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11/10/2017 | FRANCE | N°16-21370

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 11 octobre 2017, 16-21370


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le premier moyen :

Vu l'article 101 du code de procédure civile ;

Attendu, selon le jugement attaqué, que le premier tour des élections des délégués du personnel et des membres du comité d'entreprise de l'unité économique et sociale (UES) SCIC Habitat, à laquelle appartient la société la Plaine Normande, s'est déroulé le 12 avril 2016 ; que le syndicat national unitaire des personnels du groupe de la Caisse des dépôts et consignations (SNUP CDC FSU) a saisi treize tribunaux d'instance

d'une demande de rectification des procès-verbaux des résultats de ces élections ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le premier moyen :

Vu l'article 101 du code de procédure civile ;

Attendu, selon le jugement attaqué, que le premier tour des élections des délégués du personnel et des membres du comité d'entreprise de l'unité économique et sociale (UES) SCIC Habitat, à laquelle appartient la société la Plaine Normande, s'est déroulé le 12 avril 2016 ; que le syndicat national unitaire des personnels du groupe de la Caisse des dépôts et consignations (SNUP CDC FSU) a saisi treize tribunaux d'instance d'une demande de rectification des procès-verbaux des résultats de ces élections ; que, devant le tribunal de Caen, saisi de la rectification des procès verbaux de l'élection des délégués du personnel, la société La Plaine Normande a soulevé une exception de connexité ;

Attendu que pour rejeter cette exception, le tribunal retient qu'il ressort des débats et des pièces versées que les moyens soulevés par le syndicat SNUP CDC FSU à l'appui de ses demandes sont identiques à ceux portés dans le cadre des autres contestations actuellement pendantes auprès de douze autres tribunaux d'instance et que les demandes portent, en ce qui concerne la demande d'indemnisation, sur le même objet, mais qu'outre le fait que la demande de rectification ne porte que sur les procès-verbaux de l'élection des délégués du personnel de La Plaine Normande, les parties en présence sont distinctes en ce que les élus délégués du personnel convoqués et leurs syndicats sont propres à chaque entité, qu'il n'est donc pas, au sens de l'article 101 susvisé, de l'intérêt d'une bonne justice de faire juger la présente affaire par le seul tribunal d'instance de Paris ;

Qu'en se déterminant ainsi, en recherchant s'il existait entre ces instances une identité d'objet, de parties et de cause, ce qui correspondait à la définition de la litispendance, et non s'il existait, entre le litige soumis au tribunal d'instance de Paris et celui dont il était saisi, un lien tel qu'il soit de l'intérêt d'une bonne administration de la justice de les faire instruire et juger ensemble, le tribunal n'a pas donné de base légale à sa décision ;

PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les deuxième et troisième moyens :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, le jugement rendu le 21 juillet 2016, entre les parties, par le tribunal d'instance de Caen ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit jugement et, pour être fait droit, les renvoie devant le tribunal d'instance de Dijon ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du onze octobre deux mille dix-sept.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour la société La Plaine Normande.

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Le moyen reproche au jugement attaqué d'avoir rejeté l'exception de connexité soulevée par la société LA PLAINE NORMANDE ;

AUX MOTIFS QUE Sur l'exception de connexité, l'article 101 du Code de procédure civile énonce que "s'il existe entre des affaires portées devant deux juridictions distinctes un lien tel qu'il soit de l'intérêt d'une bonne justice de les faire instruire et juger ensemble, il peut être demandé à l'une de ces juridictions de se dessaisir et de renvoyer en l'état la connaissance de l'affaire à l'autre juridiction » ; qu'en l'espèce, la présente juridiction est saisie de la rectification des procès-verbaux des élections des délégués du personnel, le syndicat demandeur précisant à l'audience qu'il ne demande pas dans le cadre de cette instance la rectification des procès-verbaux des élections du comité d'entreprise, prétention dont se trouve saisie une autre juridiction ; que de fait, malgré le caractère similaire de l'instance avec certaines demandes portées devant d'autres juridictions, la demande de rectification doit être entendue comme ne portant que sur les procès-verbaux de l'élection des délégués du personnel de l'établissement de La Plaine Normande, et non de tous ceux de TUES SCIC Habitat ; qu'il ressort des débats et des pièces versées que les moyens soulevés par le syndicat SNUP CDC FSU à l'appui de ses demandes sont identiques avec ceux portés dans le cadre des autres contestations actuellement pendantes auprès de douze autres Tribunaux d'instance et que les demandes portent, en ce qui concerne la demande d'indemnisation, sur le même objet ; mais qu'outre le fait que la demande de rectification ne porte que sur les procès-verbaux de l'élection des délégués du personnel de La Plaine Normande, les parties en présence sont distinctes en ce que les élus délégués du personnel convoqués et leurs syndicats sont propres à chaque entité ; qu'il n'est donc pas, au sens de l'article 101 susvisé, de l'intérêt d'une bonne justice de faire juger la présente affaire par le seul Tribunal d'instance de Paris ; que l'exception de connexité est donc rejetée et qu'il convient de statuer au fond ;

