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15/11/2017 | FRANCE | N°16-19425

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 15 novembre 2017, 16-19425


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en sa deuxième branche :

Vu les articles L. 526-1 et L. 526-2 du code de commerce, dans leur rédaction antérieure à la loi du 4 août 2008, ensemble l'article L. 622-20 du même code ;

Attendu que la déclaration d'insaisissabilité n'étant opposable à la liquidation judiciaire que si elle a fait l'objet d'une publicité régulière, le liquidateur, qui a qualité pour agir au nom et dans l'intérêt collectif des créanciers, est recevable à contester la régularitÃ

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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en sa deuxième branche :

Vu les articles L. 526-1 et L. 526-2 du code de commerce, dans leur rédaction antérieure à la loi du 4 août 2008, ensemble l'article L. 622-20 du même code ;

Attendu que la déclaration d'insaisissabilité n'étant opposable à la liquidation judiciaire que si elle a fait l'objet d'une publicité régulière, le liquidateur, qui a qualité pour agir au nom et dans l'intérêt collectif des créanciers, est recevable à contester la régularité des mesures de publicité dont elle a été l'objet, à l'appui d'une demande tendant à la vente du bien déclaré insaisissable, en vue de reconstituer le gage commun des créanciers ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., qui exploitait, à titre individuel, une activité de débardage, a fait publier, le 28 octobre 2015, au bureau des hypothèques, une déclaration d'insaisissabilité du 20 octobre précédent, portant sur l'immeuble dont il était propriétaire et constituant sa résidence principale ; que cette déclaration n'a pas été publiée au registre du commerce et des sociétés (RCS) auquel M. X... était immatriculé ; que les 25 juin et 10 décembre 2008, M. X... a été mis en redressement puis liquidation judiciaires, M. Y... étant désigné liquidateur (le liquidateur) ; que ce dernier a demandé que la déclaration d'insaisissabilité lui soit rendue inopposable pour défaut de publicité au RCS et qu'il soit procédé à la vente de l'immeuble ;

Attendu que pour déclarer irrecevable la requête du liquidateur, l'arrêt, retenant que ce dernier ne peut légalement agir que dans l'intérêt de tous les créanciers et non dans celui d'un créancier ou d'un groupe de créanciers, énonce que, selon l'article L. 526-1 du code de commerce, la déclaration d'insaisissabilité n'a d'effet qu'à l'égard des créanciers dont les droits naissent, postérieurement à sa publication, à l'occasion de l'activité professionnelle du déclarant, de sorte que le liquidateur n'a pas qualité pour agir dans l'intérêt de ces seuls créanciers, en inopposabilité de la déclaration d'insaisissabilité ;

Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel, par une décision qui était conforme à la jurisprudence alors applicable, a méconnu les textes susvisés, dans la nouvelle interprétation que leur a donnée la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation dans son arrêt du 15 novembre 2016 (pourvoi n° 14-26.287) ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 25 avril 2016, entre les parties, par la cour d'appel de Pau ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Bordeaux ;

Condamne M. X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du quinze novembre deux mille dix-sept.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Le Bret-Desaché, avocat aux Conseils, pour M. Y...

IL EST FAIT GRIEF A l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir déclaré Maitre Dominique Y... irrecevable en sa requête faute d'intérêt à agir et y ajoutant d'avoir débouté les parties de toutes demandes plus amples ou contraires.

- AU MOTIF QUE en vertu de son article 173, l'ordonnance du 18 décembre 2008 n'est pas applicable aux procédures en cours au jour de son entrée en vigueur le 15 février 2009. Par conséquent, la procédure collective ayant été ouverte à l'égard de Monsieur Eric X... le 25 juin 2008, c'est bien l'article L.661-5 résultant de la loi du 26 juillet 2005 qui s'applique en l'espèce. Or, ce texte prévoit que "ne sont susceptibles que d'un appel et d'un pourvoi en cassation de la part du ministère public les jugements statuant sur les recours formés contre les ordonnances du juge-commissaire rendues en application des articles L.642-18 et L.642-19," lesdits articles traitant de la cession des actifs du débiteur. Dans cette hypothèse, la voie de l'appel n'est ouverte au débiteur qu'en cas d'excès de pouvoir commis par le premier juge. Tel est le cas quand il fait droit à une demande du mandataire alors que ce dernier était dépourvu de qualité pour agir. Il est constant que le liquidateur ne peut légalement agir que dans l'intérêt de tous les créanciers et non dans l'intérêt personnel d'un créancier ou d'un groupe de créanciers. D'autre part, il résulte de l'article L. 526-1 du code de commerce que la déclaration d'insaisissabilité n'a d'effet qu'à l'égard des créanciers dont les droits naissent, postérieurement à sa publication, à l'occasion de l'activité professionnelle du déclarant, de sorte que le liquidateur n'a pas qualité pour agir, dans l'intérêt de ces seuls créanciers, en inopposabilité de la déclaration d'insaisissabilité. Dès lors que le jugement frappé d'appel a confirmé l'ordonnance du juge commissaire qui a autorisé Maître Dominique Y... à vendre l'immeuble appartenant à Monsieur Eric X... alors que le mandataire n'avait pas qualité pour agir en inopposabilité de la déclaration d'insaisissabilité, et a ainsi commis un excès de pouvoir, l'appel nullité de Monsieur Eric X... est recevable. En l'espèce, Monsieur Eric X... est propriétaire d'un immeuble à usage d'habitation constituant sa résidence principale, sis commune de CARCEN PONSON, cadastré section C n°817 lieudit POUY DES TRUCS suivant acte d'acquisition du 29 avril 1993. Le 20 octobre 2005, il a fait dresser un acte notarié aux fins de déclaration d'insaisissabilité de ce bien immobilier, précisant qu'il est immatriculé au RCS pour les besoins de l'exercice de son activité professionnelle d'artisan débardeur. Dans cet acte, il était prévu en page 3 la publication de cette déclaration au bureau des Hypothèques de MONT DE MARSAN et au registre du commerce et des sociétés de DAX. En réalité si cette déclaration notariée a bien été publiée au bureau des hypothèques, la publicité n'a pas été opérée au registre du commerce et des sociétés de DAX. Après l'ouverture de la liquidation judiciaire à l'égard de Monsieur Eric X..., Maître Dominique Y... mandataire liquidateur désigné, a saisi le 6 juillet 2010 le juge commissaire d'une requête aux fins d'être autorisé à vendre, suivant les formes prescrites en matière de saisie immobilière, le bien immobilier litigieux, après avoir rappelé qu'il considérait que la déclaration d'insaisissabilité ne lui était pas opposable. Or, ainsi qu'il l'a déjà été rappelé, le liquidateur n'a pas qualité pour agir dans l'intérêt de seulement un créancier ou un groupe de créanciers, de telle sorte qu'il n'avait aucune qualité pour contester la régularité de la déclaration d'inopposabilité, fusse pour ensuite être autorisé à procéder à la vente du bien. Par conséquent, le juge-commissaire, saisi d'une requête du mandataire, ne pouvait statuer sur cette question.

