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06/09/2017 | FRANCE | N°15-20710

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 06 septembre 2017, 15-20710


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Caen, 11 décembre 2014), que Mme X..., qui a vécu en concubinage avec M. Y... du 8 mai au 8 juillet 2011, l'a assigné en paiement d'une certaine somme en remboursement d'un prêt qu'elle soutenait lui avoir consenti et en paiement de dommages-intérêts ;

Sur le premier moyen, ci-après annexé :

Attendu que ce moyen n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Sur le deuxième moyen :

Attendu que M. Y... fait grief à l'arrÃ

ªt de le condamner à payer à Mme X... une certaine somme au titre du prêt qu'elle lui avait co...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Caen, 11 décembre 2014), que Mme X..., qui a vécu en concubinage avec M. Y... du 8 mai au 8 juillet 2011, l'a assigné en paiement d'une certaine somme en remboursement d'un prêt qu'elle soutenait lui avoir consenti et en paiement de dommages-intérêts ;

Sur le premier moyen, ci-après annexé :

Attendu que ce moyen n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Sur le deuxième moyen :

Attendu que M. Y... fait grief à l'arrêt de le condamner à payer à Mme X... une certaine somme au titre du prêt qu'elle lui avait consenti, alors, selon le moyen :

1°/ que la simple vie commune ne suffit pas à rendre moralement impossible la constitution d'un écrit ; qu'en se bornant à relever, en l'espèce, que la constitution d'un écrit avait été rendu impossible pour cette seule raison que les parties avaient mené une vie commune pendant trois mois, sans relever aucune circonstance de nature à rendre moralement impossible la constitution d'un écrit, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1348 du code civil ;

2°/ qu'il incombe au demandeur à l'action en répétition de démontrer qu'il n'a pas agi dans une intention libérale ; que s'il se prévaut, à cette fin, de l'existence d'un contrat de prêt, il lui appartient de rapporter la preuve de ce contrat, sans pouvoir s'arrêter à une quelconque carence probatoire du défendeur ; qu'il en résulte que le seul fait d'établir l'absence de la cause invoquée par le bénéficiaire pour justifier du versement reçu ne suffit pas, en l'absence de reconnaissance de dette, à faire la preuve du prêt allégué pour obtenir restitution ; qu'en déduisant, en l'espèce,, l'existence d'un contrat de prêt du seul fait que les travaux invoqués par M. Y... n'avaient pas été réalisés, sans jamais mettre en évidence l'absence d'intention libérale de Mme X..., la cour d'appel a inversé la charge de la preuve et ainsi violé l'article 1315 du code civil, ensemble les articles 894, 1134 et 1892 du même code ;

Mais attendu qu'ayant constaté l'existence d'une vie commune entre les parties, et relevé que celle-ci n'avait pas permis à Mme X... de se constituer un écrit constatant le prêt, la cour d'appel a souverainement estimé, sans inverser la charge de la preuve, que la réalité de ce prêt était établie par les éléments de preuve qui lui étaient soumis ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le troisième moyen :

Attendu que M. Y... fait grief à l'arrêt de le condamner à payer une certaine somme à Mme X... à titre de dommages-intérêts, alors, selon le moyen :

1°/ que l'exercice du droit de se défendre en justice ne saurait dégénérer en abus lorsque les moyens du défendeur ont été jugés bien fondés en première instance ; qu'en l'espèce, le jugement frappé d'appel par Mme X... avait rejeté sa demande en restitution en faisant droit aux moyens soulevés en défense par M. Y... ; qu'en qualifiant, néanmoins, d'abusive la résistance de ce dernier, les juges du second degré ont violé l'article 1382 du code civil ;

2°/ que celui qui triomphe, même partiellement, dans ses prétentions, ne peut être condamné à dommages-intérêts à raison d'un abus dans l'exercice de son droit d'agir ou de se défendre en justice ; qu'en jugeant abusive la résistance de M. Y... tout en le reconnaissant bien fondé à s'opposer à la demande en remboursement des sommes versées au titre des frais médicaux, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, violant une nouvelle fois l'article 1382 du code civil ;

