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21/12/2017 | FRANCE | N°16-24865

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 21 décembre 2017, 16-24865


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :

Vu l'obligation pour le juge de ne pas dénaturer les documents de la cause ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué rendu sur pourvoi après cassation (Civ 2ème, 19 septembre 2013, pourvoi n° 12-22.366), qu'ayant exercé son activité professionnelle de 1948 à 1984 au sein des Houillères du Bassin de Lorraine, aux droits desquelles viennent les Charbonnages de France, Joseph X... a été atteint d'un adénocarcinome bronchique constaté par un c

ertificat médical du 30 juillet 1986 ; qu'après le décès de celui-ci, survenu le 1...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :

Vu l'obligation pour le juge de ne pas dénaturer les documents de la cause ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué rendu sur pourvoi après cassation (Civ 2ème, 19 septembre 2013, pourvoi n° 12-22.366), qu'ayant exercé son activité professionnelle de 1948 à 1984 au sein des Houillères du Bassin de Lorraine, aux droits desquelles viennent les Charbonnages de France, Joseph X... a été atteint d'un adénocarcinome bronchique constaté par un certificat médical du 30 juillet 1986 ; qu'après le décès de celui-ci, survenu le 13 août 1986, Mme Y..., veuve X..., a sollicité, en 2004, la reconnaissance du caractère professionnel de la maladie au titre des tableaux n° 25 et n° 30 bis auprès de la caisse autonome régionale de la sécurité sociale dans les Mines de l'Est (la caisse), laquelle lui a opposé un refus ; que contestant cette décision, s'agissant de la demande formulée au titre du tableau n° 30 bis, Mme Y... a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale d'un recours dont elle a été déboutée par jugement du 14 février 2007 ; qu'ayant formulé une nouvelle demande, le 19 mai 2006, au titre du tableau n° 25 A2, sur la base d'un certificat médical du 12 mai 2006, rejetée par la caisse, Mme Y... a saisi une juridiction de sécurité sociale d'un recours ;

Attendu que pour rejeter ce recours, la cour d'appel retient que
le certificat établi par le professeur Z... n'apporte pas d'élément nouveau par rapport à l'avis du professeur A..., sur le fondement duquel la caisse a refusé de reconnaître le caractère professionnel de la maladie professionnelle déclarée par la demanderesse en 2004, qui constate qu'il n'était pas possible de reconnaître chez M. X... l'existence d'une silicose nettement caractérisée et que son décès, étant directement lié à l'évolution d'un cancer bronchique, il pouvait être imputé aux maladies professionnelles inscrites au tableau n° 25 et au tableau n° 30 bis inexistantes ;

Qu'en statuant ainsi, alors que le certificat du Professeur Z... constatait la présence, dans le poumon gauche de M. X..., de nodules typiquement silicotiques, la cour d'appel en a dénaturé le sens clair et précis ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'autre branche du moyen :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 18 août 2016, entre les parties, par la cour d'appel de Nancy ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Metz ;

Condamne la société Charbonnages de France aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Charbonnages de France, représentée par son liquidateur, et la condamne à payer à Mme Y... la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt et un décembre deux mille dix-sept.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Garreau, Bauer-Violas et Feschotte-Desbois, avocat aux Conseils, pour Mme Y....

Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir débouté Mme X... de sa demande tendant à la reconnaissance du caractère professionnel au titre du tableau n° 25 A2 de la maladie dont était atteint de son vivant M Joseph X... et dont il est décédé, et à l'attribution à ce titre d'une rente de conjoint survivant,

AUX MOTIFS PROPRES QUE

Sur la demande,
Il ressort du dossier que Mme Paulette Y... Winter a présenté une demande de reconnaissance de maladie professionnelle concernant son époux décédé sur le fondement du tableau n° 25 des maladies professionnelles le 8 décembre 2004 ; que la demande a été instruite, un avis étant donné par le Professeur A... ; que, sur le fondement de cet avis, la caisse a rejeté la demande par décision du 4 mars 2005, cette décision de rejet n'ayant pas été l'objet d'un recours est donc devenue définitive ;
Qu'en conséquence, seule la production par Mme Paulette Y... Winter d'un élément nouveau permettrait d'examiner de nouveau la demande ;
Que compte tenu de la date des demandes présentées au titre des dispositions du tableau n° 25 des maladies professionnelles, elles ont été nécessairement examinées dans le cadre de l'état de ce tableau issu des dispositions du décret du 28 mars 2003 ;
Que Mme Paulette Y... Winter apporte au dossier un certificat établi par le professeur Daniel Z..., pneumologue, indiquant qu'il a "constaté la présence de quelques nodules typiquement silicotiques au sommet gauche et l'absence de toute image primo- (illisible) d'atteinte asbestosique ; le cancer bronchique droit est évident" ;
Qu'il ressort de l'avis établi le 14 janvier 2005 par le Professeur A... que les radiographies concernant M. Joseph X... effectuées en juillet 1986 "objective(ent) la présence d'une opacité hilaire droite avec expansion dans la région moyenne du champ droit ; à gauche dans la région apicale on devine la présence de très rares micronodules ; il n'y a pas d'images pleurales pathognomoniques d'une atteinte secondaire à une exposition à l'amiante ... " ;
Que le Professeur A... concluait qu"'au vu des éléments du dossier présenté, il n'est pas possible de reconnaître chez M. X... l'existence d'une silicose nettement caractérisée ni d'une atteinte bronchique maligne secondaire à une exposition à l'amiante ; le décès est lié directement à l'évolution du cancer bronchique et ne peut être imputé aux maladies professionnelles inscrites au tableau n° 25 et au tableau n° 30 bis inexistantes" ;
Qu'il ressort de ce qui précède que le certificat établi par le Professeur Z... n'apporte pas d'élément nouveau par rapport à l'avis du Professeur A... ;
Qu'il ne ressort pas par ailleurs des autres documents médicaux apportés au dossier, notamment les certificats des Docteurs Wantz du 5 décembre 1980, Pivoteau du 16 juillet 1986 et Mangin du 11 août 1986, qu'une origine professionnelle de la maladie dont M. Joseph X... était atteint peut être déterminée ;
Que compte tenu de ce qui précède, il y a lieu de débouter Mme Paulette Y... Winter de sa demande, et en conséquence de confirmer la décision entreprise,

