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17/01/2018 | FRANCE | N°15-29114

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 17 janvier 2018, 15-29114


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 20 novembre 2015), que, soutenant qu'une entreprise chinoise proposait sur le marché européen des produits contrefaisant le brevet français FR 94 05729 dont elle est titulaire, intitulé "Interconnexion en trois dimensions de boîtiers de composants électriques utilisant des circuits imprimés", et que pour ce faire, cette entreprise bénéficiait de la complicité de deux de ses anciens salariés, MM. X... et Y..., ainsi que de celle de la société Spacekey Europe (la so

ciété Spacekey), dont ils étaient associés, la société 3D Plus a prés...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 20 novembre 2015), que, soutenant qu'une entreprise chinoise proposait sur le marché européen des produits contrefaisant le brevet français FR 94 05729 dont elle est titulaire, intitulé "Interconnexion en trois dimensions de boîtiers de composants électriques utilisant des circuits imprimés", et que pour ce faire, cette entreprise bénéficiait de la complicité de deux de ses anciens salariés, MM. X... et Y..., ainsi que de celle de la société Spacekey Europe (la société Spacekey), dont ils étaient associés, la société 3D Plus a présenté quatre requêtes en désignation d'un huissier de justice aux fins, d'une part, de procéder à des mesures de saisie-contrefaçon et, d'autre part, des mesures d'instruction sur le fondement de l'article 145 du code de procédure civile ; qu'elle a ensuite obtenu la désignation d'un expert ayant mission d'examiner les éléments saisis en exécution des ordonnances rendues le 11 mars 2014, faisant droit à ces requêtes ; que la société Spacekey, M. X... et M. Y... ont demandé la rétractation de ces ordonnances ;

Sur le premier moyen :

Attendu que la société Spacekey, M. X... et M. Y... font grief à l'arrêt de rejeter cette demande de rétractation, en tant que formée contre les deux ordonnances autorisant une saisie-contrefaçon, et d'ordonner une expertise alors, selon le moyen :

1°/ que le juge a l'obligation de ne pas dénaturer les documents de la cause ; qu'en l'espèce, les deux ordonnances de saisie-contrefaçon du 11 mars 2014 ont autorisé l'huissier instrumentaire "à effectuer une sauvegarde complète de ses recherches sur tout support, notamment disque dur externe ou clé USB » (point 18), et également "à effectuer des copies complètes des disques durs supports externes ou internes, fichiers informatiques" (point 19) ; que si le point 18 se rapporte implicitement aux recherches effectuées par l'huissier telles que définies par les points 1 et 2 de sa mission, c'est-à-dire relatives aux éléments susceptibles d'être en lien avec la contrefaçon de brevet alléguée, le point 19 ne contient pas une telle précision, ni de manière expresse, ni de manière implicite puisqu'il concerne au contraire l'ensemble des documents informatiques de la société Spacekey, de M. X... et de M. Y..., sans aucune discrimination ; qu'en retenant néanmoins que le point 19 de la mission n'autorisait l'huissier à effectuer "des copies complètes des disques durs, supports externes ou internes, fichiers informatiques" qu'à la condition, fixée par les points 1 et 2 de la mission, de s'inscrire dans la mission de recherche d'une preuve de contrefaçon du brevet litigieux de sorte que l'objet même de ces investigations informatiques est strictement encadré, cependant qu'une telle limitation était exclue par les termes mêmes de la mission telle que définie aux points 18 et 19, la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis des ordonnances de saisie-contrefaçon du 11 mars 2014 et violé le principe susvisé ;

2°/ que la saisie-contrefaçon permet de faire procéder en tout lieu et par tous huissiers, en vertu d'une ordonnance rendue sur requête par la juridiction civile compétente, soit à la description détaillée, soit à la saisie réelle des produits ou procédés prétendus contrefaisants ainsi que de tout document s'y rapportant ; que la juridiction peut ordonner, aux mêmes fins probatoires, la saisie réelle des matériels et instruments utilisés pour fabriquer ou distribuer les produits ou pour mettre en oeuvre les procédés prétendus contrefaisants, et également autoriser l'huissier à procéder à toute constatation utile en vue d'établir l'origine, la consistance et l'étendue de la contrefaçon ; qu'en conséquence, les mesures ordonnées ne doivent pas aller au-delà de la recherche des preuves de la contrefaçon alléguée et ne peuvent donner à l'huissier une mission générale d'investigation, sans rapport avec la fin probatoire de la saisie-contrefaçon, lui permettant de mener une véritable perquisition civile des locaux des personnes visées ; qu'en l'espèce, les deux ordonnances de saisie-contrefaçon du 11 mars 2014 ont autorisé l'huissier instrumentaire, non seulement "à effectuer une sauvegarde complète de ses recherches sur tout support, notamment disque dur externe ou clé USB" (point 18), mais également "à effectuer des copies complètes des disques durs supports externes ou internes, fichiers informatiques" (point 19) ; qu'elles ont ainsi permis à l'huissier de réaliser une copie intégrale, automatique et exclusive de toute vérification préalable de l'ensemble des documents numériques de la société Spacekey, de M. X... et de M. Y..., privant la mesure ordonnée de toute limitation au regard de son objet, à savoir la preuve des faits de contrefaçon allégués ; qu'en retenant néanmoins que le point 19 n'autorisait l'huissier à effectuer une telle copie complète qu'à la condition, fixée par les points 1 et 2, de s'inscrire dans la mission de recherche d'une preuve de la contrefaçon du brevet litigieux, "de sorte que l'objet même de ces investigations informatiques est strictement encadré", cependant qu'une telle limitation des mesures était par définition exclue par l'autorisation de faire une copie complète de l'ensemble des fichiers informatiques, en sus de ceux ayant été identifiés comme ayant potentiellement un rapport avec la contrefaçon alléguée, la cour d'appel a violé les articles L. 615-5 et R. 615-2 du code de la propriété intellectuelle dans leur rédaction issue de la loi n° 2007-1544 du 29 octobre 2007, applicable en la cause ;

3°/ que la saisie-contrefaçon permet de faire procéder en tout lieu et par tous huissiers, en vertu d'une ordonnance rendue sur requête par la juridiction civile compétente, soit à la description détaillée, soit à la saisie réelle des produits ou procédés prétendus contrefaisants ainsi que de tout document s'y rapportant ; que la juridiction peut ordonner, aux mêmes fins probatoires, la saisie réelle des matériels et instruments utilisés pour fabriquer ou distribuer les produits ou pour mettre en oeuvre les procédés prétendus contrefaisants, et également autoriser l'huissier à procéder à toute constatation utile en vue d'établir l'origine, la consistance et l'étendue de la contrefaçon ; qu'en conséquence, les mesures ordonnées ne doivent pas aller au-delà de la recherche des preuves de la contrefaçon alléguée et ne peuvent donner à l'huissier une mission générale d'investigation, sans rapport avec la fin probatoire de la saisie-contrefaçon, lui permettant de mener une véritable perquisition civile des locaux des personnes visées ; qu'en l'espèce, les deux ordonnances de saisie-contrefaçon du 11 mars 2014 ont autorisé l'huissier instrumentaire à procéder "à une recherche automatique dans tout système informatique et/ou documents informatiques par les mots clés et/ou les noms de fichiers" définis dans une liste de plus de 120 mots, impropre à circonscrire l'objet de la mission aux seuls faits de contrefaçon allégués, dès lors qu'elle permettait d'appréhender l'ensemble des documents relatifs à l'activité de la société Spacekey, de M. X... et de M. Y..., grâce à l'inclusion de termes techniques génériques afférents à l'électronique et des noms et dénomination de M. X..., de M. Y... et de la société Spacekey Europe, mots-clés présents à l'évidence dans tous les documents informatiques détenus par ces derniers ; qu'en retenant néanmoins que "la recherche informatique par mots clés tels qu'énumérés dans le point 8 de la mission en question est expressément circonscrite dans son périmètre, aux éléments définis dans le point 1 de la mission", cependant que les mots clés choisis, incluant aussi bien des termes génériques que les noms et dénomination de la société Spacekey, de M. X... et de M. Y..., étaient de nature à permettre l'appréhension de tous les documents informatiques de ceux-ci, y compris ceux sans aucun rapport avec les faits de contrefaçon allégués, faisant ainsi de la mission de l'huissier une mission générale d'investigation, la cour d'appel a violé les articles L. 615-5 et R. 615-2 du code de la propriété intellectuelle dans leur rédaction issue de la loi n° 2007-1544 du 29 octobre 2007, applicable en la cause ;

4°/ que la saisie-contrefaçon permet de faire procéder en tout lieu et par tous huissiers, en vertu d'une ordonnance rendue sur requête par la juridiction civile compétente, soit à la description détaillée, soit à la saisie réelle des produits ou procédés prétendus contrefaisants ainsi que tout document s'y rapportant ; que la juridiction peut ordonner, aux mêmes fins probatoires, la saisie réelle des matériels et instruments utilisés pour fabriquer ou distribuer les produits ou pour mettre en oeuvre les procédés prétendus contrefaisants, et également autoriser l'huissier à procéder à toute constatation utile en vue d'établir l'origine, la consistance et l'étendue de la contrefaçon ; qu'en conséquence, les mesures ordonnées ne doivent pas aller au-delà de la recherche des preuves de la contrefaçon alléguée et ne peuvent donner à l'huissier une mission générale d'investigation, sans rapport avec la fin probatoire de la saisie-contrefaçon, lui permettant de mener une véritable perquisition civile des locaux des personnes visées sans aucune limitation dans le temps ; qu'en l'espèce, les deux ordonnances de saisie-contrefaçon du 11 mars 2014 n'ont pas limité dans le temps les documents et données pouvant être collectés à l'occasion des opérations menées par l'huissier instrumentaire, donnant ainsi à celui-ci une mission d'investigation générale, non seulement par son objet, mais également par son étendue temporelle illimitée ; que la cour d'appel a néanmoins énoncé que "la mission est implicitement et suffisamment limitée dans le temps du fait de la recherche et de la constatation des seuls produits et/ou procédés susceptibles de contrefaire" le brevet litigieux, et relevé en outre que la date des premiers actes de contrefaçon restait légitimement inconnue et que le point de départ de la prescription quinquennale était lié aux résultats des investigations sollicitées ; qu'en statuant par de tels motifs, impropres à établir l'existence d'une limitation temporelle des mesures ordonnées et donc à justifier sa décision, la cour d'appel a derechef violé les articles L. 615-5 et R. 615-2 du code de la propriété intellectuelle dans leur rédaction issue de la loi n° 2007-1544 du 29 octobre 2007, applicable en la cause ;

