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13/09/2017 | FRANCE | N°16-15248

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 13 septembre 2017, 16-15248


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Besançon, 15 décembre 2015), que l'Office national d'information sur les enseignements et les professions (l'Onisep) n'ayant pas renouvelé à son terme le contrat intitulé de courtage publicitaire qui le liait à Mme X..., celle-ci l'a assigné en requalification de ce contrat en contrat d'agence commerciale et en paiement d'une indemnité de rupture ;

Attendu que l'Onisep fait grief à l'arrêt de faire droit à cette demande alors, selon l

e moyen :

1°/ que ne relèvent pas des dispositions relatives à l'agent commer...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Besançon, 15 décembre 2015), que l'Office national d'information sur les enseignements et les professions (l'Onisep) n'ayant pas renouvelé à son terme le contrat intitulé de courtage publicitaire qui le liait à Mme X..., celle-ci l'a assigné en requalification de ce contrat en contrat d'agence commerciale et en paiement d'une indemnité de rupture ;

Attendu que l'Onisep fait grief à l'arrêt de faire droit à cette demande alors, selon le moyen :

1°/ que ne relèvent pas des dispositions relatives à l'agent commercial les agents dont la mission de représentation s'exerce dans le cadre d'activités économiques qui font l'objet, en ce qui concerne cette mission, de dispositions législatives particulières ; que l'intermédiaire qui prospecte des annonceurs potentiels au bénéfice d'un vendeur d'espaces publicitaires et transmet leurs ordres à ce vendeur est assimilé à la régie publicitaire, laquelle relève de la loi n° 93-122 du 29 janvier 1993 qui constitue ainsi des dispositions législatives particulières exclusives de l'application du statut de l'agent commercial ; qu'en jugeant le contraire pour reconnaître à Mme X... un droit à indemnisation du fait de la cessation du contrat de courtage publicitaire qui la liait à l'Onisep, la cour d'appel a violé l'article L. 134-1, alinéa 2, du code de commerce ;

2°/ que la qualité d'agent commercial suppose que la personne ait reçu pour mission de négocier et éventuellement de conclure des contrats de prestations de service au nom et pour le compte du donneur d'ordre et que tous deux aient ainsi une clientèle commune ; que ne peut avoir cette qualité l'intermédiaire qui fait signer des ordres d'insertion par des annonceurs au profit du support donneur d'ordre, sans engager ce dernier qui conserve la faculté de ne pas donner suite aux demandes d'annonces soumises ; qu'en conférant à Mme X... la qualité d'agent commercial dans ses relations avec l'Onisep, pour la seule circonstance que cette dernière avait un pouvoir de négociation avec les annonceurs potentiels, après avoir constaté que l'Onisep conservait toujours la faculté de ne pas donner suite aux demandes d'annonces soumises par Mme X..., demeurant ainsi libre de s'engager ou non, et qu'il facturait ensuite lui-même ces demandes une fois acceptées, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations dont il résultait que Mme X... n'avait pas reçu les pouvoirs lui permettant de bénéficier du statut d'agent commercial, violant ainsi l'article L. 134-1 du code de commerce par fausse application ;

3°/ que la qualité d'agent commercial suppose que la personne ait reçu pour mission de négocier et éventuellement de conclure des contrats de prestation de services au nom et pour le compte du donneur d'ordre et que tous deux aient ainsi une clientèle commune ; qu'en statuant comme elle a fait, sans constater que Mme X... avait reçu la faculté, par le contrat conclu, de créer une clientèle commune avec l'Onisep, la cour d'appel a privé sa décision de lui conférer la qualité d'agent commercial de base légale au regard de l'article L. 134-1 du code de commerce ;

4°/ qu'en statuant comme elle a fait, au motif que Mme X... avait antérieurement conclu avec la délégation régionale de Bourgogne de l'Onisep un contrat d'agent commercial, ce qui était impropre à qualifier la relation entre Mme X... et l'Onisep procédant du contrat distinct conclu entre cette même personne et la délégation régionale de Franche-Comté de l'Onisep le 1er août 2006, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du code civil ;

