La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

10/01/2018 | FRANCE | N°15-24681

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 10 janvier 2018, 15-24681


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que, par acte du 28 septembre 2007, la société Crédit industriel d'Alsace et de Lorraine, devenue la société CIC Est (la banque), a consenti à la société Quai 40 un prêt d'un montant de 44 350 euros ; que, par le même acte, la société Heineken entreprise (la société Heineken) s'est rendue caution de ce prêt ; que, le 2 octobre 2007, M. A..., et M. X..., associés au sein de la société Colvert, ainsi que cette dernière, se sont rendus cautions solidaires de l'emprunt

eur envers la société Heineken ; que la société Quai 40 n'ayant pas honoré ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que, par acte du 28 septembre 2007, la société Crédit industriel d'Alsace et de Lorraine, devenue la société CIC Est (la banque), a consenti à la société Quai 40 un prêt d'un montant de 44 350 euros ; que, par le même acte, la société Heineken entreprise (la société Heineken) s'est rendue caution de ce prêt ; que, le 2 octobre 2007, M. A..., et M. X..., associés au sein de la société Colvert, ainsi que cette dernière, se sont rendus cautions solidaires de l'emprunteur envers la société Heineken ; que la société Quai 40 n'ayant pas honoré ses engagements, la société Heineken a remboursé à la banque les échéances impayées ainsi que le capital restant dû, soit la somme de 45 455,37 euros selon quittance subrogative délivrée par la banque le 5 mars 2008 ; que la société Quai 40 ayant été mise en redressement judiciaire le 7 février 2008, la société Heineken a déclaré sa créance qui a été admise le 16 septembre 2008 à concurrence de la somme de 45 460,42 euros ; que la liquidation judiciaire de la société Quai 40 a été prononcée le 17 mai 2011 ; que la société Heineken a assigné en exécution de leurs engagements MM. X... et A... ainsi que la société Colvert ;

Sur le premier moyen et sur le second moyen, pris en ses première, deuxième, troisième, quatrième et cinquième branches :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens, qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Mais sur le second moyen, pris en sa septième branche :

Vu l'article 1236 du code civil dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 ;

Attendu que la sous-caution ne garantit pas la dette du débiteur principal envers le créancier, mais la dette de remboursement du débiteur principal envers la caution qui a payé à sa place le créancier, de sorte que la caution qui a payé le créancier dispose, contre la sous-caution, d'une action personnelle en exécution de sa garantie ;

Attendu que pour condamner M. X..., solidairement avec M. A... et la société Colvert, à payer à la société Heineken la somme de 51 536,64 euros, outre intérêts au taux conventionnel à compter du 26 septembre 2011, l'arrêt retient que si la société Heineken a déclaré sa créance à hauteur de la somme de 45 460,42 euros, montant auquel sa créance a été définitivement admise, il résulte des dispositions de l'article L. 622-28 du code de commerce que les cautions sont tenues des intérêts ayant couru en application du contrat de prêt dès lors que celui-ci a été conclu pour une durée supérieure à un an ;

Qu'en statuant ainsi, alors que M. X..., qui ne garantissait que la dette de remboursement de la société Quai 40 envers la société Heineken, n'était pas tenu, sauf convention contraire entre eux, de régler des intérêts au taux conventionnel qui n'avaient couru qu'en application du contrat de prêt, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS, sans qu'il y ait lieu de statuer sur le dernier grief :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il déclare recevables les pièces 17 et 18 visées au bordereau de pièces annexé aux dernières conclusions de la société Heineken entreprise, l'arrêt rendu le 5 décembre 2014, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur les autres points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;

Condamne la société Heineken entreprise aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer à M. X... la somme de 3 000 euros et rejette sa demande ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du dix janvier deux mille dix-huit.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Boulloche, avocat aux Conseils, pour M. X....

Le premier moyen de cassation fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré recevables les pièces 17 et 18 visées au bordereau de pièces annexé aux dernières conclusions de la société Heineken Entreprise ;

Aux motifs que « les pièces n° 17 et 18 produites par la société HEINEKEN ENTREPRISE et dont M X... sollicite la communication ont été régulièrement communiquées à l'ensemble des parties le 3 octobre 2013 comme l'atteste le bordereau de communication de pièces annexé aux dernières conclusions de la société HEINEKEN ENTREPRISE en date du 12 février 2014 de sorte que cette demande est sans objet et que les dites pièces doivent être déclarées recevables » (arrêt p.7, § 2 des motifs) ;