3°/ que, et en tout cas, une partie ne peut être condamnée à dommages-intérêts à raison de son attitude au cours de la procédure que s'il est établi qu'elle a adopté un comportement fautif, constitutif d'un abus de droit ; que cet abus ne peut être constaté que si celui à qui il est imputé a eu, sinon l'intention de nuire, à tout le moins connaissance du mal-fondé de sa prétention ou ne pouvait légitimement l'ignorer ; que, lorsque la cour d'appel fait partiellement droit aux moyens de défense d'une partie et qu'elle réforme, pour le surplus, les chefs par lesquels le demandeur avait été débouté en première instance, il lui appartient de mettre en évidence l'existence de circonstances particulières caractérisant malgré tout une résistance abusive du défendeur ; qu'en se fondant exclusivement, en l'espèce, sur les attestations produites par Mme X... pour affirmer que M. Y... était de « mauvaise foi » et avait formulé des « allégations mensongères », sans expliquer en quoi le fait de ne pas avoir conclu en appel était de nature à rendre de mauvaise foi le défendeur dont les moyens ont été jugés bien fondés en première instance, et encore partiellement par la cour d'appel, les juges du second degré ont, à tout le moins, privé leur décision de base légale au regard de l'article 1382 du code civil ;

Mais attendu qu'en relevant qu'il résultait d'une attestation produite par Mme X..., que M. Y... avait indiqué qu'il ne la rembourserait jamais, la cour d'appel, qui en a justement déduit la mauvaise foi de celui-ci dans le remboursement du prêt, a caractérisé sa faute ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. Y... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et le condamne à payer à Me Corlay, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, la somme de 2 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du six septembre deux mille dix-sept.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Foussard et Froger, avocat aux Conseils, pour M. Y....

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

L'arrêt infirmatif attaqué encourt la censure ;

EN CE QU'il a condamné M. Y... à verser Mme X... une somme de 3.500 euros au titre du remboursement d'un prêt ainsi qu'une autre somme de 500 euros à titre de dommages-intérêts ;