Mais attendu, en premier lieu, qu'il ne résulte ni de l'arrêt, ni des pièces de la procédure que l'Onisep ait soutenu devant la cour d'appel que le contrat devait être assimilé à un contrat de régie publicitaire ; que le grief est donc nouveau, mélangé de fait et de droit ;

Et attendu, en second lieu, que l'arrêt relève que la qualification du contrat adoptée par les parties ne correspond pas au régime juridique des opérations régies par la loi du 29 janvier 1993 auxquelles elles l'avait soumis, puisque Mme X... n'était pas chargée par des annonceurs d'obtenir des espaces publicitaires auprès de l'Onisep , mais par celui-ci, qui la rémunérait à cette fin, de trouver des annonceurs pour ses publications; qu'il constate qu'ayant eu pour obligation principale de rechercher des annonceurs pour le compte de l'Onisep et de lui soumettre des ordres de publicité consignés dans des bons de commande, sous la réserve du droit de ce dernier de refuser les publicités contraires à sa ligne éditoriale ou nuisibles à sa stratégie commerciale, Mme X..., dont la mission excédait celle d'un courtier, avait reçu mandat de l'Onisep de contracter avec des clients potentiels et pouvait mener sa politique commerciale, accorder des marges de négociation et fixer le montant de remises au mieux des intérêts communs avec l'Onisep; que de ces constatations et appréciations, faisant ressortir que Mme X... disposait d'un mandat permanent pour négocier des ordres de publicité au nom et pour le compte de l'Onisep, et, abstraction faite du motif surabondant critiqué par la quatrième branche, la cour d'appel a exactement déduit que Mme X..., qui avait la qualité d'agent commercial, avait droit à une indemnité de cessation de contrat ;

D'où il suit que le moyen, irrecevable en sa première branche, n'est pas fondé pour le surplus ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne l'Office national d'information sur les enseignements et les professions aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, le condamne à payer à Mme X... la somme de 3 000 euros et rejette sa demande ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du treize septembre deux mille dix-sept.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, avocat aux Conseils, pour l'Office national d'information sur les enseignements et les professions

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir condamné l'Onisep de Franche-Comté à payer à Mme X... la somme de 34.332 euros à titre d'indemnités de fin de contrat ;

