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10/01/2018 | FRANCE | N°16-24736

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 10 janvier 2018, 16-24736


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'un jugement a prononcé le divorce de M. Z... et de Mme X... ;

Sur le premier moyen, ci-après annexé :

Attendu que ce moyen n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Mais sur le deuxième moyen, pris en sa deuxième branche :

Vu l'article 266 du code civil ;

Attendu que, pour condamner M. Z... à payer à Mme X... des dommages-intérêts sur le fondement de ce texte, l'arrêt retient que le mari a laissé son épouse,

affectée de troubles psychiatriques graves, assumer la charge financière du foyer et l'a ensuite déla...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'un jugement a prononcé le divorce de M. Z... et de Mme X... ;

Sur le premier moyen, ci-après annexé :

Attendu que ce moyen n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Mais sur le deuxième moyen, pris en sa deuxième branche :

Vu l'article 266 du code civil ;

Attendu que, pour condamner M. Z... à payer à Mme X... des dommages-intérêts sur le fondement de ce texte, l'arrêt retient que le mari a laissé son épouse, affectée de troubles psychiatriques graves, assumer la charge financière du foyer et l'a ensuite délaissée, après avoir consolidé sa propre situation financière ;

Qu'en se déterminant ainsi, par des motifs impropres à caractériser les conséquences d'une particulière gravité subies par Mme X... du fait de la dissolution du mariage, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;

Et sur la quatrième branche du troisième moyen :

Vu les articles 270 et 271 du code civil ;

Attendu que, pour condamner M. Z... à payer à Mme X... une prestation compensatoire constituée d'un capital de 40 000 euros et de versements mensuels indexés de 900 euros, pendant huit ans, l'arrêt prend en considération, au titre des ressources du mari, les revenus tirés de la location d'un bien indivis ;

Qu'en statuant ainsi, alors que ces revenus locatifs profitaient à l'indivision et non au seul mari, de sorte qu'ils ne pouvaient constituer un facteur de disparité dans les conditions de vie respectives des parties, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne M. Z... à verser des dommages-intérêts à Mme X... sur le fondement de l'article 266 du code civil et à lui payer une prestation compensatoire sous la forme d'un capital de 40 000 euros et de versements mensuels indexés d'un montant de 900 euros, pendant huit ans, l'arrêt rendu le 29 septembre 2016, entre les parties, par la cour d'appel d'Angers ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Rennes ;

Condamne Mme X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix janvier deux mille dix-huit.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Zribi et Texier, avocat aux Conseils, pour M. Z....