AUX MOTIFS QUE « Mme X... est appelante du jugement rendu le 4 mars 2013 par le tribunal d'instance de Coutances qui l'a déboutée de ses demandes et l'a condamnée à payer à M. Y... la somme de 300 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ; que par conclusions en date du 1 octobre 2013, Mme X... demande à la Cour de : - réformer la décision déférée, - condamner M. Y... à lui verser la somme de 3.500 € avec intérêts au taux légal à compter du 18 août 2011, - condamner M. Y... à lui verser la somme de 98€ en remboursement de frais médicaux, - condamner M. Y... à lui verser la somme de 2.000 € en réparation du préjudice subi, - condamner M. Y... à lui verser la somme de 1.500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ; que bien que régulièrement assigné, M. Y... n'a pas constitué avocat ;
que M. Y... et Mme X... ont vécu ensemble du 8 mai 2011 au 8 juillet 2011 ; qu'arguant lui avoir prêté en mai et juin 2011 la somme de 3 500 € au moyen de deux chèques de 1 000 € en date du 28 mai 2011 et de 2 500 € en date du 9 juin 2011, et exposant que celui-ci s'était refusé à lui rembourser après leur séparation, Mme X... l'a fait assigner, par acte d'huissier en date du 5 octobre 2012, devant le tribunal d'instance de Coutances aux fins de l'entendre condamner au paiement de cette somme, outre celle de 75 € en remboursement de frais médicaux ; qu'elle soulignait ne pas avoir pu se procurer un écrit du fait de leur relation de concubinage ; que M. Y... s'est opposé aux demandes en prétendant que les chèques litigieux étaient la contrepartie de l'achat de matériaux et de la main d'oeuvre des travaux de carrelage qu'il avait réalisés au domicile de Mme X... en mai et juin 2011 ; qu'il soutenait à cet égard qu'il avait effectué la réfection des sols et murs de la cuisine, de la salle de bains, des toilettes, du couloir et de la terrasse ; que s'agissant des frais médicaux, il exposait les avoir remboursés à Mme X... ; que c'est dans ces conditions que le jugement déféré à la cour a été rendu ; qu'en cause d'appel, Mme X... reprend la même argumentation qu'en première instance ; qu'elle conteste que la somme de 3.500 € remise à M. Y... ait été la contrepartie des travaux effectués à son domicile par celui-ci, et soutient que, si des travaux ont effectivement été réalisés, ils l'ont été par son frère Eric X... et un ami Pascal Z... ; qu'elle ajoute qu'à l'époque M. Y... était en accident de travail ; que Mme X... justifie de ce qu'elle a remis deux chèques de 1.000 € et 2.500 € à M. Y... le 28 mai et le 9 juin 2011, et que ces chèques ont été encaissés par celui-ci ; qu'elle produit également aux débats une déclaration de concubinage déposée par elle et M. Y... à la mairie de Ouistreham le 10 mai 2011 ; qu'elle justifie également de ce que M. Y... a quitté son domicile le 10 juillet 2011 ; qu'il ressort des attestations de M. Eric X... et de M. Pascal Z... que les travaux d'aménagement du nouveau domicile dans lequel Mme X... a emménagé au début de l'année 2011 ont été réalisés par eux ; qu'ils précisent que les travaux ont notamment consisté dans la pose des carrelages et de pavés autobloquants sur la terrasse, et ils indiquent qu'à leur connaissance M. Y... qui était en arrêt de travail n'a réalisé qu'une étagère dans la cuisine et la peinture en bleu des joints de la salle de bains ; que Mme X... produit également de nombreuses factures de magasins de bricolage dont les montants ont été débités de son compte ; que M. Eric X... atteste que lorsque sa soeur a réclamé à M. Y... la somme de 3.500 € qu'elle lui avait prêtée, il lui a répondu qu'il ne la rembourserait jamais ;
qu'il ressort de ces éléments que lors de la remise des fonds, Mme X... vivait avec M. Y... ; que cette vie commune, même si elle n'a pas duré plus de trois mois, n'a pas permis à Mme X... de se constituer un écrit ; que cette impossibilité de se procurer un écrit autorise Mme X... à faire la preuve du prêt allégué par tous moyens ; qu'en l'espèce, il ressort des attestations de M. X... et de M. Z... que, contrairement à ce que M. Y... a affirmé en première instance, il n'a pas réalisé de travaux de carrelage au domicile de Mme X... ; que la contrepartie invoquée par lui pour la remise de la somme de 3.500 € est donc inexistante ; que M. Eric X... précise également que lorsque sa soeur a réclamé la somme prêtée à M. Y..., celui-ci lui a indiqué qu'il ne la rembourserait jamais ; que les allégations mensongères de M. Y... et ses déclarations de refus de remboursement exprimés devant M. X..., démontrent que la somme remise par Mme X... faisait bien l'objet d'un prêt ; que dans ces conditions, il convient de condamner M. Y... à rembourser à Mme X... la somme de 3 500 € ; que cette somme sera assortie de l'intérêt au taux légal à compter de la mise en demeure » (arrêt, p. 2 à 4) ;

ALORS QUE, premièrement, il appartient à la cour d'appel de vérifier d'office la régularité de sa saisine ; qu'à peine de caducité de l'appel relevée d'office, l'appelant dispose d'un délai de trois mois à compter de sa déclaration d'appel pour conclure ; qu'en l'espèce, il ressort des pièces de la procédure et des constatations des juges que Mme X... a formé appel par déclaration du 24 avril 2013 et qu'elle n'a produit ses conclusions d'appelante que le 1er octobre 2013 ; qu'en s'abstenant de relever d'office la caducité de l'appel qui s'en inférait, cependant que, l'intimé n'ayant pas constitué avocat, il n'avait pas pu soulever cette cause d'irrecevabilité, les juges du second degré ont violé l'article 908 du code de procédure civile ;