Aux motifs qu'aux termes du contrat litigieux, Mme X... s'était vue confier la mission de prospecter et de recueillir la publicité à insérer dans les brochures de l'Onisep puis de soumettre à l'office les ordres recueillis et enfin de lui fournir les éléments nécessaires à l'établissement des factures ; qu'en contrepartie, l'Onisep s'engageait à verser à Mme Claire X... une commission fixée à 35 % du chiffre d'affaires ; que dans un paragraphe liminaire, les parties avaient précisé que le contrat se trouvait soumis aux dispositions de la loi nº 93-122 du 29 janvier 1993 ; qu'elles avaient expressément exclu l'application à leurs relations contractuelles de la loi du 25 juin 1991 relative au statut des agents commerciaux ; que pour apprécier le bien-fondé de la demande formulée par l'appelante, il échet de ne pas s'attacher aux seules qualifications adoptées dans le contrat par les parties mais de rechercher si l'économie générale du contrat conduit à faire une application effective de la législation visée par celui-ci ; que la loi du 29 janvier 1993 fixe le régime juridique de "l'achat" des espaces publicitaires par des annonceurs ; que cette opération consiste pour un annonceur à réserver un emplacement publicitaire sur un support quelconque ; qu'il s'évince des dispositions de cette loi que l'achat d'espaces publicitaires peut intervenir avec ou sans intermédiaire ; que dans la première hypothèse l'opération peut être conduite, entre autres, par un courtier ; qu'aux termes de cette législation, il doit être impérativement passé un contrat de mandat entre le courtier et l'annonceur ; qu'en l'espèce Mme X... avait pour mission de rechercher des annonceurs pour leur proposer des espaces publicitaires dans les brochures de l'Onisep ; que cette convention est donc sans rapport aucun avec le contrat de courtage publicitaire par lequel un annonceur donne mandat à un intermédiaire (un courtier) afin de réserver des espaces publicitaires offerts par des médias institutionnels ou sur des imprimés publicitaires ; que dans le contrat de courtage en publicité, il incombe au mandant (l'annonceur) de rémunérer l'intermédiaire, tandis que dans la convention passée entre Mme X... et l'Onisep, celui-ci avait la charge du paiement de commissions ; ensuite que dans le contrat du 1er août 2006, les parties avaient fait le choix de retenir le terme de "courtier" pour qualifier le statut de Mme Claire X... ; qu'il s'avère dès lors nécessaire de rechercher si, au vu des stipulations contractuelles, cette convention constitue un contrat de courtage de droit commun ; que Mme Claire X... avait pour obligation principale de rechercher des annonceurs pour le compte de l'Onisep et de soumettre à ce dernier des ordres de publicité consignés dans des bons de commande ; qu'il échet toutefois d'ajouter que l'Onisep s'était gardé la possibilité de refuser éventuellement d'insérer des publicités non conformes à sa ligne éditoriale ou considérée comme nuisible à sa stratégie commerciale ; que le processus décrit ci-dessus conduit à considérer que Mme Claire X... avait reçu mandat de l'Onisep pour contracter avec des clients potentiels, sauf refus exprimé a posteriori par le mandant pour les motifs sus-évoqués ; qu'il y a lieu de préciser que le rôle de l'office se limitait ensuite à l'établissement des factures ; que les obligations contractuelles de l'appelante excédaient donc celles d'un simple courtier ; que l'article L. 134-1 du code de commerce dispose : "l'agent commercial est un mandataire qui, à titre de profession indépendante, sans être lié par un contrat de louage de services, est chargé, de façon permanente, de négocier et, éventuellement, de conclure des contrats de vente, d'achat, de location ou de prestation de services, au nom et pour le compte de producteurs, d'industriels, de commerçants ou d'autres agents commerciaux. Il peut être une personne physique ou une personne morale" ; que quand bien même il serait considéré que Mme Claire X... ne disposait pas d'un mandat complet lui permettant de contracter pour le compte de l'Onisep, il conviendrait alors de relever que la conclusion de contrats n'entre pas nécessairement dans la définition légale du mandat de l'agent commercial ; qu'il y a lieu de préciser de surcroît que l'appelante disposait en vertu l'article 7 du contrat du pouvoir de mener "sa politique commerciale, d'accorder des marges de négociation, de fixer le montant des remises au mieux des intérêts en commun avec l'Onisep..."; que ce pouvoir de négociation, qui est étranger au contrat de courtage, caractérise en revanche l'activité d'agent commercial ; qu'il échet enfin d'ajouter que Mme Claire X... avait conclu en 1993 avec l'Onisep de Bourgogne un contrat similaire de par son contenu à celui signé le 1er août 2006 avec la délégation de Franche Comté et que les parties avaient alors placé leurs relations contractuelles sous l'empire de la loi du 25 juin 1991 ; que la rupture de ce contrat avait donné lieu à un protocole d'accord transactionnel portant fixation d'une indemnité de fin de contrat au bénéfice de Mme Claire X... ; qu'aux termes de l'article L. 134-12 du code de commerce, "en cas de cessation de ses relations avec le mandant, l'agent commercial a droit à une indemnité compensatrice en réparation du préjudice subi" ; que Mme Claire X... réclame une indemnité de 32.332 € calculée sur la base du portefeuille de clientèle qu'elle prétend avoir développé dans le cadre de ses relations contractuelles avec l'Onisep de Franche Comté ; que celui-ci s'oppose à cette demande en faisant valoir, d'une part, que la clientèle dont s'agit a été constituée alors que l'appelante était salariée de la Société L.P.L. Communication, et d'autre part, que cette société n'avait pas pu lui transmettre ledit fichier clientèle dès lors qu'elle avait été placée par la suite en redressement judiciaire ; qu'elle en conclut que Mme Claire X... s'est en réalité "appropriée" le fichier de cette société ; mais que l'indemnité prévue par l'article L. 134-12 du code de commerce n'est pas une indemnité pour perte de clientèle ; qu'elle a vocation à compenser la perte de commissions liée à l'exploitation d'une clientèle appartenant à autrui ; que Mme Claire X... produit aux débats à l'appui de ses prétentions un état des commissions qu'elle a perçues au cours des années 2008 et 2009 ; que les sommes figurant sur cet état ne sont pas contestées dans leurs montants par l'intimé ; qu'au vu de la moyenne annuelle perçue au titre de ces deux années il sera alloué à l'appelante, au titre de l'indemnité de fin de contrat, la somme par elle sollicitée (arrêt pp. 3 à 5)

