LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Lyon, 7 mai 2015), rendu sur renvoi après cassation (chambre commerciale, financière et économique, 1er avril 2014, pourvoi n° R13-16.902) que la société Samse a tiré une lettre de change sur la société ECB entreprise X... bâtiment, qui l'a acceptée ; que M. X..., gérant de celle-ci, a avalisé cette lettre de change ; que la société Samse a assigné M. X... en paiement ;
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de le condamner à payer une certaine somme à la société Samse , en sa qualité d'avaliste du tiré accepteur, alors, selon le moyen :
1°/ que la lettre de change tirée sur un rapport fondamental inexistant constitue un effet de complaisance, entaché de nullité pour défaut de cause ; que la nullité d'une lettre de change de complaisance emporte la nullité de l'aval consenti en garantie de cet effet de commerce ; qu'en l'espèce, la cour d'appel, après avoir pourtant retenu que la « traite litigieuse […] est, certes, une traite de complaisance destinée à garantir le cautionnement solidaire donné par le dirigeant social », a cependant considéré qu'elle n'était « pas un acte nul », et que, dès lors, « l'aval donné par Thierry X... n'est pas nul », après avoir retenu qu'il n'existe pas de nullité sans texte ; qu'en se prononçant ainsi, tout en ayant constaté que l'effet de commerce litigieux était un effet de complaisance, ce qui l'entachait de nullité pour défaut de cause, la cour d'appel a violé les articles 1131 du code civil et L. 511-7 et L. 511-21 du code de commerce ;
2°/ qu'il n'y a pas provision si la dette dont le tiré est tenu envers le tireur est inférieure à la somme portée sur l'effet ; que l'avaliste, qui n'est tenu que dans la même mesure que le tiré, peut opposer au tireur demeuré porteur de l'effet l'absence de provision ; qu'en l'espèce, la cour d'appel, après avoir rappelé que la lettre de change portait sur un montant de 25 000 euros, a relevé qu'au « moment de l'émission la société ECB n'était pas débitrice » mais qu'il était « bien justifié qu'elle l'est devenue au fil des relations contractuelles à concurrence de 18.142,70 euros » ; qu'elle a condamné M. X..., au titre de l'aval qu'il avait consenti, à payer à la société Samse la somme de 18 142,70 euros ; qu'ayant pourtant constaté que la provision était inférieure à la somme portée sur l'effet à l'échéance, ce dont il résultait l'absence de provision de la lettre de change, et dès lors l'absence d'engagement de l'avaliste, la cour d'appel a violé les articles L. 511-7 et L. 511-12 du code de commerce ;
3°/ que la reconduction tacite d'un contrat à durée déterminée donne naissance à nouveau contrat, lequel est soumis aux lois en vigueur à la date de la reconduction ; qu'en l'espèce, M. X... faisait valoir que le cautionnement consenti le 1er décembre 2003 au bénéfice de la société Samse était un cautionnement à durée déterminée avec reconduction tacite de trois mois en trois mois ; qu'il en déduisait que cet engagement de caution s'était trouvé soumis, à compter de leur entrée en vigueur, le 5 février 2004, aux exigences des articles L. 341-2 et L. 341-3 du code de la consommation tels qu'issus d'une loi du 1er août 2003, et devait donc comporter, à peine de nullité, une mention manuscrite de M. X... ; que, pour considérer que le cautionnement du 1er décembre 2003 n'était pas nul, la cour d'appel a énoncé que « l'écrit qui lui est opposé, s'il est imparfait, est complété par l'élément extrinsèque tiré de sa qualité de dirigeant qui avait une parfaite connaissance des engagements de la société cautionnée et une parfaite conscience de l'étendue de son engagement de caution » ; qu'en se prononçant ainsi, par des motifs impropres à caractériser la validité du cautionnement, et sans rechercher, comme elle y était invitée, si ce cautionnement, en ce qu'il s'était renouvelé par tacite reconduction, se trouvait soumis depuis le 5 février 2004 à l'exigence d'une mention manuscrite de M. X..., personne physique, laquelle exigence n'avait pas été satisfaite, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 341-2 du code de la consommation ;
4°/ que le juge ne peut soulever un moyen d'office sans inviter au préalable les parties à présenter leurs observations ; qu'en l'espèce, aucune des parties n'avait soulevé un moyen selon lequel le cautionnement consenti le 1er décembre 2003 aurait été « imparfait » mais aurait constitué un commencement de preuve par écrit complété par un élément extrinsèque tiré de la qualité de dirigeant de M. X... ; qu'en retenant la preuve de l'engagement de caution sur ce fondement, qui n'était invoqué par aucune des parties, et sans les inviter au préalable à présenter leurs observations sur ce point, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile et le principe de la contradiction ;
Mais attendu qu'ayant constaté que le tireur avait, à l'échéance de la lettre de change, réclamé le solde restant dû de l'effet, ce dont il ne pouvait résulter un défaut de provision, la cour d'appel a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision ; que le moyen, inopérant en sa première, troisième et quatrième branches qui critiquent des motifs surabondants, n'est pas fondé pour le surplus ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et le condamne à payer à la société Samse la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt septembre deux mille dix-sept.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, avocat aux Conseils, pour M. X....
