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30/11/2017 | FRANCE | N°16-25058

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 30 novembre 2017, 16-25058


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi en ce qu'il est dirigé contre l'arrêt du 10 juillet 2012 :

Attendu que la caisse générale de sécurité sociale de la Réunion (la caisse) s'est pourvue en cassation contre l'arrêt irrévocable du 10 juillet 2012 en même temps qu'elle s'est pourvue contre l'arrêt du 4 juillet 2016 rendu par la même cour d'appel ;

Mais attendu qu'aucun des moyens contenus dans le mémoire n'étant dirigé contre l'arrêt du 10 juillet 2012, il y a lieu de constater la déchéance partielle du p

ourvoi en ce qu'il est dirigé contre cette décision ;

Sur le moyen unique pris en se...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi en ce qu'il est dirigé contre l'arrêt du 10 juillet 2012 :

Attendu que la caisse générale de sécurité sociale de la Réunion (la caisse) s'est pourvue en cassation contre l'arrêt irrévocable du 10 juillet 2012 en même temps qu'elle s'est pourvue contre l'arrêt du 4 juillet 2016 rendu par la même cour d'appel ;

Mais attendu qu'aucun des moyens contenus dans le mémoire n'étant dirigé contre l'arrêt du 10 juillet 2012, il y a lieu de constater la déchéance partielle du pourvoi en ce qu'il est dirigé contre cette décision ;

Sur le moyen unique pris en ses deux premières branches
du pourvoi en ce qu'il est dirigé contre l'arrêt du 4 juillet 2016 :

Vu l'article L. 452-3 du code de la sécurité sociale ;

Attendu qu'il résulte de ce texte tel qu'interprété par le Conseil constitutionnel dans sa décision n° 2010-8 QPC du 18 juin 2010, qu'en cas de faute inexcusable, la victime d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle peut demander à l'employeur, devant la juridiction de sécurité sociale, la réparation d'autres chefs de préjudice que ceux énumérés par le texte précité, à la condition que ces préjudices ne soient pas déjà couverts par le livre IV du code de la sécurité sociale ; qu'il en découle, d'une part, que la perte de revenus professionnels pendant la période antérieure à la consolidation est compensée par le versement d'indemnités journalières, d'autre part, que la perte de gains professionnels résultant de l'incapacité permanente partielle qui subsiste au jour de la consolidation ainsi que l'incidence professionnelle de l'incapacité et le déficit fonctionnel permanent subis par la victime sont indemnisés par l'attribution de la rente d'incapacité permanente majorée ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que, gérante salariée de la société « Pour être bien chez soi » et victime, le 23 octobre 2007, d'un accident pris en charge par la caisse générale de sécurité sociale de la Réunion (la caisse) au titre de la législation professionnelle, Mme X... (la victime) a saisi une juridiction de sécurité sociale qui a retenu une faute inexcusable de l'employeur ;

Attendu que, pour allouer à l'assurée une certaine somme au titre de la perte de ses revenus professionnels antérieure et postérieure à la consolidation en sus des indemnités journalières, puis de la rente majorée versées par la caisse, l'arrêt énonce que la perte de revenus de la salariée, égale au montant des salaires pendant la période d'inactivité consécutive à l'accident du travail, doit être évaluée à la somme brute de 11 843,41 euros qu'elle réclame ;
Qu'en statuant ainsi, alors que la perte des revenus professionnels de la victime avait été indemnisée par l'attribution des indemnités journalières, puis, après consolidation, par l'attribution d'une rente d'accident du travail, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

Et vu l'article 627 du code de procédure civile, après avis donné aux parties en application de l'article 1015 du même code ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la troisième branche du moyen :

CONSTATE la déchéance partielle du pourvoi en ce qu'il est dirigé contre l'arrêt rendu le 10 juillet 2012 par la cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion ;

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il fixe à la somme de 11 843,31 euros bruts l'indemnisation du préjudice de Mme X... au titre de la perte de revenus pendant ses arrêts de travail, l'arrêt rendu le 4 juillet 2016, entre les parties, par la cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi ;

