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23/11/2017 | FRANCE | N°16-21644

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 23 novembre 2017, 16-21644


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 9 juin 2016), que M. X... qui avait souscrit le 15 avril 2005 auprès de la société Imperio assurances (l'assureur) un contrat d'assurance sur la vie monosupport prévoyant un capital minimum garanti à son terme, a transféré le 31 octobre 2007 sur un nouveau contrat, dénommé Patrimoine expansion, la valeur acquise du précédent, soit la somme de 61 515, 02 euros, qu'il a placée en totalité sur un fonds représentatif d'actifs b

oursiers ; qu'ayant constaté une perte de valeur du capital investi, il a, ap...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 9 juin 2016), que M. X... qui avait souscrit le 15 avril 2005 auprès de la société Imperio assurances (l'assureur) un contrat d'assurance sur la vie monosupport prévoyant un capital minimum garanti à son terme, a transféré le 31 octobre 2007 sur un nouveau contrat, dénommé Patrimoine expansion, la valeur acquise du précédent, soit la somme de 61 515, 02 euros, qu'il a placée en totalité sur un fonds représentatif d'actifs boursiers ; qu'ayant constaté une perte de valeur du capital investi, il a, après avoir procédé en juin 2012 au rachat de son contrat et perçu la somme de 24 021, 51 euros, recherché la responsabilité de l'assureur pour avoir manqué à des obligations d'information, de conseil et de mise en garde et l'a assigné en indemnisation de ses préjudices ;

Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de le débouter de ses demandes alors, selon le moyen,

1°/ que l'assureur qui, au travers d'un contrat d'assurance sur la vie, propose un placement financier à son client, est tenu de l'informer sur les caractéristiques des produits proposés et sur les aspects moins favorables et les risques inhérents aux options, qui peuvent être le corollaire des avantages énoncés, ainsi que sur leur adéquation avec la situation personnelle et les attentes de son client ; qu'en considérant, pour retenir qu'il n'avait pas manqué à son devoir de conseil, que l'assureur avait porté à la connaissance de son client les données lui permettant de prendre la mesure du risque auquel son choix exposait son placement et l'avait ainsi informé des risques inhérents au placement proposé qui constituaient la contrepartie des gains espérés par lui, sans rechercher, comme elle y était invitée, si l'assureur s'était renseigné sur la situation personnelle et les attentes de son client et l'avait informé sur l'adéquation du placement envisagé avec celles-ci, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article 1147 du code civil ;

2°/ que, dans ses conclusions d'appel, M. X... faisait valoir que l'assureur avait manqué, envers lui, client profane, à son obligation de conseil à défaut d'avoir procédé à l'élaboration préalable d'un bilan patrimonial et d'avoir ainsi recherché si le placement envisagé était adapté à sa situation personnelle ; qu'en laissant sans réponse le moyen déterminant, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;

3°/ que, si le rachat total du contrat d'assurance sur la vie prive de tout effet la faculté de renonciation exercée postérieurement, elle n'interdit pas à l'assuré de rechercher, dans les conditions du droit commun, la responsabilité de l'assureur à raison de manquements à son obligation précontractuelle d'information telle qu'elle est notamment définie par les articles L. 132-5-1 et L. 132-27-1 du code des assurances ; qu'en considérant que les manquements aux obligations édictées par ces textes sont exclusivement sanctionnés par la prorogation du délai de renonciation et la restitution intégrale des fonds versés par l'assuré et qu'en l'état du rachat total du contrat, exclusif de l'exercice de la faculté de renonciation, ces manquements ne peuvent pas donner lieu à des dommages-intérêts sur un autre fondement, la cour d'appel a violé les textes susvisés, ensemble l'article 1147 du code civil ;

