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15/11/2017 | FRANCE | N°15-17092

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 15 novembre 2017, 15-17092


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant tant sur le pourvoi principal formé par la société Banque populaire du Nord que sur le pourvoi incident relevé par Mme X... ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Banque populaire du Nord (la banque) a consenti, les 16 février 2000 et 12 décembre 2003, deux prêts immobiliers à Mme X... ; qu'invoquant une défaillance de cette dernière dans le remboursement de ces prêts, la banque, après avoir prononcé la déchéance de leur terme, l'a assignée en paiement ; qu'à titre rec

onventionnel, Mme X... a recherché la responsabilité de la banque pour manquement...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant tant sur le pourvoi principal formé par la société Banque populaire du Nord que sur le pourvoi incident relevé par Mme X... ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Banque populaire du Nord (la banque) a consenti, les 16 février 2000 et 12 décembre 2003, deux prêts immobiliers à Mme X... ; qu'invoquant une défaillance de cette dernière dans le remboursement de ces prêts, la banque, après avoir prononcé la déchéance de leur terme, l'a assignée en paiement ; qu'à titre reconventionnel, Mme X... a recherché la responsabilité de la banque pour manquement à son devoir de mise en garde ;

Sur le moyen unique du pourvoi incident :

Attendu que Mme X... fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande de dommages-intérêts alors, selon le moyen, que, si elle intervenait, la cassation sur le pourvoi principal devrait s'étendre, en application des articles 624 et 625 du code de procédure civile, au chef du dispositif ayant débouté Mme X... de sa demande de dommages-intérêts à l'encontre de la société Banque populaire du Nord, qui se trouve dans la dépendance nécessaire du chef de dispositif attaqué par le pourvoi principal ;

Mais attendu que la cour d'appel ayant retenu, par motifs adoptés, que Mme X... ne démontrait pas que les sommes prêtées aient été excessives au regard de ses capacités de remboursement, de sorte que la banque n'était tenue à son égard d'aucun devoir de mise en garde, le moyen, qui demande, par voie de conséquence, une cassation fondée sur l'existence d'un préjudice résultant d'un manquement à une telle obligation, est sans portée ;

Mais sur le moyen unique du pourvoi principal, pris en sa première branche :

Sur la recevabilité du moyen, contestée par la défense :

Attendu que Mme X... soulève l'irrecevabilité du moyen en raison de sa nouveauté ;

Mais attendu que la banque ayant contesté dans ses conclusions l'existence d'une autorisation de découvert consentie au titre du compte sur lequel devaient être prélevées les échéances des prêts, les conditions de mise en oeuvre d'une telle autorisation de découvert étaient incluses dans le débat ; que le moyen, qui n'est donc pas nouveau, est recevable ;

Et sur le moyen :

Vu l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 ;

Attendu que pour déclarer irrégulière la déchéance du terme des prêts prononcée par la banque et rejeter les demandes en paiement de cette dernière, l'arrêt retient que Mme X... bénéficiait d'une autorisation tacite de découvert sur le compte sur lequel les échéances devaient être prélevées, que la banque est réputée n'avoir mis fin à cette autorisation de découvert que par la mise en demeure du 27 janvier 2009, laquelle ouvrait un préavis d'un mois en faveur de l'emprunteuse, et que la banque ne pouvait dès lors prononcer simultanément la déchéance du terme pour les deux emprunts dont les mensualités étaient valablement prélevées sur le compte ;

Qu'en se déterminant ainsi, sans préciser quel était le montant du découvert tacitement autorisé par la banque à Mme X..., ni si ce montant était au moins égal au solde débiteur du compte qui serait résulté du paiement des échéances des prêts dans l'hypothèse de leur prélèvement sur le compte de Mme X..., la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :

Rejette le pourvoi incident ;

Et sur le pourvoi principal :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il rejette les demandes en paiement de la société Banque populaire du Nord au titre du solde des prêts immobiliers des 16 février 2000 et 12 décembre 2003 et en ce qu'il statue sur les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile, l'arrêt rendu le 27 novembre 2014, entre les parties, par la cour d'appel de Douai ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Douai, autrement composée ;

Condamne Mme X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer à la société Banque populaire du Nord la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du quinze novembre deux mille dix-sept.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyen produit au pourvoi principal par la SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat aux Conseils, pour la société Banque populaire du Nord

Il est fait grief à l'arrêt partiellement infirmatif attaqué d'AVOIR débouté la SA Banque Populaire du Nord de toutes ses demandes en paiement du solde des prêts immobiliers des 16 février 2000 et 12 décembre 2003 ;

