LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Angers, 22 mars 2016), qu'à la suite de la rupture de leurs relations contractuelles, la société MGX distribution a fait assigner la société MGX Asia devant un tribunal de commerce ; que cette dernière société a fait assigner la société ICA security, devenue la société Identicar, en intervention forcée puis a, en vertu d'une clause compromissoire, soulevé l'incompétence du tribunal de commerce, que celui-ci a retenue, renvoyant la société MGX distribution à mieux se pourvoir ;
Attendu que la société MGX Asia fait grief à l'arrêt de la déclarer irrecevable à soulever l'incompétence du tribunal de commerce et de renvoyer la cause et les parties devant le tribunal de commerce du Mans pour qu'il soit statué sur le fond, alors, selon le moyen que constitue une défense au fond tout moyen qui tend à faire rejeter comme non justifiée, après examen du fond du droit, la prétention de l'adversaire ; qu'en principe, l'assignation en intervention forcée ne constitue pas une défense au fond ; qu'ainsi, le simple fait pour le défendeur de délivrer à un tiers une assignation en intervention forcée dans le simple but de prendre toutes conclusions utiles, tout en émettant des réserves quant à la compétence du tribunal saisi, n'a pas pour objet de faire rejeter comme non justifiée la prétention du demandeur et ne constitue donc pas une défense au fond ; qu'en l'espèce, après avoir été assignée au fond par la société MGX distribution, la société MGX Asia a appelé la société ICA security en intervention forcée pour « prendre toutes conclusions qu'elle jugerait utiles », tout en précisant que cette assignation était faite « sans aucune acceptation de la compétence matérielle et territoriale du tribunal de commerce du Mans pour connaître de l'assignation principale […], et au contraire, sous les plus expresses réserves de la faculté de contester ultérieurement de contester la compétence de ce tribunal » ; qu'en considérant que cette assignation en intervention forcée aurait constitué une défense au fond, la cour d'appel a violé les articles 66, 71 et 74 du code de procédure civile ;
Mais attendu, d'une part, qu'ayant exactement retenu que l'ensemble des termes de l'assignation en intervention devait être examiné pour vérifier si celle-ci comportait ou non une défense au fond, puis relevé qu'aux termes de cette assignation délivrée à la société ICA security, la société MGX Asia, pour contester le reproche que lui faisait la société MGX distribution de n'avoir pas livré les marchandises ayant fait l'objet d'acomptes, faisait valoir que si elle n'avait pas livré l'intégralité des marchandises commandées par la société ICA security, cette dernière n'aurait pas manqué de le signaler et de demander le remboursement des acomptes versés, la cour d'appel en a exactement déduit que l'assignation en intervention forcée comportait une défense au fond et, d'autre part, que retenant à bon droit que la réserve que comportait le dispositif de cette assignation sur le fait que la société MGX Asia se réservait de contester ultérieurement la compétence du tribunal de commerce étant sans incidence sur l'application de l'article 74 du code de procédure civile, la cour d'appel en a justement déduit que, quand bien même la procédure serait orale, la défense au fond rendait irrecevable la présentation ultérieure d'une exception d'incompétence ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur les deuxième, troisième et quatrième branches du moyen annexé, qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE LE POURVOI ;
Condamne la société MGX Asia Ltd aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande ; la condamne à payer à la société MGX distribution la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf octobre deux mille dix-sept.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par Me Carbonnier, avocat aux Conseils, pour la société MGX Asia Ltd.