5°/ que les huissiers de justice peuvent, commis par justice ou à la requête de particuliers, effectuer des constatations purement matérielles, exclusives de tout avis sur les conséquences de fait ou de droit qui peuvent en résulter ; qu'en conséquence, le juge ne peut en aucune manière déléguer son pouvoir juridictionnel à un huissier en confiant à celui-ci la mission de porter une appréciation juridique sur les éléments qu'il recueille au cours de ses investigations ; que tel est nécessairement le cas lorsque l'huissier doit, au terme de la mission qui lui a été confiée, déterminer, par des appréciations de nature juridique, si une pièce doit être communiquée à la partie requérante ou si au contraire cette pièce relève de la vie privée ou du secret des affaires de la personne visée par les mesures ; qu'une telle mission, qui constitue une délégation par le juge de son pouvoir juridictionnel, est disproportionnée au regard des droits et intérêts respectifs des parties et du but recherché et porte également atteinte aux droits fondamentaux de celles-ci ; qu'en retenant cependant que ne constituait pas une délégation de pouvoir juridictionnel la mission confiée à l'huissier consistant à prendre la décision de ne mettre sous séquestre que les "données susceptibles de porter atteinte à la vie privée ou au secret des affaires" de la société Spacekey, de M. X... et de M. Y... (point 24), la cour d'appel a violé les articles L. 615-5 et R. 615-2 du code de la propriété intellectuelle dans leur rédaction issue de la loi n° 2007-1544 du 29 octobre 2007, applicable en la cause ;

Mais attendu, en premier lieu, que ces ordonnances n'étant pas rédigées dans les mêmes termes, de sorte que leur compréhension supposait d'opérer un rapprochement entre elles, c'est par une interprétation souveraine, exclusive de dénaturation, que cette ambiguïté rendait nécessaire, que la cour d'appel a retenu qu'il résultait de ce rapprochement que l'huissier de justice n'était autorisé à effectuer des copies de documents qu'à la condition de s'inscrire dans sa mission de recherche des preuves de contrefaçon du brevet en cause, puis en a déduit que l'objet même de ces investigations informatiques s'en trouvait ainsi encadré, en ce que ces ordonnances ne conféraient pas à l'huissier une mission générale d'investigation, notamment au regard des mots-clés choisis pour se livrer à ces opérations, mais seulement celle de recueillir les éléments en rapport avec les imputations de contrefaçon, et qu'elle était suffisamment limitée dans le temps, dès lors que la date des premiers actes prétendus de contrefaçon était inconnue et que le point de départ de la prescription quinquennale était lié aux résultats de ces mesures de saisie-contrefaçon ;

Et attendu, en second lieu, que la cour d'appel a exactement retenu que ne constitue pas une délégation de pouvoir juridictionnel la mission confiée à un huissier de justice de mettre sous séquestre les données susceptibles de porter atteinte à la vie privée ou au secret des affaires, une telle précaution n'ayant pour but, dans l'intérêt des parties saisies, que de procéder à une première sélection de documents pouvant apparemment présenter cette nature, l'appréciation définitive de cette qualification ne relevant que du juge du fond ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le deuxième moyen :

Attendu que la société Spacekey, M. X... et M. Y... font grief à l'arrêt de rejeter leur demande de rétractation, en tant qu'elles commettent un huissier de justice afin de procéder à des constats, et d'ordonner une mesure d'expertise alors, selon le moyen :

1°/ que toute mesure d'instruction in futurum doit être circonscrite à la fois dans son objet et dans le temps, de manière à être limitée aux seules investigations nécessaires à la preuve des faits litigieux et à ne pas porter une atteinte illégitime aux libertés fondamentales des personnes concernées ; que n'est pas circonscrite dans son objet la mesure qui donne à l'huissier une mission générale d'investigation, lui permettant de mener une véritable perquisition civile des locaux des personnes visées ; qu'en l'espèce, les deux ordonnances de constat du 11 mars 2014 ont autorisé l'huissier instrumentaire, non seulement "à demander et à récupérer une sauvegarde complète de ses recherches sur tout support, notamment disque dur externe et clé USB" (point 16), mais également "à effectuer des copies complètes des disques durs supports externes et internes, fichiers informatiques contenant des informations susceptibles d'établir la preuve des opérations visées au paragraphe 1" (point 17) ; qu'elles lui ont ainsi permis de réaliser une copie intégrale, automatique et exclusive de toute vérification préalable de l'ensemble des documents numériques de la société Spacekey, de M. X... et de M. Y..., privant la mesure de recherche de toute limitation au regard de sa finalité, à savoir la preuve des faits de concurrence déloyale allégués ; qu'en retenant néanmoins que les mesures litigieuses étaient légalement admissibles, en raison de leur objet strictement cantonné aux faits dénoncés dans les requêtes, cependant que ces mesures revêtaient une portée générale, en permettant à l'huissier de réaliser une copie complète de l'ensemble des fichiers informatiques, en sus de ceux ayant été identifiés comme ayant potentiellement un rapport avec les faits allégués, la cour d'appel a violé l'article 145 du code de procédure civile ;

2°/ que toute mesure d'instruction in futurum doit être circonscrite à la fois dans son objet et dans le temps, de manière à être limitée aux seules investigations nécessaires à la preuve des faits litigieux et à ne pas porter une atteinte illégitime aux libertés fondamentales des personnes concernées ; que n'est pas circonscrite dans son objet la mesure qui donne accès au requérant à l'ensemble des pièces et documents informatiques relatifs aux personnes visées, par le biais d'une utilisation de mots-clés qui, incluant aussi bien des termes génériques que les noms et dénominations des défendeurs, sont nécessairement présents dans tous les documents et ne permettent aucun tri de ceux-ci au regard de la finalité probatoire de la mesure ; qu'une telle mesure, sous couvert de points de recherche apparemment détaillés, donne en réalité à l'huissier une mission générale d'investigation, qui lui permet de mener une véritable perquisition civile des locaux des personnes visées ; qu'en l'espèce, les deux ordonnances de constat du 11 mars 2014 ont autorisé l'huissier instrumentaire à rechercher "de manière plus générale l'ensemble des fichiers notamment par l'emploi de mots-clés ou expressions" définis dans une liste de plus de 120 termes, impropre à circonscrire l'objet de la mission au regard des faits allégués, dès lors qu'elle permettait d'appréhender l'ensemble des documents relatifs à l'activité de la société Spacekey, de M. X... et de M. Y..., grâce à l'inclusion de termes techniques génériques afférents à l'électronique et des noms et dénomination de M. X..., de M. Y... et de la société Spacekey Europe, tous mots clés présents à l'évidence dans tous les documents informatiques détenus par ces derniers ; qu'en retenant néanmoins, pour décider que la mesure était suffisamment circonscrite dans son objet, que la recherche de documents et/ou d'éléments susceptibles de provenir de la société 3D Plus ou faisant référence aux produits développés, fabriqués et commercialisés par cette dernière, était "nécessairement combinée aux mots-clés énumérés" dans le point 1 des ordonnances, cependant que les mots-clés choisis permettaient l'appréhension de tous les documents informatiques de ceux-ci, y compris ceux sans aucun rapport avec les faits de concurrence déloyale allégués, faisant de la mission de l'huissier une mission générale d'investigation, la cour d'appel a violé l'article 145 du code de procédure civile ;

3°/ que toute mesure d'instruction in futurum doit être circonscrite à la fois dans son objet et dans le temps, de manière à être limitée aux seules investigations nécessaires à la preuve des faits litigieux et à ne pas porter une atteinte illégitime aux libertés fondamentales des personnes concernées ; que n'est pas circonscrite dans le temps la mesure qui permet à l'huissier de mener une véritable perquisition civile des locaux des personnes visées sans aucune limitation de durée ; qu'en l'espèce, les deux ordonnances de constat du 11 mars 2014 n'ont pas limité dans le temps les documents et données pouvant être collectés à l'occasion des opérations menées par l'huissier instrumentaire, donnant ainsi à celui-ci une mission d'investigation générale, non seulement par son objet, mais également par son étendue temporelle illimitée ; que la cour d'appel a néanmoins énoncé que "la mission est implicitement et suffisamment limitée dans le temps du fait de la recherche et de la constatation de tous document ou élément de toute nature pouvant provenir de la société 3D Plus ou faisant référence à la société, aux produits qu'elle développe et/ou commercialise, à ses techniques de fabrication et de commercialisation", relevant en outre que la date des premiers actes de concurrence déloyale allégués restait légitimement inconnue et que le point de départ de la prescription quinquennale était lié aux résultats des investigations sollicitées ; qu'en statuant par de tels motifs, impropres à établir l'existence d'une limitation temporelle des mesures ordonnées et donc à justifier sa décision, la cour d'appel a derechef violé l'article 145 du code de procédure civile ;

