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10/01/2018 | FRANCE | N°16-19270

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 10 janvier 2018, 16-19270


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme Y... a été embauchée par la société Socomrest le 23 mars 2009 en qualité de responsable de vente ; qu'elle a été licenciée par lettre du 15 novembre 2010 pour motif économique ;

Sur les premier et troisième moyens :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur les moyens annexés qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Mais sur le deuxième moyen :

Vu l'article L. 1233-5 du

code du travail ;

Attendu que pour rejeter la demande de Mme Y... en paiement de dommages-intérê...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme Y... a été embauchée par la société Socomrest le 23 mars 2009 en qualité de responsable de vente ; qu'elle a été licenciée par lettre du 15 novembre 2010 pour motif économique ;

Sur les premier et troisième moyens :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur les moyens annexés qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Mais sur le deuxième moyen :

Vu l'article L. 1233-5 du code du travail ;

Attendu que pour rejeter la demande de Mme Y... en paiement de dommages-intérêts pour non-respect de l'ordre des licenciements, l'arrêt retient qu'elle invoque une violation des critères d'ordre des licenciements par rapport à Mme B..., qu'il ressort cependant du registre d'entrées et de sorties du personnel que cette salariée a été embauchée le 30 novembre 2009 comme "responsable vente à emporter gestion", que cet emploi n'est pas identique à celui de Mme Y... qui avait été recrutée comme "responsable des ventes à emporter", que cette dernière prétend mais ne démontre pas en quoi ces deux postes auraient été identiques et qu'en conséquence, faute de similitude avérée entre ces deux postes, l'employeur n'avait pas d'ordre des licenciements à respecter ;

Qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher si Mme B..., "responsable vente à emporter gestion" et Mme Y... "responsable vente à emporter", n'exerçaient pas des fonctions de même nature supposant une formation professionnelle commune, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il rejette la demande de Mme Y... en paiement de dommages-intérêts pour violation des critères d'ordre des licenciements, l'arrêt rendu le 24 avril 2015, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée ;

Condamne la société Socomrest aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer la somme de 3 000 euros à la SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, à charge pour cette dernière de renoncer à percevoir l'indemnité prévue par l'Etat ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix janvier deux mille dix-huit.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, avocat aux Conseils, pour Mme Y...

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté Mme Y... de sa demande de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et violation de l'obligation de bonne foi.

AUX MOTIFS QUE les difficultés économiques de la société visées dans la lettre de licenciement de D... Y... , qui la contraignent à une nécessaire réorganisation, sont suffisamment motivées ; qu'elles sont justifiées par la production des bilans aux 31 décembre 2010 et 2011 où apparaissent des pertes, par l'attestation de l'expert-comptable qui confirme la nécessité pour la société de réduire ses charges par des réductions d'effectifs (11 salariés au 31 décembre 2009 et 5 salariés au 31 décembre 2011), et les incidents bancaires multiples qui caractérisent les problèmes de trésorerie.

ALORS QUE 1°/ Mme Y... faisait valoir que son employeur qui avait procédé à de très nombreuses embauches tout au long de l'année 2010 ne pouvait se prévaloir de difficultés économiques pour justifier son licenciement en fin d'année 2010 ; qu'en laissant sans réponse ce moyen déterminant des écritures d'appel de Mme Y..., la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile.

AUX MOTIFS QUE bien que contestée par la salariée, cette suppression, est cependant établie par la production du registre des entrées et sorties du personnel qui montre qu'à l'époque du licenciement seuls deux apprentis ont été embauchés par la société.

ALORS QUE 2°/ n'est pas supprimé le poste du salarié remplacé dans ses fonctions par un salarié embauché à cet effet avant son licenciement ; que Mme Y... contestait la réalité de la suppression de son poste et soutenait avoir constaté, lors de sa reprise du travail en suite d'un arrêt maladie de plusieurs mois, que son employeur avait recruté en son absence une nouvelle responsable vente dont il reconnaissait qu'elle faisait « doublon » avec elle ; qu'en examinant le registre des entrées et sorties du personnel pour la seule période contemporaine du licenciement sans rechercher si la société Socomrest n'avait pas embauché une salariée pour remplacer Mme Y... avant son licenciement, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article L.1233-3 du code du travail.

AUX MOTIFS QUE selon l'article L.1233-4 du code du travail le licenciement pour motif économique d'un salarié ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d'adaptation ont été réalisés et que le reclassement de l'intéressé ne peut être opéré dans l'entreprise ou les entreprises du groupe auquel l'entreprise appartient ; que le reclassement du salarié s'effectue sur un emploi relevant de la même catégorie que celui qu'il occupe ou un emploi équivalent ; qu'à défaut et avec l'accord exprès du salarié, il s'opère sur un emploi d'une catégorie inférieure ; qu'en l'espèce, la société Socomrest n'a pu proposer aucun reclassement à la salariée en raison de la suppression du poste qu'elle occupait ; qu'elle produit deux attestations du restaurant « l'Epicurien » et d'un établissement « Aromat and Co » qui établissent que des recherches de reclassement avaient été entreprises à l'époque du licenciement par l'employeur auprès de personnes extérieures ;
que la suppression du poste et les recherches extérieures, loyales et sincères, de reclassement de la salariée sont établies.

