LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en sa troisième branche :
Vu l'obligation pour le juge de ne pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'un jugement a prononcé le divorce de Mme X... et de M. Y... ;
Attendu que, pour rejeter la demande de l'épouse en paiement d'une prestation compensatoire, l'arrêt retient que le mari a déclaré un revenu pour 2013 de l'ordre de 300 000 francs CFP ;
Qu'en statuant ainsi, alors que la déclaration sur l'honneur de M. Y... faisait état de revenus au titre des salaires d'une somme de 3 560 000 francs CFP et au titre des revenus fonciers d'une autre de 999 578 francs CFP, la cour d'appel, qui a dénaturé ce document par omission, a violé le principe susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du moyen :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il rejette la demande de Mme X... en paiement d'une prestation compensatoire, l'arrêt rendu le 30 octobre 2014, entre les parties, par la cour d'appel de Nouméa ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Nouméa, autrement composée ;
Condamne M. Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, le condamne à payer à Mme X... la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept septembre deux mille dix-sept.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Potier de La Varde, Buk-Lament et Robillot, avocat aux Conseils, pour Mme X...
Mme X... fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué de l'avoir déboutée de sa demande au titre de la prestation compensatoire ;
AUX MOTIFS QU'aux termes de l'article 270 du code civil l'un des époux peut être tenu de verser à l'autre une prestation destinée à compenser, autant que possible, la disparité que la rupture du mariage crée dans les conditions de vie respective ; que cette prestation compensatoire est, aux termes de l'article 271, fixée selon les besoins de l'époux à qui elle est versée et les ressources de l'autre en tenant compte de la situation au moment du divorce et de l'évolution de celle-ci dans un avenir prévisible ; que le juge prend en considération notamment - la durée du mariage, - l'âge et l'état de santé des époux, - leur qualification et leur situation professionnelle, - les conséquences des choix professionnels faits par l'un des époux pendant la vie commune pour l'éducation des enfants et du temps qu'il faudra encore y consacrer ou pour favoriser la carrière de son conjoint au détriment de la sienne, - le patrimoine estimé ou prévisible des époux, tant en capital qu'en revenu, après la liquidation du régime matrimonial, - leurs droits existants et prévisibles, - leur situation respective en matière de pensions de retraite ; qu'en l'espèce, il résulte des pièces produites que : - la vie commune n'a duré que 17 ans ; - que les enfants sont nés bien avant le mariage et qu'il n'est pas justifié que leur éducation ait eu un impact au détriment de la carrière de l'un des époux ; - que les époux ont des problèmes de santé dont rien ne vient toutefois établir une influence certaine sur l'emploi et la pérennité des ressources ; - que Mme X... est fonctionnaire avec un revenu de l'ordre de 300 000 F CFP et a la certitude d'une retraite ; - que M. Y..., artisan garagiste, a déclaré un revenu 2013 du même ordre ; - que tant M. Y... que Mme X... disposent de biens communs qu'ils vont se partager et dont la valeur totale, avec le renchérissement du prix des terrains, dépasse d'évidence les 50 millions F. CFP ; - que les valeurs des biens propres de chaque époux, au demeurant discutées, ne sont pas d'une importance suffisante pour influencer sérieusement l'analyse des conditions de vie respectives ; qu'en l'état de ces données, la cour considère qu'il n'est pas établi que la rupture du mariage va créer une disparité dans les conditions de vie respectives des époux et qu'en conséquence, aucune prestation compensatoire n'est due par M. Y... ;
1./ ALORS QUE le juge doit prendre en considération, pour caractériser la disparité que la rupture du mariage crée dans les conditions de vie respectives des époux, l'ensemble du patrimoine de ces derniers, après la liquidation du régime matrimonial, y compris la valeur des biens propres dont chacun est titulaire ; que dès lors, en se bornant à énoncer, pour considérer qu'il n'existait pas de disparité dans les conditions de vie respectives des parties justifiant l'attribution d'une prestation compensatoire, que la valeur des biens propres de chaque époux n'est pas d'une importance suffisante pour influencer sérieusement les conditions de vie des parties, sans analyser la consistance de ces biens, ni préciser quelle était leur valeur, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 270 et 271 du code civil ;
2./ ALORS QUE le juge doit prendre en considération, pour caractériser la disparité que la rupture du mariage crée dans les conditions de vie respectives des époux, l'ensemble des ressources de l'époux débiteur au moment du divorce et dans un avenir prévisible ; que dès lors, en se bornant à tenir compte des revenus et du patrimoine actuels de M. Y... alors âgé de 58 ans, sans rechercher, ainsi qu'elle y était pourtant invitée, quels seraient ses droits et ses ressources au moment de sa retraite, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 271 du code civil ;
3./ ALORS QU'il résultait de la déclaration sur l'honneur de M. Y... qu'il disposait de traitements annuels de 3 650 000 F CFP et de revenus fonciers annuels de 999 578 F. CFP, soit un revenu mensuel de l'ordre de 390 000 F. CFP ; que dès lors, en énonçant que M. Y... avait déclaré un revenu mensuel de l'ordre de 300 000 F CFP, ce qui correspondait à ses seuls revenus professionnels et ne tenait pas compte de ses revenus fonciers, la cour d'appel a dénaturé cette déclaration, en violation de l'article 1134 du code civil ;
4./ ALORS QUE, pour caractériser la disparité que la rupture du mariage crée dans les conditions de vie respectives des époux, le juge doit procéder à une évaluation au moins sommaire des besoins des époux ; que dès lors, en se bornant à énoncer, pour considérer qu'il n'existait pas de disparité dans les conditions de vie respectives des parties justifiant l'attribution d'une prestation compensatoire, qu'ils avaient chacun un revenu mensuel de l'ordre de 300 000 F. CFP, qu'ils disposaient de biens communs dont la valeur totale dépasserait les 50 millions de F. CFP et que la valeur des biens propres de chaque époux n'était pas d'une importance suffisante pour influencer sérieusement les conditions de vie des parties, sans procéder à une évaluation, même sommaire, de leurs besoins et charges, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 270 et 271 du code civil.