4°/ que les huissiers de justice peuvent, commis par justice ou à la requête de particuliers, effectuer des constatations purement matérielles, exclusives de tout avis sur les conséquences de fait ou de droit qui peuvent en résulter ; qu'en conséquence, le juge ne peut en aucune manière déléguer son pouvoir juridictionnel à un huissier en confiant à celui-ci la mission de porter une appréciation juridique sur les éléments qu'il recueille au cours de ses investigations ; que tel est nécessairement le cas lorsque l'huissier doit, au terme de la mission qui lui a été confiée, déterminer, par des appréciations de nature juridique, si une pièce doit être communiquée à la partie requérante ou si au contraire cette pièce relève de la vie privée ou du secret des affaires de la personne visée par les mesures ; qu'une telle mission, qui constitue une délégation par le juge de son pouvoir juridictionnel, est disproportionnée au regard des droits et intérêts respectifs des parties et du but recherché et porte également atteinte aux droits fondamentaux de celles-ci ; qu'en retenant que ne constituait pas une délégation de pouvoir juridictionnel la mission confiée à l'huissier consistant à prendre la décision de mettre sous séquestre les "données susceptibles de porter atteinte à la vie privée ou au secret des affaires" de la société Spacekey, de M. X... et de M. Y..., la cour d'appel a violé l'article 145 du code de procédure civile ;

5°/ que ne sont pas légalement admissibles les mesures d'instruction qui tendent à établir, non pas de simples faits de concurrence déloyale ou de parasitisme, mais en réalité un grief principal de contrefaçon pour lequel la loi organise la mesure probatoire spécifique qu'est la saisie-contrefaçon ; que tel est le cas de la mesure d'instruction in futurum qui tend à rechercher la preuve d'éléments relatifs à la commercialisation et à la mise en vente de produits argués de contrefaçon et donc en réalité à étayer ce grief principal ; qu'une telle mesure menée pour des faits de concurrence déloyale dissimulant en réalité un grief principal et unique de contrefaçon de brevet constitue une saisie-contrefaçon déguisée, opérant un détournement de procédure afin de libérer le requérant des contraintes afférentes à la saisie-contrefaçon ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a elle-même constaté que la mission confiée à l'huissier par les ordonnances de constat du 11 mars 2014 tendait "à la recherche d'éléments provenant de la société 3D Plus et relatifs à la commercialisation et à la mise en vente de produits argués de contrefaçon" ; qu'en retenant néanmoins que les mesures d'instruction in futurum relatives à des faits permettant de caractériser le grief principal de contrefaçon de brevet, ne constituaient pas une saisie-contrefaçon déguisée, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales qui s'évinçaient de ses propres constatations, a violé l'article 145 du code de procédure civile, ensemble les articles L. 615-5 et R. 615-2 du code de la propriété intellectuelle dans leur rédaction issue de la loi n° 2007-1544 du 29 octobre 2007, applicable en la cause ;

6°/ que ne sont pas légalement admissibles les mesures d'instruction qui tendent à établir, non pas de simples faits de concurrence déloyale ou de parasitisme, mais en réalité un grief principal de contrefaçon pour lequel la loi organise la mesure probatoire spécifique qu'est la saisie-contrefaçon ; que tel est le cas de la mesure d'instruction in futurum qui tend à rechercher la preuve d'éléments relatifs à la commercialisation et à la mise en vente de produits argués de contrefaçon et donc en réalité à étayer ce grief principal ; qu'associée à une saisie-contrefaçon menée en parallèle, le but de cette manoeuvre est de faire appréhender les documents des personnes visées à la fois sur le fondement de l'article L. 615-5 du code de la propriété intellectuelle et sur celui de l'article 145 du code de procédure civile, de manière à éviter une déperdition de preuves au cas où l'un des deux types de mesures, et plus particulièrement la saisie-contrefaçon compte tenu des contraintes qui y sont afférentes, serait annulé ; qu'elle constitue donc bien une saisie-contrefaçon déguisée, opérant un détournement de procédure afin de libérer le requérant des contraintes et aléas inhérents à la saisie-contrefaçon ; qu'en l'espèce, les motifs invoqués par la société 3D Plus pour fonder les mesures d'instruction in futurum sollicitées étaient similaires à ceux fondant les mesures de saisie-contrefaçon par ailleurs demandées ; qu'en effet, la société 3D Plus justifiait ces mesures par ses différents brevets et le fait qu'ils seraient contrefaits ; que les ordonnances de constat du 11 mars 2014 tendent également à permettre à l'huissier de rechercher tout document et élément relatifs aux produits développés, fabriqués et commercialisés par la société 3D Plus, produits argués de contrefaçon ; que la société 3D Plus a ainsi détourné la procédure de l'article 145 du code de procédure civile dans le but de s'assurer en toutes hypothèses une preuve de la contrefaçon alléguée même dans l'hypothèse où les deux ordonnances autorisant les saisies-contrefaçon seraient rétractées en raison notamment de leur caractère trop général ; qu'en retenant cependant que l'existence d'ordonnances de saisie-contrefaçon rendait inopérant le motif tiré d'un détournement de procédure par le biais de l'article 145 du code de procédure civile, la cour d'appel, qui a statué par un motif impropre à justifier sa décision, a violé ce texte, ensemble les articles L. 615-5 et R. 615-2 du code de la propriété intellectuelle dans leur rédaction issue de la loi n° 2007-1544 du 29 octobre 2007, applicable en la cause ;

Mais attendu, en premier lieu, que l'arrêt constate que la recherche confiée à l'huissier de justice est strictement liée aux faits de concurrence déloyale et de divulgation par deux anciens salariés de secret de fabrication, données confidentielles et savoir-faire de la société 3D Plus ; qu'il relève que cette recherche est nécessairement combinée aux mots-clés énumérés dans les ordonnances, et que la mission est suffisamment limitée dans le temps, puisque la date des premiers actes de concurrence déloyale et de parasitisme dénoncés, ainsi que celle du point de départ de la prescription quinquennale ne sont pas connues en l'état ; que de ces constatations et énonciations, la cour d'appel a pu déduire que ces ordonnances ne portaient pas sur une mission générale d'investigation, mais sur la recherche de preuves en rapport direct avec les faits dénoncés au titre de la concurrence déloyale ;

Attendu, en deuxième lieu, que la cour d'appel a exactement retenu que ne constitue pas une délégation de pouvoir juridictionnel la mission confiée à l'huissier de justice de mettre sous séquestre les données susceptibles de porter atteinte à la vie privée ou au secret des affaires, une telle précaution n'ayant pour but, dans l'intérêt des parties demanderesses à la rétractation des ordonnances, que de procéder à une première sélection de documents pouvant apparemment présenter cette nature, l'appréciation définitive de cette qualification ne relevant que du juge ;

Et attendu, enfin, que l'arrêt relève que les requêtes invoquaient des actes de concurrence déloyale, que l'huissier avait reçu mission de rechercher tout document ou élément susceptible de provenir de la société 3D Plus ou faisant référence à cette société, aux produits qu'elle commercialise et à ses techniques de fabrication et de commercialisation, et qu'ainsi, cette recherche ne portait que sur des éléments provenant de cette dernière ;

D'où il suit que le moyen, inopérant en sa dernière branche, qui critique le rejet de conclusions inopérantes dénonçant une saisie-contrefaçon déguisée, n'est pas fondé pour le surplus ;

Et sur le troisième moyen :

Attendu que la société Spacekey, M. X... et M. Y... font grief à l'arrêt d'ordonner une expertise alors, selon le moyen, que le juge ne peut en aucune manière déléguer son pouvoir juridictionnel à un technicien et confier à celui-ci une mission le conduisant à porter des appréciations d'ordre juridique sur le litige ; que tel est le cas lorsque le technicien doit opérer un tri entre les documents pouvant démontrer les faits de contrefaçon et de concurrence déloyale allégués, et les autres, et de distinguer, au sein des documents retenus, les parties ne présentant pas d'utilité pour la preuve de ces faits ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a confié à M. B..., expert judiciaire, la mission de rechercher, parmi les documents, pièces et fichiers saisis en application des quatre ordonnances du 11 mars 2014, "ceux présentant une utilité pour rapporter la preuve de la contrefaçon du brevet FR 94 05729, de concurrence déloyale, de violation contractuelle et/ou de divulgation de secret de fabrication et d'information confidentielle" et "parmi les documents, pièces, fichiers non écartés, (de) rechercher et distinguer les parties des documents, pièces et fichiers qui ne présentent pas d'utilité pour rapporter la preuve de la contrefaçon, de concurrence déloyale, de violation contractuelle et/ou de divulgation de secret de fabrication et d'information confidentielle" ; qu'ainsi que les conclusions d'appel de la société Spacekey, de M. X... et de M. Y... le faisaient valoir expressément, une telle mission implique nécessairement que l'expert apprécie et qualifie juridiquement les pièces et documents en cause ; qu'en confiant néanmoins cette mission à l'expert, la cour d'appel a par conséquent violé les articles 145, 232 et 238 du code de procédure civile ;

Mais attendu que l'expert désigné étant seulement chargé d'apprécier l'utilité, et non la pertinence, des éléments saisis, la cour d'appel, qui a constaté que les parties pourraient être représentées par leur avocat lors de ses opérations, faire respecter leurs droits et formuler tout dire ou contestation, ce dont il ressortait que cette mission ne conduisait pas cet expert à porter des appréciations d'ordre juridique sur le litige, en a exactement déduit qu'elle ne lui déléguait aucun pouvoir juridictionnel ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Spacekey Europe, M. X... et M. Y... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette leur demande et les condamne à payer à la société 3D Plus la somme globale de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept janvier deux mille dix-huit.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Hémery et Thomas-Raquin, avocat aux Conseils, pour la société Spacekey Europe, M. X... et M. Y...