ALORS D'UNE PART QUE l'article 101 du Code de procédure civile, qui dispose que s'il existe entre des affaires portées devant deux juridictions distinctes un lien tel qu'il soit de l'intérêt d'une bonne justice de les faire juger ensemble, il peut être demandé à l'une de ces juridictions de se dessaisir et de renvoyer en l'état la connaissance de l'affaire à l'autre juridiction, n'impose ni une identité totale d'objet, ni une identité de parties dans les différentes instances ; qu'en rejetant l'exception de connexité soulevée par la société LA PLAINE NORMANDE qui demandait que l'affaire portée par le syndicat SNUP CDC FSU devant le Tribunal d'instance de CAEN soit renvoyée par ce dernier devant le Tribunal d'instance de PARIS, lieu du siège social de l'unité économique et sociale et juridiction déjà saisi de d'une demande identique de rectification des procès-verbaux des élections, au motif que si l'instance présente un caractère similaire avec certaines demandes pendantes devant d'autres tribunaux d'instance, la demande de rectification des procès-verbaux ne vise que l'élection des délégués du personnel de l'établissement La Plaine Normande de l'unité économique et sociale SCIC HABITAT et les parties en présence sont distinctes en ce que les élus délégués du personnel convoqués et leurs syndicats sont propres à chaque entité, le Tribunal d'instance, qui a subordonné l'application de l'article 101 du Code de procédure civile à une condition qu'il ne comporte pas, a violé le texte précité ;

ET ALORS, D'AUTRE PART, QU'en se déterminant comme il l'a fait sans rechercher si malgré la personnalité distincte des élus délégués du personnel, parties intéressées convoquées à l'audience mais dont la situation n'était pas affectée par les différentes demandes, il n'existait pas entre les actions considérées visant à la rectification des procès-verbaux de l'ensemble des élections des délégués du personnel s'étant tenues de façon simultanée au sein de l'unité économique et sociale SCIC HABITAT un lien et une corrélation suffisante pour justifier qu'elles soient réunies et jugées par une seule juridiction, le Tribunal d'instance a privé sa décision de base légale au regard de l'article 101 du Code de procédure civile.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
(Subsidiaire)

Ce moyen reproche au jugement attaqué d'avoir déclaré recevables les demandes en rectification des procès-verbaux des élections des délégués du personnel de l'établissement La Plaine Normande de l'unité économique et sociale SCIC HABITAT ;

AUX MOTIFS QUE sur la note en délibéré, en application de l'article 846 du code de procédure civile, la procédure devant le tribunal d'instance est orale ; que toutefois, aux termes de l'article 445, après la clôture des débats, les parties ne peuvent déposer aucune note à l'appui de leurs observations, si ce n'est en vue de répondre aux arguments développés par le ministère public ou à la demande du président dans les cas prévus aux articles 442 et 444 ; qu'en l'espèce, après que l'exception de connexité ait été plaidée, le président a invité les parties à s'expliquer sur le fond et a autorisé les parties à fournir une note en délibéré pour compléter leurs arguments sur ce point ; qu'il s'en suit qu'il n'y a pas lieu d'examiner les demandes ou exceptions nouvelles soulevées après la clôture des débats telles que l'exception d'incompétence du tribunal pour statuer sur l'entrave, l'exception d'irrecevabilité tirée du défaut d'intérêt à agir du syndicat demandeur ou la demande d'indemnité fondée sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ; que de même, doivent être écartées des débats les pièces nouvelles n° 14 à 21 ;

ET AUX AUTRES MOTIFS QUE sur l'exception d'irrecevabilité, selon l'article R.2314-28 du code du travail, lorsque la contestation porte sur la régularité de l'élection, la déclaration n'est recevable que si elle est faite dans les 15 jours suivant l'élection ; qu'il doit être admis que l'action tendant à la rectification des erreurs affectant le procès-verbal de l'élection doit être introduite dans les 15 jours de la proclamation des résultats ; qu'en l'espèce, faute de précision dans le procès-verbal d' élection, la date de proclamation des résultats n'est pas connue, seule la période du vote électronique, du 29 mars 2016 au 11 avril 2016 ayant été portée sur ces documents ; que la partie demanderesse affirme sans être contredite que les résultats n'ont été affichés que le 14 avril 2016, date à partir de laquelle elle a pu prendre connaissance des résultats ; qu'il s'en suit que le recours, expédié par lettre du 28 avril 2016, a été formé dans le délai ; que la demande est donc recevable ;