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué

D'AVOIR prononcé le divorce aux torts exclusifs de M. Y... Z...,

AUX MOTIFS QUE Chacun des époux forme une demande en divorce pour faute. Le premier juge a prononcé le divorce aux torts partagés en retenant que Monsieur Y... Z... n'a pu ignorer l'état de fragilité de son épouse et à compter des années 2002-2003, le trouble de bipolarité diagnostiqué et qu'il ne lui a pas apporté la protection et le secours nécessaires, alors même qu'elle assumait les moyens matériels du foyer en ayant perdu la propriété de son entreprise. Le juge aux affaires familiales a considéré par ailleurs que les nombreuses liaisons amoureuses de Madame A... X... Z..., établies à compter de septembre 2007, et son comportement compulsif constituaient des faits fautifs d'autant que l'époux a tenté une reprise de vie commune en 2008, et ce même si l'attitude de l'épouse pouvait être mise en lien avec sa maladie psychiatrique. Il est établi que Madame A... X... Z... connaît depuis de nombreuses années des fragilités importantes pour lesquelles un diagnostic de bipolarité a été posé par les psychiatres dès 2002. Si Monsieur Y... Z... a pu méconnaître la terminologie précise de l'affection de son épouse, il ne pouvait ignorer son état de santé psychiatrique très perturbé puisqu'il ressort d'un compte-rendu d'hospitalisation du centre hospitalier Sainte-Anne à PARIS du 10 avril 2008 (pièce N°31) qu'au titre des antécédents, Madame A... X... Z... a fait une tentative de suicide en 2000 qui était la troisième, ayant entraîné une hospitalisation à Sainte-Anne et une autre en 2001 qui a entraîné une hospitalisation à la clinique de Garches. Ces événements se sont donc produits après le mariage célébré en mars 1985. Il résulte des pièces échangées (nombreuses attestations, échanges de mails, déclarations fiscales) que Madame A... X... Z... a développé une activité libérale d'attachée de presse (sous le nom de MLB) qui a rapidement connu un bel essor et s'est révélée très lucrative et que Monsieur Y... Z..., quant à lui, a laissé son épouse assumer exclusivement la charge financière du foyer, sa part dans l'éducation des enfants alors qu'il a cessé lui-même tout exercice professionnel pour se consacrer à des activités liées à ses passions musicales notamment. Plus tard, il s'installera dans leur propriété d'Ibiza où il faisait de la musique en développant la création d'un journal local. Les époux étant mariés sous un régime séparatiste, Monsieur Y... Z... s'est fait consentir sous la forme d'un don manuel, la clientèle de Madame A... X... Z... (MLB), évaluée à la somme de 220.000 francs le 15 octobre 1993 (pièce N°56), dont il a ensuite fait apport à une SARL Z... et PARTENAIRES (pièce N° 47), en devenant détenteur de 9998 parts sur 10.000 et donc largement majoritaire, alors que son épouse ne détenait qu'une part de même que son fils Emmanuel issu d'une précédente union. L'acte de donation mentionne que cette libéralité était consentie par convenance personnelle et pour permettre à Monsieur Y... Z... d'en conserver la valeur, ce dernier devant reprendre lui-même l'activité. Il faut préciser que Madame A... X... Z... aura en 1993 une dépression d'épuisement, concomitamment à cet acte de don manuel. Cependant, Madame A... X... Z... a continué à travailler comme elle le faisait auparavant et elle a assuré la formation de son beau-fils. Il résulte ainsi des pièces versées aux débats par Madame A... X... Z..., notamment de l'attestation de Madame Dominique V. (Pièce N°81), assistante de direction de 1998 à 2002, que Madame A... X... Z... faisait fonctionner l'agence à tous les niveaux d'intervention et qu'elle formait au métier d'attaché de presse Emmanuel Z.... En revanche, cette personne atteste n'avoir jamais eu de relation avec Monsieur Y... Z.... Les autres attestations confirment le rôle de Madame A... X... Z... (pièces N° 79, 80, 82, 83, 84 et 85) et établissent qu'elle a beaucoup travaillé pour diriger cette agence, qu'elle était la seule interlocutrice et qu'elle jouissait d'une excellente réputation auprès de sa clientèle. Monsieur Y... Z... prétend qu'il aurait tout appris à son épouse du métier et qu'il avait une fonction au sein de la SARL Z... et PARTENAIRES dans le domaine administratif et financier. Or, il ne démontre nullement l'effectivité d'une telle participation, qui n'est corroborée par aucun document et affirmée sur la seule foi d'une expérience antérieure. L'attestation de Madame D. (pièce N°79) indique qu'elle a formé une équipe professionnelle performante et complice avec Madame A... X... Z... et que lors de réunions de travail, elle s'est trouvée mal à l'aise devant l'attitude hautaine, condescendante et peu impliquée de Monsieur Y... Z.... L'attestation de Monsieur Brice C. (Pièce N° 80) confirme ce que Monsieur Y... Z... a d'ailleurs déclaré lors de l'évaluation sociale (Pièce N°39) effectuée en vue de l'adoption de Pauline, à savoir qu'il conseillait son épouse mais pratiquait assidûment le piano, en faisant de la recherche musicale et en étudiant la musicologie à la Sorbonne. En septembre 2007, Madame A... X... Z... va être révoquée de ses fonctions de co-gérant de la société Z... et PARTENAIRES, compte tenu d'achats compulsifs payés sur le compte de la société, et d'un manque d'assiduité au travail. Monsieur Y... Z... établit effectivement que Madame A... X... Z... aura à cette époque un comportement erratique : elle aura plusieurs liaisons dont elle ne se cache pas, fera des dépenses compulsives en prélevant sur la société. Monsieur Y... Z..., de son côté, effectue également des prélèvements importants sur le compte joint (pièce 69 et 70) au moment de la révocation. Monsieur Y... Z... invoquera alors la clause de non-concurrence insérée dans l'acte