Alors que le juge ne peut retenir les pièces versées aux débats par une partie que si elles ont pu faire l'objet d'un débat contradictoire ; que si les pièces mentionnées dans un bordereau annexé au conclusions sont réputées avoir été communiquées, c'est à la condition que cette communication n'ait pas été contestée ; qu'en l'espèce, M. X... a soutenu que la société Heineken Entreprise faisait état de pièces numérotées 17 et 18 établissant selon elle qu'elle avait rempli son obligation d'information de la caution mais que ces pièces n'avaient pas été communiquées, et demandait donc à la cour d'appel d'inviter la société Heineken Entreprise à les produire ; que pour déclarer ces pièces recevables et débouter en conséquence M. X... de sa demande de productions desdites pièces, la cour a retenu que les mentions du bordereau de communication de pièces annexé aux dernières conclusions de la société Heineken Entreprise attestaient de leur communication ; que la cour d'appel a ainsi statué par des motifs inopérants car impropres à établir la réalité de la communication de ces pièces, et a donc privé sa décision de base légale au regard des articles 16, 132, 133 et 134 du code de procédure civile.

Le second moyen de cassation fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir condamné M. Christian X..., solidairement avec M. A... et la société Colvert, à payer à la société Heineken Entreprise la somme de 51 536,64 €, outre intérêts au taux conventionnel à compter du 26 septembre 2011, capitalisés ;

Aux motifs que « la société HEINEKEN ENTREPRISE a régulièrement produit sa créance dans le cadre de la procédure de redressement judiciaire convertie en liquidation judiciaire de la société QUAI 40 sans avoir besoin en vertu de l'article L 626-27 du code de commerce d'effectuer une nouvelle déclaration de sorte que sa demande est parfaitement recevable à l'égard des cautions, étant précisé qu'elle détient au surplus une quittance subrogative émanant de la société QUAI 40 en date du 5 mars 2008 ;
Considérant que M. X... invoque pour la première fois en cause d'appel la nullité du prêt consenti par le CIC Est à la société QUAI 40 ; que s'agissant d'un moyen de défense cette demande est recevable en application de l'article 564 du code de procédure civile mais doit être jugée mal fondée, M. X... n'apportant aucun élément de nature à établir que le prêt aurait servi uniquement à régler un arriéré de factures dû à une filiale de la société HEINEKEN ENTREPRISE et non à financer des investissements, étant remarqué également que l'objet mentionné au contrat ne permet pas de définir avec précision les investissements en question puisqu'il est seulement indiqué : « un programme d'investissements » sans plus de précision ;
qu'il soutient également pour la première fois en cause d'appel que son consentement de caution a été surpris en fraude de ses droits mais que la cour relève que M. X..., associé majoritaire au sein de la société QUAI 40 ne peut utilement prétendre ne pas connaître la situation de la société emprunteuse ;
qu'il ne démontre pas davantage que sa situation financière personnelle était obérée et que son engagement de caution serait disproportionné alors que l'état de son patrimoine notamment immobilier de 425 000 euros lui permettait parfaitement de s'engager à hauteur de la somme pour le paiement de laquelle il s'est porté caution aux termes d'un acte dont la régularité formelle n'est pas contestable ;
(
) Considérant que la caution consentie par la société HEINEKEN ENTREPRISE et dont la nullité est également alléguée, n'est pas soumise aux dispositions du code de la consommation s'agissant de la caution délivrée par une société commerciale et non par une personne physique ;
que c'est donc à tort que M. A... et M. X... invoquent le non-respect des dispositions des articles L 341-2 et L 341-3 du code de la consommation ;
Considérant que M. A... et M. X... invoquent également au visa de l'article 2293 alinéa 2 du code civil le défaut d'information annuelle dont était débitrice la société HEINEKEN ENTREPRISE mais que les pièces versées aux débats par celle-ci établissent que depuis le 31 décembre 2008 cette information annuelle a été régulièrement délivrée par la société HEINEKEN ENTREPRISE subrogée depuis mars 2008 dans les droits de l'organisme prêteur ;
que c'est donc à tort que ces cautions ont sollicité la déchéance de la société HEINEKEN ENTREPRISE sur un tel fondement, étant précisé que cette information n'avait pas à être délivrée à la société COLVERT puisque l'obligation d'information annuelle ne concerne que les cautions personnes physiques ;
(
) Considérant que si la société HEINEKEN ENTREPRISE a déclaré sa créance au passif de la société QUAI 40 à hauteur de la somme de 45 460,42 euros, montant auquel sa créance a été définitivement admise à la liquidation de cette société, il résulte des dispositions de l'article L. 622-28 du code de commerce que les cautions sont tenues des intérêts ayant couru en application du contrat de prêt dès lors que celui-ci a été conclu pour une durée supérieure à un an et que c'est à bon droit que le tribunal de commerce les a condamnées au paiement de la somme de 51 536,64 euros augmentée des intérêts au taux conventionnel à compter du 26 septembre 2011 et ordonné leur capitalisation dans la limite de la somme de 53 220 euros » (arrêt, p. 7 etamp; 8) ;

