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27/09/2017 | FRANCE | N°16-15542

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 27 septembre 2017, 16-15542


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en sa deuxième branche :

Vu l'article 1116 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016, ensemble l'article L. 313-7 du code monétaire et financier ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que, pour les besoins de son activité de médecin, M. X... (le crédit-preneur) a, le 21 avril 2010, contracté avec la société Siemens Financial services (le crédit-bailleur) un crédit-bail portant sur un appareil d'échographie acquis

auprès de la société Locaccess Lasermedic (le fournisseur) et a signé un document ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en sa deuxième branche :

Vu l'article 1116 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016, ensemble l'article L. 313-7 du code monétaire et financier ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que, pour les besoins de son activité de médecin, M. X... (le crédit-preneur) a, le 21 avril 2010, contracté avec la société Siemens Financial services (le crédit-bailleur) un crédit-bail portant sur un appareil d'échographie acquis auprès de la société Locaccess Lasermedic (le fournisseur) et a signé un document intitulé « procès-verbal de réception du crédit-bail » portant la mention suivante : « le locataire déclare avoir pris livraison de l'équipement dans les conditions prévues avec le fournisseur, avoir réceptionné les prestations dans les conditions prévues avec le fournisseur, les reconnaître conformes à ceux ayant fait l'objet du contrat conclu avec la société Siemens Financial services, en avoir contrôlé le fonctionnement (...), les accepter sans restriction, ni réserve » ; que soutenant ne pas avoir reçu ledit matériel, le crédit-preneur a refusé d'autoriser les prélèvements sur son compte bancaire ; que le crédit-bailleur l'a assigné afin que soit constatée ou prononcée la résiliation du contrat de crédit-bail, qu'il soit condamné à lui restituer le matériel, à lui payer diverses sommes au titre de ce contrat et, à titre subsidiaire, au paiement de dommages-intérêts ; qu'il a également demandé qu'en cas d'annulation du contrat de vente, le fournisseur soit condamné à lui rembourser le prix d'acquisition du matériel ; qu'invoquant l'erreur commise lors de la signature du procès-verbal de réception et les manoeuvres dolosives du fournisseur, le crédit-preneur a, après avoir mis ce dernier en cause, demandé que soit prononcée la nullité des contrats de vente et de crédit-bail, qu'il soit dit que le fournisseur est le seul responsable du préjudice causé au crédit-bailleur du fait de sa faute exclusive commise tant au détriment du crédit-preneur que du crédit-bailleur et que les demandes de ce dernier formées contre lui soient rejetées ;

Attendu que pour condamner le crédit-preneur à payer au crédit-bailleur la somme de 62 625,41 euros à titre de dommages-intérêts, l'arrêt, après avoir relevé que le crédit-preneur avait signé le procès-verbal de livraison en raison de manoeuvres dolosives commises par le représentant du fournisseur destinées à lui faire croire qu'il ne s'agissait que d'une formalité pour réserver le matériel auprès du fournisseur, retient qu'en signant ce document, tout en sachant que le matériel n'était pas livré, le crédit-preneur avait commis une faute, la légèreté de son comportement ayant contribué à la naissance du préjudice subi par le crédit-bailleur, correspondant au montant des sommes payées par lui, à la vue de ce document, pour financer l'acquisition du matériel litigieux ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle avait retenu que le contrat de fourniture devait être annulé, comme ayant été signé en raison des manoeuvres dolosives commises par le représentant du fournisseur destinées à faire croire au crédit-preneur qu'il ne s'agissait que d'une formalité pour réserver le matériel auprès du fournisseur et constaté que le crédit-preneur avait accepté de signer, sur l'insistance du préposé du fournisseur, le contrat de crédit-bail ainsi que, en sa qualité de locataire, le procès-verbal de livraison, ce dont il résulte que le fournisseur n'était pas, pour la conclusion du contrat de crédit-bail, un tiers et que ses manoeuvres dolosives viciant le consentement du crédit-preneur étaient opposables au crédit-bailleur, rendant ainsi, à son égard, excusable l'erreur en résultant commise par le crédit-preneur, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il dit que M. X... a commis une faute ayant occasionné un préjudice à la société Siemens Financial services, condamne M. X..., crédit-preneur, à lui rembourser, à titre de dommages-intérêts, la somme de 62 625,41 euros et en ce qu'il statue sur les dépens, l'arrêt rendu le 19 janvier 2016, entre les parties, par la cour d'appel de Chambéry ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Grenoble ;