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé l'ordonnance entreprise en ce qu'elle a rejeté les demandes de rétractation des deux ordonnances de saisie-contrefaçon du 11 mars 2014 et ordonné une mesure d'expertise confiée à M. Frédéric B... ;

AUX MOTIFS PROPRES QU' « en ce qui concerne le grief selon lequel ces deux ordonnances de saisies-contrefaçons sont une « mission générale d'investigation » dont seraient investis les huissiers instrumentaires aux termes des points 8 et 9 sus visés, la cour relève que la recherche informatique par mots-clés tels qu'énumérés dans le point 8 de la mission en question est expressément circonscrite dans son périmètre, aux éléments définis dans le point 1 de la mission, à savoir ceux « susceptibles de provenir de 3D Plus, aux produits qu'elle développe et/ou commercialise, à des techniques de fabrication et de commercialisation », en objet avec le litige limité par le juge des requêtes à la contrefaçon alléguée du brevet français FR 94 05729, étant observé que le brevet européen EP 0 584 349, visé par la société requérante, a en revanche été exclu du champ des deux saisies-contrefaçons ordonnées ; qu'il en est de même du point 19, l'huissier instrumentaire n'étant autorisé à effectuer « des copies complètes des disques durs, supports externes ou internes et fichiers informatiques » qu'à la condition, fixée par les points 1 et 2 de la mission, de s'inscrire dans la mission de recherche d'une preuve de contrefaçon du brevet litigieux de sorte que l'objet même de ces investigations informatiques est strictement encadré ; qu'en outre, la mission est implicitement et suffisamment limitée dans le temps du fait de la recherche et de la constatation des seuls produits et/ou procédés susceptibles de contrefaire les revendications du brevet FR 94 05729 et d'actes de contrefaçon de ce brevet, étant relevé que reste légitimement inconnue, à ce stade de la recherche de preuves, la date des premiers actes de contrefaçon et que le point de départ de la prescription quinquennale, telle que prévue par l'article 2224 du code civil pour les actions personnelles de droit commun, court à compter du jour où le titulaire du droit a eu connaissance des faits dommageables, précisément liée, en l'espèce, aux résultats des investigations sollicitées aux fins de conforter les suspicions de la société requérante ; qu'enfin, n'est pas plus fondée la critique de la liste des mots-clés contenue à l'article 8 dont les appelants sollicitent, à titre subsidiaire, la réduction, ces mots s'avérant pertinents dès lors qu'ils sont à mettre en relation avec l'objet de la mission de l'huissier instrumentaire, limitée à la recherche d'une preuve de la contrefaçon du brevet FR 94 05729, et qu'ils correspondent à des étapes de fabrication des produits concernés, à des références internes de produits de la société 3D Plus ou à des personnes, physiques ou morales, susceptibles d'être impliquées dans ladite contrefaçon ; qu'il n'y a pas lieu, en conséquence de l'ensemble de ces constatations et énonciations, de cantonner les mots-clés tels que définis par les ordonnances de saisies-contrefaçons ou de les associer de façon systématique avec d'autres mots-clés énumérés par les appelants au soutien de leur demande d'infirmation totale ou partielle ou de limiter la recherche d'éléments, fichiers ou documents papier ou numériques à la condition qu'ils soient postérieurs au 12 mars 2009 et qu'ils contiennent au moins deux des mots-clés jugés comme pertinents par les appelants ; que, de même, il ne convient pas de faire droit à la demande de rétractation partielle tendant à interdire à l'huissier ou à l'expert informatique de collecter, saisir et/ou annexer tout document ou fichier qui seraient couverts par le secret bancaire et le secret des correspondances, qui ne constituent pas en eux-mêmes un obstacle à l'application des dispositions du code de la propriété intellectuelle relatives aux saisies-contrefaçons dès lors que le juge constate que les mesures probatoires ainsi demandées sont nécessaires à la protection des droits de la partie qui les a sollicitées ; qu'en outre offre des garanties suffisantes à protéger les intérêts des appelants le point 24 de la mission en ce qu'il prévoit que les éléments recueillis, qui comporteraient des données susceptibles de porter atteinte à la vie privée ou au secret des affaires de M. X... et/ou de la société Spacekey Europe ou Isotope seront mis sous séquestre et conservés par l'huissier instrumentaire, sans qu'il puisse donner connaissance jusqu'à ce qu'il en soit autrement ordonné, par décision de justice contradictoire ou jusqu'à accord amiable entre les parties ; que ne constitue pas une délégation de pouvoir juridictionnel la mission confiée à l'expert de mettre sous séquestre les données «susceptibles » d'y porter atteinte mais une vérification protectrice des intérêts des parties à charge pour la juridiction du fond d'écarter des débats, dans l'exercice de son pouvoir juridictionnel, les éléments non communicables en conséquence ; (
) qu'en conséquence, c'est à bon droit que le juge de la rétractation, qui a vérifié la proportionnalité de la mesure ordonnée au regard des intérêts et droits respectifs des parties et par rapport au but recherché, a rejeté la demande de rétractation des ordonnances de saisies-contrefaçons du 11 mars 2014 en ce qu'elles ne confient pas à l'huissier de justice une mission trop large dans son objet et dans le temps et n'opèrent pas une délégation du pouvoir juridictionnel à l'exception toutefois du chef de mission prévu au point 9 desdites ordonnances » ;

ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE, « s'agissant du cadre de la mission donnée à l'huissier, les défendeurs soutiennent qu'a été donnée à l'huissier l'autorisation de procéder à une mission générale d'investigation dans le cadre de la saisie-contrefaçon et que l'huissier avait notamment des possibilités de recherche par mots-clés extrêmement larges. Les ordonnances ayant autorisé les saisies-contrefaçons contiennent une liste de mots-clés, et indiquent que l'huissier était autorisé à faire des recherches en utilisant ces mots-clés et, « sous la responsabilité et avec l'aide de l'expert informatique, de définir tous autres mots-clés qu'il jugera pertinents au regard de la mission confiée ». Pour autant, la liste des mots-clés que l'huissier peut utiliser figure dans un paragraphe précisant les conditions dans lesquelles l'huissier peut accéder à tout système informatique de la partie saisie pour mener ces opérations « d'où pourrait ressortir la preuve de la contrefaçon, de son origine, de sa consistance, de sa destination et de son étendue
». Ainsi, la recherche par mots-clés s'inscrit dans le cadre de la mission de recherche d'une preuve de la contrefaçon du brevet, de sorte que l'objet même de ces investigations est encadré. Le recours à ces mots-clés, selon la rédaction de l'ordonnance, apparaît comme un moyen en vue d'établir l'existence d'une contrefaçon. Au vu de ce qui précède, et alors que les résultats de la recherche informatique menée lors de la saisie sont conservés sous scellés, l'importance de la liste des mots-clés ne saurait établir que la mission confiée à l'huissier dans les ordonnances autorisant la saisie-contrefaçon est trop large ou que la mission de l'huissier présente un caractère disproportionné, et que ces ordonnances doivent être rétractées. L'absence d'une limitation de la recherche par mots-clés menée par l'huissier dans le temps ne saurait davantage constituer une mission excessive confiée à l'huissier au vu des règles de prescription, dont l'appréciation et la détermination du point de départ relèvent du juge du fond ; enfin, la possibilité reconnue à l'huissier de placer sous séquestre ceux des éléments saisis qui « comporteraient des données susceptibles de porter atteinte à la vie privée ou au secret des affaires » ne parait pas constituer une délégation de pouvoir juridictionnel au profit de l'huissier, puisqu'en spécifiant que la divulgation de ces informations pouvait être ordonnée par décision de justice contradictoire, l'ordonnance garde à la juridiction le pouvoir de décider ou de refuser cette divulgation » ;

ALORS, D'UNE PART, QUE le juge a l'obligation de ne pas dénaturer les documents de la cause ; qu'en l'espèce, les deux ordonnances de saisie-contrefaçon du 11 mars 2014 ont autorisé l'huissier instrumentaire «à effectuer une sauvegarde complète de ses recherches sur tout support, notamment disque dur externe ou clé USB » (point 18), et également « à effectuer des copies complètes des disques durs supports externes ou internes, fichiers informatiques » (point 19) ; que si le point 18 se rapporte implicitement aux recherches effectuées par l'huissier telles que définies par les points 1 et 2 de sa mission, c'est-à-dire relatives aux éléments susceptibles d'être en lien avec la contrefaçon de brevet alléguée, le point 19 ne contient pas une telle précision, ni de manière expresse, ni de manière implicite puisqu'il concerne au contraire l'ensemble des documents informatiques des exposants sans aucune discrimination ; qu'en retenant néanmoins que le point 19 de la mission n'autorisait l'huissier « à effectuer « des copies complètes des disques durs, supports externes ou internes, fichiers informatiques » qu'à la condition, fixée par les points 1 et 2 de la mission, de s'inscrire dans la mission de recherche d'une preuve de contrefaçon du brevet litigieux de sorte que l'objet même de ces investigations informatiques est strictement encadré », cependant qu'une telle limitation était exclue par les termes mêmes de la mission telle que définie aux points 18 et 19, la Cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis des ordonnances de saisie-contrefaçon du 11 mars 2014 et violé le principe susvisé ;

