La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

14/09/2017 | FRANCE | N°16-21329

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 14 septembre 2017, 16-21329


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu l'article L. 442-9 du code de l'urbanisme, ensemble l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 27 mai 2016), que M. et Mme X... ont établi un projet de division du lot de lotissement dont ils sont propriétaires en trois lots ; qu'ils ont autorisé M. Y...à déposer une demande de permis de construire une maison sur deux des lots ; que le permis a été déli

vré le 12 novembre 2012 ; que, soutenant que la construction projetée contrevenai...

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu l'article L. 442-9 du code de l'urbanisme, ensemble l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 27 mai 2016), que M. et Mme X... ont établi un projet de division du lot de lotissement dont ils sont propriétaires en trois lots ; qu'ils ont autorisé M. Y...à déposer une demande de permis de construire une maison sur deux des lots ; que le permis a été délivré le 12 novembre 2012 ; que, soutenant que la construction projetée contrevenait au cahier des charges du lotissement quant à la superficie minimale de chaque lot et à son affectation, M. et Mme Z..., colotis, ont assigné M. et Mme X... et M. Y...aux fins de faire interdire la construction ;

Attendu que, pour rejeter la demande, l'arrêt retient qu'en application de l'article L. 442-9 du code de l'urbanisme, les règles d'urbanisme contenues dans les documents approuvés d'un lotissement deviennent caduques au terme de dix années à compter de la délivrance de l'autorisation de lotir si, à cette date, le lotissement est, comme en l'espèce, couvert par un plan local d'urbanisme, que le cahier des charges a été annexé à l'arrêté préfectoral du 28 septembre 1968 approuvant le lotissement et qu'il s'est écoulé plus de dix ans après cette autorisation sans qu'une majorité de colotis, calculée comme il est dit à l'article L. 442-10, ait demandé le maintien de ces règles de sorte que les règles d'urbanisme contenues dans le cahier des charges sont devenues caduques et que M. et Mme Z...sont mal fondés à exciper de leur violation par M. et Mme X... ;

Qu'en statuant ainsi, alors que le cahier des charges d'un lotissement, quelle que soit sa date, approuvé ou non, constitue un document contractuel dont les clauses engagent les colotis entre eux pour toutes les stipulations qui y sont contenues, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 27 mai 2016, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;

Condamne M. et Mme X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de M. et Mme X... et les condamne à payer la somme de 3 000 euros à M. et Mme Z...;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze septembre deux mille dix-sept.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat aux Conseils, pour M. et Mme Z....

Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'AVOIR débouté monsieur et madame Z...de toutes leurs demandes ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE « Monsieur Thierry X... et Madame Catherine A...épouse X... sont propriétaires, au sein du lotissement Domaine du Roussay à Etrechy d'un terrain cadastré Z73 et Z74 ; qu'en 2010, ils ont établi un projet de division de cet ensemble en trois lots distincts ; qu'en 2012 ils ont autorisé Monsieur Mamadou Y...à déposer une demande de permis de construire sur l'ensemble des deux lots, les lots Al et A2 dans le but de réaliser une maison d'habitation, ayant conclu un « compromis de vente » avec ces derniers ayant pour objet un lot provenant de cette division ; que les époux B...ont déposé une demande de permis de construire qui a été accordé par arrêté du maire d'Etrechy du 12 novembre 2012 ; que les époux Z...sont propriétaires, dans le même lotissement d'un terrain cadastré section ZN n° 75-2, rue du Maréchal de Lattre de Tassigny sur lequel est construit une maison individuelle ; que les époux Z..., soutenant que ce projet de construction contreviendrait à certaines règles du cahier des charges du lotissement annexé à l'arrêté du 28 septembre 1968 du préfet approuvant le lotissement, publié à la conservation des hypothèques le 20 mai 1969 ; mais qu'il ressort des dispositions de l'article L442-9 du code de l'urbanisme que : " Les règles d'urbanisme contenues dans les documents approuvés d'un lotissement deviennent caduques au terme de dix années à compter de la délivrance de l'autorisation de lotir si, à cette date, le lotissement est couvert par un plan local d'urbanisme ou un document d'urbanisme en tenant lieu. Toutefois, lorsqu'une majorité de colotis, calculée comme il est dit à l'article L. 44240, a demandé le maintien de ces règles, elles ne cessent de s'appliquer qu'après décision expresse de l'autorité compétente prise après enquête publique " ; qu'en l'espèce, les époux Z..., au soutien de leurs demandes, excipent de la violation par les époux X... de règles d'urbanisme contenues dans le cahier des charges du lotissement litigieux publié à la conservation des hypothèques en 1969, l'autorisation de lotir ayant été délivrée par arrêté du 28 septembre 1968 du préfet ; qu'il s'est ainsi écoulé plus de 10 ans après cette autorisation sans qu'une majorité de colotis, calculée comme il est dit à l'article L. 442-10, ait demandé le maintien de ces règles ; qu'il s'en déduit, en application des dispositions susvisées, que les règles d'urbanisme contenues dans le cahier des charges litigieux sont devenues caduques et qu'ainsi les époux Z...sont mal fondés à exciper de leur violation par les époux X... ; qu'au regard de ces éléments, et des motifs pertinents et non contraires des premiers juges, que la cour adopte, il y a lieu de confirmer le jugement entrepris et de rejeter toutes autres demandes » ;