REJETTE la demande indemnitaire de Mme X... au titre de la perte de ses revenus professionnels antérieure et postérieure à la consolidation ;

Condamne Mme X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, signé par M. Prétot, conseiller doyen, conformément aux dispositions des articles 456 et 1021 du code de procédure civile, en remplacement du conseiller rapporteur empêché et prononcé par le président en son audience publique du trente novembre deux mille dix-sept.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Foussard et Froger, avocat aux Conseils, pour la caisse générale de sécurité sociale de la Réunion

L'arrêt attaqué encourt la censure ;

EN CE QU'il a alloué à Madame X... une indemnité au titre de la perte de revenus pendant ses arrêts de travail, dont la CGSS de la REUNION devrait faire l'avance, et fixé celle-ci à la somme de 11.843,31 euros bruts ;

AUX MOTIFS QUE « La victime d'un accident du travail ne peut pas poursuivre, devant les juridictions du contentieux général de la sécurité sociale, la réparation de son préjudice selon les règles du droit commun de la responsabilité contractuelle. En effet, article L 451-1 du code de la sécurité sociale pose le principe selon lequel aucune action en réparation des accidents du travail ou des maladies professionnelles ne peut être exercée conformément au droit commun par la victime ou ses ayants droit ; en cas d'accident du travail ou de maladie professionnelle due à la faute inexcusable de l'employeur, l'article L 452-1 du même code ouvre droit au salarié-victime ou à ses ayants droit à une indemnisation complémentaire dans les conditions définies aux articles L 452-2 et L 452-3 du même code. Le premier de ces textes prévoit une majoration du capital ou de la rente allouée, tandis que le second permet à la victime de demander à l'employeur la réparation du préjudice causé par les souffrances physiques et morales endurées, ainsi que celle de ses préjudices esthétiques et d'agrément, et celle du préjudice résultant de la perte ou de la diminution de ses possibilités de promotion professionnelle. Par décision n° 2010-8 QPC du 18 juin 2010 rendue sur renvoi par la Cour de cassation d'une question prioritaire de constitutionnalité, le Conseil constitutionnel a été amené à se prononcer sur la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit des articles L 451-1 et L 452-1 à L 452-5 du code de la sécurité sociale. Les dispositions de l'article L. 452-3 du code de la sécurité sociale, tel qu'interprété par le Conseil constitutionnel, ne font pas obstacle à ce que, lorsque la faute inexcusable de l'employeur est reconnue, indépendamment de la majoration de la rente servie à la victime de l'accident du travail, celle-ci puisse demander à l'employeur, devant la juridiction de sécurité sociale, non seulement des chefs de préjudice énumérés par le texte susvisé, mais aussi de l'ensemble des dommages non couverts par le livre IV du code de la sécurité sociale. Par suite, le déficit fonctionnel temporaire, qui n'est pas au nombre des dommages couverts par le livre IV du code de la sécurité sociale peut être indemnisé sur le fondement de ce texte ; en revanche, le déficit fonctionnel permanent et le retentissement professionnel de l'incapacité résultant de l'accident du travail ne peuvent l'être dès lors que la rente servie en application de l'article L. 452-2 du code de la sécurité sociale les indemnise. Il s'ensuit de ce qui précède que Madame X... doit être déboutée de sa demande formée au titre de l'atteinte à l'intégrité physique et psychique, laquelle correspond au déficit fonctionnel permanent. Suite à l'accident du travail dont elle a été victime, Madame X... a présenté une fracture du col du fémur gauche et un traumatisme crânien ; il s'est ensuivi un symptôme post traumatique avec anxio-dépression. L'expert commis par la cour d'appel de Saint-Denis, dans un rapport argumenté à l'encontre duquel aucune critique sérieusement fondée ne saurait être adressée, a fixé la date de consolidation au 11 mai 2009 et ainsi qu'il suit le différents chefs de préjudice subis par Madame X... : - arrêts de travail du 23/10 au 31/01/08 et du 05/05/08 au 10/05/09 ; - déficit fonctionnel temporaire total : 23/10/07 au 29/10/07 puis du 07/04/09 au 09/04/09 ; - déficit fonctionnel temporaire partiel de classe III du 29/10/07 au 18/11/07 ; de classe II du 19/11/07 au 09/12/07 et du 10/04/09 au 10/05/09 ; de classe I du 10/12/07 au 31/01/08 et du 11/05/09 au 10/09/09 ; - souffrances endurées : 3/7 ; - atteinte à l'intégrité physique et psychique: 3 % ; - préjudice esthétique : 1/7 ; - préjudice d'agrément léger ; - préjudice professionnel : perte d'emploi et perte d'une possibilité d'évolution promotionnelle au sein de l'entreprise ; perte financière. Au vu des pièces versées aux débats, et compte tenu des conclusions du rapport d'expertise, la cour estime disposer des éléments suffisants pour fixer ainsi qu'il suit le montant des divers chefs de préjudice : LES PRÉJUDICES PATRIMONIAUX : La perte de revenus de la salariée, égale au montant des salaires pendant la période d'inactivité consécutive à l'accident du travail, doit être évaluée à la somme brute de 11.843,41 euros qu'elle réclame. » ;