ALORS, D'AUTRE PART, QUE la saisie-contrefaçon permet de faire procéder en tout lieu et par tous huissiers, en vertu d'une ordonnance rendue sur requête par la juridiction civile compétente, soit à la description détaillée, soit à la saisie réelle des produits ou procédés prétendus contre-faisants ainsi que de tout document s'y rapportant ; que la juridiction peut ordonner, aux mêmes fins probatoires, la saisie réelle des matériels et instruments utilisés pour fabriquer ou distribuer les produits ou pour mettre en oeuvre les procédés prétendus contre-faisants, et également autoriser l'huissier à procéder à toute constatation utile en vue d'établir l'origine, la consistance et l'étendue de la contrefaçon ; qu'en conséquence, les mesures ordonnées ne doivent pas aller au-delà de la recherche des preuves de la contrefaçon alléguée et ne peuvent donner à l'huissier une mission générale d'investigation, sans rapport avec la fin probatoire de la saisie-contrefaçon, lui permettant de mener une véritable perquisition civile des locaux des personnes visées ; qu'en l'espèce, les deux ordonnances de saisie-contrefaçon du 11 mars 2014 ont autorisé l'huissier instrumentaire, non seulement « à effectuer une sauvegarde complète de ses recherches sur tout support, notamment disque dur externe ou clé USB » (point 18), mais également « à effectuer des copies complètes des disques durs supports externes ou internes, fichiers informatiques » (point 19) ; qu'elles ont ainsi permis à l'huissier de réaliser une copie intégrale, automatique et exclusive de toute vérification préalable de l'ensemble des documents numériques des exposants, privant la mesure ordonnée de toute limitation au regard de son objet, à savoir la preuve des faits de contrefaçon allégués ; qu'en retenant néanmoins que le point 19 n'autorisait l'huissier à effectuer une telle copie complète qu'à la condition, fixée par les points 1 et 2, de s'inscrire dans la mission de recherche d'une preuve de la contrefaçon du brevet litigieux, « de sorte que l'objet même de ces investigations informatiques est strictement encadré », cependant qu'une telle limitation des mesures était par définition exclue par l'autorisation de faire une copie complète de l'ensemble des fichiers informatiques, en sus de ceux ayant été identifiés comme ayant potentiellement un rapport avec la contrefaçon alléguée, la Cour d'appel a violé les articles L. 615-5 et R 615-2 du Code de la propriété intellectuelle dans leur rédaction issue de la loi n° 2007-1544 du 29 octobre 2007, applicable en la cause ;

ALORS, DE TROISIEME PART, QUE la saisie-contrefaçon permet de faire procéder en tout lieu et par tous huissiers, en vertu d'une ordonnance rendue sur requête par la juridiction civile compétente, soit à la description détaillée, soit à la saisie réelle des produits ou procédés prétendus contre-faisants ainsi que de tout document s'y rapportant ; que la juridiction peut ordonner, aux mêmes fins probatoires, la saisie réelle des matériels et instruments utilisés pour fabriquer ou distribuer les produits ou pour mettre en oeuvre les procédés prétendus contre-faisants, et également autoriser l'huissier à procéder à toute constatation utile en vue d'établir l'origine, la consistance et l'étendue de la contrefaçon ; qu'en conséquence, les mesures ordonnées ne doivent pas aller au-delà de la recherche des preuves de la contrefaçon alléguée et ne peuvent donner à l'huissier une mission générale d'investigation, sans rapport avec la fin probatoire de la saisie contrefaçon, lui permettant de mener une véritable perquisition civile des locaux des personnes visées ; qu'en l'espèce, les deux ordonnances de saisie-contrefaçon du 11 mars 2014 ont autorisé l'huissier instrumentaire à procéder « à une recherche automatique dans tout système informatique et/ou documents informatiques par les mots clés et/ou les noms de fichiers » définis dans une liste de plus de 120 mots, impropre à circonscrire l'objet de la mission aux seuls faits de contrefaçon allégués, dès lors qu'elle permettait d'appréhender l'ensemble des documents relatifs à l'activité des exposants, grâce à l'inclusion de termes techniques génériques afférents à l'électronique et des noms et dénomination de M. X..., de M. Y... et de la société Spacekey Europe, mots-clés présents à l'évidence dans tous les documents informatiques détenus par ces derniers ; qu'en retenant néanmoins que « la recherche informatique par mots clés tels qu'énumérés dans le point 8 de la mission en question est expressément circonscrite dans son périmètre, aux éléments définis dans le point 1 de la mission », cependant que les mots clés choisis, incluant aussi bien des termes génériques que les noms et dénomination des exposants, étaient de nature à permettre l'appréhension de tous les documents informatiques de ceux-ci, y compris ceux sans aucun rapport avec les faits de contrefaçon allégués, faisant ainsi de la mission de l'huissier une mission générale d'investigation, la Cour d'appel a violé les articles L. 615-5 et R 615-2 du Code de la propriété intellectuelle dans leur rédaction issue de la loi n° 2007-1544 du 29 octobre 2007, applicable en la cause ;

ALORS, EN OUTRE, QUE la saisie-contrefaçon permet de faire procéder en tout lieu et par tous huissiers, en vertu d'une ordonnance rendue sur requête par la juridiction civile compétente, soit à la description détaillée, soit à la saisie réelle des produits ou procédés prétendus contre-faisants ainsi que tout document s'y rapportant ; que la juridiction peut ordonner, aux mêmes fins probatoires, la saisie réelle des matériels et instruments utilisés pour fabriquer ou distribuer les produits ou pour mettre en oeuvre les procédés prétendus contrefaisants, et également autoriser l'huissier à procéder à toute constatation utile en vue d'établir l'origine, la consistance et l'étendue de la contrefaçon ; qu'en conséquence, les mesures ordonnées ne doivent pas aller au-delà de la recherche des preuves de la contrefaçon alléguée et ne peuvent donner à l'huissier une mission générale d'investigation, sans rapport avec la fin probatoire de la saisie-contrefaçon, lui permettant de mener une véritable perquisition civile des locaux des personnes visées sans aucune limitation dans le temps ; qu'en l'espèce, les deux ordonnances de saisie-contrefaçon du 11 mars 2014 n'ont pas limité dans le temps les documents et données pouvant être collectés à l'occasion des opérations menées par l'huissier instrumentaire, donnant ainsi à celui-ci une mission d'investigation générale, non seulement par son objet, mais également par son étendue temporelle illimitée ; que la Cour d'appel a néanmoins énoncé que « la mission est implicitement et suffisamment limitée dans le temps du fait de la recherche et de la constatation des seuls produits et/ou procédés susceptibles de contrefaire » le brevet litigieux, et relevé en outre que la date des premiers actes de contrefaçon restait légitimement inconnue et que le point de départ de la prescription quinquennale était lié aux résultats des investigations sollicitées ; qu'en statuant par de tels motifs, impropres à établir l'existence d'une limitation temporelle des mesures ordonnées et donc à justifier sa décision, la Cour d'appel a derechef violé les articles L. 615-5 et R 615-2 du Code de la propriété intellectuelle dans leur rédaction issue de la loi n° 2007-1544 du 29 octobre 2007, applicable en la cause ;

ALORS, ENFIN, QUE les huissiers de justice peuvent, commis par justice ou à la requête de particuliers, effectuer des constatations purement matérielles, exclusives de tout avis sur les conséquences de fait ou de droit qui peuvent en résulter ; qu'en conséquence, le juge ne peut en aucune manière déléguer son pouvoir juridictionnel à un huissier en confiant à celui-ci la mission de porter une appréciation juridique sur les éléments qu'il recueille au cours de ses investigations ; que tel est nécessairement le cas lorsque l'huissier doit, au terme de la mission qui lui a été confiée, déterminer, par des appréciations de nature juridique, si une pièce doit être communiquée à la partie requérante ou si au contraire cette pièce relève de la vie privée ou du secret des affaires de la personne visée par les mesures ; qu'une telle mission, qui constitue une délégation par le juge de son pouvoir juridictionnel, est disproportionnée au regard des droits et intérêts respectifs des parties et du but recherché et porte également atteinte aux droits fondamentaux de celles-ci ; qu'en retenant cependant que ne constituait pas une délégation de pouvoir juridictionnel la mission confiée à l'huissier consistant à prendre la décision de ne mettre sous séquestre que les «données susceptibles de porter atteinte à la vie privée ou au secret des affaires » des exposants (point 24), la Cour d'appel a violé les articles L. 615-5 et R 615-2 du Code de la propriété intellectuelle dans leur rédaction issue de la loi n° 2007-1544 du 29 octobre 2007, applicable en la cause.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé l'ordonnance entreprise en ce qu'elle a rejeté les demandes de rétractation des deux ordonnances de constat du 11 mars 2014 et ordonné une mesure d'expertise confiée à M. Frédéric B... ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE « sur les critiques formées à l'encontre de la mission qui, selon les appelantes, autoriserait des mesures d'investigation générale, la cour relève que la recherche confiée à l'huissier instrumentaire est, dans les deux ordonnances litigieuses, strictement liée aux faits de concurrence déloyale et divulgation par deux anciens salariés de secret de fabrication, données confidentielles et savoir-faire de la société 3D Plus tels que dénoncés dans les requêtes en ce que le point 1 précise que l'huissier de justice devra procéder à la recherche et à la constatation « de tous document et/ou élément de toute nature susceptible de provenir de 3D Plus ou faisant référence à la société susceptible de provenir de 3D Plus, aux produits qu'elle développe et/ou commercialise, à ses techniques de fabrication et de commercialisation » ; que cette recherche est nécessairement combinée aux mots-clés énumérés dans ce même point 1, et dont la requérante justifie la pertinence avec les faits objets de la mesure probatoire, distincts de la contrefaçon de brevets, en ce qu'ils correspondent à des références de produits, des noms de fournisseurs, de distributeurs de 3D Plus ou des parties impliquées, personnes morales ou physiques (Orbita, D3CI, X..., Isotope, Spacekey) ou encore, en ce qui concerne les recherches informatiques, aux relations pouvant exister entre les personnes concernées par le constat et les sociétés concurrentes expressément nommées dans la requête (point 5) ; qu'en conséquence, ces mesures constituent des mesures légalement admissibles en ce qu'elles sont proportionnées aux droits et intérêts des parties, limitées implicitement mais nécessairement dans le temps dès lors que la date des premiers faits litigieux, eu égard à leur contexte international et à leur ampleur supposée, reste indéterminée, et dans leur objet strictement cantonné aux faits de concurrence déloyale, détournement ou divulgation de données, secrets de fabrique et savoir faire dénoncés de façon détaillée et motivée dans les requêtes et pièces annexes, étant relevé que le procès « en germe » possible, justifiant la mesure probatoire sollicitée, n'est pas manifestement voué à l'échec, peu important dès lors son issue devant le juge du fond ; qu'en outre, la mission est implicitement et suffisamment limitée dans le temps du fait de la recherche et de la constatation de tous document ou élément de toute nature susceptible de provenir de 3D Plus ou faisant référence à la société susceptible de provenir de 3D Plus, aux produits qu'elle développe et/ou commercialise, à ses techniques de fabrication et de commercialisation, étant relevé que reste légitimement inconnue, à ce stade de la recherche de preuves, la date des premiers actes de concurrence déloyale et de parasitisme dénoncés et que le point de départ de la prescription quinquennale, telle que prévue par l'article 2224 du Code civil pour les actions personnelles de droit commun, court à compter du jour où le titulaire du droit a eu connaissance des faits dommageables, précisément liée en l'espèce aux résultats des investigations sollicitées aux fins de conforter les suspicions de la société requérante ; que dès lors, n'est justifiée ni la rétractation totale des ordonnances de constat ni leur rétractation partielle, sollicitée à titre subsidiaire, par le cantonnement de la mission aux mots-clés proposés ou la limitation de la recherche d'éléments, fichiers ou documents papier ou numérique à la condition qu'ils soient postérieurs au 12 mars 2009, et qu'ils contiennent au moins deux des mots-clés jugés comme pertinents selon les appelants ; qu'en outre, offre des garanties suffisantes à protéger les intérêts des appelants le point 22 de la mission en ce qu'il prévoit que les éléments recueillis, qui comporteraient des données susceptibles de porter atteinte à la vie privée ou au secret des affaires de MM. Y... et X... et/ou de la société Spacekey Europe seront mis sous séquestre et conservés par l'huissier instrumentaire, sans qu'il puisse donner connaissance jusqu'à ce qu'il en soit autrement ordonné, par décision de justice contradictoire ou jusqu'à accord amiable entre les parties ; que ne constitue pas une délégation de pouvoir juridictionnel la mission confiée à l'expert de mettre sous séquestre les données «susceptibles » d'y porter atteinte mais une vérification protectrice des intérêts des parties à charge pour la juridiction du fond d'écarter des débats, dans l'exercice de son pouvoir juridictionnel, les éléments non communicables en conséquence ; (
) ; qu'enfin, en ce qui concerne le grief de saisie-contrefaçon déguisée, que la mission confiée à l'huissier en son point 1 est de rechercher et constater « tout document et/ou élément de toute nature susceptible de provenir de 3D Plus ou faisant référence à la société 3D Plus, aux produits qu'elle commercialise, à ses techniques de fabrication et de commercialisation », de sorte qu'elle tend, comme le retient exactement le juge de la rétractation, à la recherche d'éléments provenant de la société 3D Plus et relatifs à la commercialisation et à la mise en vente de produits argués de contrefaçon et non à des opérations relevant de la saisie-contrefaçon ; qu'en outre, la cour relève qu'ont été portées devant le juge des référés compétent les présentes demandes de constat et, parallèlement, formées, en application des dispositions du code de la propriété intellectuelle, des demandes de saisies de produits argués de contrefaçon du brevet dont est titulaire la société 3D Plus et suspectés d'avoir été conçus et commercialisés avec l'implication, à des titres différents, de la société Spacekey Europe, de MM. X... et Y... ; qu'il s'en déduit qu'est inopérant en l'espèce le motif tiré d'un détournement de procédure par une demande déguisée ou non autorisée de saisie-contrefaçon ; qu'en conséquence de l'ensemble de ces constatations et énonciations, c'est à bon droit que le juge de la rétractation, qui a vérifié la proportionnalité de la mesure ordonnée au regard des intérêts et droits respectifs des parties et par rapport au but recherché, a rejeté la demande de rétractation des ordonnances de saisie-contrefaçon (lire de constat) du 11 mars 2014 en ce qu'elles ne constituent pas une contrefaçon déguisée, n'opèrent pas une délégation du pouvoir juridictionnel et ne confient pas à l'huissier de justice une mission trop large dans le temps et dans son objet, à l'exception toutefois du chef de mission prévu au point 3 desdites ordonnances » ;

ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE « dans les deux ordonnances contestées, la liste des mots-clés figure dans le premier point de la mission, qui précise que l'huissier doit rechercher et constater « tout document et/ou élément de toute nature susceptible de provenir de 3D Plus ou faisant référence à la société 3D Plus, aux produits qu'elle commercialise, à ses techniques de fabrication et de commercialisation ». Ainsi, la recherche par mots-clés y est cantonnée à ce cadre, et la mission de l'huissier exclut les documents sans relation avec la société 3D Plus, ses produits et techniques de fabrication. Dans ces conditions, et alors qu'il est justifié par la société 3D Plus que les mots-clés correspondent notamment à des références de produits, des noms de fournisseurs ou de distributeurs ou des parties, l'autorisation de procéder à des recherches par une liste de mots-clés contenue dans le premier point de la mission de l'huissier ne saurait, du fait de la longueur de cette liste, ou de l'absence de combinaison avec un mot-clé complémentaire, révéler que cette mission est trop large et dépasse le cadre de la mission pouvant être ordonnée sur le fondement de l'article 145 du code de procédure civile, justifiant la rétractation des ordonnances en cause. Par ailleurs, la mission confiée à l'huissier en son point 1 était de rechercher et de constater « tout document et/ou élément de toute nature susceptible de provenir de 3D Plus ou faisant référence à la société 3D Plus, aux produits qu'elle commercialise, à ses techniques de fabrication et de commercialisation », de sorte qu'elle tendait à la recherche d'éléments provenant de la société 3D Plus, et non à celle de produits contre-faisants qui est effectuée dans le cadre d'une saisie-contrefaçon. Par conséquent, il n'est pas démontré que les mesures autorisées par ces ordonnances constituent des saisies-contrefaçons déguisées » ;

ALORS, D'UNE PART, QUE toute mesure d'instruction in futurum doit être circonscrite à la fois dans son objet et dans le temps, de manière à être limitée aux seules investigations nécessaires à la preuve des faits litigieux et à ne pas porter une atteinte illégitime aux libertés fondamentales des personnes concernées ; que n'est pas circonscrite dans son objet la mesure qui donne à l'huissier une mission générale d'investigation, lui permettant de mener une véritable perquisition civile des locaux des personnes visées ; qu'en l'espèce, les deux ordonnances de constat du 11 mars 2014 ont autorisé l'huissier instrumentaire, non seulement « à demander et à récupérer une sauvegarde complète de ses recherches sur tout support, notamment disque dur externe et clé USB » (point 16), mais également « à effectuer des copies complètes des disques durs supports externes et internes, fichiers informatiques contenant des informations susceptibles d'établir la preuve des opérations visées au paragraphe 1 » (point 17) ; qu'elles lui ont ainsi permis de réaliser une copie intégrale, automatique et exclusive de toute vérification préalable de l'ensemble des documents numériques des exposants, privant la mesure de recherche de toute limitation au regard de sa finalité, à savoir la preuve des faits de concurrence déloyale allégués ; qu'en retenant néanmoins que les mesures litigieuses étaient légalement admissibles, en raison de leur objet strictement cantonné aux faits dénoncés dans les requêtes, cependant que ces mesures revêtaient une portée générale, en permettant à l'huissier de réaliser une copie complète de l'ensemble des fichiers informatiques, en sus de ceux ayant été identifiés comme ayant potentiellement un rapport avec les faits allégués, la Cour d'appel a violé l'article 145 du Code de procédure civile ;

ALORS, D'AUTRE PART, QUE toute mesure d'instruction in futurum doit être circonscrite à la fois dans son objet et dans le temps, de manière à être limitée aux seules investigations nécessaires à la preuve des faits litigieux et à ne pas porter une atteinte illégitime aux libertés fondamentales des personnes concernées ; que n'est pas circonscrite dans son objet la mesure qui donne accès au requérant à l'ensemble des pièces et documents informatiques relatifs aux personnes visées, par le biais d'une utilisation de mots-clés qui, incluant aussi bien des termes génériques que les noms et dénominations des défendeurs, sont nécessairement présents dans tous les documents et ne permettent aucun tri de ceux-ci au regard de la finalité probatoire de la mesure ; qu'une telle mesure, sous couvert de points de recherche apparemment détaillés, donne en réalité à l'huissier une mission générale d'investigation, qui lui permet de mener une véritable perquisition civile des locaux des personnes visées ; qu'en l'espèce, les deux ordonnances de constat du 11 mars 2014 ont autorisé l'huissier instrumentaire à rechercher « de manière plus générale l'ensemble des fichiers notamment par l'emploi de mots-clés ou expressions » définis dans une liste de plus de 120 termes, impropre à circonscrire l'objet de la mission au regard des faits allégués, dès lors qu'elle permettait d'appréhender l'ensemble des documents relatifs à l'activité des exposants, grâce à l'inclusion de termes techniques génériques afférents à l'électronique et des noms et dénomination de M. X..., de M. Y... et de la société Spacekey Europe, tous mots clés présents à l'évidence dans tous les documents informatiques détenus par ces derniers ; qu'en retenant néanmoins, pour décider que la mesure était suffisamment circonscrite dans son objet, que la recherche de documents et/ou d'éléments susceptibles de provenir de la société 3D Plus ou faisant référence aux produits développés, fabriqués et commercialisés par cette dernière, était « nécessairement combinée aux mots-clés énumérés » dans le point 1 des ordonnances, cependant que les mots-clés choisis permettaient l'appréhension de tous les documents informatiques de ceux-ci, y compris ceux sans aucun rapport avec les faits de concurrence déloyale allégués, faisant de la mission de l'huissier une mission générale d'investigation, la Cour d'appel a violé l'article 145 du Code de procédure civile ;