ET AUX MOTIFS ADOPTES DANS LA MESURE OU ILS NE SONT PAS CONTRAIRES AUX SIENS, QUE « l'article L. 442-9 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction issue de la loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010 est ainsi rédigé : « Les règles d'urbanisme contenues dans les documents approuvés d'un lotissement deviennent caduques au terme de dix années à compter de la délivrance de l'autorisation de lotir si, à cette date, le lotissement est couvert par un plan local d'urbanisme ou un document d'urbanisme en tenant lieu. Toutefois, lorsqu'une majorité de colotis, calculée comme il est dit à L. 442-10, a demandé le maintien de ces règles, elles ne cessent de s'appliquer qu'après décision expresse de l'autorité compétente prise après enquête publique réalisée conformément au chapitre III du titre II du livre ler du code de l'environnement. Les dispositions du présent article ne remettent pas en cause les droits et obligations régissant les rapports entre colotis définis dans le cahier des charges du lotissement, ni le mode de gestion des parties communes. Les dispositions du présent article ne sont pas applicables aux terrains lotis en vue de la création de jardins mentionnés à l'article L, 111-5-4. ». Ce même article dans sa version issue de la loi n° 2014-366 du 24 mars 2014, immédiatement applicable est ainsi libellé : « Les règles d'urbanisme contenues dans les documents du lotissement, notamment le règlement, le cahier des charges s'il a été approuvé ou les clauses de nature réglementaire du cahier des charges s'il n'a pas été approuvé, deviennent caduques au terme de dix années à compter de la délivrance de l'autorisation de lotir si, à cette date, le lotissement est couvert par un plan local d'urbanisme ou un document d'urbanisme en tenant lieu. De même, lorsqu'une majorité de colotis a demandé le maintien de ces règles, elles cessent de s'appliquer immédiatement si le lotissement est couvert par un plan local d'urbanisme ou un document d'urbanisme en tenant lieu, dès l'entrée en vigueur de la bio n° 2014-366 du 24 mars 2014 pour l'accès au logement et un urbanisme rénové. Les dispositions du présent article ne remettent pas en cause les droits et obligations régissant les rapports entre colotis définis dans le cahier des charges du lotissement, ni le mode de gestion des parties communes. Les dispositions du présent article ne sont pas applicables aux terrains lotis en vue de la création de jardins mentionnés à l'article L. 111-5-4. Toute disposition non réglementaire ayant pour objet ou pour effet d'interdire ou de restreindre le droit de construire ou encore d'affecter l'usage ou la destination de l'immeuble, contenue dans un cahier des charges non approuvé d'un lotissement, cesse de produire ses effets dans le délai de cinq ans à compter de la promulgation de la loi n° 2014-366 du 24 mars 2014 précitée si ce cahier des charges n'a pas fait l'objet, avant l'expiration de ce délai, d'une publication au bureau des hypothèques ou au livre foncier. La publication au bureau des hypothèques ou au livre foncier est décidée par les colotis conformément à la majorité définie à l'article L. 442-10 ; les modalités de la publication font l'objet d'un décret. La publication du cahier des charges ne fait pas obstacle à l'application du même article L. 442-10. ». Il est clair que par la modification apportée par la loi du 24 mars 2014, dite loi ALUR, à l'article L. 442-9 du Code de l'urbanisme, le législateur a souhaité réduire, voire supprimer, la portée et les effets de toutes dispositions des cahiers des charges des lotissements à caractère réglementaire se rapportant à l'urbanisme. Ainsi, dès lors qu'une règle contenue dans un cahier des charges approuvé présente le caractère de règle d'urbanisme, elle devient caduque au terme de dix années à compter de la délivrance de l'autorisation de lotir si, à cette date, le lotissement est couvert par un plan local d'urbanisme ou un document d'urbanisme en tenant lieu. Par ailleurs, le fait que ces règles soient rappelées dans les actes de vente ne saurait leur conférer un caractère contractuel. En l'espèce, le cahier des charges concerné a été annexé à l'arrêté du préfet en date du 28 septembre 1968 approuvant le lotissement et a été déposé chez un notaire et publié à la conservation des hypothèques le 20 mai 1969, volume 3263 n° 5. Il est également établi que la commune concernée est dotée d'un plan local d'urbanisme Les époux Z...soutiennent que le projet de Monsieur Mamadou Y...ne respecte pas l'article 2 du cahier des charges en ce qui concerne la superficie minimale de chaque lot et le nombre des lots après éventuelle subdivision mais aussi l'article 3 pour l'affectation de certaines parties du lotissement. Ils soutiennent également que la maison qu'envisage d'implanter Monsieur Mamadou Y...aurait une hauteur qui dépasserait les préconisations du cahier des charges. De toute évidence, les infractions au cahier des charges que, selon les époux Z..., le projet de construction constituerait, concernent des règles d'urbanisme que la nouvelle rédaction de l'article L. 442-9 du Code de l'urbanisme rend caduques au terme d'un délai de dix ans. Il n'est même pas soutenu qu'une majorité de colotis auraient demandé le maintien de ces règles conformément à l'article L. 442-9 dans sa rédaction antérieure à la loi ALUR. Les règles d'urbanisme contenues dans le cahier des charges du lotissement sont donc caduques et les époux Z...doivent être déboutés de leurs demandes basées sur ce fondement » ;

