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15/11/2017 | FRANCE | N°16-25507

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 15 novembre 2017, 16-25507


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon le jugement attaqué (tribunal d'instance de Nevers, 2 novembre 2016), que le 20 janvier 2015, l'Union départementale Force ouvrière de la Nièvre a désigné Mme X... en qualité de délégué syndical au sein de la société Look fixations ; que le 30 septembre 2016, elle a désigné M. Y... en remplacement de Mme X..., estimant que celle-ci n'était plus à même de la représenter ; que la société a saisi le tribunal aux fins d'obtenir l'annulation de cette désignati

on ;

Attendu que le syndicat fait grief au jugement d'annuler la désignation, a...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon le jugement attaqué (tribunal d'instance de Nevers, 2 novembre 2016), que le 20 janvier 2015, l'Union départementale Force ouvrière de la Nièvre a désigné Mme X... en qualité de délégué syndical au sein de la société Look fixations ; que le 30 septembre 2016, elle a désigné M. Y... en remplacement de Mme X..., estimant que celle-ci n'était plus à même de la représenter ; que la société a saisi le tribunal aux fins d'obtenir l'annulation de cette désignation ;

Attendu que le syndicat fait grief au jugement d'annuler la désignation, alors, selon le moyen, que l'obligation faite par l'article L. 2143-3 du code du travail aux syndicats représentatifs de choisir en priorité le délégué syndical parmi les candidats ayant obtenu au moins 10 % des voix aux dernières élections professionnelles porte atteinte à la liberté des organisations syndicales représentatives de choisir leurs délégués syndicaux aux fins de la négociation collective et, dès lors, méconnaît les stipulations de l'article 3 de la Convention n° 87 de l'Organisation internationale du travail relative à la liberté syndicale et à la protection du droit syndical ; qu'en se fondant sur la circonstance que M. Y... n'avait pas obtenu 10 % des suffrages exprimés lors des dernières élections professionnelles organisées dans l'entreprise pour annuler sa désignation en qualité de délégué syndical, le tribunal d'instance, qui aurait dû écarter l'application de l'article L. 2143-3 du code du travail, a violé l'article 3 de la Convention n° 87 de l'Organisation internationale du travail relative à la liberté syndicale et à la protection du droit syndical ;

Mais attendu que le tribunal a exactement énoncé que l'obligation faite aux syndicats représentatifs de choisir, en priorité, le délégué syndical parmi les candidats ayant obtenu au moins 10 % des voix ne heurte aucune prérogative inhérente à la liberté syndicale et que, tendant à assurer la détermination par les salariés eux-mêmes des personnes les plus aptes à défendre leurs intérêts dans l'entreprise et à conduire les négociations pour leur compte, elle ne constitue pas une ingérence arbitraire dans le fonctionnement syndical ; que c'est dès lors à bon droit que le tribunal a refusé d'écarter l'application de l'article L. 2143-3 du code du travail au regard de l'article 3 de la Convention n° 87 de l'Organisation internationale du travail ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quinze novembre deux mille dix-sept.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par Me Haas, avocat aux Conseils, pour l'Union départementale Force ouvrière de la Nièvre, M. Y..., la Confédération générale du travail Force ouvrière et la Fédération confédérée Force ouvrière de la métallurgie

Il est fait grief au jugement attaqué D'AVOIR annulé la désignation de M. Y..., effectuée le 30 septembre 2016, en qualité de délégué syndical, par l'Union départementale Force Ouvrière de la Nièvre, au sein de la société Look fixations ;