ALORS, DE TROISIEME PART, QUE toute mesure d'instruction in futurum doit être circonscrite à la fois dans son objet et dans le temps, de manière à être limitée aux seules investigations nécessaires à la preuve des faits litigieux et à ne pas porter une atteinte illégitime aux libertés fondamentales des personnes concernées ; que n'est pas circonscrite dans le temps la mesure qui permet à l'huissier de mener une véritable perquisition civile des locaux des personnes visées sans aucune limitation de durée ; qu'en l'espèce, les deux ordonnances de constat du 11 mars 2014 n'ont pas limité dans le temps les documents et données pouvant être collectés à l'occasion des opérations menées par l'huissier instrumentaire, donnant ainsi à celui-ci une mission d'investigation générale, non seulement par son objet, mais également par son étendue temporelle illimitée ; que la Cour d'appel a néanmoins énoncé que « la mission est implicitement et suffisamment limitée dans le temps du fait de la recherche et de la constatation de tous document ou élément de toute nature pouvant provenir de la société 3D Plus ou faisant référence à la société, aux produits qu'elle développe et/ou commercialise, à ses techniques de fabrication et de commercialisation », relevant en outre que la date des premiers actes de concurrence déloyale allégués restait légitimement inconnue et que le point de départ de la prescription quinquennale était lié aux résultats des investigations sollicitées ; qu'en statuant par de tels motifs, impropres à établir l'existence d'une limitation temporelle des mesures ordonnées et donc à justifier sa décision, la Cour d'appel a derechef violé l'article 145 du Code de procédure civile ;

ALORS, DE QUATRIEME PART, QUE les huissiers de justice peuvent, commis par justice ou à la requête de particuliers, effectuer des constatations purement matérielles, exclusives de tout avis sur les conséquences de fait ou de droit qui peuvent en résulter ; qu'en conséquence, le juge ne peut en aucune manière déléguer son pouvoir juridictionnel à un huissier en confiant à celui-ci la mission de porter une appréciation juridique sur les éléments qu'il recueille au cours de ses investigations ; que tel est nécessairement le cas lorsque l'huissier doit, au terme de la mission qui lui a été confiée, déterminer, par des appréciations de nature juridique, si une pièce doit être communiquée à la partie requérante ou si au contraire cette pièce relève de la vie privée ou du secret des affaires de la personne visée par les mesures ; qu'une telle mission, qui constitue une délégation par le juge de son pouvoir juridictionnel, est disproportionnée au regard des droits et intérêts respectifs des parties et du but recherché et porte également atteinte aux droits fondamentaux de celles-ci ; qu'en retenant que ne constituait pas une délégation de pouvoir juridictionnel la mission confiée à l'huissier consistant à prendre la décision de mettre sous séquestre les « données susceptibles de porter atteinte à la vie privée ou au secret des affaires » des exposants (point 22), la Cour d'appel a violé l'article 145 du Code de procédure civile ;

ALORS, EN OUTRE, QUE ne sont pas légalement admissibles les mesures d'instruction qui tendent à établir, non pas de simples faits de concurrence déloyale ou de parasitisme, mais en réalité un grief principal de contrefaçon pour lequel la loi organise la mesure probatoire spécifique qu'est la saisie-contrefaçon ; que tel est le cas de la mesure d'instruction in futurum qui tend à rechercher la preuve d'éléments relatifs à la commercialisation et à la mise en vente de produits argués de contrefaçon et donc en réalité à étayer ce grief principal ; qu'une telle mesure menée pour des faits de concurrence déloyale dissimulant en réalité un grief principal et unique de contrefaçon de brevet constitue une saisie-contrefaçon déguisée, opérant un détournement de procédure afin de libérer le requérant des contraintes afférentes à la saisie-contrefaçon ; qu'en l'espèce, la Cour d'appel a elle-même constaté que la mission confiée à l'huissier par les ordonnances de constat du 11 mars 2014 tendait « à la recherche d'éléments provenant de la société 3D Plus et relatifs à la commercialisation et à la mise en vente de produits argués de contrefaçon » ; qu'en retenant néanmoins que les mesures d'instruction in futurum relatives à des faits permettant de caractériser le grief principal de contrefaçon de brevet, ne constituaient pas une saisie-contrefaçon déguisée, la Cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales qui s'évinçaient de ses propres constatations, a violé l'article 145 du Code de procédure civile, ensemble les articles L. 615-5 et R 615-2 du Code de la propriété intellectuelle dans leur rédaction issue de la loi n° 2007-1544 du 29 octobre 2007, applicable en la cause ;

ALORS, ENFIN, QUE ne sont pas légalement admissibles les mesures d'instruction qui tendent à établir, non pas de simples faits de concurrence déloyale ou de parasitisme, mais en réalité un grief principal de contrefaçon pour lequel la loi organise la mesure probatoire spécifique qu'est la saisie-contrefaçon ; que tel est le cas de la mesure d'instruction in futurum qui tend à rechercher la preuve d'éléments relatifs à la commercialisation et à la mise en vente de produits argués de contrefaçon et donc en réalité à étayer ce grief principal ; qu'associée à une saisie-contrefaçon menée en parallèle, le but de cette manoeuvre est de faire appréhender les documents des personnes visées à la fois sur le fondement de l'article L. 615-5 du Code de la propriété intellectuelle et sur celui de l'article 145 du Code de procédure civile, de manière à éviter une déperdition de preuves au cas où l'un des deux types de mesures, et plus particulièrement la saisie-contrefaçon compte tenu des contraintes qui y sont afférentes, serait annulé ; qu'elle constitue donc bien une saisie-contrefaçon déguisée, opérant un détournement de procédure afin de libérer le requérant des contraintes et aléas inhérents à la saisie-contrefaçon ; qu'en l'espèce, les motifs invoqués par la société 3D Plus pour fonder les mesures d'instruction in futurum sollicitées étaient similaires à ceux fondant les mesures de saisie-contrefaçon par ailleurs demandées ; qu'en effet, la société 3D Plus justifiait ces mesures par ses différents brevets et le fait qu'ils seraient contrefaits ; que les ordonnances de constat du 11 mars 2014 tendent également à permettre à l'huissier de rechercher tout document et élément relatifs aux produits développés, fabriqués et commercialisés par la société 3D Plus, produits argués de contrefaçon ; que la société 3D Plus a ainsi détourné la procédure de l'article 145 du Code de procédure civile dans le but de s'assurer en toutes hypothèses une preuve de la contrefaçon alléguée même dans l'hypothèse où les deux ordonnances autorisant les saisies-contrefaçon seraient rétractées en raison notamment de leur caractère trop général ; qu'en retenant cependant que l'existence d'ordonnances de saisie-contrefaçon rendait inopérant le motif tiré d'un détournement de procédure par le biais de l'article 145 du Code de procédure civile, la Cour d'appel, qui a statué par un motif impropre à justifier sa décision, a violé ce texte, ensemble les articles L. 615-5 et R 615-2 du Code de la propriété intellectuelle dans leur rédaction issue de la loi n° 2007-1544 du 29 octobre 2007, applicable en la cause.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
(SUBSIDIAIRE)

