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07/09/2017 | FRANCE | N°16-20463

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 07 septembre 2017, 16-20463


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon les arrêts attaqués (Besançon, 26 novembre 2014 et 8 mars 2016), qu'à la suite d'un accident de la circulation dont Mme Estelle Y... avait été victime, celle-ci, ainsi que M. et Mme Jean-Paul et Monique Y..., ses parents, et M. Raphaël Y..., son frère (les consorts Y...), ont fait assigner devant un tribunal de grande instance la Mutuelle de Poitiers assurance (l'assureur), assureur du conducteur d'un véhicule impliqué dans l'accident et décédé à cette oc

casion, ainsi que la MGEN et l'agent judiciaire du Trésor ; que par déclara...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon les arrêts attaqués (Besançon, 26 novembre 2014 et 8 mars 2016), qu'à la suite d'un accident de la circulation dont Mme Estelle Y... avait été victime, celle-ci, ainsi que M. et Mme Jean-Paul et Monique Y..., ses parents, et M. Raphaël Y..., son frère (les consorts Y...), ont fait assigner devant un tribunal de grande instance la Mutuelle de Poitiers assurance (l'assureur), assureur du conducteur d'un véhicule impliqué dans l'accident et décédé à cette occasion, ainsi que la MGEN et l'agent judiciaire du Trésor ; que par déclaration du 11 septembre 2013, les consorts Y... ont relevé appel du jugement du tribunal de grande instance en intimant l'assureur, la MGEN et "l'établissement public Trésor public", puis par une seconde déclaration, du 5 mai 2014, ont relevé appel de la même décision à l'encontre de l'Agent judiciaire de l'Etat ;

Attendu que l'assureur fait grief à l'arrêt du 26 novembre 2014 de déclarer recevable l'appel formé le 5 mai 2014 par les consorts Y... après avoir annulé l'appel par eux formé le 11 septembre 2013, alors, selon le moyen :

1°/ qu'il résulte des articles 117, 119, 552 et 553 du code de procédure civile que l'irrégularité de fond affecte la validité de l'acte et qu'en cas d'indivisibilité à l'égard de plusieurs parties, l'appel formé contre l'une n'est recevable que si toutes sont appelées à l'instance ; qu'au cas présent, la cour d'appel ne pouvait considérer que la déclaration d'appel du 11 septembre 2013 à l'encontre de l'assureur, la société MGEN et l'établissement public Trésor public était nulle comme affectée d'une irrégularité de fond pour avoir été formée contre "l'Etablissement Public, Trésor public" et décider que cette déclaration était régulière pour l'assureur et la compagnie d'assurance MGEN, motif pris de l'indivisibilité du litige, sans violer les articles susvisés ;

2°/ qu'il résulte de l'article 126 du code de procédure civile que l'appel formalisé à l'encontre d'une partie qui n'a pas qualité ne peut être régularisé qu'avant l'expiration du délai d'appel ; qu'en décidant que l'appel formé le 5 mai 2014, soit après l'expiration du délai d'appel, pouvait régulariser l'appel formé le 11 septembre 2013 par les consorts Y..., la cour d'appel a violé les articles 126, 552 et 553 du code de procédure civile ;

Mais attendu qu'ayant, d'abord, retenu par des motifs non critiqués, que le litige opposant les parties était indivisible et que la déclaration d'appel du 11 septembre 2013, en tant qu'elle avait été formée contre "l'Etablissement Public, Trésor public" et non contre l'Agent judiciaire de l'Etat, seul habilité à représenter l'Etat devant les juridictions de l'ordre judiciaire, était affectée d'une irrégularité de fond, puis, exactement retenu que l'article 552 du code de procédure civile permettait à un appelant, dès lors que son appel était recevable à l'égard d'au moins une partie et que l'instance était encore en cours, d'appeler les autres parties à la cause après l'expiration du délai pour interjeter appel, la cour d'appel en a exactement déduit que le second appel formé par les consorts Y..., le 5 mai 2014, contre l'Agent Judiciaire de l'Etat était recevable ;