Mais attendu qu'ayant constaté qu'avant la souscription du nouveau contrat d'assurance sur la vie, l'assureur avait remis à M. X... une lettre l'informant de la nécessité de s'assurer, préalablement à toute demande de transfert, de la conformité de cette opération à ses objectifs, à la composition de son patrimoine, à sa situation familiale, à son âge et à son horizon de placement, un conseiller pouvant l'assister pour apprécier ces différents éléments, ainsi qu'une note d'information sur le contrat " Patrimoine expansion " mentionnant à deux reprises, en caractères gras, que la valeur des unités de compte n'était pas garantie et était sujette à des fluctuations à la hausse comme à la baisse, puis relevé que, dans un document " portant répartition des garanties ", M. X... avait déclaré avoir été averti que les fonds représentatifs d'actifs boursiers qui pouvaient évoluer à la hausse comme à la baisse, comportaient un risque spécifique lié aux fluctuations des marchés financiers, et " assumer intégralement les risques associés à ce type de placement ", et, enfin, retenu qu'il résultait de la teneur des documents remis à M. X... que l'assureur lui avait communiqué les caractéristiques essentielles des divers supports financiers proposés, ainsi que des risques de perte qui y étaient associés, et avait porté à sa connaissance les données lui permettant de mesurer le risque auquel son choix exposait son placement, la cour d'appel qui a ainsi fait ressortir que l'information sur le produit proposé et l'adéquation des risques éventuels résultant du choix de l'assuré à sa situation personnelle avait été fournie à M. X..., a légalement justifié sa décision ;

D'où il suit que le moyen dont la dernière branche est inopérante en ce qu'elle se réfère à l'article L. 132-27-1 du code des assurances, inapplicable au litige, et qui, pour le surplus, critique un motif erroné mais surabondant, ne peut être accueilli ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois novembre deux mille dix-sept.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par Me Haas, avocat aux Conseils, pour M. X...

Il est fait grief à l'arrêt attaqué infirmatif D'AVOIR débouté M. X... de ses demandes ;