ALORS QUE, deuxièmement, et de la même manière, à peine de caducité de l'appel relevée d'office, l'appelant dispose d'un délai de quatre mois suivant sa déclaration d'appel pour signifier ses conclusions à l'intimé n'ayant pas constitué d'avocat ; qu'en l'espèce, il ressort des pièces de la procédure et des constatations des juges que Mme X... a formé appel par déclaration du 24 avril 2013 et que ses conclusions d'appelante n'ont été signifiées que le 3 octobre 2013 à M. Y... ; qu'en s'abstenant de relever d'office la caducité de l'appel qui s'en inférait, cependant que, l'intimé n'ayant pas constitué avocat, il n'avait pas pu soulever cette cause d'irrecevabilité, les juges du second degré ont également violé l'article 911 du code de procédure civile ;

ET ALORS QUE, troisièmement, et en toute hypothèse, lorsque le défendeur ne comparaît pas, le juge est tenu de vérifier d'office la régularité de la procédure ; qu'en l'espèce, il résulte de l'arrêt attaqué que M. Y..., qui était intimé, n'était pas représenté devant la cour d'appel ; qu'en examinant le bien-fondé de la demande de l'appelante sans vérifier au préalable la régularité de leur saisine, les juges d'appel ont violé l'article 472 du code de procédure civile, ensemble les articles 902, 908 et 911 du même code.

DEUXIÈ

ME MOYEN DE CASSATION :

L'arrêt infirmatif attaqué encourt la censure ;

EN CE QU'il a condamné M. Y... à verser Mme X... une somme de 3.500 euros au titre du remboursement d'un prêt ;

AUX MOTIFS QUE « M. Y... et Mme X... ont vécu ensemble du 8 mai 2011 au 8 juillet 2011 ; qu'arguant lui avoir prêté en mai et juin 2011 la somme de 3 500 € au moyen de deux chèques de 1 000 € en date du 28 mai 2011 et de 2 500 € en date du 9 juin 2011, et exposant que celui-ci s'était refusé à lui rembourser après leur séparation, Mme X... l'a fait assigner, par acte d'huissier en date du 5 octobre 2012, devant le tribunal d'instance de Coutances aux fins de l'entendre condamner au paiement de cette somme, outre celle de 75 € en remboursement de frais médicaux ; qu'elle soulignait ne pas avoir pu se procurer un écrit du fait de leur relation de concubinage ; que M. Y... s'est opposé aux demandes en prétendant que les chèques litigieux étaient la contrepartie de l'achat de matériaux et de la main d'oeuvre des travaux de carrelage qu'il avait réalisés au domicile de Mme X... en mai et juin 2011 ; qu'il soutenait à cet égard qu'il avait effectué la réfection des sols et murs de la cuisine, de la salle de bains, des toilettes, du couloir et de la terrasse ; que s'agissant des frais médicaux, il exposait les avoir remboursés à Mme X... ; que c'est dans ces conditions que le jugement déféré à la cour a été rendu ; qu'en cause d'appel, Mme X... reprend la même argumentation qu'en première instance ; qu'elle conteste que la somme de 3.500 € remise à M. Y... ait été la contrepartie des travaux effectués à son domicile par celui-ci, et soutient que, si des travaux ont effectivement été réalisés, ils l'ont été par son frère Eric X... et un ami Pascal Z... ; qu'elle ajoute qu'à l'époque M. Y... était en accident de travail ; que Mme X... justifie de ce qu'elle a remis deux chèques de 1.000 € et 2.500 € à M. Y... le 28 mai et le 9 juin 2011, et que ces chèques ont été encaissés par celui-ci ; qu'elle produit également aux débats une déclaration de concubinage déposée par elle et M. Y... à la mairie de Ouistreham le 10 mai 2011 ; qu'elle justifie également de ce que M. Y... a quitté son domicile le 10 juillet 2011 ; qu'il ressort des attestations de M. Eric X... et de M. Pascal Z... que les travaux d'aménagement du nouveau domicile dans lequel Mme X... a emménagé au début de l'année 2011 ont été réalisés par eux ; qu'ils précisent que les travaux ont notamment consisté dans la pose des carrelages et de pavés autobloquants sur la terrasse, et ils indiquent qu'à leur connaissance M. Y... qui était en arrêt de travail n'a réalisé qu'une étagère dans la cuisine et la peinture en bleu des joints de la salle de bains ; que Mme X... produit également de nombreuses factures de magasins de bricolage dont les montants ont été débités de son compte ; que M. Eric X... atteste que lorsque sa soeur a réclamé à M. Y... la somme de 3.500 € qu'elle lui avait prêtée, il lui a répondu qu'il ne la rembourserait jamais ;
qu'il ressort de ces éléments que lors de la remise des fonds, Mme X... vivait avec M. Y... ; que cette vie commune, même si elle n'a pas duré plus de trois mois, n'a pas permis à Mme X... de se constituer un écrit ; que cette impossibilité de se procurer un écrit autorise Mme X... à faire la preuve du prêt allégué par tous moyens ; qu'en l'espèce, il ressort des attestations de M. X... et de M. Z... que, contrairement à ce que M. Y... a affirmé en première instance, il n'a pas réalisé de travaux de carrelage au domicile de Mme X... ; que la contrepartie invoquée par lui pour la remise de la somme de 3.500 € est donc inexistante ; que M. Eric X... précise également que lorsque sa soeur a réclamé la somme prêtée à M. Y..., celui-ci lui a indiqué qu'il ne la rembourserait jamais ; que les allégations mensongères de M. Y... et ses déclarations de refus de remboursement exprimés devant M. X..., démontrent que la somme remise par Mme X... faisait bien l'objet d'un prêt ; que dans ces conditions, il convient de condamner M. Y... à rembourser à Mme X... la somme de 3 500 € ; que cette somme sera assortie de l'intérêt au taux légal à compter de la mise en demeure » (arrêt, p. 2 à 4) ;

