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19/10/2017 | FRANCE | N°16-17122

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 19 octobre 2017, 16-17122


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, ci-après annexé :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rouen, 3 mars 2016), que, par acte du 29 novembre 1995, M. Alain X...a pris à bail rural des terres appartenant à M. et Mme Y...; que les parcelles louées ont été mises à la disposition de l'EARL de Villiers ; que, par acte du 11 février 2010, les bailleurs ont délivré congé pour le 15 septembre 2013 au motif que M. X...avait atteint l'âge de la retraite ; que, l'EARL ayant été placée en redressement judiciaire comp

ortant un plan de continuation, un précédent arrêt a habilité le preneur à sais...

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, ci-après annexé :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rouen, 3 mars 2016), que, par acte du 29 novembre 1995, M. Alain X...a pris à bail rural des terres appartenant à M. et Mme Y...; que les parcelles louées ont été mises à la disposition de l'EARL de Villiers ; que, par acte du 11 février 2010, les bailleurs ont délivré congé pour le 15 septembre 2013 au motif que M. X...avait atteint l'âge de la retraite ; que, l'EARL ayant été placée en redressement judiciaire comportant un plan de continuation, un précédent arrêt a habilité le preneur à saisir le tribunal paritaire des baux ruraux afin de solliciter l'autorisation de céder le bail à son fils Jean-François ; que, par déclaration du 30 juillet 2013, M. Alain X...a présenté la demande à cette juridiction ;

Attendu que M. Alain X...fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande ;

Mais attendu qu'ayant retenu exactement que les conditions de mise en valeur des terres louées devaient être appréciées au regard du cessionnaire éventuel du bail et souverainement, par une appréciation des éléments de preuve produits, que, la réalité des apports de matériels n'étant pas démontrée, la capacité du candidat de gérer l'exploitation et sa solvabilité n'étaient pas suffisamment établies, la cour d'appel, qui a répondu aux conclusions prétendument délaissées et qui n'a pas inversé la charge de la preuve, a pu en déduire que la cession envisagée ne préservait pas les intérêts légitimes des bailleurs et a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. X...aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de M. X...et le condamne à payer à M. et Mme Y...la somme globale de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf octobre deux mille dix-sept.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP François-Henri Briard, avocat aux Conseils, pour M. X....

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté M. Alain X...de sa demande aux fins de voir autoriser la cession du bail portant sur des terres situées commune d'Haudricourt pour une contenance totale de 38 ha 73 a 12 ca, cadastrées section AL 1, 3, 4, 35, 85, AM 28 et AK 37, 38, 39, 40, 41, à M. Jean-François X..., et dire que le fermage sera payé conformément aux dispositions du bail,

Aux motifs qu'aux termes de l'article L. 411-64 alinéa 4 du code rural, " le preneur évincé en raison de son âge peut céder son bail à son conjoint, ou au partenaire avec lequel il est lié par un pacte civil de solidarité, participant à l'exploitation ou à l'un de ses descendants ayant atteint l'âge de la majorité ou ayant été émancipé, dans les conditions prévues à l'article L. 411-35 ; Le bénéficiaire de la cession a droit au renouvellement de son bail " ; que M. et Mme X...ont créé une exploitation agricole à responsabilité limitée dite EARL de Villers le 19 juin 1996, dont ils ont modifié les statuts le 28 décembre 1996 par lesquels ils ont accepté la sortie de Mme X...et la reprise de ses engagements par son époux, les nouveaux statuts relevant les apports de M. et Mme X...en cheptel et matériel pour une valeur de 2 933 300 francs ou 447 178 € ; que si, dans son arrêt du 15 mai 2014 confirmant l'autorisation de solliciter la cession du bail, la cour relève que l'entrée de M. Jean-François X...dans le capital social de l'EARL telle que figurant au projet versé aux débats ainsi que la création des parts sociales demandé moyennant l'apport de matériel à hauteur de 390 816 € sont de nature à garantir la pérennité de l'entreprise et le respect du plan de redressement, force est toutefois de constater que dans le cadre de la présente procédure, aucun élément ne permet de caractériser la réalité de l'apport effectué par M. Jean-François X...au profit de l'EARL Blondin ; qu'en effet, en premier lieu, l'analyse du projet de liste des biens apportée pour ce montant (pièce n° 15 de l'intimé) démontre que certains des biens listés figuraient déjà dans les comptes annuels 2010/ 2011 de l'EARL de Villers ; qu'en second lieu, l'acte du 21 novembre 2014 modifiant les statuts de L'EARL prévoit une augmentation du capital social par l'apport par M. Jean François X...de " divers matériels agricoles et de la grue dont le détail est précisé dans l'acte du 21 novembre 2014 d'une valeur nette de 360 375 € " et " en numéraire la somme de 30 441 € " et une division du capital social entre 31 434 parts sociales dont 15 150 parts attribuées à M. Alain X...et 16 284 à M. Jean-François X...attribuées " en contrepartie de son apport de matériels et de numéraire suivant acte du 21 novembre 2014 ", mais le détail de ces biens ne figure toutefois pas dans l'acte du 21 novembre 2014 produit aux débats par l'appelant (pièce n° 20 intitulé " statuts mis à jour après modification et certifiés conformes par les gérants à la date du 21 novembre 2014 ") ni dans aucun autre document qui serait annexé à cette pièce ; que faute de pièce précise sur ce point, il n'est pas possible de vérifier si les matériels apportés sont ceux appartenant à l'ETA Jean-François X..., dont les bilans 2011/ 2012 et 2012/ 2013 démontrent un résultat financier déficitaire, pour le premier une perte de 52 397 € et pour le second un bénéfice de 54 631 € s'expliquant uniquement par la cession d'éléments d'actifs ; qu'enfin le dernier bilan produit aux débats de l'EARL de Villers révèle également une perte de 11 338 € ; qu'il en résulte que même si M. Jean-François X...est titulaire d'un brevet professionnel option responsable d'exploitation agricole depuis le 26 juillet 2002, sa solvabilité et sa capacité à gérer l'exploitation ne sont pas suffisamment établies, de sorte que la cession n'apparaît pas de nature à préserver les intérêts des bailleurs ; que compte tenu de l'ensemble de ces éléments, il convient de rejeter la demande de cession de bail,

