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14/09/2017 | FRANCE | N°16-15872

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 14 septembre 2017, 16-15872


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, ci-après annexé :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Poitiers, 19 février 2016), que, le 9 novembre 2010, Mme X... a promis de vendre un immeuble occupé par deux familles à M. Y... et Mme Z... ; que la vente a été réitérée par acte authentique le 15 février 2011 ; que les acquéreurs ont été contraints de reloger une des familles en raison du prononcé de deux arrêtés d'insalubrité successifs ; que les acquéreurs ont assigné la venderesse en paiement de diverses in

demnités ;

Attendu que M. Y... et Mme Z... font grief à l'arrêt de rejeter leurs ...

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, ci-après annexé :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Poitiers, 19 février 2016), que, le 9 novembre 2010, Mme X... a promis de vendre un immeuble occupé par deux familles à M. Y... et Mme Z... ; que la vente a été réitérée par acte authentique le 15 février 2011 ; que les acquéreurs ont été contraints de reloger une des familles en raison du prononcé de deux arrêtés d'insalubrité successifs ; que les acquéreurs ont assigné la venderesse en paiement de diverses indemnités ;

Attendu que M. Y... et Mme Z... font grief à l'arrêt de rejeter leurs demandes ;

Mais attendu qu'ayant retenu, sans dénaturation, que la promesse de vente contenait un accord sur la chose et le prix et ne prévoyait pas, comme élément constitutif du consentement des parties, la réitération par acte notarié et que l'appréciation des charges devait être faite au jour de la promesse de vente et, par une appréciation souveraine des éléments de preuve qui lui était soumis, que la cause de l'insalubrité tenait à la réalisation des travaux engagés à la demande des acquéreurs, la cour d'appel a pu en déduire, sans violation du principe de la contradiction, que leurs demandes d'indemnisation ne pouvaient être accueillies ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. Y... et Mme Z... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de M. Y... et Mme Z... ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze septembre deux mille dix-sept.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Garreau, Bauer-Violas et Feschotte-Desbois, avocat aux Conseils, pour M. Y... et Mme Z...

Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir débouté M. Y... et Mme Z... de toutes leurs demandes, fms et prétentions à l'encontre de Mme X...,

AUX MOTIFS PROPRES QUE

Sur la garantie des charges déclarées

M Y... et Mme Z... soutiennent que Mme X..., en sa qualité de venderesse, n'a pas respecté son obligation de garantir les acquéreurs des charges sur l'objet non déclarées lors de la vente, en application des dispositions de l'article 1626 du code civil ;

Aux termes de l'article 1626 du code civil, "le vendeur est obligé de droit à garantir l'acquéreur de l'éviction qu'il souffre dans la totalité ou partie de l'objet vendu, ou des charges prétendues sur cet objet, et non déclarées lors de la vente" ,

II appartient donc à M. Y... et Mme Z... de démontrer l'existence de charges sur l'immeuble, non déclarées par la venderesse lors de la vente ; Les appelants soutiennent que la présence de M A..., locataire du 2ème étage, ne leur a pas été renseignée lors de la vente, celui-ci n'apparaissant pas dans l'acte notarié en date du 15 février 2011,·

Ils sollicitent le paiement d'une somme totale de 21.075,67 euros en indemnisation des préjudices résultant de la fausse déclaration de Mme X... ;

Selon l'article 1589 du code civil, "la promesse de vente vaut vente, lorsqu'il y a consentement réciproque des deux parties sur la chose elle prix" ,

Le compromis de vente signé entre les parties le 09 novembre 2010, révèle un accord sur la chose et le prix et ne prévoit pas, comme élément constitutif de leur consentement, la réitération par acte notarié ;

En effet, contrairement à ce que soutiennent les appelants, le seul fait pour les parties d'indiquer dans un compromis de vente que le transfert de propriété n'aura lieu qu'au jour de la signature de l'acte authentique, ne peut être assimilé à la volonté des parties de faire de la réitération par acte notarié un élément constitutif de leur consentement, dès lors que celles-ci se sont accordées sur la chose et le prix (3ème Civ, 28 mai 1997);