Qu'en l'état de ces constatations et énonciations, dont il découlait que l'ensemble des parties présentes en première instance à ce litige indivisible l'étaient également en cause d'appel, c'est à bon droit que la cour d'appel a écarté la fin de non-recevoir tirée de l'article 553 du code de procédure civile, soulevée par l'assureur ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la Mutuelle de Poitiers assurances aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande ; la condamne à payer à Mmes Estelle et Monique Y... et MM. Jean-Paul et Raphaël Y... la somme globale de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du sept septembre deux mille dix-sept.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par Me Z..., avocat aux Conseils, pour la Mutuelle de Poitiers assurances

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué du 26 novembre 2014 d'avoir déclaré recevable l'appel formé le 5 mai 2014 par les consorts Y... après avoir annulé l'appel par eux formé le 11 septembre 2013,

aux motifs que suite au jugement rendu le 4 juin 2013 par le Tribunal de Grande Instance de Vesoul, les consorts Y... ont interjeté appel le 11 septembre 2013 à rencontre de :

- la compagnie d'assurances Mutuelle de Poitiers Assurance,
- la compagnie d'assurances MGEN,
- l'Etablissement Public, Trésor public.

Il est constant que cette déclaration d'appel en tant qu'elle a été formée contre "l'Etablissement Public, Trésor public" et non contre Monsieur l'Agent Judiciaire de l'Etat, seul habilité à représenter l'Etat Français devant les juridictions de l'ordre judiciaire par application de l'article 38 de la loi de Finances pour 1955 et du décret du 23 août 2012, est affectée d'une irrégularité de fond entraînant sa nullité sans qu'il soit nécessaire pour l'intimé de rapporter la preuve d'un grief.

Il est encore constant que :

- cette déclaration d'appel en tant qu'elle a été formée contre les autres parties et notamment contre la compagnie d'assurances Mutuelle de Poitiers Assurance, est parfaitement régulière,

- le litige opposant les parties est indivisible.

L'article 552 du code de procédure civile dispose que :

"En cas de solidarité ou d'indivisibilité à l'égard de plusieurs parties, l'appel formé par l'une conserve le droit d'appel des autres sauf à ces dernières à se joindre à l'instance. Dans les mêmes cas, l'appel dirigé contre l'une des parties réserve à l'appelant la faculté d'appeler les autres à l'instance..."

Cette disposition réglementaire constitue une exception au principe de l'effet personnel de l'appel en cas de solidarité ou d'indivisibilité et permet à un appelant, dès lors que son appel est recevable à l'égard d'au moins une partie et que l'instance est encore en cours, d'appeler les autres à la cause après l'expiration du délai pour interjeter appel (Civ. 2ème 25-03-1992, n° 90-18.045 et Civ. 3ème 23-06-1999, n° 97-22.607).

Il s'ensuit que si l'appel interjeté par les consorts Y... le 11 septembre 2013 à l'encontre de "l'Etablissement Public, Trésor public" est incontestablement nul nonobstant sa signification à l'Agent Judiciaire de l'Etat, de sorte que, ne pouvant produire aucun effet, cette "partie" n'était pas à l'instance, celui formé par eux le 5 mai 2014 contre Monsieur l'Agent Judiciaire de l'Etat est recevable par application de l'article 552 sus-rappelé.

Pour le surplus, l'intérêt d'une partie à interjeter appel s'apprécie globalement et rien n'empêche celle-ci, même si elle a obtenu gain de cause sur certains points, de former un appel général sur le tout dès lors que la décision de première instance ne lui a pas donné entièrement satisfaction.

Enfin, il appartient à la seule cour saisie au fond d'apprécier si une demande formée par un appelant est nouvelle ou non au sens de l'article 564 du code de procédure civile, l'article 914 du même code ne conférant compétence exclusive au Conseiller de la mise en état des causes que pour statuer sur la recevabilité de l'appel et pour déclarer des conclusions irrecevables sur le fondement exclusif des articles 909 et 910.

