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30/11/2017 | FRANCE | N°14-20449

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 30 novembre 2017, 14-20449


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, ci-après annexé :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Douai, 16 avril 2014), que la société civile immobilière Beau Repère (la SCI), qui a projeté la construction d'un bâtiment industriel, a entrepris des négociations avec la société Demathieu et Bard pour lui confier la construction de l'ouvrage hors lots électricité et PCS ; qu'invoquant une rupture brutale et abusive des pourparlers, la société Demathieu et Bard a assigné le maître de l'ouvrage en responsabilité

;

Attendu que la SCI fait grief à l'arrêt de retenir sa responsabilité et de la...

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, ci-après annexé :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Douai, 16 avril 2014), que la société civile immobilière Beau Repère (la SCI), qui a projeté la construction d'un bâtiment industriel, a entrepris des négociations avec la société Demathieu et Bard pour lui confier la construction de l'ouvrage hors lots électricité et PCS ; qu'invoquant une rupture brutale et abusive des pourparlers, la société Demathieu et Bard a assigné le maître de l'ouvrage en responsabilité ;

Attendu que la SCI fait grief à l'arrêt de retenir sa responsabilité et de la condamner au paiement de dommages et intérêts ;

Mais attendu, d'une part, qu'ayant relevé que, dès le 4 mai 2010, le maître de l'ouvrage, par la voix de son maître d'oeuvre, avait indiqué « souhaiter » confier le lot gros oeuvre à la société Demathieu et Bard, que, jusqu'au mois d'août, cette société avait été étroitement associée à la définition des travaux et avait participé aux réunions de coordination sur site précédant et accompagnant le démarrage du chantier, qu'elle avait élaboré six versions de son DGPF pour répondre aux demandes d'adaptation des maître de l'ouvrage et maître d'oeuvre, dont la dernière datant du 22 juillet, ou des administrations compétentes, que les courriels échangés n'avaient traduit aucune critique à l'adresse de la société, que plusieurs courriels du maître d'oeuvre avaient évoqué la signature imminente du marché, que la notification de la rupture des négociations avait été exempte de critiques, et retenu que la SCI, qui se retranchait derrière le jeu loyal de la concurrence, ne justifiait pas de l'intervention d'une autre entreprise avant la rupture des pourparlers et que le devis de la société ayant obtenu le marché n'était pas moins-disant que celui de la société Demathieu et Bard, la cour d'appel, qui a pu en déduire qu'en rompant brutalement les négociations, sans aucun grief ni respect d'un préavis, alors que le marché était sur le point d'être signé et le démarrage des travaux de l'entreprise annoncé comme imminent, la SCI avait commis une faute envers une entreprise qui s'était particulièrement investie dans son projet immobilier, a légalement justifié sa décision de ce chef ;
Attendu, d'autre part, qu'ayant retenu que le préjudice financier de la société Demathieu et Bard était indéniable au regard de la collaboration active de ses cadres de mai à août 2010 et de la nécessaire mobilisation de son personnel sur ce projet, compte tenu de sa croyance légitime en l'attribution de ce très important marché et du démarrage imminent de son intervention que laissaient présager les réunions de chantier du mois de juin 2010, la cour d'appel, qui n'a ni indemnisé la perte de chance de réaliser des gains résultant de la conclusion du contrat ni accordé une somme forfaitaire, a souverainement évalué le préjudice de la société Demathieu et Bard ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société civile immobilière Beau Repère aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société civile immobilière Beau Repère et la condamne à verser la somme de 3 000 euros à la société Demathieu et Bard ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du trente novembre deux mille dix-sept.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Ghestin, avocat aux Conseils, pour la société Beau repère.

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir retenu la responsabilité de la SCI BEAU REPERE envers la société DEMATHIEU ET BARD à raison de la rupture brutale des négociations relatives au projet immobilier de Somain et de l'avoir condamnée à lui payer la somme de 40 000 euros à titre de dommages et intérêts, outre 4 000 euros au titre des frais irrépétibles.