Dès lors, l'appréciation des charges déclarées par le vendeur doit être faite au jour du compromis de vente et dans la mesure où cette convention mentionne bien la présence des deux locataires, M. B... et M. A..., Mme X... n'a pas manqué à son obligation légale de garantie ;

Sur l'obligation précontractuele d'information

M Y... et Mme Z... invoquent l'existence d'une réticence dolosive de la part de Mme X..., au sens des dispositions de l'article 1116 du code civil ;

La réticence dolosive s 'apprécie au moment de la formation du contrat soit, en l'espèce, pour les motifs exposés plus haut, au jour du compromis de vente;

En conséquence, la présence des deux locataires étant indiquée au compromis de vente, la réticence dolosive de l'intimée n 'est pas caractérisée ,·

Sur la responsabilité contractuelle

Les appelants sollicitent la prise en charge par Mme X... des dépenses consécutives à la procédure d'insalubrité, sur la base de ses obligations contractuelles puisqu'elle s'était engagée dans l'acte notarié du 15 février 20 il à prendre à sa charge les frais résultant d 'une réclamation pour insalubrité dans le cas où sa cause serait antérieure à la vente, ce qui serait le cas selon les appelants ,

Cependant, il résulte d'un rapport réalisé par l'inspecteur de salubrité de la DIREN, à la suite de la procédure menée par le service hygiène publique de la ville de Poitiers en mai 2011, que la réalisation de travaux par des entreprises, sur la demande des acquéreurs, était effectuée sans précaution dans l'immeuble, avec un risque potentiel d'accessibilité au plomb en présence d 'enfants en bas âge, ceux des époux A... ;

C'est sur la base de cette situation qu'a été pris un premier arrêté préfectoral en date du 18 juillet 2011 afin de traiter les désordres ponctuels sources de danger imminent pour la santé et la sécurité des occupants assorti d'une interdiction temporaire d'habiter puis un second arrêté du 14 octobre 2011, constatant également l'insalubrité des lieux ;

En l'absence d'éléments contraires, ces documents mettent en évidence que la cause de l'insalubrité tient à la réalisation des travaux à la demande des acquéreurs, soit postérieurement à la vente de l'immeuble, d'où il suit que la responsabilité contractuelle de Mme X... ne peul être engagée ;

Le jugement entrepris mérite ainsi pleine confirmation,

ET AUX MOTIFS ADOPTÉS QUE

Vu les articles 11-1 7, 1382, 1626 et suivants du code civil, 696 et suivants du code de procédure civile;

Vu l'assignation, les conclusions respectives des parties, les pièces produites et les notes d'audience tenues par le greffier figurant au dossier ;

Mme X... qui était propriétaire d'un immeuble sis ... a signé avec l'agence Gloëser un mandat de vente sans exclusivité portant sur cet immeuble dont la valeur avait été alors fixée à 90.000 euros ;

Au jour de la signature du mandat de vente, il ne peut être sérieusement contesté que l'immeuble était en partie louée au rez-de-chaussée à M. Robert B... et au second étage à M. et Mme A...;

M. Y... et Mme Z... qui étaient des connaissances de Mme X... l'ont informé de leur intention d'acheter son immeuble et celle-ci a consenti, après avoir mis fin au mandat de l'agence, un compromis de gré à gré sous la forme d'un acte authentique signé le 9 novembre 2010 pour un montant de 65.000 euros ;

L'acte de vente a été régularisé en l'étude de Maître C... le 15 février 2011 pour un prix très inférieur indiqué ci-dessus à celui initialement fixé par l'agence, sans aucun doute compte tenu de l'occupation de cet immeuble par des locataires ;

Les acquéreurs, M. Y... et Mme Z..., ont bien postérieurement fait assigner Mme X... au motif qu'elle les aurait volontairement trompés en ne les informant pas que M. et Mme A... étaient locataires lors de la réitération du compromis de vente, ce qui leur aurait causé nombre de préjudices prenant pour partie leur source dans un retard des travaux et dans l'obligation de reloger M. et Mme A... suite à un arrêté préfectoral d'insalubrité ;