de don manuel qu'il opposera à son épouse. Il cherche ensuite à définir des accords avec son épouse. Un protocole d'accord est établi en 2008 prévoyant une reprise de vie commune avec une période probatoire, puis un second protocole le 23 octobre 2008, qui prévoit des dispositions financières suite à une décision commune de vie séparée au 1er août 2008. Plusieurs procédures de divorce seront ensuite engagées, arrêtées, puis reprises. Madame A... X... Z... va connaître alors de nombreuses hospitalisations et faire plusieurs tentatives d'autolyse. Elle tentera également de reprendre son activité professionnelle sans succès. Monsieur Y... Z..., après être allé en Martinique, au Cameroun, s'est fixé à IBIZA. Sur la base de l'ensemble de ces éléments, le premier juge a pu à bon droit considérer que Monsieur Y... Z... a eu un comportement fautif en n'apportant pas l'assistance et le secours nécessaires à son épouse alors qu'il ne pouvait pas méconnaître son état de fragilité psychiatrique. Monsieur Y... Z... s'est en effet prioritairement attaché à préserver sa propre situation au mépris des contraintes professionnelles importantes que Madame A... X... Z... subissait, qui ne pouvaient qu'aggraver son état. Les mails qu'il adresse au psychiatre de sa femme (pièces 71 et 72), le docteur de Z..., le 11 décembre 2008 sont à cet égard édifiants puisqu'il est principalement évoqué des questions financières et d'avenir, Monsieur Y... Z... indiquant 'si A... sort de l'hospitalisation mais n'est pas capable de travailler, il y aura alors un problème majeur dont je ne vois pas l'issue pour le moment. Il est établi par ailleurs, devant la cour, par Madame A... X... Z... que Monsieur Y... Z... a entretenu plusieurs liaisons extra-conjugales après 2007. Il est parti en Martinique en novembre 2008 chez son amie Josska comme le démontre le mail qu'il a adressé à Annick L. (pièce N° 32). Il a enfin depuis mai 2011 une liaison avec Christine N. qui l'a rejoint à Ibiza en 2012 (pièce N°18) et s'occupe avec lui des locations saisonnières. Dès lors, la cour confirmera de plus fort la décision dont appel qui a retenu que Madame A... X... Z... démontrait une violation renouvelée des devoirs et obligations du mariage par l'époux qui ont rendu intolérable le maintien de la vie commune, le premier juge ayant considéré toutefois qu'elle ne rapportait pas la preuve de l'infidélité de son mari. Le premier juge a fait droit également à la demande en divorce pour faute du mari fondée sur les liaisons amoureuses que Madame A... X... Z... a entretenues et d'ailleurs relatées à Monsieur Y... Z..., et le comportement qui a abouti à sa révocation. Or, de nombreuses pièces produites aux débats démontrent l'état psychiatrique très altéré de Madame A... X... Z..., qui n'est pas contesté, et le juge aux affaires familiales a pu considérer justement que les agissements compulsifs pouvaient être mis en lien avec la maladie psychiatrique. Toutefois, le juge a aussi considéré que Monsieur Y... Z... n'était pas seul responsable de l'échec du mariage, puisque la tentative de reprise de vie commune en 2008 a échoué. Or, l'état psychique de Madame A... X... Z... n'a pas pu s'améliorer et le certificat du docteur T. (pièce N° 3) du 6 novembre 2008, précise que 'la dégradation rapide de la situation conjugale n'a pas permis à Madame A... X... Z... de retrouver un équilibre psychologique suffisant pour, soit reconstruire son couple, soit pour mener la procédure de séparation. Un passage à l'acte par IVM à Ibiza au printemps dernier a précipité cette dégradation et la menace de mise sous tutelle par son mari a contribué à sa fragilité. Madame A... X... Z... sera placée sous curatelle renforcée par jugement du 29 juillet 2010 pour un an et le médecin a préconisé la désignation d'un curateur institutionnel et non celle de Monsieur Y... Z.... Le compte-rendu d'hospitalisation à l'hôpital Saint-Anne, du 7 mars 2008 au 4 avril 2008, suite à cette tentative de suicide, démontre que pendant cette période de reprise de vie commune, l'état de Madame A... X... Z... était critique (six tentatives de suicide entre 2007 et 2009 pièce N° 104 CR d'hospitalisation du Dr L. de la Clinique du Parc à NANTES). Il est produit de part et d'autre la littérature médicale sur le trouble de bipolarité qui décrit les phénomènes compulsifs (conduites sexuelles inconséquentes, dépenses excessives) et l'exaltation de l'humeur en phase maniaque ou mixte (pièce N°55, 65 ou N° 169). Devant la cour, Monsieur Y... Z... invoque l'abandon du domicile conjugal par Madame A... X... Z... le 26 septembre 2007 et l'abandon de famille et le non-respect de ses obligations financières envers son mari et ses enfants. Le divorce pour faute ne peut être prononcé à l'encontre d'un époux que pour des faits qui lui sont imputables et qui constituent une violation grave et renouvelée des devoirs et obligations du mariage et rendent intolérable le maintien de la vie commune. Or, en septembre 2007, Madame A... X... Z... s'est trouvée dans l'incapacité de continuer son travail du fait de la révocation et de la clause de non-concurrence que lui opposait son mari, mais surtout parce qu'elle connaissait une phase de dégradation de son état psychique, qui s'est poursuivie et amplifiée lors de la tentative de reprise de vie commune en 2008. Dès lors les faits qui lui sont reprochés ne sont que la conséquence des troubles mentaux de sorte qu'ils ne peuvent lui être imputés à faute et le premier juge ne pouvait pas retenir des violations par Madame A... X... Z... de ses devoirs d'épouse. La cour ne peut pas plus retenir les griefs invoqués par Monsieur Y... Z... en appel. Le jugement, qui a prononcé le divorce aux torts partagés, sera en conséquence infirmé et le divorce prononcé aux torts exclusifs du mari » ;