AUX MOTIFS QUE la chronologie des négociations entre les parties telle qu'elle ressort de l'ensemble des pièces communiquées est la suivante : ensuite d'un dossier de consultation des entreprises établi par le maître d'oeuvre d'exécution en Novembre 2009 et plusieurs fois modifié jusqu'en Février 2010, la société DEMATHIEU et BARD transmettait le 19 Mars 2010 un acte d'engagement au terme duquel elle s'engageait à réaliser le lot "gros oeuvre étendu au prix de 675 889 € HT soit 808 363 € TTC, après une réunion tripartite (maître de l'ouvrage, maître d'oeuvre et entreprise) du 3 Mai 2010, le maître d'oeuvre écrivait le 4 Mai à DEMATHIEU et BARD: « Comme convenu avec le maître de l'ouvrage (.J, et avec son accord et aval, nous vous confirmons souhaiter vous confier la réalisation de ces travaux TCE bâtiment, hors les lots Electricité et PCS pour un total de 1 033 000 € HT prorata inclus à hauteur de 2%, la gestion dudit compte prorata vous incombant; les lots qui vous seraient dévolus, en plus du votre sont les suivants: charpente-couverturebardage, vêture bois, menuiseries ext. et int., serrurerie métallerie, carrelage, cloison-plâtrerie, sols souples et peintures, l'ensemble pour une valeur non négociée à ce jour d'environ 637 000 € HT suivant devis en notre possession que nous pouvons vous commenter Merci de nous fixer par retour afin que nous puissions organiser une réunion de coordination générale après signature des pièces marché, lancement de l'OS et période de préparation... " ; qu'à partir du 11 Mai étaient organisées entre le maître d'oeuvre et l'entreprise une série de réunions en vue de définir les modalités techniques des travaux ensuite desquelles étaient diffusés un certain nombre de documents : - le 11 Mai:
réunion sur les travaux et/ou prestations modifiées et/ou à modifier sur le gros oeuvre et la couverture - le 18 Mai: réunion sur le lot menuiseries (en lien avec l'entreprise LECOQ) - le 27 Mai: réunion (mise au point de l'escalier métallique à définir avec le bureau de contrôle, bardage, cloisons, menuiseries, aménagements intérieurs... ) - le 1er Juin: réunion en présence du maître de l'ouvrage sur des choix techniques (menuiseries, chauffage, cloisons, carrelage... ) ; qu'à la suite de cette réunion, l'entreprise transmettait au maître d'oeuvre le 9 Juin son DGPF (décomposition du prix global et forfaitaire) - le 10 Juin: réunion après laquelle, sur la demande du maître d'oeuvre, DEMATHIEU et BARD transmettait son planning prévisionnel pour validation - le 14 Juin : réunion en présence du maître de l'ouvrage après laquelle le maître d'oeuvre précisait à l'entreprise que le plafond financier de 1.033.000 € HT s'entendait dans le cadre d'un marché forfaitaire incluant les frais de nettoyage, de pilotage et de compte prorata. Il ajoutait qu'en cas d'accord de DEMATHIEU et BARD sur ces modalités, le maître de l'ouvrage était prêt à signer le marché "avant la fin de cette semaine" ; qu'une discussion s'ensuivait sur les évacuations d'EP (mails du 15 Juin) puis le maître d'oeuvre transmettait le 17 Juin à DEMATHIEU et BARD le plan d'exécution voirie-assainissement établi par le bureau d'études ADI - le 18 Juin, le maître d'oeuvre réclamait à DEMATHIEU et BARD son plan d'installation du chantier ainsi que l'additif au CCTP, pièces destinées à composer le marché, que l'entreprise s'engageait à lui fournir semaines 25 ou 26 - le même jour, 3 A CONCEPT précisait vouloir un additif au CCTP avec les ajouts, retraits et/ou modifications et non un CCTP nouveau, le CCTP initial restant applicable - le 21 Juin, le maître d'oeuvre réclamait à nouveau le planning d'intervention de DEMATHIEU et BARD, lui transmettait le 22 Juin le rapport initial de contrôle technique et, parallèlement, le 24 Juin, sollicitait d'une entreprise tierce l'implantation du panneau de chantier mentionnant les entreprises intervenantes parmi lesquelles DEMATHIEU et
BARD pour les lots gros oeuvre, charpente bois, couverture-bardage étanchéité, menuiseries extérieures, serrurerie-métallerie, carrelage-faïence, cloisons et plâtrerie, peinture et sols souples » - le 25 Juin, DEMATHIEU et BARD transmettait son DPGF modifié - le 28 Juin, le maître d'oeuvre transmettait à l'entreprise le rapport du SD aux fins d'information et de modifications éventuelles de son offre tenant compte des observations de cet organisme, l'offre complémentaire devant lui parvenir le 1er Juillet au plus tard. Parallèlement, débutaient en Juin 2010 sur le site des réunions de coordination, réunissant, sur le modèle des réunions de chantier, le maître de l'ouvrage, le maître d'oeuvre d'exécution, et les entreprises concernées afin de coordonner le démarrage du chantier ; que c'est ainsi que la société DEMATHIEU et BARD participait, représentée par son conducteur de travaux, aux réunions des 10, 25, 29 Juin et 2 Juillet, qu'elle était de même convoquée à toutes les réunions ultérieures jusqu'au 27 Août et rendue destinataire des compte-rendus, lesquels évoquaient son intervention notamment celui du 10 Juin qui prescrivait la pose de la clôture du chantier par DEMATHIEU et BARD et le démarrage du gros oeuvre par ses soins à la fin du mois de Juin, lui demandant par ailleurs de recaler son planning pour planifier les interventions VRD et de fournir ses tolérances de planimétrie à STBM chargée du lot VRD ; que lors de la réunion du 2 Juillet, STBM suggérait encore que DEMATHIEU et BARD réalise ses fouilles pour ses fondations et mette ses déblais sur la plate-forme. Le 6 Juillet : après une "dernière réunion de mise au point avec le maître de l'ouvrage" , le maître d'oeuvre demandait à DEMATHIEU et BARD de chiffrer la solution d'un dallage sur plate-forme traitée pour être portante avec bêche périphérique ;