ET AUX MOTIFS éventuellement adoptés QUE le licenciement économique d'un salarié ne peut intervenir que si son reclassement dans l'entreprise et, le cas échéant, dans le groupe auquel appartient l'entreprise est impossible ; que l'adhésion à une convention de reclassement personnalisé ne prive pas le salarié du droit de contester le motif économique du licenciement ni de contester la cause réelle et sérieuse de la rupture de son contrat de travail ; que l'effectif de la Sté Socomrest est passé de 11 salariés au 31/12/2009 à 5 salariés au 31/12/2011 ; que le poste de Mme Y... de responsable de vente à emporter a été supprimé ; que de la taille de la Sté Socomrest, ainsi elle n'avait pas été en mesure de trouver un ou des postes de reclassement, compte tenu du nombre d'emplois qui a été réduit de 50%.

ALORS QUE 3°/ le licenciement d'un salarié pour motif économique n'a de cause réelle et sérieuse que si l'employeur a recherché les possibilités de reclassement et s'est trouvé dans l'impossibilité de reclasser le salarié concerné ; qu'en se bornant à faire état de la suppression du poste de Mme Y... et du faible effectif de l'entreprise, la cour d'appel qui n'a pas caractérisé l'absence de poste de reclassement disponible au sein de l'entreprise n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article L.1233-4 du code du travail.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
, subsidiaire

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté Mme Y... de sa demande de dommages-intérêts pour violation des critères relatifs à l'ordre des licenciements et violation de l'obligation de bonne foi.

AUX MOTIFS QUE D... Y... invoque une violation des critères d'ordre des licenciements par rapport à C... B... ; qu'il ressort cependant du registre d'entrées et de sorties du personnel que cette salariée a été embauchée le 30 novembre 2009 comme "responsable vente à emporter gestion" et que cet emploi n'est pas identique à celui de D... Y... qui avait été recrutée comme "responsable vente à emporter", D... Y... prétend mais ne démontre pas en quoi ces deux postes auraient été identiques ; qu'en conséquence, faute de similitude avérée entre ces deux postes, l'employeur n'avait pas d'ordre des licenciements à respecter.

ET AUX MOTIFS éventuellement adoptés QUE l'employeur est dispensé de la détermination de l'ordre des licenciements lorsque tous les emplois d'une catégorie sont supprimés ; que cette demande sera rejetée.

ALORS QUE la notion de catégorie professionnelle au sein de laquelle s'applique l'ordre des licenciements ne se réduit pas à un emploi déterminé, mais vise l'ensemble des salariés qui exercent dans l'entreprise des fonctions de même nature supposant une formation professionnelle commune ; qu'en se bornant à dire que l'emploi de « responsable vente à emporter gestion [
] n'est pas identique à celui de D... Y... qui avait été recrutée comme "responsable vente à emporter » sans se prononcer au regard des fonctions occupées par les salariées occupant l'un et l'autre de ces emplois, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article du code du travail.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté Mme Y... de sa demande de dommages-intérêts pour absence de visite médicale de reprise et violation de l'obligation de bonne foi.

AUX MOTIFS QUE les dispositions légales imposaient à la société Socomrest de faire passer à D... Y... une visite médicale de reprise, dans les huit jours de la reprise effective du travail ; que la dernière reprise effective du travail de la salariée est intervenue le 6 novembre 2010, jusqu'au 12 novembre, date d'un nouvel arrêt de travail pour maladie, de telle sorte qu'à la date du licenciement prononcé le 15 novembre, le délai de huitaine n'était pas expiré ; qu'aucune faute ne peut être reprochée à la société Socomrest de ce chef ; qu'en conséquence il ressort de ces éléments que le licenciement de la salariée a été prononcé pour une cause réelle et sérieuse et que D... Y... doit être déboutée de ses demandes.

ET AUX MOTIFS éventuellement adoptés QUE selon l'article R.4624-22 du Code du Travail, le salarié bénéficie d'un examen de reprise de travail par le Médecin du Travail, après un congé de maternité, après une absence pour cause de maladie professionnelle, après une absence d'au moins 30 jours pour cause d'accident du travail, de maladie ou d'accident non professionnel ; qu'il incombe à l'employeur de prendre l'initiative de cette visite médicale et de convoquer le salarié par tous moyens ; que toutefois, la visite de reprise peut être sollicitée par le salarié auprès du médecin du travail en avertissant l'employeur de cette demande ; que Mme Y... n'a jamais sollicitée la visite de reprise auprès du médecin du travail en avertissant l'employeur de cette demande, cette demande sera rejetée.

ALORS QUE Mme Y... soutenait, sans que cela soit contesté, avoir fait l'objet d'arrêts de travail du 12 septembre 2009 au 25 février 2010, du 13 avril 2010 au 16 octobre 2010, du 23 octobre 2010 au 5 novembre 2010 puis à compter du 12 novembre 2010 ; qu'en retenant que « le délai de huitaine n'était pas expiré » au seul regard du dernier arrêt maladie sans rechercher si la salariée avait bénéficié de la visite médicale de reprise au titre des précédents arrêts de travail, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles R.4624-21 et L.4121-1 à L.4121-4 du code du travail.

ET ALORS QUE l'organisation de la visite périodique incombe à l'employeur ; qu'en reprochant à la salariée, par adoption des motifs des premiers juges, de n'avoir pas suppléé à la carence de son employeur en sollicitant elle-même l'organisation d'une visite de reprise, la cour d'appel a violé les articles R. 4624-21 et R. 4624-22 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 16-19270
Date de la décision : 10/01/2018
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 24 avril 2015


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 10 jan. 2018, pourvoi n°16-19270


Composition du Tribunal
Président : M. Chauvet (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Hémery et Thomas-Raquin, SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:16.19270
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