ALORS QUE, premièrement, la simple vie commune ne suffit pas à rendre moralement impossible la constitution d'un écrit ; qu'en se bornant à relever en l'espèce que la constitution d'un écrit avait été rendu impossible pour cette seule raison que les parties avaient mené une vie commune pendant trois mois, sans relever aucune circonstance de nature à rendre moralement impossible la constitution d'un écrit, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1348 du code civil ;

ET ALORS QUE, deuxièmement, il incombe au demandeur à l'action en répétition de démontrer qu'il n'a pas agi dans une intention libérale ; que s'il se prévaut à cette fin de l'existence d'un contrat de prêt, il lui appartient de rapporter la preuve de ce contrat, sans pouvoir s'arrêter à une quelconque carence probatoire du défendeur ; qu'il en résulte que le seul fait d'établir l'absence de la cause invoquée par le bénéficiaire pour justifier du versement reçu ne suffit pas, en l'absence de reconnaissance de dette, à faire la preuve du prêt allégué pour obtenir restitution ; qu'en déduisant en l'espèce l'existence d'un contrat de prêt du seul fait que les travaux invoqués par M. Y... n'avaient pas été réalisés, sans jamais mettre en évidence l'absence d'intention libérale de Mme X..., la cour d'appel a inversé la charge de la preuve et ainsi violé l'article 1315 du code civil, ensemble les articles 894, 1134 et 1892 du même code.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

L'arrêt infirmatif attaqué encourt la censure ;

EN CE QU'il a condamné M. Y... à verser Mme X... une somme de 500 euros à titre de dommages-intérêts ;

