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18/10/2017 | FRANCE | N°16-16040

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 18 octobre 2017, 16-16040


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 25 février 2016), que, dans le cadre du projet de production d'un film intitulé « Bye-bye Blondie », la société Red Star Cinema a, par acte du 16 mars 2010, cédé à la société Compagnie pour le financement des loisirs (la société Cofiloisirs) l'intégralité des sommes provenant de tout financement obtenu pour cette production ; que par avenant du 16 juillet 2010, elle a étendu cette cession aux sommes attendues de la société de fi

nancement des œuvres cinématographiques ou audiovisuelles Cinémage 5 en vue de c...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 25 février 2016), que, dans le cadre du projet de production d'un film intitulé « Bye-bye Blondie », la société Red Star Cinema a, par acte du 16 mars 2010, cédé à la société Compagnie pour le financement des loisirs (la société Cofiloisirs) l'intégralité des sommes provenant de tout financement obtenu pour cette production ; que par avenant du 16 juillet 2010, elle a étendu cette cession aux sommes attendues de la société de financement des œuvres cinématographiques ou audiovisuelles Cinémage 5 en vue de cette production, pour un montant de 375 000 euros ; que le premier contrat a été publié au registre du cinéma et de l'audiovisuel le 15 avril 2010 et le second, le 6 septembre 2011 ; que, par lettre du 21 juillet 2010, la société Red Star Cinema a donné instruction à sa banque, la Caisse de crédit mutuel de Paris Montmartre-Grands Boulevards (la Caisse), de verser à la société Cofiloisirs les sommes reçues de la société Cinémage 5 ; que celle-ci ayant réglé ce montant en trois fractions, la Caisse a versé à la société Cofiloisirs la somme reçue après l'enregistrement de l'avenant du 16 juillet 2010, mais non celles payées auparavant ; que la société Red Star Cinema a été mise en redressement puis liquidation judiciaires ; que, soutenant notamment que par une lettre du 15 octobre 2010, la Caisse s'était engagée à lui reverser ces sommes, la société Cofiloisirs l'a assignée en paiement de celles réglées par la société Cinémage 5 avant le 6 septembre 2010 ;

Attendu que la société Cofiloisirs fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes alors, selon le moyen :

1°/ que l'absence d'inscription sur le registre public du cinéma et de l'audiovisuel des délégations et cessions en pleine propriété de tout ou partie des produits d'une oeuvre cinématographique ou audiovisuelle n'a aucune incidence sur la validité d'un engagement pris par un établissement bancaire de reverser à l'établissement de crédit assurant la trésorerie des sociétés de production de films les financements versés pour la production de ce film ; qu'en refusant de reconnaître toute force obligatoire à la lettre du 15 octobre 2010 par laquelle la Caisse s'était engagée envers la société Cofiloisirs à virer en sa faveur des sommes en provenance de la société Sofica Cinémage 5 en raison du non-respect des dispositions du code du cinéma relatives à l'inscription sur un registre de l'avenant du 16 juillet 2010, la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil ;

2°/ que, dans sa lettre du 15 octobre 2010 adressée à la société Cofiloisirs, la Caisse avait confirmé que, dès réception par ses services des sommes en provenance de la société Cinémage 5 au titre de sa participation au financement de la production du film intitulé « Bye-bye Blondie », il procéderait au règlement en sa faveur des sommes ainsi reçues ; qu'en énonçant que ce courrier ne constituait qu'une réponse à la société Red Star Cinema qui ne pouvait valoir engagement souscrit par la Caisse, cependant que cette lettre avait bien été adressée à cette dernière et engageait son auteur, la cour d'appel en a dénaturé les termes clairs et précis et a méconnu l'interdiction faite au juge de dénaturer les documents de la cause ;

3°/ que la cour d'appel, qui a dénié toute force obligatoire à l'engagement de la Caisse envers la société Cofiloisirs en raison de la référence à une somme de 375 000 euros fractionnée qui n'aurait pas été versée, quand il était constant, ainsi que l'a rappelé la cour d'appel, que la société Cinémage 5 avait procédé au virement de la somme de 188 000 euros sur le compte de la société Red Star Cinema le 2 mars 2011 puis à deux autres virements, de 94 000 euros le 26 juillet 2011 et de 93 000 euros le 19 mars 2012, soit une somme totale de 375 000 euros, a violé l'article 1134 du code civil ;

