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28/09/2017 | FRANCE | N°16-28336

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 28 septembre 2017, 16-28336


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu l'article L. 2143-3 du code du travail ;

Attendu, selon le jugement attaqué, que le premier tour des élections professionnelles s'est déroulé le 1er février 2014 au sein de l'établissement de Cambrai de l'UES Boulanger, constituée des sociétés Boulanger, Cap Boulanger Holding et Solvarea ; que M. X... a été élu, sur une liste présentée par la CFTC, membre du comité d'établissement, avec 85,20 % des suffrages exprimés ; que la fédération des services CFDT l'a dÃ

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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu l'article L. 2143-3 du code du travail ;

Attendu, selon le jugement attaqué, que le premier tour des élections professionnelles s'est déroulé le 1er février 2014 au sein de l'établissement de Cambrai de l'UES Boulanger, constituée des sociétés Boulanger, Cap Boulanger Holding et Solvarea ; que M. X... a été élu, sur une liste présentée par la CFTC, membre du comité d'établissement, avec 85,20 % des suffrages exprimés ; que la fédération des services CFDT l'a désigné le 29 septembre 2016 en qualité de délégué syndical pour la région Nord ; que les sociétés Boulanger, Cap Boulanger Holding et Solvarea ont saisi le tribunal d'instance d'une demande d'annulation de cette désignation ;

Attendu que pour accueillir cette demande, le jugement retient que les dispositions de l'article L. 2143-3 du code du travail font obligation à l'organisation syndicale représentative qui désigne un délégué syndical de le choisir parmi les candidats qu'elle a présentés aux élections professionnelles et qui, au premier tour, ont recueilli au moins 10 % des suffrages exprimés, que ce n'est que si aucun de ses candidats ne remplit cette condition de score personnel, ou s'ils ne sont plus dans l'entreprise ou l'établissement, qu'elle peut choisir un délégué parmi les autres candidats et à défaut parmi ses adhérents, qu'elle peut alors notamment choisir un candidat présenté par une autre organisation syndicale qui a depuis lors changé d'étiquette, sans d'ailleurs qu'il soit nécessaire que ce candidat ait obtenu les 10 %, qu'en l'espèce,u la fédération des services CFDT disposait de deux candidats encore présents dans l'entreprise et qui justifiaient au premier tour des élections professionnelles d'un score d'au moins 10 % des suffrages exprimés, et que la désignation de M. X... doit donc être annulée ;

Attendu cependant que, dès lors qu'un salarié remplit les conditions prévues par la loi pour être désigné délégué syndical, il n'appartient qu'au syndicat désignataire d'apprécier s'il est en mesure de remplir sa mission, peu important que ce salarié ait été élu, lors des dernières élections, représentant du personnel sur des listes présentées par un autre syndicat ;

Qu'en statuant comme il a fait, alors qu'il résultait de ses constatations que M. X... avait recueilli à titre personnel au moins 10 % des suffrages exprimés au premier tour des élections au comité d'établissement, de sorte qu'il remplissait les conditions prévues par la loi pour être désigné délégué syndical, le tribunal a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, le jugement rendu le 16 décembre 2016, entre les parties, par le tribunal d'instance de Cambrai ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit jugement et, pour être fait droit, les renvoie devant le tribunal d'instance de Douai ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne les sociétés Boulanger, Cap Boulanger Holding et Solvarea à payer à M. X... et au syndicat des services CFDT la somme globale de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit septembre deux mille dix-sept.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, avocat aux Conseils, pour M. X... et le syndicat des services CFDT

Le moyen reproche au jugement attaqué d'AVOIR annulé la désignation de Monsieur Jean-Marie X... en qualité de délégué sydical CFDT de la région Nord et condamné la Fédération des Services CFDT à payer aux sociétés Boulanger, Cap Boulanger Holding et Solvarea la somme globale de 800 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