le 15 Juillet, le maître d'oeuvre accusait réception du complément de devis et l'option dallage transmis par DEMATHIEU et BARD et précisait être en cours de finalisation d'un additif au CCTP de base qui serait envoyé à l'entreprise pour information avant signature. Le 22 Juillet le maître d'oeuvre informait l'entreprise que le CCTP initial constituerait le référentiel de base, l'additif élaboré par lui apportant options et/ou modifications, que le dallage du hall et de la zone bureau serait extourné du marché, et lui demandait pour le lendemain de fournir un devis actualisé pour le lot gros oeuvre comportant bêche périphérique et bêche de refend, plancher sur bac acier, réseaux sous dalle, maçonneries, enduits et finitions restant inchangés. Il indiquait que l'enveloppe financière initiale n'était plus un objectif à atteindre ou à respecter. Le 5 Août, DEMATHIEU et BARD transmettait au maître d'oeuvre le dernier indice DGPF puis, en réponse à un mail du 16 Août exigeant l'envoi rapide de l'ensemble du DCE/TCE réclamé par le bailleur de fonds, adressait le 23 Août le DPGF modifié. Le 30 Août, le maître d'oeuvre informait DEMATHIEU et BARD qu'après examen de l'organisme de financement son offre n'était pas retenue. Le 20 Septembre 2010, le maître de l'ouvrage informait la société MORETTI de son souhait de lui confier le "lot gros oeuvre étendu" pour le prix de 719 748 € HT. Cet historique des relations entre les parties suscite les observations suivantes : dès le 4 Mai 2010, le maître de l'ouvrage, par la voix de son maître d'oeuvre d'exécution qui affirmait parler en son nom (cela n'est pas contesté par la SCI BEAU REPERE), indiquait clairement "souhaiter" confier le lot gros oeuvre étendu à DEMATHIEU et BARD ( la même formule sera d'ailleurs utilisée à l'adresse de MORETTI : "nous souhaitons confier à votre entreprise les travaux... "), pour un prix global de 1.033.000 € HT dont une partie n'avait pas été négociée et restait sujette à discussion, tout au long des mois de Mai, Juin, Juillet et Août, la société DEMATHIEU et BARD a été associée étroitement par le maître d'oeuvre d'exécution à la définition des travaux relevant du lot gros oeuvre étendu dans le cadre de réunions organisées par 3 A CONCEPT ce qui prouve, au-delà du souhait exprimé le 4 Mai, une collaboration effective de l'entreprise à la phase de "préparation technique"
visée à l'article 3 du contrat de maîtrise d'oeuvre d'exécution signé le 2 Octobre 2009 par 3 A CONCEPT, elle a de même été associée ès qualités d'entreprise titulaire du lot gros oeuvre étendu aux réunions de coordination sur site qui ont précédé et accompagné le démarrage du chantier, le maître d'oeuvre envisageant le 10 Juin le démarrage de ses prestations pour la fin du mois _ pas moins de six versions de son DGPF ont été élaborées par ses soins de Mai à Août 2010, oscillant entre 836.000 € HT et 1.044.000 € HT, pour répondre aux demandes d'adaptations, solutions alternatives ou modifications sollicitées par le maître de l'ouvrage et le maître d'oeuvre (la dernière date du 22 Juillet) ou exigées par les administrations compétentes, la société DEMATHIEU et BARD contribuant ainsi à la mission du maître d'oeuvre d'exécution prévue à l'article 3-D, portant sur les aménagements et modifications des offres pour les mettre en conformité avec le projet, hormis quelques mises au point du maître d'oeuvre (par exemple celle du 14 Juin 2010 pour récapituler le contenu de l'enveloppe financière de 1.033.000 € HT sur la base de laquelle la SCI BEAU REPERE était prête à signer le marché, excluant toute dérogation, celle du 18 Juin sur la nécessité de distinguer CCTP initial et additif ou encore celle du 22 Juillet sur le dallage du hall et des bureaux), les mails échangés ne traduisent aucune critique du maître d'oeuvre ou du maître de l'ouvrage à l'adresse de l'entreprise, que ce soit sur le contenu de ses propositions ou sur ses diligences, ni ne révèlent d'ailleurs un quelconque