1°) Alors que le juge est tenu de répondre aux conclusions des parties ; que M. X... a fait valoir que la société Heineken Entreprise était mal fondée à se prévaloir du cautionnement car elle avait commis une faute en permettant à la société Quai 40, par son cautionnement, de souscrire un emprunt auprès de sa propre banque, ce qui avait permis de la maintenir artificiellement en aggravant sa situation déjà catastrophique dont elle avait connaissance, et en s'immisçant ainsi dans sa gestion (concl. d'appel, p. 4, 5 et 7) ; qu'en condamnant cependant M. X... à payer à la société Heineken Entreprise la somme de 51 536,64 €, outre intérêts, sans répondre à ces conclusions, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

2°) Alors que tenu de motiver sa décision, le juge doit préciser les éléments de preuve sur lesquels il se fonde ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a retenu, pour juger que M. X... ne pouvait arguer d'un vice du consentement, qu'il était associé majoritaire et qu'en tant que tel, il ne pouvait prétendre ignorer la situation de la société emprunteuse ; qu'en statuant ainsi, sans s'expliquer, alors au surplus que cette circonstance était contestée (concl. p. 4), d'où elle déduisait que M. X... était associé majoritaire de la société Quai 40, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

3°) Alors que le juge doit analyser au moins sommairement les éléments de preuve sur lesquels il se fonde ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a retenu que M. X... n'était pas fondé à invoquer le manquement de la société Heineken Entreprise à son obligation d'information annuelle de la caution, en relevant que les pièces versées aux débats établissaient que depuis le 31 décembre 2008, cette information annuelle avait été régulièrement délivrée ; qu'en statuant ainsi, sans analyser au moins sommairement « les pièces versées aux débats » permettant de retenir que la société Heineken Entreprise avait satisfait à son obligation d'information annuelle, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

4°) Alors que le juge est tenu de répondre aux conclusions des parties ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a retenu que M. X... n'était pas fondé à invoquer le manquement de la société Heineken Entreprise à son obligation d'information annuelle de la caution, en relevant que les pièces versées aux débats établissaient que depuis le 31 décembre 2008, cette information annuelle avait été régulièrement délivrée ; qu'en statuant ainsi, sans répondre aux conclusions de M. X... (p. 12) soutenant qu'il n'avait jamais été rendu destinataire des courriers par lesquels la société Heineken France aurait exécuté son obligation d'information annuelle, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

5°) Alors que M. X... a également soutenu (concl. p. 11) que la créance de la société Heineken Entreprise avait été admise à hauteur de 45 460,42 € et qu'elle avait perçu, dans le cadre de la distribution de dividendes prévue par le plan de continuation de la société Quai 40, la somme de 3 636,83 € dont elle ne pouvait donc obtenir le paiement de la part des cautions ; qu'en s'abstenant de répondre à ce moyen, la cour d'appel a encore violé l'article 455 du code de procédure civile ;

6°) Alors que le jugement d'ouverture arrête le cours des intérêts légaux et conventionnels, ainsi que de tous intérêts de retard et majorations, à moins qu'il ne s'agisse des intérêts résultant de contrats de prêt conclus pour une durée égale ou supérieure à un an ou de contrats assortis d'un paiement différé d'un an ou plus ; que les personnes physiques cautions peuvent se prévaloir de ces dispositions ; qu'en l'espèce, M. X... a fait valoir, pour solliciter l'infirmation du jugement qui l'avait condamné à payer la somme de 51 536,64 €, outre intérêts conventionnels, que la créance de la société Heineken Entreprise envers la société Quai 40 avait été arrêtée à la somme de 45 460,42 € (concl. p. 9 etamp; 10) ; que la cour d'appel a retenu, pour confirmer le jugement de ce chef, qu'il résulte de l'article L. 622-28 du code de commerce que les cautions sont tenues des intérêts ayant couru en application du contrat de prêt dès lors que celui-ci a été conclu pour une durée supérieure à un an ; qu'en statuant ainsi, alors que la créance de la société Heineken envers le débiteur principal ne résultait pas de la conclusion d'un contrat de prêt mais de l'exécution d'un engagement de caution, la cour d'appel a violé les articles 2290 du code civil et L. 622-28 du code de commerce ;

7°) Alors que l'engagement de la caution ne peut excéder ce qui est dû par le débiteur ni être contracté sous des conditions plus onéreuses ; qu'en condamnant M. X... à payer la somme de 51 536,64 € augmentée des intérêts conventionnels à compter du 26 septembre 2011 sans préciser d'où il résultait que la créance de la société Heineken Entreprise envers le débiteur principal était productive d'intérêts suivant un taux conventionnel, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 2290 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 15-24681
Date de la décision : 10/01/2018
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 05 décembre 2014


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 10 jan. 2018, pourvoi n°15-24681


Composition du Tribunal
Président : Mme Mouillard (président)
Avocat(s) : SCP Boulloche, SCP Garreau, Bauer-Violas et Feschotte-Desbois

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:15.24681
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award