1°) ALORS QUE le divorce peut être demandé par l'un des époux lorsque des faits constitutifs d'une violation grave ou renouvelée des devoirs et obligations du mariage sont imputables à son conjoint et rendent intolérable le maintien de la vie commune ; que la faute ne saurait être exclue du fait de l'état mental d'un époux que s'il était privé de discernement à la date des faits qui lui sont reprochés ; que la cour d'appel a relevé que l'épouse avait eu plusieurs relations adultères et que M. Z... lui reprochait en outre l'abandon du domicile le 26 septembre 2007 et le non-respect de ses obligations financières envers sa famille ; qu'en excluant toutefois toute faute de Mme X... Z..., en énonçant que « les faits qui lui sont reprochés ne sont que la conséquence des troubles mentaux », en mentionnant seulement que son état psychique s'était dégradé en 2007 et que ce mouvement s'était amplifié en 2008, sans relever ni faire ressortir que les troubles bipolaires dont était affectée l'épouse l'auraient privée de discernement à l'époque de l'ensemble des faits qui lui étaient reprochés, la cour d'appel a violé l'article 242 du code civil ;

2°) ALORS QUE le divorce peut être demandé par l'un des époux lorsque des faits constitutifs d'une violation grave ou renouvelée des devoirs et obligations du mariage sont imputables à son conjoint et rendent intolérable le maintien de la vie commune ; que la faute ne saurait être exclue du fait de troubles mentaux d'un époux que si ce dernier exclut toute imputabilité des faits qui lui sont reprochés ; que la cour d'appel a relevé que l'épouse avait eu plusieurs relations adultères et que M. Z... lui reprochait en outre l'abandon du domicile le 26 septembre 2007 et le non-respect de ses obligations financières envers sa famille ; qu'en excluant toutefois toute faute de Mme X... Z..., en énonçant que « les faits qui lui sont reprochés ne sont que la conséquence des troubles mentaux », sans relever ni faire ressortir que les troubles bipolaires dont était affectée l'épouse la privait de discernement et excluait en conséquence toute imputabilité des faits qui lui étaient reprochés, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 242 du code civil.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
(subsidiaire)

Il est fait grief à l'arrêt attaqué

D'AVOIR condamné M. Z... à payer à Mme A... X... Z... une somme de 5000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 266 du code civil,

AUX MOTIFS QUE « en raison de ce qui précède, Monsieur Y... Z..., qui ne peut démontrer l'existence d'une action fautive de son épouse, ne peut voir sa demande de dommages-intérêts fondée sur les dispositions de l'article 1382 du code civil, accueillie ; le jugement sera infirmé en ce qu'il lui a accordé l'euro symbolique de dommages-intérêts ; en revanche, le divorce étant prononcé aux torts et griefs exclusifs du mari, la demande de Madame A... X... Z... fondée sur les dispositions de l'article 266 du code civil est recevable ; l'attitude du mari qui a laissé son épouse, affectée de troubles psychiatriques graves, assumer la charge financière du foyer et l'a ensuite délaissée, après avoir consolidé sa propre situation financière cause à Mme A... X... Z..., un préjudice que la cour estime pouvoir fixer à la somme de 5000 euros » ;