ALORS D'UNE PART QUE le président de la juridiction qui a demandé à une partie de fournir des explications et l'a autorisé à déposer une note en délibéré est tenu d'examiner les termes de cette dernière et de répondre aux moyens soulevés ; qu'il s'évince des énonciations du jugement que le juge, après avoir rejeté l'exception de connexité soulevée par la société La Plaine Normande a invité les parties à s'expliquer sur le fond et les a autorisées à fournir une note en délibéré pour compléter leurs arguments sur ce point, faculté dont a usé la société La Plaine Normande en faisant notamment valoir l'absence d'intérêt à agir du syndicat SNUP CDC FSU ; qu'en disant néanmoins n'y avoir pas lieu d'examiner la fin de non-recevoir ainsi soulevée par la société défenderesse, le Tribunal d'instance a violé les articles 445 et 444 du Code de procédure civile ;

ALORS D'AUTRE PART QUE l'action tendant à la rectification des erreurs affectant le procès-verbal des élections n'est recevable que dans le délai de quinze jours suivant les élections ; que ce délai de contestation commence à courir à compter de la proclamation nominative des élus, laquelle, en vertu de l'article R.67 du Code électoral, suit immédiatement les opérations de dépouillement ; que le Tribunal d'instance qui, pour faire courir à compter de la date d'affichage des résultats dans l'entreprise le délai imparti, déclare que la date de proclamation des résultats n'est pas connue faute de précision sur le procès-verbal d'élections, sans relever aucun élément de nature à établir que la proclamation nominative était intervenue postérieurement au jour du dépouillement, a privé sa décision de base légale au regard des articles R.67 du Code électoral et R.2314-28 du Code du travail ;

ALORS ENFIN QUE le délai de contestation court à compter de la proclamation nominative des résultats qui suit immédiatement les opérations de dépouillement, sauf à l'égard des organisations syndicales n'ayant pas été invitées à négocier le protocole d'accord préélectoral lorsqu'elles établissent n'avoir eu connaissance qu'ultérieurement des résultats ;

qu'en retenant comme point de départ du délai de contestation le 14 avril 2016, soit la date d'affichage des résultats considérée comme étant celle à laquelle le syndicat demandeur a pu avoir connaissance des résultats, sans qu'il résulte par ailleurs de ses constatations que le syndicat SNUP CDC FSU n'avait pas été invité à la négociation du protocole préélectoral ayant fixé au 12 avril la date du dépouillement pour le premier tour des élections, le Tribunal d'instance a privé sa décision de base légale au regard de l'article R.2314-28 du Code du travail.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
(Subsidiaire)

Ce moyen reproche au jugement attaqué d'avoir rectifié les procès-verbaux des résultats des élections des délégués du personnel et les procès-verbaux des élections des membres du comité d'entreprise ayant eu lieu au sein de l'UES SCIC HABITAT en y portant les mentions suivantes :
- date du précédent scrutin : 16 avril 2012 au lieu de 24 mai 2012
- date du scrutin : 12 avril 2016 au lieu de 29 mars 2016 au 11 avril 2016 ;

AUX MOTIFS QUE de jurisprudence constante, le juge d'instance a toute compétence, de manière générale, pour rectifier les imprimés CERFA si les données qu'il contient ne sont pas conformes aux opérations électorales ; qu'en l'espèce, le syndicat SNUP CDC FSU demande la rectification des erreurs suivantes sur les procès-verbaux des résultats des élections des délégués du personnel de l'établissement de La Plaine Normande: -rectification de la date du précédent scrutin sur les procès-verbaux 2016 des élections des délégués du personnel ; -inscription sur les procès-verbaux de la date effective du scrutin du 12 avril 2016 ; que lesdits procès-verbaux mentionnent le 24 mai 2012 comme date du précédent scrutin ; qu'or il ressort des procès-verbaux des précédentes élections professionnelles de 2012 que le premier tour avait eu lieu le 16 avril 2012 ; qu'il convient donc de rectifier les procès-verbaux 2016 des élections des délégués du personnel ; que lesdits procès-verbaux mentionnent "29 mars 2016 au 11 avril 2016" comme date du scrutin 2016 ; qu'or il ressort du protocole d'accord préélectoral que le premier tour de ces élections a eu lieu le 12 avril 2016 ; qu'il convient donc de rectifier les procès-verbaux 2016 des élections des délégués du personnel sur ce point ;

ALORS QUE le défaut de réponse à conclusions constitue un défaut de motifs ; que la société La Plaine Normande faisait valoir dans ses conclusions que les procès-verbaux contestés par le syndicat SNUP CDC FSU avaient été signés sans réserves par les membres du bureau de vote et ne comportaient pas la moindre observation de ces derniers ; qu'en faisant droit néanmoins à la demande de rectification des dates des différents scrutins inscrites sur les procès-verbaux sans avoir répondu à ce moyen de ses écritures le Tribunal d'instance a violé l'article 455 du Code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 16-21370
Date de la décision : 11/10/2017
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Tribunal d'instance de Caen, 21 juillet 2016


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 11 oct. 2017, pourvoi n°16-21370


Composition du Tribunal
Président : M. Huglo (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Lyon-Caen et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2017:16.21370
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