ET AUX MOTIFS ADOPTÉ QUE
sur le bien-fondé,
toutefois, il n'en sera pas de même en ce qui concerne le bien-fondé du recours ;
que le tableau 25 A2 décrit ainsi le cancer broncho pulmonaire dont, selon Madame X..., son mari aurait souffert :
« Manifestations pathologiques associées à des signes radiologiques ou des lésions de nature silicotique : cancer broncho pulmonaire primitif. » ;
Que cette pathologie est donc étroitement liée à la silicose dont elle est la conséquence ;
Que si le jugement du 14 février 2007, statuant sur une autre maladie que celle présentement alléguée ne peut être invoqué comme cause d'irrecevabilité, il ne peut, en revanche être ignoré dans la présente procédure ;
Que ce jugement ayant fait justice des critiques de Madame X... quant au rapport du Professeur A..., lequel concluait ainsi : « Au vu des éléments du dossier présenté il n'est pas possible de reconnaître chez M. X... l'existence d'une silicose nettement caractérisée ni d'une atteinte bronchique maligne secondaire à une exposition à l'amiante » pour ne pas admettre l'existence de la maladie du tableau 30 B, le tribunal ne saurait, sans se contredire, recourir à une expertise afin de savoir s'il existait une silicose, laquelle n'a pas été reconnue par l'expert ;
Que le jugement du 14 février 2007 ayant homologué le rapport d'expertise du Docteur A... quant à l'absence de silicose comme cause possible de la maladie du tableau 30 B, la maladie du tableau 25 A 2 doit être écartée pour la même raison ;
Qu'il n'y a pas lieu, en conséquence, d'ordonner une expertise ;
Que la décision de la commission de recours amiable du 5 septembre 2006 sera confirmée et le recours de Madame X... ne sera pas accueilli,

ALORS QUE les juges ont l'interdiction de dénaturer les documents de la cause ; qu'en retenant que le certificat établi par le Dr Z... n'apporte pas d'élément nouveau par rapport à l'avis du Pr A..., cependant que ce certificat concluait à l'existence d'un cancer bronchique droit évident tel qu'inscrit au tableau n° 25 A2 des maladies professionnelles issu du décret n° 2003-186 du 28 mars 2003, tandis que l'avis du Pr A... ne faisait qu'écarter l'existence d'une silicose nettement caractérisée et d'une atteinte bronchique maligne secondaire à une exposition à l'amiante telles qu'inscrites aux tableaux n° 25 et 30 bis dans leur rédaction antérieure audit décret du 28 mars 2003, ce qui proposait un diagnostic distinct du diagnostic initial ainsi que l'a retenu la Cour de cassation dans son arrêt du 19 septembre 2013 rendu dans le cadre du présent litige, la cour d'appel a dénaturé les documents de la cause,

ALORS QU'aux termes de l'article L 461-1 alinéa 2 du code de la sécurité sociale, est présumée d'origine professionnelle toute maladie désignée dans un tableau de maladies professionnelles et contractée dans les conditions mentionnées à ce tableau ; que le tableau n° 25 A2 des maladies professionnelles tel qu'issu du décret n° 2003-286 du 28 mars 2003 vise les silicoses ou pneumoconioses pouvant consister, notamment, en un cancer bronchopulmonaire primitif associé à des lésions de nature silicotique ; qu'en écartant le caractère professionnel de la maladie de Monsieur X..., tout en constatant que celle-ci consistait en un cancer bronchique et était accompagnée de la présence de nodules typiquement silicotiques, ce qui correspondait aux prévisions de ce tableau, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations au regard des textes et tableau susvisés, qu'elle a donc violés par fausse application.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 16-24865
Date de la décision : 21/12/2017
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Nancy, 18 août 2016


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 21 déc. 2017, pourvoi n°16-24865


Composition du Tribunal
Président : Mme Flise (président)
Avocat(s) : SCP Garreau, Bauer-Violas et Feschotte-Desbois, SCP Meier-Bourdeau et Lécuyer

Origine de la décision
Date de l'import : 29/12/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2017:16.24865
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