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21/11/2017 | FRANCE | N°16-85650

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 21 novembre 2017, 16-85650


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

-
M. Jovanny X..., partie civile,

contre l'arrêt de la cour d'appel de SAINT-DENIS DE LA RÉUNION, chambre correctionnelle, en date du 4 août 2016, qui, dans la procédure suivie contre Mme Elsa Y... des chefs notamment de blessures involontaires et conduite sans assurance, a prononcé sur les intérêts civils ;

La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 10 octobre 2017 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-

1-1 du code de procédure pénale : M. Soulard, président, Mme Ingall-Montagnier, conseiller...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

-
M. Jovanny X..., partie civile,

contre l'arrêt de la cour d'appel de SAINT-DENIS DE LA RÉUNION, chambre correctionnelle, en date du 4 août 2016, qui, dans la procédure suivie contre Mme Elsa Y... des chefs notamment de blessures involontaires et conduite sans assurance, a prononcé sur les intérêts civils ;

La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 10 octobre 2017 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Soulard, président, Mme Ingall-Montagnier, conseiller rapporteur, M. Pers, conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme Guichard ;

Sur le rapport de Mme le conseiller INGALL-MONTAGNIER, les observations de la société civile professionnelle MATUCHANSKY, POUPOT et VALDELIÈVRE, de la société civile professionnelle DELVOLVÉ et TRICHET, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général DESPORTES ;

Vu les mémoires produits, en demande et en défense ;

Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 1 et 4 de la loi du 5 juillet 1985, 1382 du code civil, 2, 3 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a infirmé le jugement correctionnel du 10 décembre 2015 qui, sur l'action civile, avait déclaré Mme Y... entièrement responsable du préjudice subi par M. X... et a ainsi débouté ce dernier de ses demandes tendant à faire reconnaître son droit à l'indemnisation intégrale du préjudice subi lors de l'accident de la circulation survenu le 20 décembre 2012 et d'en mettre la réparation à la charge de Mme Y... ;

"aux motifs que sur l'action pénale, l'étude de la procédure révèle les insuffisances de celle-ci ; qu'en effet, seuls ont été entendu les deux conducteurs en cause dans l'accident qui relatent les faits de façon divergente ; qu'à défaut de témoignages, un minimum de constatations matérielles auraient pu être faites, il n'en a rien été ; que les policiers ont repris les versions des deux conducteurs ; que Mme Y... affirmait avoir marqué le stop et avoir démarré alors qu'aucun véhicule n'était visible ; que selon elle, le scooter n'était pas éclairé ; qu'au bout de quelques mètres alors qu'elle tournait à gauche le scooter était venu la percuter en opérant un dépassement ; que M. X... affirme quant à lui que le véhicule automobile ; qu'au bout de quelques mètres alors qu'elle tournait à gauche, le scooter était venu la percuter en opérant un dépassement ; que M. X... affirme quant à lui que le véhicule automobile n'a pas respecté le panneau stop et que le scooter était éclairé ; que les policiers n'ont ni mentionné d'élément objectif justifiant le choix du point d'impact présumé ni examiné le scooter ; qu'en fait, le seul élément certain est la position de la victime qui a été retrouvé à près de 14 m du point d'impact présumé par les policiers sur une voie adjacente à gauche de l'axe de circulation ; que cette position aurait tendance à accréditer la thèse de Mme Y... puisqu'elle situe l'impact plus loin et plus à gauche que M. X... ; que, par ailleurs, M. X... soutient à la fois avoir perdu conscience et se rappeler du déroulement des évènements ; qu'enfin et surtout, des proches de M. X... ont soustrait le scooter aux constatations de police, ce qui permet légitimement de s'interroger sur les raisons de cet acte, la dissimulation d'indice ne pouvant être faite que pour éviter que des constatations matérielles mettent à mal la thèse du scooteriste ; qu'il résulte de ces éléments qu'il existe un doute certain quant au déroulement des faits et qu'aucun élément objectif ne permet d'accréditer une thèse plutôt qu'une autre ; qu'il n'est nullement établi que Mme Y... n'ait pas respecté le panneau stop et que l'accident soit le résultat d'une maladresse, imprudence, inattention, négligence ou manquement à une obligation de prudence et de sécurité imposée par la loi imputable à Mme Y... ; que dès lors les faits ne sont pas suffisamment établis et il convient de prononcer la relaxe de Mme Y... des faits de blessures involontaires ayant entraîné une incapacité totale de travail supérieure à trois mois par conducteur de véhicule terrestre à moteur, circulation avec un véhicule terrestre à moteur sans assurance et inobservation par conducteur de l'arrêt absolu imposé par le panneau stop à une intersection de route ; que le défaut d'assurance n'est pas quant à lui contesté et la décision entreprise sera sur ce point confirmée tant sur la culpabilité que sur la peine ; que sur l'action civile, au vu des éléments du dossier le préjudice subi par M. X... ne peut être rattaché par un lien direct et certain à un comportement fautif de Mme Y..., les dispositions civiles seront infirmées et l'ensemble des parties civiles déboutées de leurs demandes ;