AUX MOTIFS QUE « Mme X... est appelante du jugement rendu le 4 mars 2013 par le tribunal d'instance de Coutances qui l'a déboutée de ses demandes et l'a condamnée à payer à M. Y... la somme de 300 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ; que par conclusions en date du 1 octobre 2013, Mme X... demande à la Cour de : - réformer la décision déférée, - condamner M. Y... à lui verser la somme de 3.500 € avec intérêts au taux légal à compter du 18 août 2011, - condamner M. Y... à lui verser la somme de 98€ en remboursement de frais médicaux, - condamner M. Y... à lui verser la somme de 2.000 € en réparation du préjudice subi, - condamner M. Y... à lui verser la somme de 1.500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ; que bien que régulièrement assigné, M. Y... n'a pas constitué avocat ;
que M. Y... et Mme X... ont vécu ensemble du 8 mai 2011 au 8 juillet 2011 ; qu'arguant lui avoir prêté en mai et juin 2011 la somme de 3 500 € au moyen de deux chèques de 1 000 € en date du 28 mai 2011 et de 2 500 € en date du 9 juin 2011, et exposant que celui-ci s'était refusé à lui rembourser après leur séparation, Mme X... l'a fait assigner, par acte d'huissier en date du 5 octobre 2012, devant le tribunal d'instance de Coutances aux fins de l'entendre condamner au paiement de cette somme, outre celle de 75 € en remboursement de frais médicaux ; qu'elle soulignait ne pas avoir pu se procurer un écrit du fait de leur relation de concubinage ; que M. Y... s'est opposé aux demandes en prétendant que les chèques litigieux étaient la contrepartie de l'achat de matériaux et de la main d'oeuvre des travaux de carrelage qu'il avait réalisés au domicile de Mme X... en mai et juin 2011 ; qu'il soutenait à cet égard qu'il avait effectué la réfection des sols et murs de la cuisine, de la salle de bains, des toilettes, du couloir et de la terrasse ; que s'agissant des frais médicaux, il exposait les avoir remboursés à Mme X... ; que c'est dans ces conditions que le jugement déféré à la cour a été rendu ; qu'en cause d'appel, Mme X... reprend la même argumentation qu'en première instance ; qu'elle conteste que la somme de 3.500 € remise à M. Y... ait été la contrepartie des travaux effectués à son domicile par celui-ci, et soutient que, si des travaux ont effectivement été réalisés, ils l'ont été par son frère Eric X... et un ami Pascal Z... ; qu'elle ajoute qu'à l'époque M. Y... était en accident de travail ; que Mme X... justifie de ce qu'elle a remis deux chèques de 1.000 € et 2.500 € à M. Y... le 28 mai et le 9 juin 2011, et que ces chèques ont été encaissés par celui-ci ; qu'elle produit également aux débats une déclaration de concubinage déposée par elle et M. Y... à la mairie de Ouistreham le 10 mai 2011 ; qu'elle justifie également de ce que M. Y... a quitté son domicile le 10 juillet 2011 ; qu'il ressort des attestations de M. Eric X... et de M. Pascal Z... que les travaux d'aménagement du nouveau domicile dans lequel Mme X... a emménagé au début de l'année 2011 ont été réalisés par eux ; qu'ils précisent que les travaux ont notamment consisté dans la pose des carrelages et de pavés autobloquants sur la terrasse, et ils indiquent qu'à leur connaissance M. Y... qui était en arrêt de travail n'a réalisé qu'une étagère dans la cuisine et la peinture en bleu des joints de la salle de bains ; que Mme X... produit également de nombreuses factures de magasins de bricolage dont les montants ont été débités de son compte ; que M. Eric X... atteste que lorsque sa soeur a réclamé à M. Y... la somme de 3.500 € qu'elle lui avait prêtée, il lui a répondu qu'il ne la rembourserait jamais ;
qu'il ressort de ces éléments que lors de la remise des fonds, Mme X... vivait avec M. Y... ; que cette vie commune, même si elle n'a pas duré plus de trois mois, n'a pas permis à Mme X... de se constituer un écrit ; que cette impossibilité de se procurer un écrit autorise Mme X... à faire la preuve du prêt allégué par tous moyens ; qu'en l'espèce, il ressort des attestations de M. X... et de M. Z... que, contrairement à ce que M. Y... a affirmé en première instance, il n'a pas réalisé de travaux de carrelage au domicile de Mme X... ; que la contrepartie invoquée par lui pour la remise de la somme de 3.500 € est donc inexistante ; que M. Eric X... précise également que lorsque sa soeur a réclamé la somme prêtée à M. Y..., celui-ci lui a indiqué qu'il ne la rembourserait jamais ; que les allégations mensongères de M. Y... et ses déclarations de refus de remboursement exprimés devant M. X..., démontrent que la somme remise par Mme X... faisait bien l'objet d'un prêt ; que dans ces conditions, il convient de condamner M. Y... à rembourser à Mme X... la somme de 3 500 € ; que cette somme sera assortie de l'intérêt au taux légal à compter de la mise en demeure ;
que s'agissant des frais médicaux, les mentions portées par Mme X... sur ses relevés bancaires, ne suffisent pas à faire la preuve de ce que les sommes délivrés l'aient été pour le compte de M. Y... ; que le jugement sera donc confirmé de ce chef ;
qu'en équité, il sera alloué à Mme X... une somme de 1.500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
que la mauvaise foi de M. Y... ayant obligé Mme X... à poursuivre une procédure longue et coûteuse il sera condamné à lui régler à la somme de 500 € à titre de dommages et intérêts » (arrêt, p. 2 à 4) ;