contentieux entre les parties, plusieurs mails du maître d'oeuvre évoquent la signature imminente du marché (voir notamment celui du 14 Juin) ; que le revirement du maître de l'ouvrage notifié par le maître d'oeuvre le 30 Août 2010, à la suite du contrôle du bailleur de fonds dont les conclusions ne sont pas connues, était de même exempt de toutes critiques à l'adresse de l'entreprise avec laquelle 3 A CONCEPT exprimait le souhait de retravailler ultérieurement. La SCI BEAU REPERE qui, pour justifier son recours à la société MORETTI, se retranche derrière le jeu loyal de la concurrence, ne rapporte par ailleurs aucunement la preuve de l'intervention de cette dernière (ni d'ailleurs d'une quelconque autre entreprise) que ce soit au stade des appels d'offres du maître d'oeuvre d'exécution ou ultérieurement, la première intervention de la société MORETTI procédant de la lettre d'intention du 20 Septembre 2010, postérieure à la rupture des négociations avec DEMATHIEU et BARD, ce qui tend à conforter la thèse de cette dernière selon laquelle elle était depuis le mois de Mai 2010 la seule interlocutrice du maître de l'ouvrage et du maître d'oeuvre pour la réalisation du gros oeuvre étendu de ce projet immobilier. Enfin, même à supposer que la société MORETTl ait participé à l'appel d'offre de 3 A CONCEPT, la Cour constate que le tableau comparatif des offres de DEMATHIEU et BARD et de MORETTI dressé par la SCI BEAU REPERE révèle que, pour les mêmes prestations (hors dalle RDC), le devis de DEMATHIEU et BARD s'élevait à 1.041.698 € HT lorsque celui de MORETTI était de 1.121.450 € HT ce qui contredit l'analyse du Tribunal estimant non critiquable le choix du maître de l'ouvrage en faveur de l'entreprise la moins-disante ; La Cour estime donc, au contraire du Tribunal, qu'en rompant brutalement les négociations, sans aucun grief ni respect d'un quelconque préavis, alors que le marché était sur le point d'être signé et le démarrage des travaux de l'entreprise annoncés comme imminents par le maître d'oeuvre la SCI BEAU REPERE a singulièrement manqué de loyauté envers une entreprise qui s'était particulièrement investie quatre mois durant dans son projet immobilier et a commis une faute qui engage sa responsabilité envers la société DEMATHIEU et BARD sur le fondement de l'article 1382 du Code civil : que la société DEMATHIEU et BARD chiffre à 51.458.37 € le montant des sommes investies dans sa collaboration avec la SCI BEAU REPERE et son maître d'oeuvre d'exécution auxquels elle ajoute une réclamation indemnitaire à hauteur de 83 600 € correspondant à la marge bénéficiaire qu'elle escomptait tirer de ce marché ; que la SCI BEAU REPERE conteste ces préjudices que n'étaye aucune pièce justificative, qualifiant ces réclamations "d'incompréhensibles ; que la Cour estime le préjudice financier de la société DEMATHIEU et BARD indéniable dans son principe au regard d'une part de la collaboration active de ses cadres de Mai à Août 2010 (réunions multiples, présence aux réunions sur le site, études, concertation avec les intervenants: bureaux d'études, de contrôle, VEOLIA, entreprises etc…), d'autre part de la nécessaire mobilisation de son personnel sur ce projet compte-tenu de sa croyance légitime en l'attribution de ce très important marché (plus d'un million d'euros), du démarrage imminent de son intervention que laissaient présager les réunions de chantier du mois de juin 2010 avec, à terme, la perspective d'un chiffre d'affaire conséquent ; qu'en l'absence de toute justification des dépenses énoncées (frais de détachement d'un ingénieur et d'un conducteur de travaux, frais d'études de béton armé, de plans, de reprographie) et d'une analyse comptable propre à établir la marge bénéficiaire que l'entreprise pouvait raisonnablement envisager, la Cour estime légitime d'indemniser le préjudice financier de la société DEMATHIEU et BARD à hauteur de 40 000 € (arrêt attaqué p. 3 al. 6, 7, 8, p. 4, p. 5, p. 6, p. 7 al. 1, 2, 3) ;