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt confirmatif attaqué, d'avoir condamné M. Thierry X..., en sa qualité d'avaliste du tiré accepteur, à payer à la société Samse la somme de 18.142,70 € ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE vu les articles L. 511-7, alinéa 4, et L. 511-21, alinéa 7, du code de commerce ; qu'il résulte de la combinaison de ces textes que l'avaliste d'une lettre de change, tenu de la même manière que celui qu'il garantit, peut se voir opposer la présomption de provision qui s'attache à l'acceptation ; que pour combattre cette présomption de provision qui s'attache à l'acceptation ; que pour combattre cette présomption, il lui incombe, comme au tiré accepteur, d'établir le défaut de provision ; qu'en l'espèce, le défaut de provision n'est pas établi par Thierry X... qui s'était engagé à garantir le paiement des dettes dues à la Samse par la société qu'il dirigeait en risquant un engagement de caution et une lettre de change comme avaliste ; que, dans la mesure où il n'existe pas de nullité sans texte et où la traite litigieuse qui est, certes, une traite de complaisance destinée à garantir le cautionnement solidaire donné par le dirigeant social, n'est pas un acte nul, l'aval donné par Thierry X... n'est pas nul ; qu'en effet, le tireur et le bénéficiaire de cette lettre de change sont une seule et même personne, la société Samse à l'égard de laquelle Thierry X... s'est engagé à garantir solidairement les dettes futures de la société ECB dont il était le dirigeant. Il n'y a ni fraude ni absence de rapport fondamental lors de l'émission de la traite, la présomption de l'article 511-7 alinéa 4 du code de commerce n'ayant aucune vocation à s'appliquer en l'espèce ; que s'il est vrai qu'au moment de l'émission la société ECB n'était pas débitrice, il est bien justifié qu'elle l'est devenue au fil des relations contractuelles à concurrence de 18 142,70 euros comme le premier juge l'a admis ; qu'en effet, contrairement à ce que Thierry X... soutient, à titre subsidiaire, dans ses conclusions d'appel, le cautionnement donné le 1er décembre 2003 n'est pas nul dans la mesure où l'écrit qui lui est opposé, s'il est imparfait, est complété par l'élément extrinsèque tiré de sa qualité de dirigeant qui avait une parfaite connaissance des engagements de la société cautionnée et une parfaite conscience de l'étendue de son engagement de caution ; que la confirmation de la décision du 14 décembre 2011 s'impose en ce qu'elle condamne Thierry X... à payer la somme principale de 18 142,70 euros avec intérêts au taux légal à compter du 02 juillet 2010 et avec capitalisation de l'article 1154 du code civil (arrêt, p.
ET AUX MOTIFS ADOPTÉS QUE la lettre de change émise en date du 29 avril 2009 est bien conforme à l'article L. 511-1 du code de commerce ; que M. X... l'a bien avalisée en tant que gérant de la société ECB ; […] ;
qu'en conséquence le tribunal condamnera M. X... en sa qualité d'avaliste du tiré accepteur, à payer à la société Samse la somme de 18.142,70 € outre intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 2 juillet 2010 (jugement, p. 3 dernier § et p. 4 § 1).
