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05/10/2017 | FRANCE | N°15-22175

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 05 octobre 2017, 15-22175


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Bordeaux, 30 avril 2015), que M. et Mme X..., propriétaires d'une maison d'habitation, ont assigné M. et Mme Y..., propriétaires de la parcelle voisine, cadastrée AS 1199, à usage de cour, en suppression des obstacles réduisant l'usage de la servitude conventionnelle de passage instituée entre les deux fonds par un acte du 22 mai 1953 ; que M. et Mme Y...ont formé une demande reconventionnelle en suppression de la rampe d'accès menant au garage de leurs voisins ;
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LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Bordeaux, 30 avril 2015), que M. et Mme X..., propriétaires d'une maison d'habitation, ont assigné M. et Mme Y..., propriétaires de la parcelle voisine, cadastrée AS 1199, à usage de cour, en suppression des obstacles réduisant l'usage de la servitude conventionnelle de passage instituée entre les deux fonds par un acte du 22 mai 1953 ; que M. et Mme Y...ont formé une demande reconventionnelle en suppression de la rampe d'accès menant au garage de leurs voisins ;

Sur le premier moyen :

Vu les articles 1234, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016, et 701 du code civil, ensemble l'obligation faite au juge de ne pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis ;

Attendu que, pour rejeter la demande de M. et Mme X..., l'arrêt retient que l'acte du 22 mai 1953 prévoyait un droit de passage à pied, en voiture et camion par le porche de la cour, sans préciser la largeur de ce passage, et que ceux-ci ont manifesté sans équivoque que le droit de passage ne devait s'exercer que sur la largeur nécessaire pour permettre l'accès des véhicules au garage en ne prévoyant pas d'ouverture d'une porte piétons à côté de la porte du garage dans leur demande de permis de construire celui-ci ;

Qu'en statuant ainsi, alors que les titres concordants des parties fixent le passage sur l'entière cour commune cadastrée AS 1199, la cour d'appel, qui a dénaturé les titres du 26 janvier 2001 et du 5 décembre 2003, a violé les textes et le principe susvisés ;

Sur le deuxième moyen :

Vu l'article 4 du code de procédure civile ;

Attendu que, pour rejeter la demande de M. et Mme X..., l'arrêt retient qu'ils ont fermé la partie ouverte d'un bâtiment de dépendance
par un mur en aggloméré dont il n'est pas contesté qu'il est implanté en limite de leur fonds et que, contre ce mur, M. et Mme Y...ont fait construire sur leur propriété un mur de briques d'une épaisseur de quatre centimètres ;

Qu'en statuant ainsi, alors que, dans leurs conclusions, M. et Mme X..., se prévalant des constatations de l'expert judiciaire, soutenaient que leur mur était édifié en retrait de deux centimètres sur leur propre fonds et que le mur de doublage construit par leurs voisins empiétait de deux centimètres sur leur terrain, la cour d'appel, qui a modifié l'objet du litige, a violé le texte susvisé ;

Et sur le troisième moyen :

Vu l'article 455 du code de procédure civile ;

Attendu que, pour accueillir la demande reconventionnelle de M. et Mme Y..., l'arrêt retient qu'entre l'extrémité de la rampe pavée de ces derniers et le point E, la rampe ciment de M. et Mme X...dépasse la limite de propriété sur une largeur d'environ trente-six centimètres ;

Qu'en statuant ainsi, sans répondre aux conclusions de M. et Mme X...soutenant que la rampe d'accès constituait un ouvrage indispensable pour permettre l'accès à leur garage, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, en ses dispositions, sauf celle concernant le débord du toit de la construction de M. et Mme X..., l'arrêt rendu le 30 avril 2015, entre les parties, par la cour d'appel de Bordeaux ; remet, en conséquence, sur le surplus, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Toulouse ;

Condamne M. et Mme Y...aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de M. et Mme Y...et les condamne à payer à M. et Mme X...la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du cinq octobre deux mille dix-sept.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils, pour M. et Mme X...

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué, confirmatif sur ce point, d'avoir débouté les époux X...de leurs demandes tendant à la suppression de tous les ouvrages et obstacles édifiés par les époux Y...sur la parcelle 1199,

AUX MOTIFS QUE dans leur demande de permis de construire, les époux X...n'ont pas prévu l'ouverture d'une porte pour piétons à côté de la porte de garage, le plan joint à cette demande figurant clairement par des flèches le droit de passage par le porche se prolongeant uniquement jusqu'à l'entrée du garage, avec la mention manuscrite : « passage obligatoire, avec droit de passage, puis rentrer obligatoirement dans le garage AS 1162 » ; qu'ils ont ainsi manifesté sans équivoque que leur droit de passage ne devait s'exercer que sur la largeur nécessaire pour leur permettre d'accéder au garage qu'ils allaient construire, et non sur la partie en retrait, propriété des époux Y...; qu'ils ne démontrent pas que les ouvrages édifiés par les époux Y...sur leur propriété font obstacle à leur droit de passage ni même gênent l'accès à leur garage, étant observé qu'ils peuvent parfaitement aménager un accès piétons dans l'ouverture du garage ;