1°) ALORS QUE lorsque le divorce est prononcé aux torts exclusifs de l'un des époux, celui-ci peut être condamné à des dommages-intérêts en réparation du préjudice matériel ou moral que la dissolution du mariage fait subir à son conjoint ; que pour condamner M. Z... à verser des dommages et intérêts à son épouse sur le fondement de l'article 266 du code civil, la cour d'appel retient que l'attitude du mari qui a laissé son épouse, affectée de troubles psychiatriques graves, assumer la charge financière du foyer et l'a ensuite délaissée, après avoir consolidé sa propre situation financière a causé à Mme A... X... Z..., un préjudice ; qu'en allouant ainsi un préjudice qui ne résultait pas de la dissolution du mariage, la cour d'appel a violé l'article 266 du code civil ;

2°) ALORS QUE sans préjudice de l'application de l'article 270, des dommages et intérêts peuvent être accordés à un époux en réparation des conséquences d'une particulière gravité qu'il subit du fait de la dissolution du mariage ; que pour condamner M. Z... à verser des dommages et intérêts à son épouse sur le fondement de l'article 266 du code civil, la cour d'appel retient que l'attitude du mari qui a laissé son épouse, affectée de troubles psychiatriques graves, assumer la charge financière du foyer et l'a ensuite délaissée, après avoir consolidé sa propre situation financière ; qu'en statuant ainsi par des motifs impropres à caractériser des conséquences d'une particulière gravité subies par l'épouse du fait de la dissolution du mariage, la cour d'appel a violé l'article 266 du code civil.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
(tout aussi subsidiaire)

Il est fait grief à l'arrêt attaqué

D'AVOIR condamné M. Z... à payer à Mme A... X... Z... une prestation compensatoire sous la forme du versement d'un capital de 40 000 euros et d'une rente mensuelle de 900 euros durant huit années,