AUX MOTIFS QUE : « Il n'est pas discuté que la souscription du nouveau contrat impliquait le respect des dispositions de l'article L. 132-5-1 du code des assurances. M. X... n'a pas maintenu sa volonté initiale de renoncer au contrat en cause et a choisi de procéder à son rachat total. Par l'effet de ce rachat total, antérieur à l'introduction de la présente instance, il n'est plus fondé à se prévaloir de manquements à l'obligation d'information prévue par les dispositions des articles L. 132-5-1 et L. 132-27-1 du code des assurances, qui sont sanctionnés par la prorogation du délai de renonciation et la restitution intégrale des fonds versés par l'assuré, cette sanction étant exclusive de toute autre et il en résulte qu'il ne peut solliciter des dommages-intérêts pour ce même manquement sur un autre fondement. Pour autant, indépendamment de la question formelle de la délivrance des documents prévus par l'article L. 132-5-1, les manquements de l'assureur à ces obligations sont susceptibles de constituer une faute lorsqu'il en résulte que l'assuré n'a pas été informé, in concreto, sur certains éléments essentiels. L'assuré qui entend agir sur le fondement du droit commun, et spécialement l'article 1382 du code civil applicable à la période précédant la signature du contrat, doit donc établir une faute déterminée, un dommage subi et le lien de causalité entre la faute et ce dommage. L'assureur est en effet tenu d'une obligation générale d'information et de conseil à l'égard de son cocontractant profane, et ce indépendamment des obligations d'information qui lui sont imposées par la loi ou les textes réglementaires, et, comme tout professionnel, il est également tenu d'une obligation précontractuelle d'information à l'égard de celui qui souhaite souscrire un contrat d'assurance. Le 31 octobre 2007, reçu par un commercial de la société Imperio, M. X... s'est vu remettre :- un courrier l'informant : * de la possibilité de transférer la valeur acquise de son contrat en euros sur le nouveau contrat « Patrimoine Expansion » multi-support à capital variable libellé en unités de compte et/ ou en euros, 20 % au minimum de la somme investie devant obligatoirement l'être sur des unités de compte, * de la nécessité de s'assurer, préalablement à toute demande de transfert, de ce que « cette opération est conforme à vos objectifs, à la composition de votre patrimoine, à votre situation familiale, à votre âge et à votre horizon de placement. Votre conseiller lmperio pourra vous assister pour apprécier ces différents éléments », * dans un paragraphe spécifique intitulé « risques associés aux investissements sur des unités de compte », de ce que, contrairement aux sommes actuellement investies dans le cadre du contrat d'origine, les investissements en unités de compte ne comportaient aucune garantie en capital, la garantie de l'assureur portant uniquement sur le nombre d'unités de compte et « en aucun cas sur leur valeur qui est susceptible de fluctuer à la hausse ou à la baisse ». Il était mentionné dans ce courrier qu'y étaient joints le formulaire de demande de transfert, la demande de souscription du nouveau contrat, la note d'information de celui-ci et une annexe à la demande dc souscription incluant la liste et les caractéristiques principales des unités de compte offertes, et cette mention : « vous devez prendre connaissance de l'ensemble de ces documents avant de signer la demande de transfert ». Ce courrier a été signé de M. X... le 31 octobre 2007, preuve qu'il a pris connaissance de son contenu ;- un document constituant la demande de transfert vers le contrat d'assurance-vie à capital variable et/ ou en euros « Patrimoine Expansion », dans lequel il est notamment indiqué « Je déclare avoir pris connaissance de l'information transmise par Imperio en ce qui concerne la possibilité de transfert de la valeur acquise de mon contrat d'assurance vie libellé en euros ci-dessus référencé, sur le contrat d'assurance vie à capital variable et/ ou en euros... Je déclare avoir pris connaissance de la note d'information ainsi que de l'ensemble des documents contractuels du document d'assurance vie... Je déclare être informé des termes et conditions de ce transfert. J'accepte et je reconnais savoir notamment que le nouveau contrat d'assurance vie Patrimoine Expansion est un contrat mufti-support offrant à la fois la possibilité d'investir dans un fonds libellé en euros qui bénéficie d'un rendement garanti, et dans des unités de compte dont les actifs sous-jacents sont notamment investis en actions. Les investissements dans les unités de compte ne comportent aucune garantie en capital et peuvent varier à la hausse ou à la baisse, la garantie de l'assureur ne portant que sur le nombre d'unités de compte de mon contrat et en aucun cas sur leur valeur ». Ce document est daté du 31 octobre 2007 et signé de M. X.... Il en résulte, quoi qu'il en dise aujourd'hui, qu'il a bien reçu la note d'information ;- la note d'information, dans laquelle il est mentionné à deux endroits distincts, à chaque fois en caractères gras, que la valeur des unités de compte n'est pas garantie et qu'elle est sujette à des fluctuations à la hausse comme à la baisse, et dans laquelle figure un paragraphe consacré aux profils de gestion, dans lequel sont expliqués les différents types de gestion possibles, à savoir la « gestion profilée » (sécurisée, prudente, équilibrée, dynamique ou offensive, avec pour chacune la proportion de capital à investir sur les fonds en euros et sur les supports d'OPCVM, (100 % pour la sécurisée, 80 %/ 20 % pour la prudente, 60 %/ 40 % pour l'équilibrée, 40 %/ 60 % pour la dynamique et 20 %/ 80 % pour l'offensive) et la « gestion libre » dans laquelle, comme son nom l'indique, le souscripteur choisit librement la répartition des primes investies sur les différents supports disponibles ;- une demande de souscription datée et signée de M. X... le 31 octobre 2007 qui comporte le choix des bénéficiaires du contrat, le choix du profil de gestion, en l'espèce « gestion profilée ou libre », le choix de versement des primes (libre en l'espèce),- un document portant « répartition des garanties » signé de M. X... le 31 octobre 2007 prévoyant une affectation de 100 % de son versement sur des fonds représentatifs d'actifs boursiers (l'autre choix d'affectation étant un fonds en euros), s'achevant sur cette phrase, en caractères gras, précédant la signature de M. X... le 31 octobre 2007 : « Je reconnais avoir préalablement complété la demande de souscription ci-jointe et avoir pris connaissance des caractéristiques des actifs correspondant aux fonds choisis, dont les notices d'information m'ont été remises en main propre. Je déclare avoir été averti que les fonds représentatifs d'actifs boursiers comportent un risque spécifique lié aux fluctuations des marchés financiers et peuvent évoluer à la hausse comme à la baisse. En conséquence, je déclare assumer intégralement les risques associés à ce type de placements ». M. X... fait valoir que, de nationalité portugaise, il parle et comprend mal le français. Cependant il n'a pas été contesté que les conseillers Imperio parlent sa langue natale si bien que l'argument est sans portée. Au demeurant, M. X... résidait en France depuis de nombreuses années. Il résulte donc de la teneur de ces documents que l'assureur a bien communiqué à M. X... les caractéristiques essentielles des divers supports financiers qui lui étaient proposés, la différence existant entre les valeurs en unités de compte et les valeurs euros ainsi que les risques de perte qui étaient associés aux premières, et qu'il a ainsi porté à sa connaissance les données lui permettant de prendre la mesure du risque auquel son choix exposait son placement. M. X..., ainsi exactement et complètement informé des risques inhérents au placement proposé qui constituaient la contrepartie des gains espérés par lui, a choisi le profil de gestion procurant le plus fort potentiel de valorisation et comportant le plus fort risque de perte. En conséquence, la société Imperio ne saurait voir sa responsabilité engagée au titre des articles 1147 ou 1382 du code civil, pour manquement à son obligation d'information et de conseil. » ;