ALORS 1°) QUE les clauses du cahier des charges d'un lotissement, quelle que soit sa date, approuvé ou non, revêtent un caractère contractuel et engagent les colotis entre eux pour toutes les stipulations qui y sont contenues, notamment celles qui fixent la superficie minimale des lots et l'affectation de certaines parties des lots ; qu'ayant constaté que monsieur et madame Z...invoquaient la violation, par les époux X..., des articles 2 et 3 du cahier des charges relatifs à la superficie minimale de chaque lot et à l'affectation de certaines parties du lotissement, en jugeant qu'il s'agissait de règles d'urbanisme devenues caduques parce que le cahier des charges a été annexé à l'arrêté préfectoral du 28 septembre 1968, que ce dernier a donné l'autorisation de lotir et qu'il s'est depuis lors écoulé plus dix ans sans qu'une majorité de colotis ait demandé le maintien des règles d'urbanisme contenues dans le cahier des charges, la cour d'appel a violé les articles L. 442-9 du code de l'urbanisme et 1134 (ancien) du code civil ;

ALORS 2°) QU'à supposer qu'elle ait considéré que les clauses du cahier des charges invoquées par monsieur et madame Z...aient constitué la seule reproduction de documents d'urbanisme ou du règlement de lotissement sans valeur contractuelle en application de l'article L. 115-1 (ancien L. 111-5) du code de l'urbanisme, en statuant de la sorte, sans rechercher, comme elle y était invitée (conclusions de monsieur et madame Z..., p. 5), si la volonté des parties de s'obliger à respecter les clauses en question ne résultait pas de l'article 1er du cahier des charges selon lequel le présent cahier des charges a pour objet de fixer les règles d'intérêt privé et tout acquéreur de lot est tenu d'en respecter les conditions, ainsi que de l'article 10 du cahier des charges imposant l'agrément des architectes du lotissement avant tous travaux de construction pour assurer le respect des clauses du cahier des charges, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 442-9 et L. 115-1 (ancien L. 111-5) du code de l'urbanisme et 1134 (ancien) du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 16-21329
Date de la décision : 14/09/2017
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 27 mai 2016


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 14 sep. 2017, pourvoi n°16-21329


Composition du Tribunal
Président : M. Chauvin (président)
Avocat(s) : SCP Didier et Pinet, SCP Thouin-Palat et Boucard

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2017:16.21329
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award