AUX MOTIFS QUE Sur la prestation compensatoire ; Il ressort de l'article 270 du code civil, qu'un des époux peut être tenu de verser à l'autre une prestation destinée à compenser, autant qu'il est possible, la disparité que la rupture du mariage crée dans les conditions de vie respective. Cette prestation a un caractère forfaitaire. Elle prend la forme d'un capital dont le montant est fixé par le juge ; aux termes de l'article 271 du code civil, la prestation compensatoire est fixée selon les besoins de l'époux à qui elle est versée et les ressources de l'autre en tenant compte de la situation au moment du divorce et de l'évolution de celle-ci dans un avenir prévisible. À cet effet, le juge prend en considération notamment :- la durée du mariage ; l'âge et l'état de santé des époux ; leur qualification et leur situation professionnelles ;les conséquences des choix professionnels fait par l'un des époux pendant la vie commune pour l'éducation des enfants et du temps qu'il faudra encore y consacrer ou pour favoriser la carrière de son conjoint au détriment de la sienne le patrimoine estimé ou prévisible de époux, tant en capital qu'en revenu, après la liquidation du régime matrimonial ; leur droits existants et prévisibles ; leur situation respective en matière de pensions de retraite. Par ailleurs, l'article 272 du même code indique notamment que dans le cadre de la fixation d'une prestation compensatoire par le juge, les parties fournissent une déclaration certifiant sur l'honneur l'exactitude de leurs ressources, revenus, patrimoine et conditions de vie. L'appel étant général, la cour doit dès lors évaluer la situation des époux, à la date où elle statue En l'état des explications échangées entre les parties ainsi que des pièces justificatives produites et régulièrement communiquées, leurs situations respectives s'établissent comme suit : La durée du mariage aura été de 31 ans dont 23 ans de vie commune. Le couple a eu deux enfants. Pour Madame : Elle est âgée de 55 ans, puisque née le [...]          . Elle présente un trouble bipolaire et se trouve en invalidité de catégorie 2 depuis le 16 novembre 2014. Le médecin psychiatre qui la suit depuis de nombreuses années, le docteur T., indique dans un certificat du 19 avril 2016 (pièce N°8) que l'on peut considérer que son invalidité est définitive car elle ne pourra plus retrouver un travail ni se remettre dans un circuit de recherche. Elle perçoit une pension d'invalidité mensuelle d'un montant de 504,28 euros.(pièces 4,5,6,7). Elle a justifié de ses charges courantes (électricité, eau, assurances, taxes, téléphonie), d'un montant de 550 euros environ outre un loyer de 450 euros. Elle rembourse des dettes par des versements mensuels de 30 et 128,66 euros. Elle expose par ailleurs des frais de transport pour se rendre à des consultations médicales mensuelles. Elle a des frais dentaires importants à effectuer. La projection de ses droits à la retraite (pièce N° 114) établit qu'elle pourra prétendre à ses 62 ans, soit dans sept ans, percevoir une rente mensuelle de 903 euros (comprenant régime de base et complémentaire). Elle justifie avoir perçu suite au décès de ses parents [...]        , une somme de 23.994 euros. Pour Monsieur Il est âgé de 69 ans comme étant né le [...]         . Il n'évoque aucun problème de santé. Il est à la retraite et perçoit diverses rentes d'un montant de 1.574, 36 euros. La déclaration fiscale 2015 fait apparaître des pensions perçues en 2014 de 23.132 euros soit 1.927 euros par mois. Il perçoit en outre le prix de la cession de ses parts sociales de la société Z... et PARTENAIRES à son fils Emmanuel mensuellement, soit 830,60 euros. L'acte (pièce N° 116) du 19 mars 2009 prévoyait un règlement semestriel de 4.783 euros outre l'indexation jusqu'en 2020. Monsieur Y... Z.... soutient que le dernier versement aura lieu en juin 2018 en raison de règlements anticipés et il produit un mail de son fils (pièce 129) sans apporter les justificatifs de ces anticipations. Monsieur Y... Z.... perçoit en outre des revenus locatifs provenant du bien locatif indivis, dont la réalité est établie mais le montant difficile à déterminer au regard des explications fournies par Monsieur Y... Z... Monsieur Y... Z.... soutient dans ses écritures qu'il n'occupe plus la maison indivise depuis le mois d'octobre 2012 alors même que plusieurs pièces qu'il a lui-même versées sur les charges qu'il assume démontrent le contraire. Madame A... X... épouse Z... a produit des documents établissant que Monsieur Y... Z... louait des chambres d'hôte à Ibiza, le bien indivis se composant de plusieurs immeubles (pièces 124-125). En mai 2015, c'est d'ailleurs l'amie de Monsieur Y... Z...., Christine qui en faisait la promotion sur internet. Elle estime les revenus que Monsieur Y... Z... en tire à environ 9.000 euros par mois. Puis, sans doute à la faveur de la procédure, le site n'a plus été actualisé, et Monsieur Y... Z... soutient qu'il n'effectue plus de locations, lassé par les démarches administratives et fiscales, mais il reconnaît néanmoins deux locations jusqu'en octobre 2016 pour 400 euros et jusqu'en avril 2016 pour 550 euros. Monsieur Y... Z.... a justifié de charges qui ont, pour partie, été réglées en espèces, selon un usage espagnol, comme il le soutient, ce qui pourrait être identique pour les rentrées Monsieur Y... Z.... n'expose pas de loyer à proprement parler bien qui aura à régler une indemnité d'occupation, la jouissance de l'immeuble lui ayant été accordée à titre onéreux. Monsieur Y... Z.... invoque des charges courantes et par ailleurs des frais exposés pour Pauline, qu'il estime à la somme de 400 euros par mois, ce qui apparaît très excessif, puisqu'elle réside à son domicile. Pauline a 24 ans prochainement et il est justifié qu'elle a été inscrite comme demandeur d'emploi en novembre 2015, sans autre précision sur sa situation Suite au décès de sa mère, Monsieur Y... Z... a perçu une somme de 160.768,19 euros en septembre 2014. (Pièce N°132). Les époux se sont mariés sous le régime de la séparation des biens. Il résulte de l'ensemble des éléments ci-dessus qu'il existe une très importante disparité dans la situation financière respective des parties. Si Madame A... X... épouse-Z.... a vocation à récupérer la moitié de la valeur du bien immobilier indivis, il faut relever qu'il se situe en Espagne, que Monsieur Y... Z... l'occupe et l'exploite. Il l'a mis en vente sans qu'aucun acquéreur ne se soit manifesté jusqu'à présent. Monsieur Y... Z.... verse une estimation du bien non datée, pour 1.169.000 euros, mais cette valeur doit être ramenée à la somme de 889.150 euros selon un document de novembre 2007 (pièce 156) en raison de constructions sans autorisation et de l'existence d'une hypothèque légale datant de 1932 qui devrait être levée. Madame A... X... épouse- Z.... a, pendant de longues années et par son seul travail, assuré la charge matérielle du ménage, tout en prenant sa part dans l'éducation des enfants (attestations du pasteur RAMEHNA pièce N°113, de Madame D. pièce N° 48). Ce n'est qu'en raison de l'aggravation de son état psychiatrique, qu'elle n'a pu assumer ses obligations maternelles, et d'ailleurs en 2012, à la faveur d'une amélioration, Pauline est revenue vivre auprès d'elle. Madame A... X... Z... justifie qu'elle a procédé à des règlements dans l'intérêt de ses enfants. (Pièces 106 et 107). Or, Madame A... X... Z...., en dehors de la constitution de droits à la retraite qui ont été examinés plus haut, n'a pas pu percevoir la totalité des fruits de son travail, puisqu'elle a fait don à son mari de sa clientèle lors d'un épisode dépressif tout en ayant continué à travailler seule contrairement aux accords pris avec son mari. Monsieur Y... Z...., qui a fait apport de cette clientèle à la société Z... et PARTENAIRES a pu céder ses parts à son fils pour la somme de 110.000 euros. La disparité créée dans les conditions de vie des parties est due à la rupture du mariage et elle doit être compensée. Le juge aux affaires familiales a donc à bon droit retenu le principe d'une prestation compensatoire que ne méconnaît d'ailleurs pas Monsieur Y... Z.... Toutefois l'appréciation du montant de la prestation n'est pas en adéquation avec la situation réelle des parties. L'article 274 du code civil prévoit la fixation de la prestation compensatoire en capital, mais en l'espèce, il sera fait application des dispositions de l'article 276 du code civil, au regard de l'âge et de la situation précaire de Madame A... X... Z... pour fixer en partie une rente viagère à la charge de Monsieur Y... Z....Monsieur Y... Z.... sera ainsi condamné à verser à Madame A... X... Z.... une prestation compensatoire sous le forme d'un capital de 40.000 euros et une rente de 900 euros par mois pendant huit ans avec indexation » ;