1°) ALORS QUE la lettre de change tirée sur un rapport fondamental inexistant constitue un effet de complaisance, entaché de nullité pour défaut de cause ; que la nullité d'une lettre de change de complaisance emporte la nullité de l'aval consenti en garantie de cet effet de commerce ; qu'en l'espèce, la cour d'appel, après avoir pourtant retenu que la « traite litigieuse […] est, certes, une traite de complaisance destinée à garantir le cautionnement solidaire donné par le dirigeant social , a cependant considéré qu'elle n'était « pas un acte nul », et que, dès lors, « l'aval donné par Thierry X... n'est pas nul », après avoir retenu qu'il n'existe pas de nullité sans texte (arrêt, p. 4 § 8) ; qu'en se prononçant ainsi, tout en ayant constaté que l'effet de commerce litigieux était un effet de complaisance, ce qui l'entachait de nullité pour défaut de cause, la cour d'appel a violé les articles 1131 du code civil et L. 511-7 et L. 511-21 du code de commerce ;
2°) ALORS QUE, SUBSIDIAIREMENT, il n'y a pas provision si la dette dont le tiré est tenu envers le tireur est inférieure à la somme portée sur l'effet ;
que l'avaliste, qui n'est tenu que dans la même mesure que le tiré, peut opposer au tireur demeuré porteur de l'effet l'absence de provision ; qu'en l'espèce, la cour d'appel, après avoir rappelé que la lettre de change portait sur un montant de 25.000 € (arrêt, p. 3 dernier §), a relevé qu'au « moment de l'émission la société ECB n'était pas débitrice » mais qu'il était « bien justifié qu'elle l'est devenue au fil des relations contractuelles à concurrence de 18.142,70 € » (arrêt, p. 4 § 8) ; qu'elle a condamné M. X..., au titre de l'aval qu'il avait consenti, à payer à la société Samse la somme de 18.142,70 € ; qu'ayant pourtant constaté que la provision était inférieure à la somme portée sur l'effet à l'échéance, ce dont il résultait l'absence de provision de la lettre de change, et dès lors l'absence d'engagement de l'avaliste, la cour d'appel a violé les articles L. 511-7 et L. 511-12 du code de commerce ;
3°) ALORS QUE, À TITRE INFINIMENT SUBSIDIAIRE, la reconduction tacite d'un contrat à durée déterminée donne naissance à nouveau contrat, lequel est soumis aux lois en vigueur à la date de la reconduction ; qu'en l'espèce, M. X... faisait valoir que le cautionnement consenti le 1er décembre 2003 au bénéfice de la société Samse était un cautionnement à durée déterminée avec reconduction tacite de trois mois en trois mois ; qu'il en déduisait que cet engagement de caution s'était trouvé soumis, à compter de leur entrée en vigueur, le 5 février 2004, aux exigences des articles L. 341-2 et L. 341-3 du code de la consommation tels qu'issus d'une loi du 1er août 2003, et devait donc comporter, à peine de nullité, une mention manuscrite de M. X... ; que, pour considérer que le cautionnement du 1er décembre 2003 n'était pas nul, la cour d'appel a énoncé que « l'écrit qui lui est opposé, s'il est imparfait, est complété par l'élément extrinsèque tiré de sa qualité de dirigeant qui avait une parfaite connaissance des engagements de la société cautionnée et une parfaite conscience de l'étendue de son engagement de caution » (arrêt, p. 4 § 9) ; qu'en se prononçant ainsi, par des motifs impropres à caractériser la validité du cautionnement, et sans rechercher, comme elle y était invitée, si ce cautionnement, en ce qu'il s'était renouvelé par tacite reconduction, se trouvait soumis depuis le 5 février 2004 à l'exigence d'une mention manuscrite de M. X..., personne physique, laquelle exigence n'avait pas été satisfaite, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 341-2 du code de la consommation ;
4°) ALORS QUE, EN TOUTE HYPOTHÈSE, le juge ne peut soulever un moyen d'office sans inviter au préalable les parties à présenter leurs observations ; qu'en l'espèce, aucune des parties n'avait soulevé un moyen selon lequel le cautionnement consenti le 1er décembre 2003 aurait été « imparfait » mais aurait constitué un commencement de preuve par écrit complété par un élément extrinsèque tiré de la qualité de dirigeant de M. X... ; qu'en retenant la preuve de l'engagement de caution sur ce fondement, qui n'était invoqué par aucune des parties, et sans les inviter au préalable à présenter leurs observations sur ce point, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile et le principe de la contradiction.