ALORS QUE, premièrement, l'exercice du droit de se défendre en justice ne saurait dégénérer en abus lorsque les moyens du défendeur ont été jugés bien fondés en première instance ; qu'en l'espèce, le jugement frappé d'appel par Mme X... avait rejeté sa demande en restitution en faisant droit aux moyens soulevés en défense par M. Y... ; qu'en qualifiant néanmoins d'abusive la résistance de ce dernier, les juges du second degré ont violé l'article 1382 du code civil ;

ALORS QUE, deuxièmement, celui qui triomphe, même partiellement, dans ses prétentions, ne peut être condamné à dommages-intérêts à raison d'un abus dans l'exercice de son droit d'agir ou de se défendre en justice ; qu'en jugeant abusive la résistance de M. Y... tout en le reconnaissant bien fondé à s'opposer à la demande en remboursement des sommes versées au titre des frais médicaux, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, violant une nouvelle fois l'article 1382 du code civil ;

ET ALORS QUE, troisièmement, et en tout cas, une partie ne peut être condamnée à dommages-intérêts à raison de son attitude au cours de la procédure que s'il est établi qu'elle a adopté un comportement fautif, constitutif d'un abus de droit ; que cet abus ne peut être constaté que si celui à qui il est imputé a eu, sinon l'intention de nuire, à tout le moins connaissance du mal-fondé de sa prétention ou ne pouvait légitimement l'ignorer ; que lorsque la cour d'appel fait partiellement droit aux moyens de défense d'une partie et qu'elle réforme pour le surplus les chefs par lesquels le demandeur avait été débouté en première instance, il lui appartient de mettre en évidence l'existence de circonstances particulières caractérisant malgré tout une résistance abusive du défendeur ; qu'en se fondant exclusivement en l'espèce sur les attestations produites par Mme X... pour affirmer que M. Y... était de « mauvaise foi » et avait formulé des « allégations mensongères », sans expliquer en quoi le fait de ne pas avoir conclu en appel était de nature à rendre de mauvaise foi le défendeur dont les moyens ont été jugés bien fondés en première instance, et encore partiellement par la cour d'appel, les juges du second degré ont à tout le moins privé leur décision de base légale au regard de l'article 1382 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 15-20710
Date de la décision : 06/09/2017
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Caen, 11 décembre 2014


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 06 sep. 2017, pourvoi n°15-20710


Composition du Tribunal
Président : Mme Batut (président)
Avocat(s) : Me Rémy-Corlay, SCP Foussard et Froger

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2017:15.20710
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