1°) ALORS QUE les juges du fond ne peuvent fixer le montant de la prestation compensatoire sans préciser sur quels éléments ils se sont déterminés ; qu'en se bornant, pour infirmer le jugement de première instance ayant fixé la prestation compensatoire à 10 000 euros, et la fixer à 40 000 euros en capital et à une rente de 900 euros par mois pendant huit ans, à énoncer que « l'appréciation du montant de la prestation compensatoire n'est pas en adéquation avec la situation réelle des parties », sans davantage s'expliquer sur les éléments la conduisant à retenir un tel montant, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 270 et 271 du code civil ;

2°) ALORS QUE, subsidiairement, l'un des époux peut être tenu de verser à l'autre une prestation destinée à compenser, autant qu'il est possible, la disparité que la rupture du mariage crée dans les conditions de vie respectives des époux ; que pour fixer la prestation compensatoire due par M. Z... à la somme de 40 000 euros en capital et 900 euros sous forme de rente mensuelle, la cour d'appel relève d'une part, que l'épouse soutenait que son mari percevait des revenus locatifs d'environ 9000 euros par mois, et d'autre part, qu'il soutenait qu'il n'effectuait plus de locations, reconnaissant toutefois deux locations jusqu'en octobre et avril 2016 ; qu'en statuant ainsi par des motifs ne permettant pas de déterminer si elle a tenu compte de ces revenus locatifs prétendus pour apprécier le montant de la prestation compensatoire, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 270 et 271 du code civil ;

3°) ALORS QUE, tout aussi subsidiairement, les juges ne sauraient statuer par des motifs hypothétiques ; que pour fixer la prestation compensatoire due par M. Z... à la somme de 40 000 euros en capital et 900 euros sous forme de rente mensuelle, la cour d'appel a énoncé, concernant les revenus locatifs invoqués par son épouse, que « Monsieur Y... Z... a justifié de charges qui ont, pour partie, été réglées en espèces, selon un usage espagnol, comme il le soutient, ce qui pourrait être identique pour les rentrées » ; qu'en statuant ainsi par des motifs hypothétiques concernant les revenus locatifs prétendus de M. Z..., la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