1°) ALORS QUE la liberté contractuelle implique celle de rompre les pourparlers, liberté qui n'est limitée que par l'abus du droit de rompre qui est une faute caractérisée par le fait de tromper la confiance du partenaire ; que la Cour d'appel, a seulement relevé le souhait initial exprimé par la SCI BEAU REPERE de confier le marché gros oeuvre à la société DEMATHIEU ET BARD sous réserve de négociations et la participation de cette dernière, pendant quatre mois, aux réunions successives avec les entreprises pressenties le maître de l'ouvrage et le maître d'oeuvre tendant à la définition de la nature et du prix des travaux comme il est courant pour un projet de construction de grande envergure ; qu'en s'abstenant de relever à la charge de la société BEAU REPERE des actes ou un comportement de nature à caractériser un abus ou sa mauvaise foi, la Cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard des articles 1382 et 1383 du Code civil ;

2°) ALORS QUE seuls les frais exposés par celui qui subit la rupture fautive de pourparlers précontractuels constituent un préjudice indemnisable ; que la Cour d'appel a en l'espèce relevé « l'absence de toute justification des dépenses énoncées (frais de détachement d'un ingénieur et d'un conducteur de travaux, frais d'étude de béton armé, de plans, de reprographie) » ; qu'en condamnant néanmoins la société BEAU REPERE à payer la somme de 40 000 € à titre de dommages et intérêts, la Cour d'appel a violé l'article 1382 du Code civil ;

3°) ALORS QUE les circonstances constitutives d'une faute commise dans l'exercice du droit de rupture unilatérale des pourparlers précontractuels ne sont pas la cause du préjudice consistant dans la perte d'une chance de réaliser les gains que permettait d'espérer la conclusion du contrat ; qu'en estimant indéniable un préjudice financier incluant la perte de « la perspective d'un chiffre d'affaire conséquent » pour estimer « légitime d'indemniser le préjudice financier de la société DEMATHIEU et BARD », la Cour d'appel a violé l'article 1382 du Code civil ;

4°) ALORS QUE le principe de la réparation intégrale, qui commande de réparer l'entier préjudice, mais uniquement le préjudice, interdit toute indemnisation forfaitaire sans lien avec le dommage effectivement subi par la victime ; qu'en accordant à la société DEMATHIEU ET BARD une indemnisation de 40 000 euros tout en reconnaissant que cette société n'apportait aucune justification des dépenses exposées ni d'une perte chance de marge bénéficiaire, la Cour d'appel qui a ainsi reconnu implicitement que l'indemnisation qu'elle accordait était forfaitaire a violé l'article 1382 du Code civil, ensemble le principe de la réparation intégrale sans perte ni profit pour la victime.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 14-20449
Date de la décision : 30/11/2017
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Douai, 16 avril 2014


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 30 nov. 2017, pourvoi n°14-20449


Composition du Tribunal
Président : M. Chauvin (président)
Avocat(s) : SCP Ghestin, SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2017:14.20449
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