lui est soumise ; qu'à cet égard, la circonstance que le juge des libertés et de la détention n'ait pas repris les éléments litigieux dans le texte de son ordonnance est inopérante ; qu'en refusant de censurer l'ordonnance pour ce motif, le juge d'appel a violé, par fausse application, l'article L.38 du Livre des procédures fiscales.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
Le moyen reproche à l'ordonnance attaquée d'avoir confirmé une ordonnance du juge des libertés et de la détention ayant autorisé une perquisition dans divers locaux et dépendances sur le fondement de l'article 38-1 du Livre des procédures fiscales (LPF) ;
AUX MOTIFS QUE le contrôle initial de l'établissement sis [...] du 3 décembre 2015, l'a été dans le cadre d'un contrôle des obligations s‘imposant aux professionnels relativement à la réglementation sur les contributions indirectes et des possibilités permises par les articles L. 81 et L. 96 H du LPF, ce dernier texte visant expressément l'obligation pour les marchands de métaux précieux de présenter leur registre de police ; que cette visite domiciliaire s'est réalisée le 3 décembre 2015 à 11 h 35, immédiatement après que le procès-verbal de communication de documents établi le même jour à 10 h 48 ait révélé que l'établissement de la rue Saint-Honoré fonctionnait sans la déclaration d'existence prévue à l'article 534 du CGI et qu'elle apparaît donc régulière (ordonnance p.8 in fine et p.9 alinéas 1 à 3) ;
ALORS QUE les exposants soutenaient que cette visite domiciliaire apparemment régulière constituait, en réalité, un détournement de procédure, ayant consisté à procéder à une visite domiciliaire dans les conditions dérogatoires de la flagrance de l'article L. 38-2 du Livre des procédures fiscales, sans avoir recours à la procédure d'autorisation par un juge des libertés et de la détention, en invoquant artificiellement l'existence d'une infraction flagrante ; qu'ainsi, en ne répondant pas à ce moyen, l'ordonnance attaquée est entachée d'un défaut de motivation au regard des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.
QUATRIEME MOYEN DE CASSATION :
Le moyen reproche à l'ordonnance attaquée d'avoir confirmé une ordonnance du juge des libertés et de la détention ayant autorisé une perquisition dans divers locaux et dépendances sur le fondement de l'article 38-1 du Livre des procédures fiscales (LPF) ;
AUX MOTIFS QUE la saisie des supports informatiques prévue par l'article L. 38-4 bis du LPF serait une possibilité générale et ne serait pas seulement prévue dans l'hypothèse de l'obstacle fait par l'occupant des lieux à l'accès aux documents présents sur ces supports (ordonnance p.10 alinéa 1) ;
ALORS QUE le texte clair de cette disposition ne prévoit cette possibilité de saisie des supports informatiques que par voie d'exception, dans le seul cas d'opposition de l'occupant des lieux, ce qui n'était pas le cas en l'espèce ; qu'ainsi, en considérant que les saisies de ces supports ont, en l'espèce, été régulièrement effectuées, sans avoir relevé une telle opposition, la cour d'appel a violé les dispositions précitées de l'article 38-4 bis.
CINQUIEME MOYEN DE CASSATION :
Le moyen reproche à l'ordonnance attaquée d'avoir confirmé une ordonnance du juge des libertés et de la détention ayant autorisé une perquisition et des saisies dans divers locaux et dépendances sur le fondement de l'article 38-1 du Livre des procédures fiscales ;
AU MOTIF QUE la saisie des supports informatiques prévue par l'article L.38-4 bis du LPF est une possibilité générale et n'est pas seulement prévue dans l'hypothèse de l'obstacle mis par l'occupant des lieux à l'accès aux documents présents sur ces supports ;
ALORS QUE l'article L.38-4 bis du LPF méconnaît, ainsi qu'il est démontré dans la question prioritaire de constitutionnalité qui fait l'objet d'un mémoire distinct, les dispositions de l'article 66 alinéa 2 de la Constitution et de l'article 2 de la Déclaration des droits de l'homme de 1789.