ALORS QUE, premièrement, il résulte de l'article L. 452-3 du code de la sécurité sociale, tel qu'interprété par le Conseil constitutionnel dans sa décision n°2010-8 QPC du 18 juin 2010, qu'en cas de faute inexcusable, la victime d'un accident du travail peut demander, devant la juridiction de sécurité sociale, la réparation d'autres chefs de préjudice que ceux énumérés par le texte précité, à la condition que ces préjudices ne soient pas déjà couverts par le livre IV du code de la sécurité sociale ; que la perte de revenus professionnels pour la période antérieure à la consolidation est compensée par le service des indemnités journalières en application des articles L. 433-1 et suivants du code de la sécurité sociale ; qu'en faisant droit à la demande indemnitaire de Madame X... au titre de sa perte de revenus pendant ses arrêts de travail, les juges du fond ont violé l'article L. 452-3 du code de la sécurité sociale, ensemble les articles L. 433-1 et suivants du même code ;

ALORS QUE, deuxièmement, il résulte de l'article L. 452-3 du code de la sécurité sociale, tel qu'interprété par le Conseil constitutionnel dans sa décision n°2010-8 QPC du 18 juin 2010, qu'en cas de faute inexcusable, la victime d'un accident du travail peut demander, devant la juridiction de sécurité sociale, la réparation d'autres chefs de préjudice que ceux énumérés par le texte précité, à la condition que ces préjudices ne soient pas déjà couverts par le livre IV du code de la sécurité sociale ; que la perte de revenus professionnels pour la période postérieure à la consolidation est compensée par le service de la rente allouée en application des articles L. 434-1 et suivants du code de la sécurité sociale ; qu'en faisant droit à la demande indemnitaire de Madame X... au titre de sa perte de revenus pendant ses arrêts de travail, les juges du fond ont violé l'article L. 452-3 du code de la sécurité sociale, ensemble les articles L. 434-1 et suivants du même code ;

ALORS QUE, troisièmement, et en tout état, en statuant de la sorte, sans rechercher au préalable, comme ils y étaient invités (conclusions de la CGSS, pp. 3-4), si le préjudice invoqué par Madame X..., au titre de la perte de revenus, n'était pas déjà, fût-ce de manière incomplète, couvert par le livre IV du code de la sécurité sociale, les juges du fond ont à tout le moins privé leur décision de base légale au regard de l'article L. 452-3 du code de la sécurité sociale.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 16-25058
Date de la décision : 30/11/2017
Sens de l'arrêt : Cassation partielle sans renvoi
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion, 04 juillet 2016


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 30 nov. 2017, pourvoi n°16-25058


Composition du Tribunal
Président : Mme Flise (président)
Avocat(s) : SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, SCP Foussard et Froger, SCP Lyon-Caen et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2017:16.25058
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