AUX MOTIFS QUE : « madame X... conteste catégoriquement la déchéance du terme prononcée le 27 janvier 2009 par la Banque Populaire du Nord pour les deux emprunts immobiliers qu'elle a souscrits les 16 février 2000 et 12 décembre 2003 ; elle objecte en effet que le compte sur lequel les mensualités de ces deux prêts étaient prélevées était débiteur depuis de nombreux mois de sorte qu'elle bénéficiait d'un découvert tacite auquel cette dernière ne pouvait mettre un terme qu'en lui notifiant officiellement la clôture ; sur la notion de découvert tacite, l'examen de la convention du compte de chèques n° 61028161902 ouvert dans les livres de la Banque Populaire du Nord enseigne qu'aucun découvert n'avait expressément été accordé à Martine X... ; cette convention précise au paragraphe II – Réduction ou suppression des concours – que « pour les comptes des particuliers, il est spécifié que la banque conserve également la possibilité de mettre fin au découvert sous préavis d'un mois courant de la notification faite par lettre sauf cas de comportement gravement répréhensible du client » ; il s'évince du relevé du compte en question transmis par l'emprunteuse que le solde est constamment resté débiteur entre janvier 2008 et janvier 2009 sans que la banque n'éprouve le besoin de soumettre à sa cocontractante une quelconque offre de crédit, l'établissement bancaire n'ayant toutefois pas négligé de prélever chaque trimestre des frais de découvert ; il faut donc constater que la Banque Populaire du Nord, nonobstant la sanction de la déchéance du droit aux intérêts contractuels au bout de trois mois, a laissé fonctionner le compte en position débitrice durant toute cette période de sorte que c'est à bon droit que madame Martine X... entend lui opposer le découvert tacitement accordé par l'établissement financier ; la Banque Populaire du Nord, qui a entendu y mettre finalement un terme, se devait pour ce faire de respecter le formalisme mentionné dans la convention de compte et tel que repris ci-dessus, étant précisé que l'existence en soi du découvert ne peut caractériser contre l'emprunteuse le comportement gravement répréhensible auquel fait référence cet acte ; que si la lettre recommandée avec accusé de réception du 27 janvier 2009 fait référence à diverses relances, il n'est pas explicité en quoi celles-ci ont consisté, étant observé que la banque n'en justifie pas non plus ; ainsi dans la mesure où madame X... bénéficiait d'un découvert tacite sur son compte de chèques auquel la banque n'est réputé avoir mis fin que par le biais de la mise en demeure du 27 janvier 2009, laquelle ouvrait un préavis d'un mois en faveur de l'emprunteuse, la Banque Populaire du Nord ne pouvait simultanément prétendre prononcer la déchéance du terme pour les deux emprunts dont les mensualités étaient valablement prélevées sur le compte litigieux sauf à autoriser l'établissement bancaire à choisir la date à laquelle les prélèvements ne seraient plus effectifs et partant la date à laquelle elle pourrait rendre exigible pour le tout le solde des concours financiers qu'elle accorde, l'emprunteur ne disposant d'aucune possibilité véritable de régulariser sa situation ; en conclusion, la déchéance du terme prononcée le 27 janvier 2009 par la Banque Populaire du Nord pour chacun des deux prêts immobiliers des 16 février 2000 et 12 décembre 2003 est à la fois irrégulière et abusive, cette déchéance n'ayant pu avoir pour conséquence de rendre immédiatement exigibles ces deux concours ; en cela, l'établissement bancaire poursuivant doit être débouté de ses demandes en paiement au titre du solde de ces deux prêts » ;

ALORS 1°) QUE pour rejeter la demande en paiement du solde des deux prêts consentis par l'exposante, la cour d'appel a considéré que la déchéance du terme avait été irrégulièrement prononcée, retenant que madame X... bénéficiait d'une autorisation tacite de découverte au titre du compte, ouvert dans les livres de la Banque Populaire du Nord et sur lequel devaient être prélevées les deux échéances ; qu'en statuant ainsi, sans rechercher quel était le montant du découvert tacite prétendument consenti à madame X... et sans rechercher si le paiement des prêts n'aurait pas entraîné un dépassement important du montant de l'autorisation ainsi consentie, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 et 1147 du code civil ;

ALORS SUBSIDIAIREMENT 2°) QUE pour rejeter la demande en paiement du solde des deux prêts consentis, la cour d'appel a considéré que l'exposante ne pouvait simultanément mettre fin à l'autorisation tacite de découvert, laquelle ouvrait un préavis d'un mois en faveur de l'emprunteuse, et prétendre prononcer la déchéance du terme pour les deux emprunts dont les mensualités étaient valablement prélevées sur le compte litigieux ; qu'en statuant ainsi, quand pourtant il résultait des extraits du compte n° 61028161902 régulièrement produits par la société BPN (pièces n° 13 des conclusions de l'exposante), que de nombreuses mensualités n'avaient pas été acquittées de sorte que la déchéance du terme des deux prêts étaient encourue antérieurement à la dénonciation du découvert, la cour d'appel a dénaturé lesdits extraits de compte, violant ainsi l'article 1134 du code civil ;

ALORS SUBSIDIAIREMENT 3°) QU'en retenant que les mensualités était valablement prélevées sur le compte litigieux, sans préciser sur quelle pièce elle fondait cette affirmation erronée, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile.
Moyen produit au pourvoi incident éventuel par la SCP Rousseau et Tapie, avocat aux Conseils, pour Mme X...

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Mme X... de sa demande de dommages-intérêts à l'encontre de la société Banque Populaire du Nord ;

Aux motifs qu'en considération du rejet des demandes en paiement du prêteur notamment au titre du solde des deux prêts immobiliers litigieux, la demande indemnitaire de l'emprunteuse sur le fondement du manquement de la banque au devoir de mise en garde lors de l'octroi des concours financiers ne peut prospérer, ne serait-ce que du fait de l'absence de justification d'un quelconque préjudice ;

Alors que si elle intervenait, la cassation sur le pourvoi principal devrait s'étendre, en application des articles 624 et 625 du code de procédure civile, au chef de dispositif ayant débouté Mme X... de sa demande de dommages-intérêts à l'encontre de la société Banque Populaire du Nord, qui se trouve dans la dépendance nécessaire du chef de dispositif attaqué par le pourvoi principal.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 15-17092
Date de la décision : 15/11/2017
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Douai, 27 novembre 2014


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 15 nov. 2017, pourvoi n°15-17092


Composition du Tribunal
Président : M. Rémery (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Rousseau et Tapie, SCP Thouin-Palat et Boucard

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2017:15.17092
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