ALORS, 1°), QUE l'assureur qui, au travers d'un contrat d'assurance vie, propose un placement financier à son client, est tenu de l'informer sur les caractéristiques des produits proposés et sur les aspects moins favorables et les risques inhérents aux options, qui peuvent être le corollaire des avantages énoncés, ainsi que sur leur adéquation avec la situation personnelle et les attentes de son client ; qu'en considérant, pour retenir qu'il n'avait pas manqué à son devoir de conseil, que l'assureur avait porté à la connaissance de son client les données lui permettant de prendre la mesure du risque auquel son choix exposait son placement et l'avait ainsi informé des risques inhérents au placement proposé qui constituaient la contrepartie des gains espérés par lui, sans rechercher, comme elle y était invitée, si l'assureur s'était renseigné sur la situation personnelle et les attentes de son client et l'avait informé sur l'adéquation du placement envisagé avec celles-ci, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article 1147 du code civil ;

ALORS, 2°), QUE, dans ses conclusions d'appel (p. 7 et p. 8, al. 1er), M. X... faisait valoir que la société Imperio assurances avait manqué, envers lui, client profane, à son obligation de conseil à défaut d'avoir procédé à l'élaboration préalable d'un bilan patrimonial et d'avoir ainsi recherché si le placement envisagé était adapté à sa situation personnelle ; qu'en laissant sans réponse le moyen déterminant, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;

ALORS, 3°), QUE si le rachat total du contrat d'assurance sur la vie prive de tout effet la faculté de renonciation exercée postérieurement, elle n'interdit pas à l'assuré de rechercher, dans les conditions du droit commun, la responsabilité de l'assureur à raison de manquements à son obligation précontractuelle d'information telle qu'elle est notamment définie par les articles L. 132-5-1 et L. 132-27-1 du code des assurances ; qu'en considérant que les manquements aux obligations édictées par ces textes sont exclusivement sanctionnés par la prorogation du délai de renonciation et la restitution intégrale des fonds versés par l'assuré et qu'en l'état du rachat total du contrat, exclusif de l'exercice de la faculté de renonciation, ces manquements ne peuvent pas donner lieu à des dommages-intérêts sur un autre fondement, la cour d'appel a violé les textes susvisés, ensemble l'article 1147 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 16-21644
Date de la décision : 23/11/2017
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 09 juin 2016


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 23 nov. 2017, pourvoi n°16-21644


Composition du Tribunal
Président : Mme Flise (président)
Avocat(s) : Me Haas, SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2017:16.21644
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