4°/ que la Caisse avait elle-même, dans ses conclusions d'appel, reconnu avoir souscrit un « engagement » envers la société Cofiloisirs le 15 octobre 2010, de sorte qu'en ayant énoncé que le courrier du 15 octobre 2010 ne pouvait valoir engagement de la Caisse envers elle, la cour d'appel a méconnu les termes du litige et a violé l'article 4 du code de procédure civile ;

Mais attendu, en premier lieu, que la cour d'appel n'a pas dénaturé les termes du litige en examinant la teneur et la portée de l'engagement résultant de la lettre du 15 octobre 2010, qui étaient contestées ;

Attendu, en deuxième lieu, que cette lettre indiquant, tout à la fois, que la Caisse tiendrait compte des accords entre les sociétés Red Star Cinema et Cofiloisirs et qu'elle procéderait au virement en faveur de cette dernière des sommes ainsi reçues, ce dont il ne résultait pas d'engagement inconditionnel de procéder à un tel virement, c'est par une interprétation souveraine, exclusive de dénaturation, que l'ambiguïté de ses termes rendait nécessaire, que la cour d'appel a retenu, peu important son destinataire, que cette lettre ne valait pas engagement de la Caisse de régler ces sommes à la société Cofiloisirs ;

Et attendu, enfin, que la cour d'appel a exactement décidé que faute d'inscription de délégations et cessions en pleine propriété de tout ou partie des produits d'une oeuvre cinématographique ou audiovisuelle au registre public du cinéma et de l'audiovisuel, la cession consentie à la société Cofiloisirs était inopposable à la Caisse, conformément à l'article L. 123-1 du code du cinéma et de l'image animée ;

D'où il suit que le moyen, inopérant en sa troisième branche, n'est pas fondé pour le surplus ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Compagnie pour le financement des loisirs aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer à la société Caisse de crédit mutuel Paris Montmartre-Grands boulevards la somme de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit octobre deux mille dix-sept.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Rousseau et Tapie, avocat aux Conseils, pour la société Compagnie pour le financement des loisirs

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir infirmé le jugement ayant condamné la caisse régionale de Crédit Mutuel de Paris Montmartre Grands Boulevards à payer à la société Cofiloisirs les sommes de 188 000 euros et de 94 000 euros et d'avoir débouté cette dernière de ses demandes ;

Aux motifs que l'article L. 123-1 du code du cinéma disposait que pour les oeuvres cinématographiques ou audiovisuelles dont le titre avait été préalablement déposé dans les conditions prévues à l'article L. 122-1, devaient être inscrites au registre public du cinéma et de l'audiovisuel, à la requête de la partie la plus diligente, les délégations et cessions, en pleine propriété ou à titre de garantie, de tout ou partie des produits présents ou à venir d'une oeuvre cinématographique ou audiovisuelle et qu'à défaut d'inscription au registre public du cinéma et de l'audiovisuel des actes, conventions ou jugements susmentionnés, les droits résultant de ces actes, conventions ou jugements étaient inopposables aux tiers ; que l'acte de cession du 16 mars 2010 avait fait l'objet d'une inscription au registre du cinéma et de l'audiovisuel le 15 avril 2010 ; que le 16 juillet 2010, les sociétés Cofiloisirs et Red Star Cinéma avaient conclu un avenant au terme duquel la société Red Star Cinéma avait cédé en garantie à la société Cofiloisirs l'intégralité des sommes à provenir de tout financement obtenu de la société Sofica Cinémage 5 pour la production de ce film, soit un montant de 375 000 euros ; que si elle avait écrit, le 21 juillet 2010, au Crédit Mutuel pour lui donner instruction de verser à son compte le montant de la participation de la société Sofica Cinémage 5, soit 375 000 euros et si le Crédit Mutuel lui avait écrit, le 15 octobre 2010, qu'il procéderait au virement en sa faveur des sommes reçues de la société Sofica Cinémage 5, ce courrier ne pouvait valoir engagement dès lors que les dispositions réglementaires en vigueur n'étaient pas remplies ; qu'en effet, la délégation au profit de la société Cofiloisirs résultant de l'avenant du 16 juillet 2010 n'avait fait l'objet d'une inscription au registre que le 6 septembre 2011 ; qu'en conséquence, le Crédit Mutuel, tiers à cette opération, n'avait pas à transmettre à la société Cofiloisirs les sommes versées par la société Sofica Cinémage 5 le 2 mars 2011 à hauteur de 188 000 euros et le 26 juillet 2011 à hauteur de 94 000 euros en vertu de la délégation de recettes du 16 juillet 2010 ; qu'en conséquence, le jugement serait infirmé ; que par ailleurs, la société Cofiloisirs soutenait que le Crédit Mutuel avait souscrit, par son courrier du 15 octobre 2010, un engagement à son profit ; que ce courrier était une réponse à la société Red Star Cinéma et ne pouvait valoir engagement souscrit par le Crédit Mutuel envers la société Cofiloisirs, d'autant que ce courrier faisait référence à une somme de 375 000 euros fractionnée, qui n'avait pas été versée ;