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR déclaré la société MGX Asia Ltd irrecevable à soulever l'incompétence du tribunal de commerce et renvoyé la cause et les parties devant le tribunal de commerce du Mans pour qu'il soit statué sur le fond,
AUX MOTIFS QUE "La clause sur l'application de laquelle les parties s'opposent, telle qu'elle a été rappelée à l'exposé du litige comprend à la fois une clause compromissoire de recours à l'arbitrage et des clauses d'attribution de compétence aux juridictions de Hong Kong et de France. En application de l'article 1448 du code de procédure civile lorsqu'un litige relevant d'une convention d'arbitrage est porté devant une juridiction de L'Etat, celle-ci se déclare incompétente sauf sue tribunal arbitral n'est pas encore saisi et si la convention d'arbitrage est manifestement nulle ou manifestement inapplicable. L'exception tirée de l'existence d'une clause compromissoire est régie par les dispositions qui gouvernent les exceptions de procédure de sorte qu'elle est assujettie à l'article 74 du code de procédure civile, également applicable en matière d'exception d'incompétence, qui dispose que les exceptions de procédure doivent, à peine d'irrecevabilité, être présentées avant toute défense au fond ou fins de non recevoir. Il résulte du dossier transmis par le tribunal de commerce que la société MGX Asia a soulevé l'incompétence de la juridiction consulaire en se prévalant de la clause compromissoire litigieuse, dans des conclusions datées du 31 mai 2013, adressées au greffe du tribunal de commerce par un courrier daté du 3 juin 2013 et arrivé au greffe le 6 juin 2013. Aux termes de ces conclusions aucune demande n'était formée à l'encontre de la société ICA Security et l'exception d'incompétence y était présentée avant toutes autres demandes ou prétentions lesquelles tendaient au seul débouté de la société MGX Distribution. Il en était de même aux termes des deuxièmes conclusions de la société MGX Asia déposées au greffe du tribunal de commerce le 9 décembre 2013. C'est par des conclusions parvenues au greffe de la cour le 10 février 2014, que la société MGX Asia a, à titre subsidiaire, formé des demandes en paiement à l'encontre de la société ICA Security, l'exception d'incompétence étant aux termes de ces conclusions, présentée avant toutes autres demandes ou prétentions. Il ressort du jugement qu'à l'audience elle a, comme les autres parties, développé ses conclusions auxquelles le jugement renvoie expressément. Pour conclure à la tardiveté de l'exception soulevée par la société MGX Asia, la société MGX Distribution lui oppose l'assignation en intervention forcée que cette dernière a fait délivrer à la société ICA Security en soutenant que cette assignation constitue une défense au fond rendant irrecevable l'exception d'incompétence soulevée par la société MGX Asia. L'assignation en intervention forcée invoquée par la société MGX Distribution a été délivrée le 22 mai 2013. Certes, ainsi que le fait observer la société MGX Asia cette assignation en intervention forcée ne comporte aux termes de son dispositif aucune demande de garantie ni une quelconque demande en paiement à l'encontre de la société ICA Security. Cependant, c'est l'ensemble des termes de l'assignation qui doit être examiné pour vérifier si celle-ci comporte ou non une défense au fond. Il convient de rappeler ici que la société MGX Distribution avait fait assigner la société MGX Asia en paiement de la somme de 427 895,49 USD en faisant valoir, notamment (cf. page 9 de l'assignation) : - que conformément à l'accord entre la société MGX Asia et la société MGX Distribution , a société MGX Distribution avait fait plusieurs paiements en avance (acomptes) en sus des acomptes payés par la société ICA Security et rachetés comme créances par la société KLR puis par la société MGX Distribution lors de la vente de la société ICA Security le 22 septembre 2011, - que toutefois la société MGX Asia n'avait pas livré l'ensemble des marchandises correspondant aux acomptes et qu'au 8 février 2012, la différence entre les acomptes payés par la société MGX Distribution et les marchandises livrées par la société MGX Asia faisait apparaître une créance de 427 895,49 USD au profit de la société MGX Distribution. Il s'ensuit que pour motiver sa demande en paiement la société MGX Distribution faisait grief à la société MGX Asia de n'avoir pas livré l'ensemble des marchandises ayant fait l'objet d'acomptes. Or aux termes de l'assignation en intervention forcée qu'elle a fait délivrer à la société ICA Security, la société MGX Asia indique : "La quasi totalité des commandes passées ICA Security SAS à MGX Asia Ltd dans le cadre de l'accord quadripartite ou antérieurement à celui-ci ont été exécutées et livrées par MGX Asia LTD à ICA Security SAS à l'exception de certaines commandes annulées par ICA Security SAS (…) Dans la mesure où, par hypothèse, MGX Distribution SARL ne faisait jamais l'avance des acomptes de commandes, mais transmettait à MGX Asia Ltd ceux reçus par ICA Security SAS, il est indispensable qu'ICA Security SAS intervienne à la procédure principale, en tant qu'acheteur final des dites marchandises et partie à l'accord quadripartite, afin de faire connaître sa position et prendre toutes conclusions utiles sur ce point. En effet, si comme l'allègue MGX Distribution SARL, MGX Asia n'aurait pas livré l'intégralité des marchandises commandées par ICA Security SAS, cette dernière n'aurait pas manqué de le signaler et de demander le remboursement des acomptes versés". Aux termes