Condamne la société Siemens Financial services aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer à M. X... la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept septembre deux mille dix-sept.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Bouzidi et Bouhanna, avocat aux Conseils, pour M. X...

IL EST FAIT GRIEF A L'ARRET INFIRMATIF ATTAQUE D'AVOIR dit que M. X... a commis une faute ayant occasionné un préjudice à la société SIEMENS FINANCIAL SERVICES et condamné M. X..., crédit-preneur, à rembourser à la société SIEMENS FINANCIAL SERVICES, crédit-bailleur, à titre de dommages-intérêts, la somme de 62 625,41 € ;

AUX MOTIFS QUE sur la nullité du contrat de vente : que le 20 mai 2010, le docteur X... a écrit par mail à M. Y..., de la société LOCACCESS, qui lui demandait si le laser pouvait être livré le 21 mai : « de toutes façons, le deal ne change pas : tu n'envoies rien avant mon accord express qui dépend de celui de la banque » ; le 26 mai, il lui réécrivait : « je viens de recevoir ce jour un genre de contrat avec échéancier de 84 périodes par Siemens. Quelques remarques : (..) enfin, et je le regrette bien plus que toi, les autorisations bancaires ne sont pas encore toutes signées, ce qui, comme je te l'ai toujours dit, m'empêche pour l'instant d'avaliser le contrat » ; il en résulte que le docteur X... considérait à ce moment-là qu'il n'avait souscrit aucun contrat de crédit-bail ; que le 14 juin suivant, constat a été dressé par huissier de justice que le laser n'avait pas été livré ; que dans ces conditions, c'est par une exacte appréciation des circonstances de la cause que le premier juge a considéré que le contrat de fourniture du matériel fourni par la société LOCACCESS était nul, comme ayant été signé en raison de manoeuvres dolosives commises par M. Y..., destinées à faire croire à M. X... qu'il ne s'agissait que d'une formalité pour réserver le matériel auprès du fournisseur ; sur la nullité du contrat de crédit-bail : ce contrat est dépourvu de cause, en l'absence d'un matériel livré au client et commandé par celui-ci ; que le jugement déféré sera là encore confirmé sur ce point ; que le contrat étant nul, la société SIEMENS ne peut réclamer paiement de l'indemnité de résiliation stipulée au contrat au docteur X... ; sur la responsabilité de M. X... : le docteur X... a accepté de signer, certes sur l'insistance du préposé de la société LOCACCESS, le contrat de crédit-bail et surtout un procès-verbal de livraison du matériel commandé, à la vue duquel la société SIEMENS a débloqué les fonds et payé la société LOCACCESS ; qu'en signant un tel document, alors qu'il savait que le matériel n'était pas livré, le docteur X... a commis une faute, la légèreté de son comportement ayant contribué à la naissance du préjudice subi par la société SIEMENS ; que ce préjudice est égal au montant des sommes déboursées par la société SIEMENS pour financer l'acquisition du matériel litigieux, à savoir la somme de 62 625,41 €, aucune TVA n'étant prise en compte, la société SIEMENS pouvant la récupérer ; que le docteur X... sera condamné à payer cette somme, aucun manquement ne pouvant être reproché à l'appelante, qui n'a débloqué les fonds qu'au vu du document signé par le docteur X... ; que la société SIEMENS FINANCIAL n'avait pas à procéder à d'autres vérifications avant de procéder au paiement (arrêt, page 5) ;