AUX MOTIFS QUE dans sa rédaction issue de la loi du 5 mars 2014, l'article L2143-3 du code du travail est ainsi rédigé : « Chaque organisation syndicale représentative dans l'entreprise ou l'établissement d'au moins cinquante salariés, qui constitue une section syndicale, désigne parmi les candidats aux élections professionnelles qui ont recueilli à titre personnel et dans leur collège au moins 10 % des suffrages exprimés au premier tour des dernières élections au comité d'entreprise ou de la délégation unique du personnel ou des délégués du personnel, quel que soit le nombre de votants, dans les limites fixées à l'article L2143-12, un ou plusieurs délégués syndicaux pour la représenter auprès de l'employeur. Si aucun des candidats présentés par l'organisation syndicale aux élections professionnelles ne remplit les conditions mentionnées au premier alinéa du présent article ou s'il ne reste, dans l'entreprise ou l'établissement, plus aucun candidat aux élections professionnelles qui remplit les conditions mentionnées au premier alinéa, une organisation syndicale représentative peut désigner un délégué syndical parmi les autres candidats ou, à défaut, parmi ses adhérents au sein de l'entreprise ou de l'établissement » ; le problème juridique posé au tribunal est de savoir si, lorsque l'organisation syndicale représentative a présenté au premier tour des élections professionnelles des candidats ayant recueilli à titre personnel dans leur collège au moins 10 % des suffrages exprimés, et qu'au moment de la désignation du délégué syndical, ces candidats étaient toujours dans l'entreprise, elle doit nécessairement désigner son délégué parmi ceux-ci ; les nombreuses jurisprudences dont les parties se prévalent ne sont en fait pas contradictoires mais complémentaires ; il n'est pas possible, et la cour de cassation ne l'a d'ailleurs jamais fait, de lire l'article L2143-3 en dissociant les deux alinéas ci-dessus reproduits ; ces deux alinéas ne forment qu'un seul et même article et doivent être interprétés l'un par rapport à l'autre ; ces dispositions font obligation à l'organisation syndicale représentative qui désigne un délégué syndical, de le choisir parmi les candidats qu'elle a présentés aux élections professionnelles et qui, au premier tour, ont recueilli au moins 10 % des suffrages exprimés ; ce n'est que si aucun de ses candidats ne remplit cette condition de score personnel, ou s'ils ne sont plus dans l'entreprise ou l'établissement, qu'elle peut choisir un délégué parmi les autres candidats à défaut parmi ses adhérents ; elle peut alors notamment choisir un candidat présenté par une autre organisation syndicale et qui a depuis lors changé d'étiquette, sans d'ailleurs qu'il soit nécessaire que ce candidat ait obtenu les 10 % ; en l'espèce, la fédération des services CFDT disposait de deux candidats encore présents dans l'entreprise et qui justifiaient en premier tour des élections professionnelles, d'un score d'au moins 10 % des suffrages exprimés, en l'espèce Monsieur Y... et Monsieur Z... ; la désignation de Monsieur X... est donc irrégulière et doit être annulée, sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres questions juridiques soulevées ; …/…l'équité commande de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et de condamner la fédération des services CFDT à lui rembourser au moins partiellement les frais exposés, soit la somme de 800 euros ;

ALORS QUE, si l'affiliation confédérale sous laquelle un syndicat a présenté des candidats aux élections des membres du comité d'entreprise constitue un élément essentiel du vote des électeurs en ce qu'elle détermine la représentativité du syndicat, le score électoral exigé d'un candidat pour sa désignation en qualité de délégué syndical est un score personnel qui l'habilite à recevoir mandat de représentation par un syndicat représentatif ; qu'est donc valable la désignation d'un salarié ayant été présenté aux élections par un syndicat différent de celui l'ayant désigné ; que le tribunal a annulé la désignation de Monsieur X... en qualité de délégué syndical par la CFDT aux motifs que l'organisation syndicale qui désigne un délégué syndical avait obligation de le choisir « parmi les candidats qu'elle a présentés aux élections professionnelles », que Monsieur X... avait été candidat sur la liste d'un autre syndicat, tandis que la CFDT disposait de deux candidats présentés sur ses propres listes ; qu'en statuant comme il l'a fait, quand les dispositions légales n'imposent au syndicat aucune obligation de désigner les candidats présentés sur ses propres listes, le tribunal, qui a ajouté à la loi des conditions et restrictions non prévues légalement, a violé l'article L2143-3 du code du travail ;

ALORS aussi QU' aucune disposition n'interdit à un syndicat de désigner en qualité de délégué du personnel un salarié ayant obtenu 10% des voix sur une autre liste, peu important qu'il existe des salariés présentés sur ses propres listes et remplissant les conditions pour être désignés ; qu'en statuant autrement, le tribunal a encore ajouté à la loi des conditions et restrictions non prévues légalement, a violé l'article L2143-3 du code du travail

Et ALORS QUE la Fédération CFDT et Monsieur X... avaient soutenu et démontré que Monsieur X... avait obtenu un score supérieur à 10 % lors des dernière élections et remplissait les conditions requises par l'article L 2143-3 pour être désigné en qualité de délégué syndical – ce qui

n'était pas contesté ; qu'en statuant comme il l'a fait, sans rechercher si Monsieur X... avait obtenu un score supérieur à 10 % lors des dernière élections et remplissait les conditions requises par l'article L 2143-3 pour être désigné en qualité de délégué syndical, le tribunal a entaché sa décision d'un défaut de base légale au regard de l'article L2143-3 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 16-28336
Date de la décision : 28/09/2017
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Tribunal d'instance de Cambrai, 16 décembre 2016


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 28 sep. 2017, pourvoi n°16-28336


Composition du Tribunal
Président : M. Huglo (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Gatineau et Fattaccini, SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2017:16.28336
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