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé l'ordonnance entreprise en ce qu'elle a ordonné une mesure d'expertise confiée à M. Frédéric B... ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE « par l'expertise confiée au visa de l'article 145 du Code de procédure civile, le juge de la rétractation désigne M. Frédéric B... en qualité d'expert avec pour mission de : - se faire remettre une copie des procès-verbaux de saisie-contrefaçon et de constat dressés le 26 mars 2014 par Me Alexandre C... à l'encontre de M. Benoît X... et de la société Spacekey Europe ainsi que les pièces annexées, une copie du procès-verbal de constat dressé le 26 mars 2014 par Me Stanislas D... à l'encontre de M. Rémy Y... et des pièces annexées, une copie du procès-verbal de saisie-contrefaçon dressé le 26 mars 2014 par Me François E... à l'encontre de la société Isotope Electronics et des pièces annexées ; - procéder à l'ouverture des scellés en présence des avocats des parties et d'un ou deux conseils en propriété intellectuelle de chacune d'elles, dont l'identité devra être communiquée avant la première réunion d'expertise à l'expert et aux avocats des parties ; - recueillir les explications des avocats des parties ou d'un ou deux conseils en propriété intellectuelle du choix des parties et se faire remettre toute pièce qui s'avérerait nécessaire à l'exécution de sa mission ; - rechercher, parmi ces documents, pièces ou fichiers ceux présentant une utilité pour rapporter la preuve de la contrefaçon du brevet FR 94 05729, de concurrence déloyale, de violation contractuelle et/ou divulgation de secret de fabrication et d'information confidentielle, tout document susceptible de provenir de la société 3D plus ou y faisant référence, ainsi qu'aux produits qu'elle développe et/ou commercialise, à ses techniques de fabrication et de commercialisation ; - dresser la liste de ces documents et informations et les annexer au rapport d'expertise dans lequel sera exposé le travail de recherche et de distinction effectué ; - parmi les documents, pièces, fichiers non écartés, rechercher et distinguer les parties des documents pièces et fichiers qui ne présentent pas d'utilité pour rapporter la preuve de la contrefaçon, de concurrence déloyale, de violation contractuelle et/ou de divulgation de secret de fabrication et d'information confidentielle, et occulter lesdites parties ne présentant pas d'utilité ; - si le contenu de certains supports informatiques ne peut être consulté, diligenter toute intervention ou prendre toute mesure pour accéder et restaurer l'accès à leur contenu, en se faisant si besoin communiquer les mots de passe par les défendeurs ; [dit] que l'expert pourra faire une copie de l'intégralité des documents saisis, qui lui seront remis et qu'il conservera pendant toute la durée de l'expertise ; [dit qu'à l'issue des opérations d'expertise, l'expert devra remettre les documents, pièces et fichiers originaux à chacun des huissiers de justice qui lui auront remis ces documents, pour qu'ils les conservent sous séquestre ; [dit] que seuls les avocats des parties et un ou deux conseils en propriété intellectuelle de chacune d'elles pourront participer aux opérations d'expertise et avoir accès aux documents d'expertise, sans pouvoir en faire la moindre copie ou reproduction, et sans communiquer à leur client quelque information que ce soit ; [dit] que le greffe notifiera la décision à l'expert, à charge pour les parties de lui remettre sans délai l'ensemble des pièces de la présente procédure et tous les documents nécessaires à l'accomplissement de sa mission ; [dit] que l'expert fera connaître sans délai au juge s'il accepte la mission, et commencera ses opérations dès la provision consignée ; [dit] que l'expert, en cas de conciliation, avisera le tribunal que sa mission est devenue sans objet ; [dit] que l'expert effectuera sa mission conformément aux dispositions de l'article 263 du Code de procédure civile, et déposera l'original de son rapport au greffe de la 3e chambre du tribunal de grande instance avant le 30 mai 2015, sauf prorogation de délai sollicitée en temps utile et de manière motivée ; [dit] que l'expert pourra se faire assister, dans l'accomplissement de sa mission, par tout sapiteur de son choix qui interviendra sous son contrôle et sa responsabilité, et pourra prendre l'initiative de recueillir l'avis d'un autre technicien dans une spécialité différente de la sienne ; [fixe] à 6.000 euros la provision sur les frais d'expertise qui devra être consignée par la société 3D Plus à la régie du tribunal de grande instance de Paris, avant le 20 novembre 2014 ; [dit] que, faute de consignation de la provision avant cette date, sous peine de caducité de la mesure d'expertise ordonnée» ; que si certaines pièces ont été saisies directement par l'huissier instrumentaire lors du déroulement des opérations de saisie-contrefaçon et de constat, telles que les boitiers physiques (ou modules électroniques) remis par M. X... et des documents non séquestrés, il n'est pas contesté que la copie intégrale faite des disques durs par l'huissier a été placée sous scellés de sorte que la société 3D Plus n'y a pas accès ; que dès lors, la société 3D Plus justifie d'un motif légitime à ce que soit analysée par un expert la « data-room » (chambre de données) comprenant les résultats issus de ces copies afin de rechercher et rapporter la preuve des actes allégués avant tout procès au fond, instance dont la potentialité est manifeste, étant relevé que cette mesure in futurum permet de préserver, dans le respect du principe de la contradiction, les droits et intérêts des parties appelantes qui pourront se faire représenter par leurs avocats lors des opérations d'expertise, lesquels seront à même dans les conditions fixées par l'ordonnance entreprise, de faire respecter, si besoin est, les droits de la défense, le secret des correspondances et de la vie privée et le secret bancaire, de faire annexer les données confidentielles au rapport expertal et de présenter tous dires et contestations utiles ; que la mission est strictement limitée aux documents et données recueillis par un auxiliaire de justice présentant toutes garanties de confidentialité requises et en exécution de missions de saisies-contrefaçon et constats elles-mêmes proportionnées et encadrées dans leur objet et dans le temps et n'opérant aucune délégation de pouvoir juridictionnel comme la Cour l'a retenu par les motifs sus-mentionnés ; qu'il n'y a pas lieu dès lors d'ordonner à l'expert désigné de limiter sa recherche aux mots-clés « pour lesquels la cour aura reconnu que la société 3D Plus est légitime à les rechercher, en association systématique avec les mots clés pertinents relatifs au brevet de la société 3D Plus (FR 94 05729) », aux « références précises de ses produits et/ou à sa dénomination sociale, qui auront été définis » ou « ceux postérieurs au 12 mars 2009 » et de « s'abstenir de toute appréciation juridique sur les données et informations qui relèveraient ou non du litige » ; que le premier juge a ordonné que soient occultés dans les documents relatifs aux faits incriminés les noms ou dénominations sociales des contacts, fournisseurs, clients et intermédiaires autres que M. X... et M. Y... figurant sur la liste produite en pièce adverse 44 par la société 3D Plus, les appelants ne justifiant pas que cette liste comprenne des noms ou dénominations ne correspondant pas à ces critères ; que la limitation retenue par le juge de la rétractation s'avère dès lors proportionnée aux droits et intérêts des parties et suffisante à en garantir la protection ; qu'il n'est pas opportun que les informations relatives aux prix, marges ou autre donnée comptable ou financière soient systématiquement barrées ou noircies dès lors que le présent arrêt prévoit expressément, aux termes de la modification de la mission expertale définie par le dispositif, que seuls les conseils des parties pourront se prononcer sur les données et informations secrètes ou confidentielles, en lien avec le litige opposant les parties, qui devront être jointes au rapport expertal et d'autre part, fait interdiction à l'expert désigné de prendre connaissance, consulter, ouvrir ou rechercher à ouvrir tout document en dehors de la recherche autorisée aux termes du présent arrêt» ;

ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE « si certaines pièces ont été saisies directement lors du déroulement des opérations de saisie-contrefaçon et de constat, il n'est pas contesté par les défendeurs que d'autres ont été placées sous scellés, de sorte que la société 3D Plus n'y a pas eu accès. Aussi, le recours à la mesure d'expertise parait nécessaire afin de permettre à la société 3D Plus d'établir la réalité des actes de contrefaçon allégués. Pour autant, il convient de l'encadrer dans des conditions de nature à préserver le secret des affaires au profit des défendeurs. En conséquence, il convient de recourir à une mesure d'expertise en data-room réalisée dans les conditions précisées dans le dispositif de la présente décision. Les noms de fichiers étant susceptibles de constituer en soi des informations confidentielles dont la divulgation à la société 3D Plus pourrait porter préjudice aux défendeurs, ils ne seront pas communiqués aux parties mais seulement aux avocats et conseils participant à la mesure d'expertise, lesquels ne seront pas autorisés à communiquer ces informations à leurs clients. Il ne sera pas fait droit à la demande présentée par les défendeurs tendant à l'exclusion de certains mots-clés ou à la limitation de leur liste, afin de permettre à l'expert de procéder aux recherches qui lui sembleront les plus appropriées, au vu des éléments soumis à son appréciation. Pour la même raison, il ne sera procédé à l'occultation que des noms de contacts et de fournisseurs ne figurant pas parmi les contacts et fournisseurs de la société 3D Plus. Enfin, l'acquisition de la prescription relevant du juge du fond, la demande présentée par les défendeurs tendant à voir exclus les pièces datées de l'année 2009 et les pièces antérieures ne sera pas accueillie favorablement. Il convient de préciser que l'expert procèdera à l'ouverture des scellés en présence des avocats et d'un ou deux conseillers en propriété intellectuelle de leur choix. Pour autant, le recours à l'expert étant justifié par la nécessité de bénéficier des connaissances de ce dernier, l'exigence de la présence des avocats des parties durant toute les opérations d'expertise n'apparaît pas fondée, l'expert pouvant du fait même de ses compétences faire le tri parmi les documents soumis à son examen hors la présence des avocats, ceux utiles à l'appréciation des actes reprochés et ceux qui ne le sont pas. Il entrera dans sa mission de rechercher, parmi les documents placés sous scellés, ceux présentant une utilité pour rapporter la preuve de la contrefaçon du brevet FR 94 05729, ou tout document susceptible de provenir de la société 3D Plus, ou y faisant référence, ainsi qu'aux produits qu'elle développe et/ou commercialise, à ses techniques de fabrication et de commercialisation, selon les termes précisés dans le dispositif. Il convient de préciser que les échanges relevant du secret professionnel des correspondances intervenant dans les relations avocats/clients, et tout document ou fichier couvert par le secret professionnel des avocats, seront exclus des procès-verbaux réalisés. De la même façon, sera ordonnée l'exclusion de tout document ou fichier couvert par le secret bancaire, ou des fichiers comportant expressément un signe distinctif permettant de retenir leur caractère personnel.

Enfin, seront exclus les échanges entre les parties défenderesses et leurs conseillers en propriété intellectuelle. Par ailleurs, les informations saisies lors des opérations d'huissier ayant été placés sous scellés, les défendeurs ne sont pas fondés à solliciter l'exclusion des conseillers en propriété intellectuelle ayant été présents lors de ces opérations, et il ne sera pas fait droit à leur demande en ce sens. Enfin, l'expert pourra, de sa propre initiative, solliciter l'intervention d'un sapiteur de son choix dans l'accomplissement de sa mission » ;

ALORS QUE le juge ne peut en aucune manière déléguer son pouvoir juridictionnel à un technicien et confier à celui-ci une mission le conduisant à porter des appréciations d'ordre juridique sur le litige ; que tel est le cas lorsque le technicien doit opérer un tri entre les documents pouvant démontrer les faits de contrefaçon et de concurrence déloyale allégués, et les autres, et de distinguer, au sein des documents retenus, les parties ne présentant pas d'utilité pour la preuve de ces faits ; qu'en l'espèce, la Cour d'appel a confié à M. B..., expert judiciaire, la mission de rechercher, parmi les documents, pièces et fichiers saisis en application des quatre ordonnances du 11 mars 2014, « ceux présentant une utilité pour rapporter la preuve de la contrefaçon du brevet FR 94 05729, de concurrence déloyale, de violation contractuelle et/ou de divulgation de secret de fabrication et d'information confidentielle » et « parmi les documents, pièces, fichiers non écartés, (de) rechercher et distinguer les parties des documents, pièces et fichiers qui ne présentent pas d'utilité pour rapporter la preuve de la contrefaçon, de concurrence déloyale, de violation contractuelle et/ou de divulgation de secret de fabrication et d'information confidentielle » ; qu'ainsi que les conclusions d'appel des exposants le faisaient valoir expressément, une telle mission implique nécessairement que l'expert apprécie et qualifie juridiquement les pièces et documents en cause ; qu'en confiant néanmoins cette mission à l'expert, la Cour d'appel a par conséquent violé les articles 145, 232 et 238 du Code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 15-29114
Date de la décision : 17/01/2018
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 20 novembre 2015


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 17 jan. 2018, pourvoi n°15-29114


Composition du Tribunal
Président : Mme Mouillard (président)
Avocat(s) : SCP Hémery et Thomas-Raquin, SCP Rocheteau et Uzan-Sarano

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:15.29114
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