Alors 1°) que l'absence d'inscription sur le registre public du cinéma et de l'audiovisuel des délégations et cessions en pleine propriété de tout ou partie des produits d'une oeuvre cinématographique ou audiovisuelle n'a aucune incidence sur la validité d'un engagement pris par un établissement bancaire de reverser à l'établissement de crédit assurant la trésorerie des sociétés de production de films les financements versés pour la production de ce film ; qu'en refusant de reconnaître toute force obligatoire à la lettre du 15 octobre 2010 par laquelle la société Crédit Mutuel s'était engagée envers la société Cofiloisirs à virer en sa faveur des sommes en provenance de la société Sofica Cinémage 5 en raison du non-respect des dispositions du code du cinéma relatives à l'inscription sur un registre de l'avenant du 16 juillet 2010, la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil ;

Alors 2°) que dans sa lettre du 15 octobre 2010 adressée à la société Cofiloisirs, le Crédit Mutuel avait confirmé que, dès réception par ses services des sommes en provenance de la Sofica Cinémage 5 au titre de sa participation au financement de la production du film intitulé « Bye bye Blondie », il procéderait au règlement en sa faveur des sommes ainsi reçues ; qu'en énonçant que ce courrier ne constituait qu'une réponse à la société Red Star Cinéma qui ne pouvait valoir engagement souscrit par le Crédit Mutuel envers la société Cofiloisirs, cependant que cette lettre avait bien été adressée à cette dernière et engageait son auteur, la cour d'appel en a dénaturé les termes clairs et précis et a méconnu l'interdiction faite au juge de dénaturer les documents de la cause ;

Alors 3°) que la cour d'appel, qui a dénié toute force obligatoire à l'engagement du Crédit Mutuel envers la société Cofiloisirs en raison de la référence à une somme de 375 000 euros fractionnée qui n'aurait pas été versée, quand il était constant, ainsi que l'a rappelé la cour d'appel (arrêt p. 3 §1 et 3), que la société Sofica Cinémage 5 avait procédé au virement de la somme de 188 000 euros sur le compte de la société Red Star Cinéma le 2 mars 2011 puis à deux autres virements, de 94 000 euros le 26 juillet 2011 et de 93 000 euros le 19 mars 2012, soit une somme totale de 375 000 euros, a violé l'article 1134 du code civil ;

Alors 4°) que la caisse de Crédit Mutuel de Paris Montmartre-Grands Boulevards avait elle-même, dans ses conclusions d'appel signifiées le 20 octobre 2015 (p. 13 §6), reconnu avoir souscrit un « engagement » envers la société Cofiloisirs le 15 octobre 2010, de sorte qu'en ayant énoncé que le courrier du 15 octobre 2010 ne pouvait valoir engagement de la caisse de Crédit Mutuel envers la société Cofiloisirs, la cour d'appel a méconnu les termes du litige et a violé l'article 4 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 16-16040
Date de la décision : 18/10/2017
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 25 février 2016


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 18 oct. 2017, pourvoi n°16-16040


Composition du Tribunal
Président : Mme Riffault-Silk (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Le Prado, SCP Rousseau et Tapie

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2017:16.16040
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