"alors que, lorsque plusieurs véhicules sont impliqués dans un accident de la circulation, chaque conducteur a droit à l'indemnisation des dommages qu'il a subis, sauf s'il a commis une faute ayant contribué à la réalisation de son préjudice ; qu'il appartient alors au juge d'apprécier souverainement si cette faute a pour effet de limiter l'indemnisation ou de l'exclure en faisant abstraction du comportement de l'autre conducteur ; qu'en déniant comme elle l'a fait le droit à indemnisation de M. X... ; qu'en déniant comme elle l'a fait le droit à indemnisation de M. X... pour la circonstance qu'aucun lien direct et certain ne pouvait être retenu entre le préjudice subi par ce conducteur avec un comportement fautif de Mme Y..., autre conductrice dont il n'était pas discuté qu'elle était impliquée dans l'accident, quand il lui appartenait, en faisant abstraction du comportement de cette dernière, de rechercher si M. X... avait commis une faute de nature à exclure ou à limiter son droit à indemnisation, la cour d'appel a méconnu les textes susvisés" ;

Vu les articles 1er et 4 de la loi n°85-677 du 5 juillet 1985 ;

Attendu que, lorsque plusieurs véhicules sont impliqués dans un accident de la circulation, chaque conducteur a droit à l'indemnisation des dommages qu'il a subis, sauf s'il a commis une faute ayant contribué à la réalisation de son préjudice ; qu'il appartient alors au juge d'apprécier souverainement si cette faute a pour effet de limiter l'indemnisation ou de l'exclure en faisant abstraction du comportement de l'autre conducteur ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure qu'une collision s'est produite entre le scooter piloté par M. Jovanny X... et le véhicule conduit par Mme Elsa Y..., aucun des conducteurs n'étant assuré, que Mme Y... a été poursuivie pour blessures involontaires, inobservation du panneau stop et défaut d'assurance, que le tribunal correctionnel a retenu sa culpabilité, la condamnant à diverses peines et a prononcé sur les intérêts civils ; qu'appel a été interjeté par la prévenue et le procureur de la République ;

Attendu que, pour exclure l'indemnisation des dommages subis par M. X..., l'arrêt retient que le préjudice subi par ce dernier ne peut être rattaché par un lien direct et certain à un comportement fautif de Mme Y... ;

Mais attendu qu'en statuant ainsi, alors qu'il lui appartenait, en faisant abstraction du comportement du conducteur impliqué dans l'accident, de rechercher si la victime avait commis une faute de nature à exclure ou à limiter son droit à indemnisation, la cour d'appel a méconnu le sens et la portée des textes susvisés et le principe ci-dessus rappelé ;

D'où il suit que la cassation est encourue ;

Par ces motifs :

CASSE et ANNULE l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion, en date du 4 août 2016, mais en ses seules dispositions sur l'action civile ayant débouté M. X... de ses demandes, toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;

Et pour qu'il soit à nouveau statué, conformément à la loi, dans les limites de la cassation ainsi prononcée ;

RENVOI la cause et les parties devant la cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion, autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;

ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le vingt et un novembre deux mille dix-sept ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 16-85650
Date de la décision : 21/11/2017
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion, 04 août 2016


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 21 nov. 2017, pourvoi n°16-85650


Composition du Tribunal
Président : M. Soulard (président)
Avocat(s) : SCP Delvolvé et Trichet, SCP Matuchansky, Poupot et Valdelièvre

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2017:16.85650
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