- ALORS QUE D'UNE PART si le juge-commissaire ne peut sans excéder ses pouvoirs autoriser le liquidateur judiciaire, qui ne peut légalement agir que dans l'intérêt de tous les créanciers et non dans l'intérêt personnel d'un créancier ou d'un groupe de créancier, à procéder à la vente d'un immeuble dont l'insaisissabilité lui est opposable, encore faut-il que la déclaration d'insaisissabilité ait été régulièrement publiée non seulement au fichier immobilier, mais également au Registre du Commerce et des Sociétés, lorsque le déclarant y est immatriculé, ou au Répertoire des Métiers lorsque le débiteur y est inscrit, ou enfin dans un Journal d'annonces légales lorsque le déclarant n'est pas tenu de s'immatriculer dans un registre de publicité légales et ce, avant l'ouverture de sa procédure collective ; qu'en l'espèce, il résulte des propres constatations de la cour que si la déclaration notariée d'insaisissabilité a bien été publiée au bureau des hypothèques, la publicité n'a pas été opérée au registre du commerce et des sociétés de Dax dans lequel M. X... était immatriculé ; qu'il en résulte d'une part que ladite déclaration d'insaisissabilité était inopposable aux créanciers dont les droits sont nés avant la date du jugement d'ouverture de la procédure collective et d'autre part que par voie de conséquence le mandataire judiciaire avait qualité pour présenter une requête en autorisation de vente au nom de l'ensemble des créanciers ; qu'en décidant le contraire et en jugeant qu'en confirmant l'ordonnance du juge-commissaire ayant autorisé Me Y..., ès qualités, à vendre l'immeuble appartenant à M. X..., le tribunal avait commis un excès de pouvoir de telle sorte que l'appel nullité de M. X... était recevable, la cour d'appel a violé l'article L 641-9 du code de commerce dans sa rédaction alors applicable en la cause, les articles L 526-1 et L 526-2 du code de commerce dans leur rédaction alors applicable, ensemble l'article L 661-5 du code de commerce dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 18 décembre 2008, L 123-9 du code de commerce et les principes régissant l'excès de pouvoir.

- ALORS QUE D'AUTRE PART l'opposabilité aux tiers de la déclaration d'insaisissabilité est subordonnée à sa publicité dans le registre de publicité légale à caractère professionnel auquel l'auteur de la déclaration est légalement tenu de s'immatriculer ; qu'en décidant que le liquidateur judiciaire n'avait pas qualité pour agir dans l'intérêt de seulement un créancier ou un groupe de créanciers, de telle sorte qu'il n'avait aucune qualité pour contester la régularité de la déclaration d'inopposabilité, fusse pour ensuite être autorisé à procéder à la vente du bien tout en constatant que la déclaration notariée d'insaisissabilité litigieuse n'avait pas été publiée au registre du commerce et des sociétés de Dax dans lequel M. X... était immatriculé, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations au regard des articles 31 du code de procédure civile, L 123-9 du code de commerce, L 526-1 et L 526-2 du code de commerce dans leur rédaction alors applicable, ensemble l'article 19-1 de la loi du 5 juillet 1996 et l'article 7 du décret du 2 avril 1998 et les règles régissant l'excès de pouvoir ;

- ALORS QU'ENFIN en décidant que le juge-commissaire, saisi d'une requête du mandataire, ne pouvait statuer sur la question de la régularité de la déclaration d'inopposabilité, fusse pour ensuite autoriser le liquidateur judiciaire à procéder à la vente du bien, la cour d'appel a violé les articles 49 et 71 du code de procédure civile, ensemble L 642-18 du code de commerce, ensemble les principes régissant l'excès de pouvoir.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 16-19425
Date de la décision : 15/11/2017
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Pau, 25 avril 2016


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 15 nov. 2017, pourvoi n°16-19425


Composition du Tribunal
Président : M. Rémery (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Le Prado, SCP Le Bret-Desaché

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2017:16.19425
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