1°) Alors que ne relèvent pas des dispositions relatives à l'agent commercial les agents dont la mission de représentation s'exerce dans le cadre d'activités économiques qui font l'objet, en ce qui concerne cette mission, de dispositions législatives particulières ; que l'intermédiaire qui prospecte des annonceurs potentiels au bénéfice d'un vendeur d'espaces publicitaires et transmet leurs ordres à ce vendeur est assimilé à la régie publicitaire, laquelle relève de la loi n° 93-122 du 29 janvier 1993 qui constitue ainsi des dispositions législatives particulières exclusives de l'application du statut de l'agent commercial ; qu'en jugeant le contraire pour reconnaître à Mme X... un droit à indemnisation du fait de la cessation du contrat de courtage publicitaire qui la liait à l'Onisep, la cour d'appel a violé l'article L. 134-1, alinéa 2, du code de commerce ;

2°) Alors que, subsidiairement, la qualité d'agent commercial suppose que la personne ait reçu pour mission de négocier et éventuellement de conclure des contrats de prestations de service au nom et pour le compte du donneur d'ordre et que tous deux aient ainsi une clientèle commune ; que ne peut avoir cette qualité l'intermédiaire qui fait signer des ordres d'insertion par des annonceurs au profit du support donneur d'ordre, sans engager ce dernier qui conserve la faculté de ne pas donner suite aux demandes d'annonces soumises ; qu'en conférant à Mme X... la qualité d'agent commercial dans ses relations avec l'Onisep, pour la seule circonstance que cette dernière avait un pouvoir de négociation avec les annonceurs potentiels, après avoir constaté que l'Onisep conservait toujours la faculté de ne pas donner suite aux demandes d'annonces soumise par Mme X..., demeurant ainsi libre de s'engager ou non, et qu'il facturait ensuite lui-même ces demandes une fois acceptées, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations dont il résultait que Mme X... n'avait pas reçu les pouvoirs lui permettant de bénéficier du statut d'agent commercial, violant ainsi l'article L. 134-1 du code de commerce par fausse application ;

3°) Alors que, subsidiairement, la qualité d'agent commercial suppose que la personne ait reçu pour mission de négocier et éventuellement de conclure des contrats de prestation de services au nom et pour le compte du donneur d'ordre et que tous deux aient ainsi une clientèle commune ; qu'en statuant comme elle a fait, sans constater que Mme X... avait reçu la faculté, par le contrat conclu, de créer une clientèle commune avec l'Onisep, la cour d'appel a privé sa décision de lui conférer la qualité d'agent commercial de base légale au regard de l'article L. 134-1 du code de commerce ;

4°) Alors que, en tout état de cause, en statuant comme elle a fait, au motif que Mme X... avait antérieurement conclu avec la délégation régionale de Bourgogne de l'Onisep un contrat d'agent commercial, ce qui était impropre à qualifier la relation entre Mme X... et l'Onisep procédant du contrat distinct conclu entre cette même personne et la délégation régionale de Franche-Comté de l'Onisep le 1er août 2006, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 16-15248
Date de la décision : 13/09/2017
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Besançon, 15 décembre 2015


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 13 sep. 2017, pourvoi n°16-15248


Composition du Tribunal
Président : Mme Mouillard (président)
Avocat(s) : SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, SCP Matuchansky, Poupot et Valdelièvre

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2017:16.15248
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