ALORS D'UNE PART QUE l'erreur provoquée par des manoeuvres dolosives est toujours excusable ; qu'en l'espèce, pour condamner M. X... à payer à la société SIEMENS les sommes déboursées par cette dernière pour financer l'acquisition du matériel litigieux, la cour d'appel a relevé que l'exposant a accepté de signer un procès-verbal de livraison du matériel commandé, à la vue duquel la société SIEMENS a débloqué les fonds et payé la société LOCACCESS, et qu'en signant un tel document, M. X... a commis une faute, la légèreté de son comportement ayant contribué à la naissance du préjudice subi par la société SIEMENS ; qu'en statuant ainsi, tout en relevant par ailleurs que le contrat de fourniture devait être annulé, comme ayant été signé en raison de manoeuvres dolosives commises par le préposé de la société LOCACCESS, destinées à faire croire à M. X... que le procès-verbal de livraison ne constituait qu'une formalité pour réserver le matériel auprès du fournisseur, ce dont il résulte que la signature de ce document, obtenue grâce à des manoeuvres dolosives, avait été apposée par erreur par M. X... dont la responsabilité ne pouvait, dès lors, être engagée de ce chef, la cour d'appel a omis de tirer les conséquences légales de ses propres constatations et violé l'article 1116 du code civil, ensemble l'article 1147 du même code ;

ALORS D'AUTRE PART QUE dans le cadre d'une opération de crédit-bail, les manoeuvres dolosives du vendeur sont opposables au crédit-bailleur ; qu'en l'espèce, pour condamner M. X... à payer à la société SIEMENS les sommes déboursées par cette dernière pour financer l'acquisition du matériel litigieux, la cour d'appel a relevé que l'exposant a accepté de signer un procès-verbal de livraison du matériel commandé, à la vue duquel la société SIEMENS a débloqué les fonds et payé la société LOCACCESS, et qu'en signant un tel document, M. X... a commis une faute, la légèreté de son comportement ayant contribué à la naissance du préjudice subi par la société SIEMENS ; qu'en statuant ainsi, tout en relevant par ailleurs que le contrat de fourniture devait être annulé, comme ayant été signé en raison de manoeuvres dolosives commises par le préposé de la société LOCACCESS, destinées à faire croire à M. X... que le procès-verbal de livraison ne constituait qu'une formalité pour réserver le matériel auprès du fournisseur, ce dont il résulte que les manoeuvres dolosives imputables à la société venderesse et ayant provoqué la signature du procès-verbal de livraison étaient opposables à la société de crédit-bail qui, partant, ne pouvait réclamer au preneur la réparation du préjudice subi du fait du déblocage des fonds, la cour d'appel a omis de tirer les conséquences légales de ses propres constatations et violé l'article 1116 du code civil, ensemble l'article L 313-7 du code monétaire et financier ;

ALORS, SUBSIDIAIREMENT, DE TROISIEME PART, QU'en relevant, pour condamner M. X... à rembourser à la société SIEMENS l'intégralité des fonds débloqués pour régler la société venderesse, qu'aucun manquement ne peut être reproché au crédit-bailleur, qui n'a débloqué les fonds qu'au vu du procès-verbal de livraison signé par M. X... et qui n'était pas tenue de procéder à d'autres vérifications avant de procéder au paiement, sans répondre au chef péremptoire des conclusions d'appel de l'exposant qui faisait valoir (pages 26 et 27) que la société SIEMENS avait commis une faute en acceptant de régler la société venderesse sur la foi d'un procès-verbal de livraison établi quatre jours avant le contrat de crédit-bail et qui, comme tel, ne pouvait démontrer à lui seul l'engagement ferme et définitif du preneur, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 16-15542
Date de la décision : 27/09/2017
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Chambéry, 19 janvier 2016


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 27 sep. 2017, pourvoi n°16-15542


Composition du Tribunal
Président : M. Rémery (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Bouzidi et Bouhanna, SCP Ohl et Vexliard

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2017:16.15542
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