Alors en premier lieu qu'il incombe à la partie qui conteste la réalité de l'apport effectué par un associé et matérialisé dans les statuts modifiés à la suite de l'augmentation de capital de rapporter la preuve de son caractère fictif ; qu'il s'évince des constatations de l'arrêt que l'acte du 21 novembre 2014 modifiant les statuts de l'E. A. R. L. de Villers prévoit une augmentation de capital social par l'apport par M. Jean-François X...de « divers matériels agricoles et de la grue dont le détail est précisé dans l'acte du 21 novembre 2014 d'une valeur nette de 360. 375 euros » et « en numéraire la somme de 30. 441 euros » ; qu'en énonçant que faute de pièce précise il n'était pas possible de caractériser la réalité de l'apport effectué par M. Jean-François X...au profit de l'E. A. R. L. Blondin et de vérifier si les matériels agricoles apportés étaient ceux appartenant à l'E. T. A. Jean-François X...quand il incombait à M. et Mme Y..., sur qui pesait la charge de la preuve, de démontrer que les 16. 284 parts sociales attribuées à M. Jean-François X...lors de l'augmentation de capital de l'E. A. R. L. de Villers étaient dépourvues de contrepartie et présentaient par conséquent un caractère fictif, la cour d'appel a violé l'article 1315 du code civil,

Alors en deuxième lieu que le preneur évincé en raison de son âge peut céder son bail à son conjoint, ou au partenaire avec lequel il est lié par un pacte civil de solidarité, participant à l'exploitation ou à l'un de ses descendants ayant atteint l'âge de la majorité ou ayant été émancipé, dans les conditions prévues à l'article L. 411-35. Le bénéficiaire a droit au renouvellement de son bail ; qu'il s'évince des propres constatations de l'arrêt que dans sa décision devenue définitive en date du 15 mai 2014, la cour d'appel de Rouen avait relevé que l'entrée de M. Jean-François X...dans le capital social de l'E. A. R. L. de Villers ainsi que la création des parts sociales moyennant l'apport de matériel à hauteur de 390. 816 euros sont de nature à garantir la pérennité de l'entreprise et le respect du plan de redressement ; qu'en énonçant néanmoins que la cession de bail n'apparaît pas de nature à préserver les intérêts des bailleurs, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé les articles L. 411-35 et L. 411-64 du code rural et de la pêche maritime,

Alors en troisième lieu que dans ses conclusions d'appel, M. Alain X...faisait valoir que les garanties offertes par M. Jean-François X...avaient déjà été vérifiées par Maître Z..., commissaire à l'exécution du plan de redressement de l'E. A. R. L. de Villers qui, dans un rapport écrit du 9 juillet 2013, avait indiqué qu'il n'y avait pas lieu à opposition à l'égard de la requête présentée par M. Alain X...aux fins d'autoriser l'entrée de M. Jean-François X...dans l'E. A. R. L. de Villers en qualité de nouvel associé et d'autoriser la création de 16. 284 parts sociales d'une valeur nominale de 15 euros en contrepartie de l'apport de M. Jean-François X...d'une valeur de 390. 816 euros, ces demandes permettant de préserver l'activité de l'E. A. R. L. de Villers et de poursuivre l'exécution du plan ; qu'en énonçant qu'aucun élément ne permet de caractériser la réalité de l'apport effectué par M. Jean-François X...sans s'expliquer sur la vérification déjà effectuée, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile,

Alors en quatrième lieu que dans ses conclusions d'appel M. Alain X...faisait valoir qu'en sa qualité d'associé de l'E. A. R. L. de Villers, M. Jean-François X...était responsable à hauteur de ses apports de sorte qu'en raison de cette garantie la cession de bail au profit de M. Jean-François X...préservait suffisamment les intérêts du bailleur ; qu'en ne répondant pas à ce moyen, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.

Alors en cinquième lieu que le preneur évincé en raison de son âge peut céder son bail à son conjoint, ou au partenaire avec lequel il est lié par un pacte civil de solidarité, participant à l'exploitation ou à l'un de ses descendants ayant atteint l'âge de la majorité ou ayant été émancipé, dans les conditions prévues à l'article L. 411-35. Le bénéficiaire a droit au renouvellement de son bail ; qu'en relevant de manière inopérante que le dernier bilan de l'EARL de Villers révélait une perte de 11. 338 euros sans constater que le plan de redressement de cette entreprise, qui arrivait à son terme en 2017, aurait généré une quelconque difficulté d'exécution ce qui n'était pas soutenu, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 411-35 et L. 411-64 du code rural et de la pêche maritime.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 16-17122
Date de la décision : 19/10/2017
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Rouen, 03 mars 2016


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 19 oct. 2017, pourvoi n°16-17122


Composition du Tribunal
Président : M. Chauvin (président)
Avocat(s) : SCP François-Henri Briard, SCP Garreau, Bauer-Violas et Feschotte-Desbois

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2017:16.17122
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