1°) ALORS QU'il résulte clairement des titres concordants des époux X...(26 janvier 2001) et des époux Y...(5 décembre 2003), ainsi que rappelé clairement par le rapport d'expertise judiciaire (p. 12, 16 et 17), que la parcelle 1199, acquise par les époux Y...et sur laquelle ils ont édifié des ouvrages (massif, bacs à fleurs, muret, rampe, etc.) qui en réservent l'usage à leur seul profit, fait partie en son entier d'un ensemble de parcelles mentionnées dans leur titre sous la désignation « partie cédée CDEF restant commune », à l'instar de la partie CEGI restant également commune – ces parties communes supportant un « droit de passage à pied, à voiture et camion par le porche de la cour » ; que dès lors que l'ensemble de cette parcelle 1199 supporte le droit de passage et l'usage commun des parties – fussent-ils d'origine légale et non conventionnelle –, les époux Y...ne pouvaient en aucun cas réduire l'étendue de ce droit réel conféré au profit notamment du fonds X...; qu'en limitant ainsi en dehors de toute clause contractuelle l'étendue de la servitude concédée, et en méconnaissant ainsi les titres des parties, la Cour d'appel a violé les articles 1134, 682, 690 et 701 du Code civil ;

2°) ALORS QU'il est interdit au propriétaire du fonds servant de diminuer l'usage de la servitude, quel que peut être l'intérêt de celle-ci pour le fonds dominant ; que la Cour d'appel a violé l'article 701 du Code civil ;

3°) ALORS QUE la seule mention figurant sur un plan annexé à une demande de permis de construire un garage, selon laquelle « passage obligatoire, avec droit de passage, puis rentrer obligatoirement dans le garage AS 1162 », signifie que le passage s'effectue par voie de servitude, et non par accès direct, et qu'aucune automobile ne doit stationner dans la cour commune pour ne pas l'encombrer ; qu'en y lisant une définition de l'étendue du droit de passage et d'usage concédé par titre sur l'ensemble de cette cour commune, la Cour d'appel a dénaturé ce document et violé l'article 1134 du Code civil ;

4°) ALORS, EN TOUTE HYPOTHESE, QUE cette mention, destinée à préciser à l'administration devant délivrer le permis de construire les modalités d'accès au bâtiment à construire et de stationnement des véhicules, est insusceptible de caractériser une renonciation à l'étendue d'un droit de passage concédé par titre sur l'ensemble de la parcelle 1199 ; que la Cour d'appel a violé l'article 1234 du Code civil.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué, confirmatif sur ce point, d'avoir débouté les époux X...de leurs demandes tendant à la démolition du mur de doublage édifié par les époux Y...le long du mur X...(mur STU du plan de l'expert),

AUX MOTIFS QU'« il n'est pas contesté » que le mur X... « est implanté en limite de leur fonds » et « que contre ce mur, les époux Y...ont fait construire sur leur propriété un mur de brique d'une épaisseur de 4 cm, après avoir fait une déclaration de travaux » ;

1°) ALORS QUE dans leurs conclusions d'appel (p. 11), les époux X...contestaient expressément que leur propre mur eût été édifié en limite de leur fonds, faisaient valoir – en se prévalant des conclusions de l'expert sur ce point (p. 23) – que leur mur avait été édifié en retrait de 2 cm sur leur propre fonds par rapport à la ligne divisoire, et que le mur de doublage, accolé au leur, empiétait de 2 cm sur leur propre fonds ; qu'en affirmant qu'aucune contestation n'était élevée sur ce point, la Cour d'appel a dénaturé le cadre du litige et violé l'article 4 du Code de procédure civile ;

2°) ALORS QU'en omettant de s'expliquer sur cet empiètement de nature à justifier la démolition, si minime fût-il, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 545 du Code civil.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué, infirmatif sur ce point, d'avoir fait droit à la demande des époux Y...et d'avoir ordonné la suppression du plan incliné installé par les époux X...pour accéder à leur garage,

AUX MOTIFS QU'il n'est pas contesté que cet ouvrage est implanté exclusivement sur la propriété des époux Y...; que cet empiètement doit être supprimé ;

1°) ALORS QU'aux termes des articles 697 et 698 du Code civil, celui auquel est due une servitude a le droit de faire à ses frais tous les ouvrages nécessaires pour en user et la conserver ; que M. et Mme X...faisaient valoir dans leurs conclusions d'appel (p. 13), que leur droit de passage en voiture et camion les autorisait à user normalement de leur garage et que la courte rampe d'accès qu'ils avaient créée sur le fonds servant était destinée à permettre un accès aisé avec leur véhicule dans ce garage ; qu'il s'agissait ainsi d'un simple aménagement de la servitude de passage dont ils bénéficient ; qu'en s'abstenant de répondre à ce moyen, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile ;

2°) ALORS, AU DEMEURANT, QU'en s'abstenant de toute explication sur les modalités d'exercice de la servitude et sur la nécessité d'une rampe d'accès de 36 cm ainsi créée pour accéder au garage, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 697 du Code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 15-22175
Date de la décision : 05/10/2017
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Bordeaux, 30 avril 2015


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 05 oct. 2017, pourvoi n°15-22175


Composition du Tribunal
Président : M. Chauvin (président)
Avocat(s) : SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2017:15.22175
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