4°) ALORS QUE, subsidiairement, les juges du fond ne sauraient, pour fixer le montant de la prestation compensatoire, tenir compte des revenus locatifs procurés par des biens indivis aux époux ; que la cour d'appel a relevé que le bien immobilier sis en Espagne était un bien indivis aux deux époux ; qu'en tenant toutefois compte, comme de revenus personnels à l'époux, des revenus locatifs procurés par ce bien indivis, la cour d'appel a violé les articles 270 et 271 du code civil ;

5°) ALORS QUE, encore plus subsidiairement, en tenant compte des revenus locatifs correspondant à des locations saisonnières d'un bien sis en Espagne que percevrait M. Z..., sans rechercher si les règles restrictives des locations saisonnières aux Baléares n'interdisaient pas la location saisonnière du bien de M. Z... et n'excluait pas en conséquence qu'il en tire des revenus locatifs, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 270 et 271 du code civil ;

6°) ALORS QUE les juges du fond ne sauraient méconnaître l'objet du litige ; que Mme X... Z... soutenait que M. Z... avait perçu, à titre de droits successoraux dans la succession de sa mère, la somme de 146,476 euros (concl. adv., p.44) ; que ce fait n'était pas contesté par M. Z... ; qu'en retenant cependant qu'il aurait perçu dans cette succession la somme de 160.768,19 euros, la cour d'appel a méconnu l'objet du litige et ainsi violé l'article 4 du code de procédure civile ;

7°) ALORS QUE, en tout état de cause, les juges du fond ne sauraient dénaturer les pièces qui leur sont soumises ; que Mme X... Z... produisait aux débats une attestation du notaire chargé de la succession de la mère de son époux, qui énonçait que Monsieur Y... Z... avait droit à la succession à concurrence d'un quart, soit 160.768, 19 euros, mais que le solde qui lui reviendrait, déduction faite du remboursement d'un prêt et d'une plus-value immobilière, et hors frais de notaire, s'élèverait à la somme de 146.476,19 euros ; qu'en énonçant toutefois qu'il résultait de cette pièce numérotée 132 que M. Z... avait perçu la somme de 160.768,19 euros, la cour d'appel a dénaturé l'attestation du notaire numérotée 132 produite par Mme X... Z... et ainsi violé l'article 1134 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016 ;

8°) ALORS QUE le juge ne peut se fonder sur l'insuffisance des preuves et éléments qui lui sont fournis pour refuser de statuer ; que la cour d'appel a relevé que la fille majeure des époux Z... résidait au domicile de l'époux et qu'elle était au chômage ; que pour ne pas tenir compte des charges afférentes à l'entretien de la fille de M. Z..., la cour d'appel a énoncé que l'estimation par M. Z... de ces charges à hauteur de 400 euros par mois était excessive et qu'elle était inscrite comme demandeur d'emploi en novembre 2015 sans précision sur sa situation ; qu'en refusant ainsi d'examiner par elle-même le montant des charges correspondant à l'entretien de la fille de M. Z..., en se fondant sur l'insuffisance des preuves et des éléments qui lui étaient fournis par les parties, la cour d'appel a violé les dispositions de l'article 4 du code civil ;

9°) ALORS QUE le juge fixe le montant de la prestation compensatoire, en tenant compte des charges des époux, parmi lesquelles figurent les charges afférentes à l'entretien et l'éducation des enfants ; que la cour d'appel a relevé que la fille majeure des époux Z... résidait au domicile de l'époux et qu'elle était au chômage ; qu'en énonçant seulement que l'estimation par M. Z... de ces charges à hauteur de 400 euros par mois était excessive et qu'elle était inscrite comme demandeur d'emploi en novembre 2015 sans précision sur sa situation, sans tenir compte de ces charges ni en préciser le montant, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 270 et 271 du code civil ;

10 °) ALORS QUE M. Z... soutenait dans ses conclusions d'appel que la simulation des droits à la retraite produite par son épouse était incomplète et qu'il convenait d'y ajouter les droits correspondants aux périodes où elle a cotisé en qualité de gérante associée de la société Bach et partenaires (concl., p.31) ; qu'en s'abstenant de procéder à cette recherche à laquelle elle était invitée, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 270 et 271 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 16-24736
Date de la décision : 10/01/2018
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Angers, 29 septembre 2016


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 10 jan. 2018, pourvoi n°16-24736


Composition du Tribunal
Président : Mme Batut (président)
Avocat(s) : SCP Foussard et Froger, SCP Zribi et Texier

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:16.24736
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