AUX MOTIFS QUE, selon l'article 3 de la convention n° 87 de l'Organisation internationale du travail (OIT) de 1948 : « 1. Les organisations de travailleurs et d'employeurs ont le droit d'élaborer leurs statuts et règlements administratifs, d'élire librement leurs représentants, d'organiser leur gestion et leur activité, et de formuler leurs programmes d'action ; 2. Les autorités publiques doivent s'abstenir de toute intervention de nature à limiter ce droit ou à en entraver l'exercice légal. » ; que l'article L. 2143-3, alinéa 1er, du code du travail prévoit que chaque organisation syndicale représentative dans l'entreprise ou l'établissement d'au moins cinquante salariés, qui constitue une section syndicale, désigne parmi les candidats aux élections professionnelles qui ont recueilli à titre personnel et dans leur collège au moins 10 % des suffrages exprimés au premier tour des dernières élections au comité d'entreprise ou de la délégation unique du personnel ou des délégués du personnel, quel que soit le nombre de votants, dans les limites fixées à l'article L. 2143-12, un ou plusieurs délégués syndicaux pour la représenter auprès de l'employeur ; qu'en son alinéa 2, cet article dispose que si aucun des candidats présentés par l'organisation syndicale aux élections professionnelles ne remplit les conditions mentionnées au 1er alinéa du présent article ou s'il ne reste dans l'entreprise ou l'établissement plus aucun candidat aux élections professionnelles qui remplit les conditions mentionnées au 1er alinéa, une organisation syndicale représentative peut désigner un délégué syndical parmi les autres candidats ou, à défaut, parmi ses adhérents au sein de l'entreprise ou l'établissement ; que, pour soutenir que la condition d'audience électorale de 10 % minimum des votants au premier tour posée par les dispositions du code du travail est contraire à l'article 3 de la convention n° 87 de l'OIT, les défendeurs font valoir qu'une telle condition heurte les principes de libre choix de ses représentants par une organisation syndicale et de l'absence d'ingérence des autorités publiques dans cette désignation qui en découle ; que s'il n'est pas contestable que la convention internationale précitée est d'effet direct en droit interne, l'exigence d'un seuil de 10 % des voix telle que posée par l'article L. 2143-3 précité, qui constitue un critère objectif, précis et préétabli, ne heurte aucune stipulation de l'article 3 de cette convention internationale, sauf à commettre une confusion entre la liberté du syndicat d'élire ses représentants, au sens d'organes dirigeants, et la faculté, lorsqu'une législation nationale le prévoit, de désigner un représentant dans une entreprise, faculté nécessairement limitée, à commencer par l'exigence que le représentant soit un salarié de l'entreprise ; qu'ainsi, l'obligation d'audience électorale contestée n'est pas contraire aux textes internationaux, et notamment à l'article 3 de la convention n° 87 de l'OIT de 1948, en ce qu'elle ne heurte aucune prérogative inhérente à la liberté syndicale et en ce qu'elle vise à assurer la détermination par les salariés eux-mêmes des personnes les plus aptes à défendre leurs intérêts dans l'entreprise et à conduire les négociations pour leur compte, de telle sorte qu'elle ne constitue pas une ingérence arbitraire dans le fonctionnement syndical ; qu'en l'espèce, il ressort des procès-verbaux des élections de la délégation unique du personnel qui se sont déroulées le 14 novembre 2014 au sein de la société Look fixations que M. Y... n'a pas recueilli au moins 10 % des suffrages exprimés au premier tour, tant pour l'élection des membres titulaires que des membres suppléants, en obtenant respectivement une voix sur 22 et une voix sur 21 ; qu'en conséquence, alors qu'il n'est pas contesté que l'Union départementale Force Ouvrière de la Nièvre disposait d'autres candidats ayant obtenu au moins 10 % des suffrages exprimés au premier tour de ces élections, il y a lieu d'annuler la désignation de M. Y... ;

ALORS QUE l'obligation faite par l'article L. 2143-3 du code du travail aux syndicats représentatifs de choisir en priorité le délégué syndical parmi les candidats ayant obtenu au moins 10 % des voix aux dernières élections professionnelles porte atteinte à la liberté des organisations syndicales représentatives de choisir leurs délégués syndicaux aux fins de la négociation collective et, dès lors, méconnaît les stipulations de l'article 3 de la Convention n° 87 de l'OIT relative à la liberté syndicale et à la protection du droit syndical ; qu'en se fondant sur la circonstance que M. Y... n'avait pas obtenu 10 % des suffrages exprimés lors des dernières élections professionnelles organisées dans l'entreprise pour annuler sa désignation en qualité de délégué syndical, le tribunal d'instance, qui aurait dû écarter l'application de l'article L. 2143-3 du code du travail, a violé l'article 3 de la Convention n° 87 de l'OIT relative à la liberté syndicale et à la protection du droit syndical.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 16-25507
Date de la décision : 15/11/2017
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Tribunal d'instance de Nevers, 02 novembre 2016


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 15 nov. 2017, pourvoi n°16-25507


Composition du Tribunal
Président : M. Huglo (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Haas, SCP Gatineau et Fattaccini

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2017:16.25507
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