L'ordonnance entreprise mérite en conséquence confirmation en ce qu'elle a débouté la Mutuelle de Poitiers Assurances de l'ensemble de ses demandes et a rejeté celles formées en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile (arrêt p. 4 et 5) ;

1°) alors que, d'une part, il résulte des articles 117, 119, 552 et 553 du code de procédure civile que l'irrégularité de fond affecte la validité de l'acte et qu'en cas d'indivisibilité à l'égard de plusieurs parties, l'appel formé contre l'une n'est recevable que si toutes sont appelées à l'instance ; qu'au cas présent, la cour d'appel ne pouvait considérer que la déclaration d'appel du 11 septembre 2013 à l'encontre de la compagnie d'assurances Mutuelle de Poitiers Assurances, la compagnie d'assurance MGEN et l'Etablissement Public Trésor Public était nulle comme affectée d'une irrégularité de fond pour avoir été formée contre « l'Etablissement Public, Trésor Public » et décider que cette déclaration était régulière pour la compagnie d'assurances Mutuelle de Poitiers Assurances et la compagnie d'assurance MGEN, motif pris de l'indivisibilité du litige, sans violer les articles susvisés ;

2°) alors que, d'autre part, et en toute hypothèse, il résulte de l'article 126 du code de procédure civile que l'appel formalisé à l'encontre d' une partie qui n'a pas qualité ne peut être régularisé qu'avant l'expiration du délai d'appel ;
qu'en décidant que l'appel formé le 5 mai 2014, soit après l'expiration du délai d'appel, pouvait régulariser l'appel formé le 11 septembre 2013 par les consorts Y..., la cour d'appel a violé les articles 126 , 552 et 553 du code de procédure civile ;


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 16-20463
Date de la décision : 07/09/2017
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Analyses

APPEL CIVIL - Intimé - Pluralité - Appel interjeté contre un seul - Litige indivisible - Appel postérieur contre les autres parties - Appel postérieur à l'expiration du délai d'appel - Possibilité

APPEL CIVIL - Intimé - Pluralité - Appel tardif contre l'un d'eux - Litige indivisible - Recevabilité - Condition INDIVISIBILITE - Effets - Appel - Défaut d'intimation de l'une des parties INDIVISIBILITE - Effets - Appel - Pluralité d'intimés - Appel interjeté contre un seul - Appel postérieur contre les autres parties - Appel postérieur à l'expiration du délai d'appel

En cas de solidarité ou d'indivisibilité, l'article 552 du code de procédure civile permet à l'appelant, dès lors que son appel est recevable à l'égard d'au moins une partie et que l'instance est encore en cours, d'appeler les autres parties à la cause, après l'expiration du délai pour interjeter appel. En ce cas, l'appelant échappe à l'irrecevabilité de son appel, prévue par l'article 553 du même code, lorsque, en cas d'indivisibilité entre plusieurs parties, toutes n'ont pas été appelées à l'instance. Doit en conséquence être approuvé l'arrêt d'une cour d'appel qui, dans un litige indivisible jugé suivant la procédure ordinaire avec représentation obligatoire, écarte la fin de non-recevoir tirée de l'application de l'article 553 susmentionné après avoir relevé qu'un premier appel, formé dans le délai d'appel, mais qui n'avait pas été dirigé contre l'une des parties en première instance, avait été complété par un second appel dirigé contre cette partie et formé avant que la cour d'appel ne statue


Références :

articles 552 et 553 du code de procédure civile

Décision attaquée : Cour d'appel de Besançon, 08 mars 2016

A rapprocher :Com., 5 décembre 1972, pourvoi n° 71-11635, Bull. 1972, IV, n° 325 (rejet) ;2e Civ., 28 mai 1990, pourvoi n° 88-15257, Bull. 1990, II, n° 118 (rejet) ;Com., 28 avril 1998, pourvoi n° 96-18741, Bull. 1998, IV, n° 135 (rejet) ;3e Civ., 23 juin 1999, pourvoi n° 97-22607, Bull. 1999, III, n° 146 (cassation)

arrêt cité


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 07 sep. 2017, pourvoi n°16-20463, Bull. civ.
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles

Composition du Tribunal
Président : Mme Flise
Avocat(s) : Me Bouthors, SCP Rocheteau et Uzan-Sarano

Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2017:16.20463
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