Ils estiment que la venderesse avait l'obligation légale de garantir la protection paisible de la chose vendue, notamment en indiquant aux éventuels acheteurs l'existence d'un bail et que cette fausse information constitue, à titre subsidiaire, un manquement à l'obligation précontractuelle d'information et qu'elle a au surplus engagé sa responsabilité contractuelle en ne prenant en charge les frais liés à une procédure d'insalubrité ;

Le tribunal qui s'est livré à un examen attentif des pièces du dossier en cours de délibéré ne peut que constater à l'examen attentif du déroulement de la procédure d'acquisition que lors de celle-ci, M. Y... et Mme Z... avaient bien eu connaissance, dans le cadre du compromis, date à laquelle il y a lieu d'apprécier les charges déclarées, que deux appartements sur trois que comprend l'immeuble étaient loués ;

Aucun élément ne justifie que Mme X... ail déclaré lors de la signature de l'acte notarié que les époux A... avaient mis fin à leur contrat de location; C'est seulement un simple avis, dont même la preuve n'est pas rapportée au dossier, que ceux-ci envisageaient de quitter les lieux, qui a entrai né dans l'acte authentique l'absence de mention de celle occupation ;

C'était donc au notaire qu'il appartenait de s'assurer de la véracité de l'acte qu'il était amené à rédiger et de prendre toutes les informations utiles dans cet objectif- notamment de vérifier si un congé avait été délivré par le locataire - avant de modifier l'acte ;

Aucun manquement ne peut donc être reproché à Mme X... laquelle, contrairement à ce qu'indiquent les demandeurs n'étaient absolument pas assistée de son notaire Maître D... lors du projet d'acte antérieurement établi par Maître C... et transmis à Maître D... lequel comportait bien la mention d'une location au second étage ;

Le tribunal ne peut donc que constater que Mme X... n'a en aucun cas caché l'existence de locataires au deuxième étage et la modification le jour de l 'acte authentique résulte de toute évidence d'une initiative qui ne saurait lui être reprochée ;

Il est également reproché par M. Y... et Mme Z... que Mme X... aurait manqué à son obligation précontractuelle d'information ;

Toutefois, les demandeurs ne rapportent aucun élément de preuve au dossier de l'attention dolosive de la venderesse ;

Il est également reproché à Mme X... un manquement dans ses obligations contractuelles relatives à la salubrité de l'immeuble rnis en vente,

Toutefois les acquéreurs ne peuvent valablement indiquer qu'ils ignoraient la situation de celui-ci si l'on regarde attentivement les diverses descriptions figurant en page 13 à 15 de l'acte notarié ;

À titre surabondant il y a lieu de remarquer que si Mme X... a été effectivement poursuivie devant le tribunal correctionnel de Poitiers pour avoir soumis ses locataires à des conditions d'hébergement incompatibles avec la dignité humaine, il y a lieu de remarquer que cette dernière a fait l'objet d'une relaxe : le tribunal correctionnel ayant considéré que si l'immeuble était quelque peu vétuste et nécessitait des travaux, les éléments constitutifs de l'infraction n'étaient pas caractérisés ;

Les acquéreurs ont toujours eu connaissance de la situation de cet immeuble et avait d'ailleurs prévu, à l'examen des pièces versées aux débats, des travaux pour rénover cet immeuble ;

En conséquence, et au titre de la responsabilité contractuelle du vendeur la responsabilité de Mme X... ne saurait être retenue et il n'y a donc pas lieu d'examiner les demandes de préjudices présentés par M. Y... et Mme Z... ;

ALORS QUE le juge ne peut dénaturer ni les termes clairs et précis, ni la portée d'un contrat ; qu'en affirmant que le compromis de vente signé par les parties le 9 novembre 2010 ne prévoyait pas, comme élément constitutif de leur consentement, la réitération par acte notarié, cependant que ce compromis mentionne expressément que « les parties soumettent formellement la réalisation des présentes et le transfert de propriété, au paiement par l'acquéreur, au plus tard au moment de l'acte authentique de vente, de l'intégralité du prix payable comptant et des frais de réalisation » (p. 4 § 3), ce dont il résulte que les parties avaient clairement et précisément manifesté l'intention de faire de la réitération par acte authentique une condition de leur engagement, la cour d'appel, qui a dénaturé la portée du compromis de vente du 9 novembre 2010, a violé l'article 1134 du code civil,