de ces mentions, la société MGX Asia se défend donc, pour contester le reproche que lui fait la société MGX Distribution, de n'avoir pas livré les marchandises ayant fait l'objet d'acompte et elle appelle à la cause la société ICA Security, motifs pris de ce que cette dernière n'aurait pas manqué de s'en émouvoir. Il en résulte que l'assignation en intervention forcée comporte une défense au fond, rendant irrecevable, quand bien même la procédure serait-elle orale, la présentation ultérieure d'une exception d'incompétence, la réserve que comporte le dispositif de cette assignation sur le fait que la société MGX Asia se réservait de contester ultérieurement la compétence du tribunal du tribunal de commerce étant sans incidence. La décision entreprise sera en conséquence infirmée et la société MGX Asia sera déclarée irrecevable en sa demande tendant à voir déclarer le tribunal de commerce du Mans. La cause et les parties seront renvoyées devant le tribunal de commerce, la cour n'estimant pas devoir évoquer" (arrêt, p. 13 à 15),
1°) ALORS QUE constitue une défense au fond tout moyen qui tend à faire rejeter comme non justifiée, après examen du fond du droit, la prétention de l'adversaire ; qu'en principe, l'assignation en intervention forcée ne constitue pas une défense au fond ; qu'ainsi, le simple fait pour le défendeur de délivrer à un tiers une assignation en intervention forcée dans le simple but de prendre toutes conclusions utiles, tout en émettant des réserves quant à la compétence du tribunal saisi, n'a pas pour objet de faire rejeter comme non justifiée la prétention du demandeur et ne constitue donc pas une défense au fond ;
Qu'en l'espèce, après avoir été assignée au fond par la société MGX Distribution, la société MGX Asia a appelé la société ICA Security en intervention forcée pour « prendre toutes conclusions qu'elle jugerait utiles », tout en précisant que cette assignation était faite « sans aucune acceptation de la compétence matérielle et territoriale du tribunal de commerce du Mans pour connaître de l'assignation principale […], et au contraire, sous les plus expresses réserves de la faculté de contester ultérieurement de contester la compétence de ce tribunal » ;
Qu'en considérant que cette assignation en intervention forcée aurait constitué une défense au fond, la cour d'appel a violé les articles 66, 71 et 74 du code de procédure civile ;
2°) ALORS QUE l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties, ces prétentions étant fixé par les écritures des parties ; que le juge ne saurait dés lors dénaturer les termes clairs et précis des conclusions des parties ;
Qu'en l'espèce, après avoir été assignée au fond par la société MGX Distribution, la société MGX Asia a, par acte du 22 mai 2013, appelé la société ICA Security en intervention forcée pour « prendre toutes conclusions qu'elle jugerait utiles », tout en précisant que cette assignation était faite « sans aucune acceptation de la compétence matérielle et territoriale du tribunal de commerce du Mans pour connaître de l'assignation principale […], et au contraire, sous les plus expresses réserves de la faculté de contester ultérieurement de contester la compétence de ce tribunal » ;
Qu'en considérant que cette assignation en intervention forcée constituait une défense au fond rendant irrecevable l'exception d'incompétence soulevée par la société MGX Asia, la cour d'appel a dénaturé les termes de l'assignation en intervention du 22 mai 2013 et violé les articles 4 et 5 du code de procédure civile ;
3°) ALORS, EN TOUTE HYPOTHESE, QUE le tribunal de commerce est saisi par la remise au greffe d'une copie de l'assignation ;
Qu'en l'espèce, après avoir été assignée au fond par la société MGX Distribution, la société MGX Asia a appelé la société ICA Security en intervention forcée pour « prendre toutes conclusions qu'elle jugerait utiles », tout en précisant que cette assignation était faite « sans aucune acceptation de la compétence matérielle et territoriale du tribunal de commerce du Mans pour connaître de l'assignation principale […], et au contraire, sous les plus expresses réserves de la faculté de contester ultérieurement de contester la compétence de ce tribunal » ;
Que, pour écarter l'exception d'incompétence soulevée par la société MGX Asia, l'arrêt retient que l'assignation en intervention forcée valait défense au fond et s'opposait à ce qu'un contredit puisse être formé ultérieurement pour contester la compétence du tribunal de commerce ;
Qu'en statuant ainsi, sans constater que l'assignation délivrée à la société ICA Security avait été remise au greffe, sans quoi elle se trouvait privée d'effet en tant que moyen de défense, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 71, 74 et 857 du code de procédure civile ;
4°) ALORS, ENFIN, QUE les exceptions doivent, à peine d'irrecevabilité, être soulevées avant toute défense au fond ; que, devant le tribunal de commerce, la procédure étant orale, les prétentions des parties peuvent être formulées au cours de l'audience et qu'il en est notamment ainsi des exceptions de procédure ;
Qu'il ressort de l'arrêt attaqué (p. 14, § 4) que, lors de l'audience devant le tribunal de commerce, la société MGX Asia a soulevé in limine litis l'incompétence de ce tribunal ;
Qu'en considérant cependant que « l'intervention forcée comporte une défense au fond rendant irrecevable, quand bien même la procédure serait-elle orale, la présentation ultérieure d'une exception d'incompétence », la cour d'appel a violé les articles 74 et 860-1 du code de procédure civile.