ALORS QUE le juge ne peut dénaturer les termes clairs et précis d'un contrat; qu'en affirmant qu'aucun élément ne démontrait que Mme X... ait déclaré lors de la signature de l'acte notarié de vente du 15 février 20 11, que M. et Mme A... avaient mis fin à leur contrat de location, cependant que cet acte authentique mentionne que « l'entrée en jouissance s'effectuera, ce que l'acquéreur accepte, pour partie, par la perception des loyers, l'appartement du rez-de-chaussée étant loué dans les conditions ci-après précisées, le surplus de l'ensemble immobilier par la prise de possession réelle, ce dernier étant libre de toute location et occupation ainsi que le vendeur le déclare» (p. 3, dernier paragraphe), ce dont il résulte que Mme X... avait expressément déclaré à M. Y... et Mme Z... que l'appartement du deuxième étage de l' immeuble vendu était devenu libre de toute location et occupation depuis la signature du compromis, la cour d'appel, qui a dénaturé les termes clairs et précis de l'acte notarié de vente du 15 février 2011, a violé l'article 1134 du code civil ;

ALORS, EN TOUT ÉTAT DE CAUSE, QUE Je juge est tenu de répondre aux conclusions des parties de nature à influer sur la solution du litige; qu'en omettant de répondre aux conclusions de M. Y... et Mme Z..., aux termes desquelles ceux-ci soutenaient que Mme X... avait manqué à son obligation de bonne foi, en leur dissimulant le fait que M. et Mme A... n'étaient plus à jour du paiement du loyer depuis le mois de janvier 2011, tandis que la délivrance de cette information leur aurait permis de se prévaloir de la défaillance de la condition suspens ive prévue au compromis de vente, qu'aucune charge autre que celles déclarées dans cet acte, pouvant diminuer sensiblement la valeur de l'immeuble ou le rendre impropre à sa destination locative, ne soit révélée avant la réitération par acte authentique, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile,

ALORS QUE le juge doit faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'en se fondant, pour décider que la cause de l'insalubrité de l'immeuble résidait dans les travaux réalisés à la demande de M. Y... et Mme Z..., sur un rapport réalisé par l'inspecteur de salubrité de la DIREN, à la suite de la procédure menée par le service hygiène publique de la ville de Poitiers en mai 2011, dont il ne résulte ni des mentions de l'arrêt attaqué, ni des pièces de la procédure, qu'il ait été communiqué à M. Y... et Mme Z..., la cour d'appel a violé les articles 16 et 132 du code de procédure civile,

ALORS, EN TOUTE HYPOTHÈSE, QUE les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites ; qu'en décidant que la cause de l'insalubrité était postérieure à la vente, pour résider dans les travaux réalisés à la demande de M. Y... et Mme Z..., cependant qu'il résulte de l'arrêté préfectoral du 14 octobre 2011 que l'insalubrité a été constatée en raison du défaut d 'étanchéité de la toiture et du pignon, de la dangerosité de l' installation électrique, du faible niveau de protection contre l'incendie, de l'insuffisance de dispositifs de protection contre la défenestration, de l'insuffisance de la hauteur sous plafond, de l' insuffisance de ventilation, du défaut de solidité des planchers et plafonds, de la dégradation des cloisons et plafonds, de la présence de revêtements dégradés contenant des peintures au plomb, de la vétusté et de l'insuffisance du système de chauffage, et du défaut de production d'eau chaude sanitaire, c'est-à-dire en raison de vices affectant l'immeuble dans sa structure et ses éléments d'équipements, nécessairement antérieurs à la vente, la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 16-15872
Date de la décision : 14/09/2017
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Poitiers, 19 février 2016


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 14 sep. 2017, pourvoi n°16-15872


Composition du Tribunal
Président : M. Chauvin (président)
Avocat(s) : Me Le Prado, SCP Garreau, Bauer-Violas et Feschotte-Desbois

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2017:16.15872
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